CB/AM
Numéro 12/3715
COUR D'APPEL DE PAU
1ère Chambre
ARRET DU 25/09/2012
Dossier : 11/03207
Nature affaire :
Demande en garantie des vices cachés ou tendant à faire sanctionner un défaut de conformité
Affaire :
SCCV LE CLOS AMETS
C/
[G] [V]
Grosse délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R E T
prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 25 septembre 2012, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 11 juin 2012, devant :
Madame BENEIX, magistrat chargé du rapport,
assistée de Madame PEYRON, Greffier, présente à l'appel des causes,
Monsieur CASTAGNE, en application des articles 786 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries, en présence de Madame BENEIX, et en a rendu compte à la Cour composée de :
Madame PONS, Président
Monsieur CASTAGNE, Conseiller
Madame BENEIX, Conseiller
qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANTE :
SCCV LE CLOS AMETS
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représentée par la SCP LONGIN - LONGIN-DUPEYRON - MARIOL, avocats à la Cour
assistée de Maître LONGIN loco Maître Philippe VELLE-LIMONAIRE, avocat au barreau de BAYONNE
INTIMEE :
Mademoiselle [G] [V]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
représentée par la SCP DUALE - LIGNEY, avocats à la Cour
assistée de Maître Maider HENNEBUTTE, avocat au barreau de BAYONNE
sur appel de la décision
en date du 18 JUILLET 2011
rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BAYONNE
FAITS
Par acte en date du 18 novembre 2008, Melle [V] a acquis auprès de la SCCV Le Clos Amets, un appartement et deux emplacements de parking dans un ensemble immobilier situé à [Localité 2], dans le cadre d'une vente en l'état futur d'achèvement.
La réception avec réserves est intervenue le 23 février 2009 et par courrier du 28 février 2009 elle dénonçait de nouveaux défauts.
Par acte du 2 décembre 2010, portant dénonciation d'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire, elle a assigné son vendeur devant le tribunal de grande instance de Bayonne, en responsabilité sur le fondement de l'article 1147 du code civil et en réparation de ses préjudices matériel et moral.
Suivant jugement du 18 juillet 2011, rendu en l'absence de la SCCV Le Clos Amets, ce tribunal a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, consacré la responsabilité contractuelle du vendeur et l'a condamné à verser à Melle [V] la somme de 9'421 € en réparation de son préjudice matériel et 800 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, rejetant ainsi la demande au titre du préjudice moral.
La SCCV Le Clos Amets a interjeté appel de la décision suivant déclaration au greffe en date du 1er septembre 2011.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 11 mai 2012.
MOYENS et PRETENTIONS des PARTIES
La SCCV Le Clos Amets dans ses dernières écritures en date du 11 mai 2012, conclut à la réformation de la décision, à l'irrecevabilité de l'action et en toute hypothèse, à son caractère infondé.
Subsidiairement elle demande à la Cour de dire et juger que Melle [V] ne justifie pas du montant des travaux de reprise concernant les réserves figurant au procès-verbal du 23 février 2009. Elle sollicite l'allocation de la somme de 800 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient que l'action n'est pas recevable sur le fondement de l'article 1642-1 du code civil pour ne pas avoir été engagée dans le délai légal de 13 mois à compter de la livraison du 23 février 2009 mais le 2 décembre 2010 pour ce qui concerne les désordres constatés lors de la livraison et ceux décrits dans les courriers du 28 février et du 9 mars 2009 n'ont pas été dénoncés dans le mois de la prise de possession, conformément à l'acte d'achat.
L'action n'est pas non plus recevable sur le fondement de l'article 1147 s'agissant de désordres apparents relevant des dispositions spéciales des articles 1642-1 et 1648 du code civil.
Elle soutient que tous les désordres mentionnés dans le procès-verbal du 23 février 2009 ont été effectivement supprimés au vu du constat d'huissier du 5 novembre 2009 qui n'en fait plus mention. Les autres réserves, faites par Melle [V] dans ses courriers postérieurs, n'ont fait l'objet d'aucun accord de reprise, de sorte qu'elle ne peut en demander réparation sur le fondement de l'article 1147 du code civil.
Melle [V] dans ses dernières écritures en date du 7 mai 2012, conclut au rejet de l'exception de nullité de l'assignation et à la condamnation de l'appelant à lui verser la somme de 9 200 € au titre du préjudice matériel et 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au regard de sa responsabilité contractuelle engagée sur l'article 1147 du code civil.
