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29/03/2011 | FRANCE | N°09/04280

France | France, Cour d'appel de Pau, 1ère chambre, 29 mars 2011, 09/04280


CB/NL



Numéro 11/





COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre







ARRET DU 29/03/11







Dossier : 09/04280





Nature affaire :



Demande en réparation des dommages causés par l'activité des auxiliaires de justice















Affaire :



[I] [R] épouse [X]



C/



[F] [V],

SCP [V] & [Y]




















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Grosse délivrée le :



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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R E T



prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 29 mars 2011, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 45...

CB/NL

Numéro 11/

COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre

ARRET DU 29/03/11

Dossier : 09/04280

Nature affaire :

Demande en réparation des dommages causés par l'activité des auxiliaires de justice

Affaire :

[I] [R] épouse [X]

C/

[F] [V],

SCP [V] & [Y]

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 29 mars 2011, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 18 Janvier 2011, devant :

Monsieur AUGEY, Conseiller, faisant fonction de Président

Monsieur DEFIX, Conseiller

Madame BENEIX, Conseiller, Magistrat chargé du rapport conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

assistés de Madame PEYRON, Greffier, présente à l'appel des causes.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

Le Ministère Public a donné son avis écrit le 26 novembre 2010.

dans l'affaire opposant :

APPELANTE :

Madame [I] [B] [R] épouse [X]

[Localité 3]

représentée par la SCP RODON, avoués à la Cour

assistée de Me DABADIE, avocat au barreau de PAU

INTIMES :

Maître [F] [V] pris en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège

[Adresse 6]

[Localité 4]

SCP [V] & [Y] prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège

[Adresse 6]

[Localité 4]

représentés par la SCP PIAULT / LACRAMPE-CARRAZE, avoués à la Cour

assistés de la SCP KUHN, avocats au barreau de PARIS

sur appel de la décision

en date du 18 NOVEMBRE 2009

rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PAU

FAITS

M. [C] est décédé le [Date décès 2] 2006.

Il avait établi deux testaments olographes :

le premier, le 04 février 2004, où il avait institué ses deux neveux MM. [U] et [K] [R], en qualité de légataires universels de la totalité de ses biens et sa nièce, Mme [X], en qualité de légataire particulière d'un terrain ;

le second, le 21 avril 2004, modifiant le premier, où il instituait sa nièce et 'sa famille', en qualité de légataire universelle d'une liste de biens.

Le 09 mars 2007, les parties ont signé un protocole d'accord établi par le notaire chargé du règlement de la succession, Me [V], où Mme [X] ne se reconnaissait que comme légataire particulière. Toutefois elle a refusé de signer le projet de déclaration de succession.

PROCEDURE

Par acte en date du 23 décembre 2008, Mme [X] a assigné Me [V] et la SCP de notaires [V] devant le tribunal de grande instance de Pau, en responsabilité pour manquement à son obligation de conseil, pour l'avoir considérée non comme légataire universel mais comme légataire particulier, à l'occasion de ce protocole d'accord du 9 mars 2007.

Par jugement du 18 novembre 2009, ce tribunal l'a déboutée de l'ensemble de ces demandes excluant toute faute de la part du notaire dans l'interprétation du testament. Elle a été condamnée à verser aux défendeurs la somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [X] a interjeté appel suivant déclaration au greffe du 3 décembre 2009.

MOYENS et PRETENTIONS des PARTIES

Mme [X] dans ses dernières écritures en date du 25 août 2010, conclut à la responsabilité de Me [V] et la SCP de notaires [V], pour manquement à son obligation de conseil et sollicite leur condamnation solidaire à lui verser la somme de 114.720 € pour « tous chefs de préjudice » outre 15.000 € en réparation du préjudice moral ainsi qu'une indemnité de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle soutient qu'aux termes du second testament du 21 avril 2004, son oncle, M. [C], a annulé clairement les précédentes dispositions testamentaires et l'a instituée comme légataire universelle. Cette terminologie se suffit à elle-même, peu importe l'énumération de biens non exhaustive, par ailleurs. Sa famille est citée comme héritière pour le cas où elle pré-décéderait.

La faute du notaire, dont elle était la cliente, consiste donc dans le fait de lui avoir fait entériner par la signature du protocole, son interprétation erronée de cet acte, de nature à lui porter préjudice. Il n'existait aucun conflit entre les ayants droits, antérieurement, de sorte que le protocole n'a pas de cause. Elle a fait confiance à ce professionnel du droit et elle n'a pas été en mesure de réfléchir avant de donner son accord.

Son action en responsabilité pour faute est recevable nonobstant l'absence de recours en nullité du protocole et ce d'autant qu'elle ne dispose plus d'aucune voie de contestation dans la mesure où elle ne peut plus se faire envoyer en possession et que moralement elle ne veut pas agir contre ses frères.

Le dommage dont elle se prévaut est né, actuel est certain : il est constitué d'un préjudice financier relatif à la perte des biens attribués à ses frères et d'un préjudice moral au regard de la dégradation des relations qu'elle entretenait avec eux, en raison de ce litige.

