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23/09/2014 | FRANCE | N°12/04175

France | France, Cour d'appel de Pau, 1ère chambre, 23 septembre 2014, 12/04175


PC/AM



Numéro 14/3165





COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre







ARRET DU 23/09/2014







Dossier : 12/04175





Nature affaire :



Demande en paiement du prix ou tendant à faire sanctionner le non-paiement du prix















Affaire :



SARL JALYM



C/



[M] [O]

SCP [K]

DIRECTION GENERALE DES FINANCES PUBLIQUES



















Grosse délivrée le :



à :























RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R E T



prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 23 septembre 2014, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditio...

PC/AM

Numéro 14/3165

COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre

ARRET DU 23/09/2014

Dossier : 12/04175

Nature affaire :

Demande en paiement du prix ou tendant à faire sanctionner le non-paiement du prix

Affaire :

SARL JALYM

C/

[M] [O]

SCP [K]

DIRECTION GENERALE DES FINANCES PUBLIQUES

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 23 septembre 2014, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 11 mars 2014, devant :

Madame PONS, Président

Monsieur CASTAGNE, Conseiller, magistrat chargé du rapport conformément à l'article 785 du code de procédure civile

Madame CATUGIER, Conseiller

assistés de Monsieur CASTILLON, Greffier, présent à l'appel des causes.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTE :

SARL JALYM

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par son gérant Monsieur [H] [G], demeurant [Adresse 3])

représentée par Maître Sophie CREPIN, avocat au barreau de PAU

assistée de Maître Sylvie BAILLEUL, avocat au barreau de LILLE

INTIMEES :

Madame [M] [O]

née le [Date naissance 1] 1945 à [Localité 4]

de nationalité française

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée et assistée de la SCP DEFOS DU RAU - CAMBRIEL - REMBLIERE, avocat au barreau de DAX

SCP CAZALIS - DUPLANTIER & LOUSTALOT

[Adresse 2]

[Localité 3]

prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège

DIRECTION GENERALE DES FINANCES PUBLIQUES

Pôle Recouvrement Spécialisé

[Adresse 1]

[Localité 1]

prise en la personne de son représentant légal

assignées

sur appel de la décision

en date du 07 NOVEMBRE 2012

rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE DAX

Selon acte authentique dressé le 12 juillet 2006 par Me [N], notaire associé de la SCP [K], la SARL Jalym a vendu à Mme [M] [O] (alors gérante de cette société, constituée entre elle et M. [G]) divers lots de copropriété en état futur d'achèvement, dans un immeuble en cours de rénovation à Seignosse, pour un prix global de 370 000 €.

Exposant que Mme [O] occupe un appartement et loue les autres lots sans avoir acquitté la totalité du prix et que la conservation des hypothèques a refusé d'inscrire au fichier son privilège de vendeur, la SARL Jalym a fait assigner :

- Mme [O] en résolution de la vente et paiement de diverses indemnités,

- la SCP notariale en responsabilité et paiement de dommages-intérêts,

- la Direction Générale des Finances Publiques de Mont de Marsan en déclaration de jugement commun.

Par jugement du 7 novembre 2012, le tribunal de grande instance de Dax a :

- prononcé la résolution de la vente portant sur les lots 75, 96, 11, 117, 79, 94, 125 et 126 de l'immeuble, dit que ces lots réintégreront le patrimoine de la SARL Jalym, dit que celle-ci devra restituer à Mme [O] les sommes par elle versées dans le cadre de la vente, dit que Mme [O] est occupante sans droit ni titre de l'appartement type 5 et qu'elle devra libérer les lieux dans le mois de la signification du jugement sous astreinte de 50 € par jour de retard,

- dit que Mme [O] est tenue de verser à la SARL Jalym les sommes de 48 300 € au titre de la restitution des loyers perçus sur l'appartement type 3, somme à parfaire au jour de la restitution sur la base d'une valeur locative mensuelle de 700 €, dit que Mme [O] est tenue de verser à la SARL Jalym la somme de 20 000 € à titre de dommages-intérêts, - dit que Mme [O] est créancière de la SARL Jalym de la somme de 24 655,69 € et ordonné la compensation des dettes réciproques entre les parties,