Elle soutient que la responsabilité de la venderesse est engagée sur le fondement de l'article 1147 du code civil, dès lors qu'elle n'a pas réparé les désordres relevant de la garantie contractuelle, désordres qui ont été dénoncés par procès-verbal de réception du 23 février 2009 et dans ses courriers du 28 février 2009 et du 16 mars 2009 soit dans le délai de l'article 1642-1 du code civil. L'article 1792-6 du code civil n'exige pas la constatation contradictoire des désordres dénoncés postérieurement au procès-verbal de réception.
Son action n'est pas fondée sur l'article 1642-1 du code civil de sorte qu'elle n'est pas prescrite. En outre, dès lors que tous les désordres objets des réserves n'ont pas été repris malgré mise en demeure, l'article 1648 alinéa 2 n'est pas applicable.
Elle démontre que la faute de la venderesse est en lien de causalité directe avec son préjudice.
MOTIVATION
La SCCV Le Clos Amets n'a pas soutenu l'exception tirée de la nullité de l'assignation ; il n'y a donc pas lieu à statuer sur ce point.
L'action de l'acquéreur contre le vendeur d'un immeuble en l'état futur d'achèvement, pour la reprise des désordres apparents, relève des dispositions spéciales des articles 1642-1 et 1648 du code civil, qui sont exclusives de la responsabilité contractuelle de droit commun.
En vertu de l'article 1642-1 du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause, le vendeur d'un immeuble à construire ne peut être déchargé, ni avant la réception des travaux, ni avant l'expiration d'un délai d'un mois après la prise de possession par l'acquéreur, des vices de construction apparents.
Il résulte des dispositions des articles L 262-3 du code de la construction et 1648 alinéa 2 du code civil que dans le cas prévu à l'article 1642-1, l'action doit être introduite, à peine de forclusion, dans l'année qui suit la date à laquelle le vendeur peut être déchargé des vices.
Toutefois, ce délai d'un an ne s'applique pas à l'action visant l'exécution de l'engagement pris par le vendeur d'un immeuble à construire, de remédier aux désordres dénoncés ou encore, lorsque le vendeur s'est obligé à réparer le désordre ou qu'il a renoncé à se prévaloir de la forclusion acquise.
En l'espèce, Melle [V] a émis plusieurs réserves lors de la réception de l'immeuble suivant procès-verbal du 23 février 2009 ainsi que par lettres des 28 février et 16 mars 2009.
Il n'est pas sérieusement contesté que la prise de possession est intervenue le 28 février 2009. En conséquence, en vertu des textes susvisés, elle disposait d'un délai expirant le 28 mars 2010 pour agir contre son vendeur déficient sur le fondement des articles 1642-1 et suivants du code civil.
Melle [V] soutient agir non pas sur le fondement de ces textes mais sur le fondement de l'article 1147 du code civil, de sorte que son action n'est donc pas prescrite.
Or, contrairement à ce qu'elle affirme, elle ne justifie pas d'un accord du vendeur sur la reprise des désordres autres que ceux figurant au procès-verbal de réception du 23 février 2009, dénoncés dans ses courriers postérieurs, voire d'un commencement d'exécution des travaux de reprise, permettant d'engager sa responsabilité sur le fondement de l'inexécution de cet accord.
En effet, la seule mention manuscrite «'OK'» figurant en face de certaines des réserves mentionnées sur son courrier du 16 mars 2009, ne peut constituer la preuve d'un accord du vendeur sur les désordres dénoncés dans ses courriers postérieurs à la réception ni la preuve d'un commencement d'exécution ou de la renonciation à la prescription, alors surtout, qu'en fin de ce courrier, elle a écrit de sa main «'à ce jour toujours pas repris ni aucune réponse aux questions posées ni aucune date de prévu pour lever les réserves 18 juin 2009'».
Dans ces conditions, Melle [V] doit être déclarée irrecevable en ses demandes et le jugement sera infirmé.
Eu égard aux circonstances de la cause et à la position des parties, il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la SCCV Le Clos Amets la totalité des frais exposés pour agir en justice et non compris dans les dépens, ce qui commande le rejet de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
- Infirme le jugement du tribunal de grande instance de Bayonne en date du 18 juillet 2011, et statuant à nouveau :
- Déclare Melle [V] irrecevable en ses demandes à l'encontre de la SCCV Le Clos Amets ;
- La condamne aux dépens ;
- Autorise, les avocats de la cause qui en ont fait la demande à recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont ils auraient fait l'avance sans avoir reçu provision.
Le présent arrêt a été signé par Mme Pons, Président, et par Mme Peyron, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER,LE PRESIDENT,
Mireille PEYRONFrançoise PONS