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15/06/2021 | FRANCE | N°21/00218U

France | France, Cour d'appel de Paris, B3, 15 juin 2021, 21/00218U


REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 12

SOINS PSYCHIATRIQUES SANS CONSENTEMENT

ORDONNANCE DU 15 JUIN 2021

(no 236 , pages)

No du répertoire général : No RG 21/00218 - No Portalis 35L7-V-B7F-CD2BS

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 07 Juin 2021 -Tribunal judiciaire de CRETEIL (Juge des Libertés et de la Détention) - RG no 21/01423

L'audience a été prise au siège de la juridiction, en audience publique, le 14 juin 2021

Décision contradictoire

COMPOSITI

ON

Gilles BALAY, président de chambre à la cour d'appel, agissant sur délégation du Premier Président de la cour d'appel de ...

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 12

SOINS PSYCHIATRIQUES SANS CONSENTEMENT

ORDONNANCE DU 15 JUIN 2021

(no 236 , pages)

No du répertoire général : No RG 21/00218 - No Portalis 35L7-V-B7F-CD2BS

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 07 Juin 2021 -Tribunal judiciaire de CRETEIL (Juge des Libertés et de la Détention) - RG no 21/01423

L'audience a été prise au siège de la juridiction, en audience publique, le 14 juin 2021

Décision contradictoire

COMPOSITION

Gilles BALAY, président de chambre à la cour d'appel, agissant sur délégation du Premier Président de la cour d'appel de Paris,

assisté de Yael KOBIS, greffier lors des débats et du prononcé de la décision

APPELANTE

Mme [B] [F] (personne faisant l'objet des soins)
née le [Date naissance 1] 1983 à [Localité 1]
demeurant [Adresse 1]
actuellement hospitalisée aux hopitaux [Localité 2]

comparante en personne, assistée de Me Dalila Madjid, avocat commis d'office, avocat au barreau de Paris,

INTIMÉ

M. PREFECTURE DE POLICE [Localité 1]
demeurant [Adresse 2]

non comparant, représenté par Me Asma Frigui, avocat au barreau de Paris

LIEU D'HOSPITALISATION

Les Hopitaux [Localité 2]
demeurant [Adresse 3]

non comparant, non représenté,

MINISTÈRE PUBLIC

Représenté par Sylvie Schlanger, avocate générale,

DÉCISION

FAITS ET PROCÉDURE

Par arrêté du préfet de police [Localité 1] en date du 28 mai 2021, Mme [B] [F] a été admise en soins psychiatriques sans consentement, se fondant sur les énonciations du certificat médical du Docteur [V]. La mesure s'est poursuivie de fait sous la forme d'une hospitalisation complète jusqu'à ce jour.

Statuant sur requête reçue au greffe de la Cour le 2 juin 2021, M. Le préfet ayant demandé qu'il soit procédé au contrôle de la mesure, le juge des libertés et de la détention a ordonné la poursuite de l'hospitalisation complète.

Par lettre reçue au greffe de la Cour le 9 juin 2021, Mme [B] [F] a interjeté appel de cette ordonnance.

MOYENS ET PRÉTENTIONS

Mme [B] [F] s'oppose aux soins sous contrainte, affirmant que sa récente fugue avait pour motif son refus d'un médicament qu'on lui aurait administré sans la prévenir. Elle affirme avoir été attaquée par des pompiers et assure qu'elle n'est pas folle.

A l'audience elle indique vouloir se soigner chez elle et demande la mainlevée de la mesure.

Le préfet de police conclut a la confirmation de l'ordonnance en raison de la nécessité actuelle de garantir le suivi d'un traitement rigoureux.

Le ministère public conclut au maintien de la mesure de soins psychiatriques sans consentement sous forme d'hospitalisation complète.

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

Aux termes de l'article L3213-1 du code de la santé publique, « Le représentant de l'Etat dans le département prononce par arrêté, au vu d'un certificat médical circonstancié ne pouvant émaner d'un psychiatre exerçant dans l'établissement d'accueil, l'admission en soins psychiatriques des personnes dont les troubles mentaux nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l'ordre public. Les arrêtés préfectoraux sont motivés et énoncent avec précision les circonstances qui ont rendu l'admission en soins nécessaire. Ils désignent l'établissement mentionné à l'article L. 3222-1 qui assure la prise en charge de la personne malade ».

De même, ce texte précise au paragraphe II ce qui suit : « Dans un délai de trois jours francs suivant la réception du certificat médical mentionné à l'avant-dernier alinéa de l'article L. 3211-2-2, le représentant de l'Etat dans le département décide de la forme de prise en charge prévue à l'article L. 3211-2-1, en tenant compte de la proposition établie, le cas échéant, par le psychiatre en application du dernier alinéa de l'article L. 3211-2-2 et des exigences liées à la sûreté des personnes et à l'ordre public. Il joint à sa décision, le cas échéant, le programme de soins établi par le psychiatre.

Dans l'attente de la décision du représentant de l'Etat, la personne malade est prise en charge sous la forme d'une hospitalisation complète ».