- débouté la SARL Jalym du surplus de ses demandes à l'encontre de Mme [O] ainsi que de sa demande de mainlevée des sûretés ou hypothèques inscrites sur les lots litigieux et de l'ensemble de ses demandes contre la SCP notariale,

- condamné Mme [O] à payer à la SARL Jalym la somme de 2 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

La SARL Jalym a interjeté appel de cette décision selon déclaration enregistrée au greffe de la Cour le 7 décembre 2012 (instance enrôlée sous le RG n° 12/04175).

Mme [O] a interjeté appel de cette décision selon déclaration enregistrée au greffe de la Cour le 14 janvier 2013 (instance enrôlée sous le RG n°13/0 0160).

Les deux instances ont été jointes sous le RG n° 12/04175 par ordonnance du magistrat de la mise en état en date du 3 septembre 2013.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du magistrat de la mise en état en date du 5 février 2014.

Dans ses dernières conclusions déposées le 4 mars 2013, la SARL Jalym demande à la Cour, au visa des articles 1183, 1184, 1147, 1656 et 2243 du code civil et des articles 28 et 30 du décret du 4 janvier 1955 :

- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la résolution de la vente, dit que les lots réintégreront son patrimoine et qu'elle devra restituer à Mme [O] les sommes versées par celle-ci dans le cadre de la vente et, le réformant pour le surplus :

- à l'égard de Mme [O] :

$gt; de dire qu'elle devra quitter les lieux dans le mois de la décision à intervenir sous astreinte de 250 € par jour de retard et à peine d'expulsion,

$gt; de la condamner à lui restituer les fruits perçus au titre des locations et évalués au 1er janvier 2013 à 54 000 € à parfaire au jour de la restitution de l'appartement de type T3 n° 75 sur la base d'une valeur locative estimée de 750 € par mois et à lui payer des dommages-intérêts correspondant au préjudice subi du fait de l'immobilisation des lots, préjudice pouvant être évalué au 1er janvier 2013 à 144 600 € à parfaire,

$gt; de dire que l'indemnité d'immobilisation de l'appartement T5 n° 79 sera actualisée au jour de la restitution sur la base d'une indemnité de 1 200 € par mois,

$gt; de débouter Mme [O] de ses demandes à l'exception de celle relative à son compte courant, à condition qu'il soit justifié du montant de ce dernier à la date de la décision à intervenir,

$gt; d'ordonner la compensation entre les créances réciproques des parties,

$gt; de dire l'arrêt à intervenir opposable à l'administration fiscale,

$gt; d'ordonner la radiation de toutes les sûretés, hypothèques ou garanties inscrites sur les biens et notamment celles inscrites par le Trésor public,

$gt; de condamner Mme [O] à lui payer la somme de 20 000 € à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et la somme de 20 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- à l'égard de Me [N] :

$gt; de dire que le notaire a commis une faute dans l'accomplissement des formalités de publicité du privilège de vendeur de nature à engager sa responsabilité,

$gt; de condamner Me [N] à l'indemniser des conséquences préjudiciables de cette faute et de la condamner les sommes de 20 000 € si la résolution de la vente est confirmée et la radiation de l'hypothèque du Trésor public prononcée ou de 370 000 € si la résolution de la vente n'est pas confirmée ou si la radiation de l'hypothèque du Trésor public est refusée,

$gt; de condamner Me [N] en tant que de besoin conjointement et solidairement avec Mme [O] aux condamnations au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens, avec bénéfice de distraction au profit de Me Crépin.