Me [V] et la SCP de notaires [V] dans leurs dernières écritures en date du 8 juin 2010, concluent à la confirmation du jugement déféré et au débouté des demandes formées par l'appelante dont ils sollicitent la condamnation à leur verser la somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Ils soutiennent qu'il existait un véritable problème d'interprétation, susceptible de créer des tensions familiales, puisque le second testament, d'une part, énumère dans une liste précise et limitative des biens individualisés, ce qui exclut toute universalité et d'autre part, visent des bénéficiaires non identifiés, Mme [X] et « sa famille ».

Ils estiment que l'établissement d'un protocole susceptible de taire un futur conflit sur la base de renseignements obtenus du Cridon, relevait de la mission du notaire.

Mme [X] qui a disposé d'un délai d'une semaine pour réfléchir au projet de protocole, ne justifie d'aucun préjudice né, certain et directement imputable aux intimés :

la succession de M. [C] n'est toujours pas réglée, de sorte que ses droits sont intacts et peuvent être reconnus dans le cadre d'un envoi en possession voire d'une action en nullité du protocole,

elle dispose donc d'une créance contre la succession qu'elle ne peut réclamer simultanément au notaire, au titre de l'application du principe de la réparation intégrale du préjudice qui interdit tout enrichissement,

elle n'a intenté aucun recours contre ses frères ni contre le protocole, de sorte qu'elle n'est pas dans l'impossibilité de recouvrer sa créance,

le préjudice moral n'est pas justifié vu le caractère forfaitaire de la demande chiffrée.

Le ministère public a, suivant réquisitions du 26 novembre 2010, indiqué s'en rapporter.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 30 novembre 2010.

MOTIVATION

Selon les articles 1002, 1003, 1010 et 1014 du code civil, les dispositions testamentaires sont ou universelles, ou à titre universel, ou à titre particulier ; ainsi le testateur est en droit de donner ou l'universalité, ou une quote part de ses biens dont la loi lui permet de disposer ou encore un bien particulier, individuellement déterminé.

Le second testament de M. [C] en date du 21 avril 2004 est ainsi libellé :

« ce testament annule et remplace le précédent. Lors de mon décès je souhaite faire héritière universelle [B] [X] et sa famille des biens que je possède une maison sur [Localité 8] une parcelle sur [Localité 7] n° [Cadastre 1] une parcelle de terre sur Navailles n° AT [Cadastre 5] et des biens s'il en reste à la poste et au crédit agricole »

La formulation employée par M. [C] dans la rédaction de ce testament, était ambiguë en ce que Mme [X] était citée en qualité de légataire universelle d'un certain nombre de biens individuellement déterminés, ce qui est contradictoire, au regard des textes ci-dessus. En effet l'individualisation de biens dans une énumération limitative est exclusive de l'universalité du legs. Peu importe dès lors la terminologie utilisée par le testateur.

Il appartient au notaire de procéder à la vérification des faits et conditions nécessaires pour assurer l'utilité, l'efficacité technique et pratique et la sécurité de ses actes. De sorte qu'il lui appartient de conseiller utilement son client en attirant son attention, de manière complète et circonstanciée, sur la portée, les effets et les risques de ses engagements ainsi qu'en lui suggérant les mesures les plus propices pour obtenir le résultat qu'il désire atteindre.

Me [V] et la SCP de notaires [V] ont obtenu l'adhésion de Mme [X] et de MM. [U] et [K] [R], à un protocole, le 9 mars 2007, par lequel ces derniers se voyaient attribuer la totalité des biens immeubles de M. [C] sous réserve des biens meubles et immeubles précisément énumérés, revenant à leur soeur Mme [X].

Dès lors, en relevant la contradiction insérée à l'acte du 21 avril 2004, en sollicitant l'avis du Cridon, organisme de conseil à destination des notaires et en proposant un protocole d'accord à tous les ayants droits nommément désignés de M. [C], Me [V] et la SCP de notaires [V] ont, non seulement rempli leur mission de conseil mais encore ont donné le conseil utile et efficace permettant d'échapper à la contradiction soulignée dans le dernier testament et sécuriser, pour l'avenir, les droits et situations juridiques de chacun des ayants droits de M. [C].

Dans ces conditions, à défaut de preuve d'une faute des notaires, leur responsabilité ne peut être engagée. Le jugement du tribunal de grande instance de Pau du 18 novembre 2009 sera intégralement confirmé.

Eu égard aux circonstances de la cause et à la position des parties, il est inéquitable de laisser à la charge de Me [V] et de la SCP de notaires [V] la totalité des frais exposés pour agir en justice et non compris dans les dépens, ce qui commande l'octroi de la somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

Après en avoir délibéré, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;

Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Pau du 18 novembre 2009 dans toutes ses dispositions ;

Condamne Mme [X] à verser à Me [V] et la SCP de notaires [V] la somme de 1.500 € (mille cinq cents euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [X] aux dépens ;

Autorise, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, la SCP Piault/Lacrampe-Carraze, avoués, à recouvrer directement contre la partie condamnée, ceux des dépens dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision.

Le présent arrêt a été signé par M. Fabrice AUGEY, Président, et par Mme Mireille Peyron, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

Mireille PEYRON Fabrice AUGEY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 09/04280
Date de la décision : 29/03/2011

Références :

Cour d'appel de Pau 01, arrêt n°09/04280 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-03-29;09.04280 ?
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