En l'espèce, la période d'observation et de soin initiale a pris effet le 28 mai 2021 ; les certificats médicaux de 24 heures et 72 heures ont été respectivement établis le 29 mai 2021 et le 31 mai 2021, régulièrement ; l'arrêté préfectoral décidant de la poursuite de la mesure sous forme d'hospitalisation complète n'est pas produit et la préfecture de police indique par courriel, sur demande du greffe, que cet arrêté n'a pas été pris dans le délai de 3 jours francs suivant la réception du dernier certificat, motif pris de l'arrêt de la cour de cassation du 28 mai 2015 qui dispenserait la préfecture de police d'une formalisation de la décision.

Il doit être relevé que cette pratique est contraire à la loi et entraîne nécessairement une irrégularité de la procédure. En effet, les médecins rédigent des certificats médicaux mais ne sont pas les auteurs d'une décision administraive qui est nécessaire et selon le texte précité doit être prise en tenant compte de la proposition établie par les médecins et des exigences liées à l'ordre public et à la sécurité des personnes.

D'autre part, il ne peut être prétendu que le préfet de police maintient implicitement une décision antérieure portant sur la prise en charge sous forme d'hospitalisation complète car le préfet a seulement décidé de l'admission en soins sans consentement mais n'a pas pris de décision sur la forme de la prise en charge initiale, laquelle est imposée par la loi elle-même ; et précisément, la loi a obligé le représentant de l'Etat dans le département à prendre une décision dans un délai de trois jours francs suivant la réception du certificat médical mentionné à l'avant-dernier alinéa de l'article L. 3211-2-2, sur la forme de prise en charge.

Il s'en déduit que la patiente est maintenue en soins psychiatriques sans consentement sous forme d'hospitalisation complète sans qu'aucune décision administrative ne soit intervenue sur ce point. La mesure de soins sans consentement a bien pour base légale l'arrêté d'admission, mais la forme de la prise en charge, qui précisément a pour objet l'exercice d'une contrainte lorsqu'il s'agit d'hospitalisation complète, ne repose sur aucune base légale ce qui constitue une atteinte caractérisée à la liberté du patient.

Néanmoins, Le certificat médical de 72 heures comporte la mention suivante :
"A ce jour, l'état mental de cette personne impose la nécessité de maintenir les soins psychiatriques immédiats assortis d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète.
Le patient a été informé du projet de maintien de soins.
Le patient a fait valoir des observations".

Bien qu'il s'agisse de mentions stéréotypées qui figurent sur l'imprimé servant à établir tous les certificats de 72 heures, il convient de relever que Mme [F] n'en conteste pas les termes. D'ailleurs, elle ne se prévaut pas elle-même de l'irrégularité de la procédure. En l'état, il y a en conséquence lieu de considérer que l'irrégularité n'a pas porté atteinte à ses droits au sens de l'article L3216-1 du code de la santé publique, en ce que son droit à la santé et à la sécurité méritaient en l'espèce d'être protégées sans délai, par priorité.

Le certificat médical d'admission mentionne l'interpellation de la patiente alors qu'elle errait sur la voie publique, désorientée et délirante, secourue par deux personnes ayant prévenu la police. Il indique qu'il s'agit de son deuxième passage en un mois à l'infirmerie psychiatrique de la préfecture de police [Localité 1]. Il mentionne un délire à mécanisme interprétatif et intuitif accompagné d'une probable note hallucinatoire, dans une thématique essentiellement persécutoire.

Le certificat médical de 24 heures et le certificat médical de 72 heures mentionnent les troubles mentaux de l'intéressée ayant des antécédents psychiatriques, la persistance d'éléments délirants et une profonde angoisse.

L'avis motivé établi le 3 juin 2021 par le Docteur [Q], réitéré le 4 juin 2021 dans les mêmes termes, confirme la persistance d'un délire vaste et systématisé, enkysté en soulignant qu'elle parvient néanmoins à une alliance thérapeutique en acceptant le traitement et en souhaitant son transfert vers une clinique privée; ce transfert est envisagé mais nécessite une meilleure stabilisation de son état.

Ces observations ne font pas l'objet d'une critique sérieuse à l'audience. Elles établissent que les troubles mentaux de l'intéressée persistent et qu'ils sont susceptibles de compromettre l'ordre public et la sûreté des personnes.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par décision rendue par mise à disposition,

DECLARONS la procédure irrégulière,

DISONS n'y avoir lieu à mainlevée de la mesure,

CONFIRMONS l'ordonnance,

Laissons les dépens la charge de l'État.

Ordonnance rendue le 15 JUIN 2021 par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE MAGISTRAT DÉLÉGATAIRE

Une copie certifiée conforme notifiée le 15 juin 2021 par fax à :

X patient à l'hôpital
ou/et par LRAR à son domicile
X avocat du patient
X directeur de l'hôpital
tiers par LRARXpréfet de police
Xavocat du préfet
tuteur / curateur par LRAR
XParquet près la cour d'appel de Paris


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : B3
Numéro d'arrêt : 21/00218U
Date de la décision : 15/06/2021
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2021-06-15;21.00218u ?
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