Dans ses dernières conclusions déposées le 4 février 2014, Mme [O] demande à la Cour :

- à titre principal :

$gt; de réformer le jugement en ce qu'il a prononcé la résolution de la vente, plus particulièrement concernant le lot 16 de la copropriété,

$gt; de confirmer le jugement en ce qu'il l'a déclarée créancière de la SARL Jalym d'une somme de 24 655,69 € au titre de son compte courant d'associé,

$gt; de dire qu'elle est également créancière des sommes de 4 724,20 € au titre du compte fournisseur Kiwi Cuisines, de 30 889,80 € et 20 000 € au titre du débit du compte fournisseur Kiwi Cuisines en 2007 sans contrepartie au crédit et d'une rémunération au titre de ses fonctions de gérante de la SARL Jalym entre 2004 et 2010,

$gt; de constater que ces sommes viennent en compensation du solde du prix de 232 700 € dû à la SARL Jalym,

$gt; de constater que la SARL Jalym fait obstacle à la fixation de la rémunération de gérante qui lui est incontestablement due,

$gt; de surseoir à statuer sur le solde restant éventuellement dû à celle-ci,

$gt; d'ordonner, le cas échéant sous astreinte, à la SARL Jalym de convoquer une assemblée générale ayant pour ordre du jour la fixation de sa rémunération de gérante et de se réserver la liquidation de cette astreinte,

$gt; à défaut de dire que la SARL Jalym est débitrice d'une somme totale de 200 000 € au titre de cette rémunération,

$gt; après compensation, de condamner la SARL Jalym à lui payer la somme de 47 569,69 €,

$gt; de débouter la SARL Jalym de ses demandes et de la condamner à lui payer la somme de 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens,

- subsidiairement, de condamner la SARL Jalym à lui payer, en sus des sommes précitées, la somme de 137 300 € correspondant aux acomptes par elle versés et 23 627,63 € au titre des impenses.

La SCP Cazalis - Duplantier & Loustalot et la Direction Générale des Finances Publiques, régulièrement assignées à personne tant par la SARL Jalym que par Mme [O] et auxquelles celles-ci ont signifié, dans les délais légaux, leurs conclusions respectives par actes d'huissier de justice n'ont pas constitué avocat.

MOTIFS

I - Sur le litige principal opposant la SARL Jalym à Mme [O] :

1 - Sur la demande en résolution de la vente :

Exposant que la vente n'avait d'autre but que de permettre à la SARL Jalym de satisfaire à la condition légale de garantie intrinsèque d'achèvement nécessaire à la commercialisation de l'immeuble et à l'obtention de concours bancaires et qu'il avait été convenu qu'elle ne réglerait l'intégralité du prix que par sa rémunération de gérante et les bénéfices réalisés sur la revente des lots qu'elle acquérait, Mme [O] conteste la recevabilité même de la demande en résolution de la vente en soutenant :

- d'une part que la SARL Jalym a tacitement mais de manière non équivoque renoncé à son action résolutoire ainsi qu'il résulte de l'absence de mise en demeure de paiement des acomptes qui devaient être versés au fur et à mesure de l'avancement de la rénovation dans le cadre de la vente en état futur d'achèvement, d'autre part de l'absence d'inscription de privilège du vendeur et enfin de sa prise de possession des lots nonobstant le non-paiement du prix,

- d'autre part, que la demande de résolution de la vente doit être déclarée irrecevable par application de l'article 2379 du code civil à défaut d'inscription par la SARL Jalym se son privilège de vendeur.

Mme [O] ne peut se prévaloir des dispositions de l'article 2379 du code civil selon lesquelles l'action résolutoire établie par l'article 1654 ne peut être exercée, à défaut d'inscription du privilège du vendeur dans le délai de deux mois à compter de l'acte de vente, au préjudice des tiers qui ont acquis des droits sur l'immeuble du chef de l'acquéreur et qui les ont publiés dès lors qu'acquéreur 'direct' des lots litigieux, elle n'a pas la qualité de tiers (à la vente initiale dont la résolution est demandée) au sens de ce texte qui ne vise que les sous-acquéreurs du bien.

C'est à bon droit que les premiers juges ont déclaré l'action en résolution de la SARL Jalym recevable en relevant :

- d'une part, que les allégations de Mme [O] quant à la faculté pour elle d'acquitter le prix d'achat des lots au moyen des plus-values sur reventes futures et de sa rémunération de gérante ne sont étayées par aucun élément objectif et sont sans portée sur l'application des articles 1650 et suivants du code civil,

- d'autre part, qu'il ne peut être déduit de la délivrance des lots antérieurement au règlement intégral du prix d'achat et de la non-inscription du privilège de vendeur une renonciation non équivoque de la venderesse à exercer éventuellement l'action résolutoire en cas de non-paiement du prix.

Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a prononcé, sur le fondement de l'article 1654 du code civil, la résolution de la vente immobilière litigieuse après avoir constaté le non-paiement par Mme [O] de l'intégralité du prix d'acquisition qui devait être soldé lors de la mise à disposition des locaux, nonobstant mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception du 10 novembre 2010.

Exposant qu'elle est réciproquement et de manière non contestée créancière de la société venderesse d'une somme de 24 655,69 € au titre du solde créditeur de son compte courant d'associé et que cette somme doit s'imputer en priorité sur le solde impayé du prix d'acquisition du lot n° 16 (appartement T5 par elle personnellement occupé), Mme [O] demande à la Cour d'exclure ce lot de l'assiette de la résolution de la vente, en se prévalant des dispositions combinées des articles 1253 et 1256 du code civil.

Il ne saurait cependant être fait droit à cette demande dès lors même que l'acte de vente ne porte mention que d'un prix global, non ventilé entre les divers lots objets de la cession.

Le jugement déféré sera également confirmé en ce que tirant les exactes conséquences de la résolution de la vente, il a disposé :

- que Mme [O] devra restituer à la SARL Jalym les lots de copropriété objets de la vente résolue et les libérer de toute occupation personnelle ou de son chef,

- que la SARL Jalym est réciproquement tenue de restituer à Mme [O] les sommes par elle versées en exécution du contrat résolu.

La SARL Jalym demande à la Cour, réformant partiellement le jugement entrepris de condamner Mme [O] à lui payer les sommes de :

- 54 000 € au titre des fruits perçus au titre de la location d'un appartement de type T3 n° 75, évalués au 1er janvier 2013, à parfaire au jour de la restitution, sur la base d'une valeur locative estimée de 750 € par mois,

- 144 600 € à titre de dommages-intérêts correspondant au préjudice subi du fait de l'immobilisation des lots, selon évaluation arrêtée au 1er janvier 2013, à parfaire, dont 81 400 € au titre de la dépréciation des biens, 20 000 € au titre des frais financiers exposés et 43 200 € au titre du préjudice lié à l'immobilisation des biens,

- 1 200 € par mois à titre d'indemnité d'immobilisation de l'appartement T5 n° 79 personnellement occupé par Mme [O], jusqu'à la restitution effective.

Il y a lieu de rappeler :

- que lorsque, comme en l'espèce, un contrat synallagmatique est résolu pour inexécution par l'une des parties de ses obligations, les choses doivent être remises en l'état dans lequel elles se seraient trouvées si les obligations nées du contrat n'avaient jamais existé,

- que sur le fondement de l'article 1234 du code civil, le vendeur ne peut, en raison de l'effet rétroactif de la résolution, prétendre obtenir une indemnité correspondant à la seule occupation de l'immeuble,

- que la partie de bonne foi, sur le fondement de l'article 1382 du code civil, peut seule demander la condamnation de la partie fautive à réparer le préjudice qu'elle a subi en raison de la conclusion du contrat résolu.

Dès lors, d'une part, que les loyers constituent des fruits, simples accessoires de la chose et, d'autre part, que la résolution de la vente a été prononcée aux torts exclusifs de Mme [O] qui ne peut dès lors être considérée comme de bonne foi au sens de l'article 549 du code civil, le jugement déféré sera confirmé en ce que les premiers juges ont de ce chef :

- exactement estimé, sur la base du descriptif du bien contenu dans l'acte de vente et à défaut de production des contrats de bail y afférents, la valeur locative de l'appartement T3 à la somme de 700 € par mois, cette évaluation n'étant pas remise en cause par les éléments (pages d'offres de locations immobilières) versés aux débats par la SARL Jalym faisant état de loyers dans une fourchette comprise entre 602 € et 819 € pour des biens de même nature,

- condamné en conséquence Mme [O] à payer à la SARL Jalym la somme de 48 300 € au titre de la restitution des loyers perçus sur l'appartement type 3, somme à parfaire au jour de la restitution, sur la base d'une valeur locative mensuelle de 700 €, à compter du 1er janvier 2007 et jusqu'à restitution effective du bien.

S'agissant de l'indemnité de dépréciation sollicitée par la SARL Jalym à concurrence de la somme de 81 400 € correspondant à la différence de valeur entre un bien immobilier neuf et un bien ancien, sur la base d'un taux de décote moyen de 22 % tel que prétendument estimé par les professionnels de l'immobilier, il y a lieu de considérer que, quels que soient l'état dans lequel les biens seront restitués par Mme [O] et l'entretien dont ils ont pu faire l'objet depuis la prise de possession par celle-ci en janvier 2007, ces biens ne pourront être commercialisés sur la base d'une valeur à neuf en sorte que la réalité d'une perte de valeur et, partant, du préjudice invoqué de ce chef par la SARL Jalym est incontestable et qu'il lui sera alloué, compte tenu de la durée de possession par Mme [O] et du prix de vente initial de ceux-ci une indemnité de 37 000 €, le jugement déféré devant en conséquence être réformé en ce qu'il a débouté la SARL Jalym de ce chef de demande.

Le remboursement de frais financiers exposés pour l'acquisition de l'immeuble et le paiement d'une indemnité au titre de l'immobilisation de l'appartement T5 occupé personnellement par Mme [O] ne peuvent être inclus dans les restitutions réciproques consécutives à la résolution de la vente car ils ne constituent ni un accessoire de la chose ni une conséquence directe de la résolution mais des préjudices distincts n'ouvrant droit à indemnisation, compte tenu de l'effet rétroactif de la résolution, que sur un fondement délictuel, non invoqué par la SARL Jalym qui ne vise dans ses écritures que les dispositions des articles 1183, 1184, 1147, 1656 et 2243 du code civil.

Il convient dès lors, d'une part, de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la SARL Jalym de sa demande en remboursement de frais financiers exposés pour l'acquisition de l'immeuble et, d'autre part, le réformant de ce chef, de débouter la SARL Jalym de sa demande en paiement d'indemnité d'immobilisation au titre de l'appartement T5.

La créance de la SARL Jalym au titre des restitutions réciproques consécutives à la résolution de la vente sera donc fixée aux sommes de 37 000 € au titre de la dépréciation des biens objets de la vente résolue et de 48 300 € au titre de la restitution des loyers perçus sur l'appartement type 3, somme à parfaire au jour de la restitution, sur la base d'une valeur locative mensuelle de 700 €, à compter du 1er janvier 2007 et jusqu'à restitution effective du bien.

2 - Sur les demandes reconventionnelles de Mme [O] :

Mme [O] sollicite la compensation judiciaire de l'éventuelle créance de la SARL Jalym à son égard avec les sommes dont elle prétend elle-même réciproquement être créancière, en exposant que la société Jalym lui doit, outre la somme de 24 655,69 € portée au crédit de son compte courant d'associé, une somme de 4 724,20 € au titre de son activité d'installation de cuisines et salles de bains sous l'enseigne Kiwi Cuisines à laquelle il y a lieu d'ajouter les sommes de 30 889,80 € et 20 000 € portées au débit du compte fournisseur de Kiwi Cuisines en 2007, suite au contrôle fiscal de la SARL Jalym, sans contrepartie de crédit, alors que ces sommes correspondaient pour la première à la rémunération ou commission due par la SARL Jalym à Mme [O] au titre de l'achat de l'hôtel et, pour la seconde, au remboursement d'une somme de 20 000 € versée à un tiers (M. [W]), pour le compte de la SARL Jalym.

La SARL Jalym conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il a fait droit à la demande relative au compte courant d'associé, à condition qu'il soit justifié du montant de ce dernier à la date de l'arrêt à intervenir et en ce qu'il a débouté Mme [O] de ses autres demandes à défaut de preuve d'un lien entre Mme [O] et 'Kiwi Cuisines' et de preuve du paiement par Mme [O] des sommes portées au crédit du compte Kiwi Cuisines au motif qu'il n'est pas établi que Mme [O] a fait l'avance des fonds.

Mme [O] verse cependant aux débats en cause d'appel (pièce n° 14) un extrait du site informatique 'Société.com' duquel il résulte qu'elle a exercé jusqu'au 21 janvier 2008, date de radiation de son inscription au RCS de [Localité 3] sous le n° A325980563 une activité de commerce de détail de meubles sous l'enseigne 'Kiwi', en sorte qu'il y a leu de considérer qu'elle justifie du lien entre elle et les comptes ouverts au nom de Kiwi Cuisines dans la comptabilité de la SARL Jalym.

Par ailleurs, si l'extrait du compte Kiwi inscrit dans le grand livre de la SARL Jalym fait effectivement apparaître, pour l'exercice civil 2007, deux inscriptions de 30 889,80 € et 20 000 €, l'extrait dudit compte arrêté au 31 décembre 2011, fait apparaître au profit de Kiwi Cuisines un solde créditeur de 4 724,20 €, dont la SARL Jalym ne rapporte pas la preuve du règlement et qui constitue, seul, la créance dont Mme [O] est titulaire contre ladite société, outre la somme de 24 655,69 € au titre du solde créditeur de son compte courant d'associé, tel que figurant sur l'extrait du grand livre comptable de la société (pièce n° 12) arrêté au 31 décembre 2011 et dont la SARL Jalym ne rapporte pas la preuve du règlement.

S'agissant enfin de la créance invoquée par Mme [O] au titre de la rémunération qui lui serait due pour la période pendant laquelle elle a assuré la gérance de la SARL Jalym

(dont les statuts du 19 novembre 2004 prévoient en leur article 12 qu'en rémunération de ses fonctions, chaque gérant a droit à un traitement fixe ou proportionnel ou encore mixte dont le montant et les modalités de paiement sont déterminés par décision collective ordinaire des associés), il convient de considérer qu'il n'appartient pas à la Cour de se substituer tant à Mme [O] en ordonnant la tenue d'une assemblée générale dont il incombe à celle-ci de provoquer une réunion dont elle ne justifie pas de l'impossibilité de mise en oeuvre qu'à l'assemblée générale ordinaire de la société, organe décisionnaire en la matière, alors même que Mme [O] ne justifie pas avoir utilisé la faculté prévue par l'article L. 223-27 alinéa 5 du code commerce qui prévoit la possibilité pour tout associé de demander en justice la désignation d'un mandataire chargé de convoquer l'assemblée générale et de fixer un ordre du jour.

Il convient dès lors de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [O] de ses demandes de ce chef et, le réformant pour le surplus, de dire que Mme [O] est créancière de la SARL Jalym des sommes de 24 655,69 € au titre du solde créditeur de son compte courant d'associée et de 4 724,20 € au titre du solde créditeur du compte 'Kiwi Cuisines' et d'ordonner la compensation judiciaire de cette créance avec celles dont la SARL Jalym a ci-dessus été reconnue titulaire envers Mme [O].

II - Sur la demande en mainlevée d'inscription hypothécaire :

Le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il a débouté la SARL Jalym de sa demande de radiation de l'inscription hypothécaire définitive prise le 26 août 2010 par le Trésor public sur l'ensemble des biens objets de la vente litigieuse en garantie de sommes dues par Mme [O], les premiers juges ayant exactement considéré qu'à défaut de publication du privilège du vendeur, la résolution de la vente ne peut, par application de l'article 2379 du code civil, préjudicier aux droits des tiers et notamment des créanciers de l'acquéreur ayant inscrit une garantie sur les biens objets de la vente résolue.

III - Sur la demande formée contre la SCP notariale :

Le notaire instrumentaire est tenu, en application des articles 1382 et 1383 du code civil, de s'assurer de la pleine efficacité des actes juridiques auxquels il prête son concours et spécialement d'exécuter, dans les délais légaux, la formalité courante que constitue l'inscription du privilège du vendeur en matière de vente immobilière dont le prix est payable à terme.

Il résulte des éléments versés aux débats et plus particulièrement des relevés des formalités délivrés par le service de la publicité foncière que le privilège de vendeur (dont l'acte de vente du 12 juillet 2006 prévoyait spécialement l'inscription au profit de la SARL Jalym) n'a pas été inscrit par le notaire instrumentaire, la demande initiale, déposée le 17 octobre 2006 (soit postérieurement à l'expiration du délai de deux mois à compter de la date de l'acte prévu par les dispositions combinées des articles 33 du décret du 4 janvier 1955 et 2379 du code civil) ayant fait l'objet d'un rejet définitif et aucune nouvelle demande n'ayant été régularisée antérieurement à l'inscription de l'hypothèque du Trésor public.

Le non-respect du délai visé aux articles 33 du décret de 1955 et 2379 du code civil n'emporte pas rejet d'une demande d'inscription du privilège de vendeur déposée postérieurement mais seulement inopposabilité du privilège aux tiers ayant eux-mêmes publié un acte créateur de droits en leur faveur antérieurement à son inscription.

En l'espèce, il y a lieu de constater que le privilège de vendeur dont l'acte de vente imposait au notaire de procéder à l'inscription n'a pas été régulièrement inscrit antérieurement à l'inscription hypothécaire prise au profit du Trésor public en garantie de sommes dues par Mme [O] à celui-ci.

La SCP notariale ne fournit aucune explication sur ce manquement qui constitue objectivement une faute professionnelle de négligence de nature à engager sa responsabilité envers la SARL Jalym.

Le préjudice en résultant pour la SARL Jalym ne peut cependant comme le prétend celle-ci être équivalent au prix de vente de l'immeuble dès lors, d'une part, que l'existence d'une inscription hypothécaire ne rend pas, en soi, le bien grevé de celle-ci inaliénable et, d'autre part, qu'en cas de vente du bien et de versement au Trésor public de tout ou partie du prix de revente du bien, elle disposerait d'une action subrogatoire contre Mme [O].

La SARL Jalym ne justifiant d'aucun préjudice actuel et certain, en relation directe de causalité avec le manquement du notaire à ses devoirs professionnels, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande indemnitaire à son encontre.

IV - Sur les demandes accessoires :

A défaut de preuve d'une faute de nature à faire dégénérer en abus le droit fondamental

de Mme [O] à assurer en justice la défense de ses intérêts légitimes, laquelle ne peut s'évincer de la seule succombance, au demeurant partielle, de celle-ci dans ses prétentions, la SARL Jalym sera déboutée de sa demande en dommages-intérêts pour résistance abusive.

L'équité ne commande pas de faire, en cause d'appel, application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une quelconque des parties constituées et de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné Mme [O] à payer à la SARL Jalym la somme de 2 000 € au titre des frais irrépétibles par elle exposés en première instance.

Mme [O] sera condamnée aux entiers dépens d'appel et de première instance, avec bénéfice de distraction au profit de Me Crépin.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort :

Vu le jugement du tribunal de grande instance de Dax en date du 7 novembre 2012,

Réformant partiellement le jugement entrepris :

- Fixe à la somme de 37 000 € (trente sept mille euros) le montant de la créance de la SARL Jalym contre Mme [O] au titre de la dépréciation des biens objets de la vente résolue,

- Déboute la SARL Jalym de sa demande en paiement d'une indemnité d'immobilisation de l'appartement de type T5,

- Dit que Mme [O] est créancière de la SARL Jalym de la somme de 4 724,20 € (quatre mille sept cent vingt quatre euros et vingt centimes) au titre du solde créditeur du compte 'Kiwi Cuisines',

Confirme le jugement entrepris pour le surplus.

Ajoutant au jugement entrepris :

- Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

- Condamne Mme [O] aux dépens d'appel, avec bénéfice de distraction au profit de Me Crépin, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Mme Pons, Président, et par Mme Vicente, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT,

Sandra VICENTE Françoise PONS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 12/04175
Date de la décision : 23/09/2014

Références :

Cour d'appel de Pau 01, arrêt n°12/04175 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-09-23;12.04175 ?
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