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06/07/2018 | FRANCE | N°17/18798

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 8, 06 juillet 2018, 17/18798


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 8



ARRET DU 6 JUILLET 2018



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 17/18798



Renvoi après cassation du 27 Septembre 2017- RG n° 1209 F-D - d'un arrêt de la cour d'appel de paris en date du 8 décembre 2015 - RG 14/13917







DEMANDEURS A LA SAISINE APRES CASSATION



Maître Marc X...



agissant es-qualité de Mandataire judiciaire de la SARL 2012 BIO FRANCE en redressement judiciaire, domicilié [...]



SARL 2012 BIO FRANCE

société en redressement judiciaire, agissan...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 8

ARRET DU 6 JUILLET 2018

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 17/18798

Renvoi après cassation du 27 Septembre 2017- RG n° 1209 F-D - d'un arrêt de la cour d'appel de paris en date du 8 décembre 2015 - RG 14/13917

DEMANDEURS A LA SAISINE APRES CASSATION

Maître Marc X...

agissant es-qualité de Mandataire judiciaire de la SARL 2012 BIO FRANCE en redressement judiciaire, domicilié [...]

SARL 2012 BIO FRANCE

société en redressement judiciaire, agissant en la personne de son gérant ou tout autre représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège

Le Haras, rue des Grands Prés

[...]

Représentés par Me Pascale Y..., avocat au barreau de PARIS, toque : K0090

Assistés de Me Mathilde A..., substituant Me François Z..., avocat au barreau de PARIS, toque : E617

DÉFENDERESSE A LA SAISINE APRES CASSATION

SAS LABORATOIRES D.E.A.

[...]

N° SIRET : 450 005 830

Représentée par Me Xavier B... ET JUDICIAIRES, avocat au barreau de PARIS, toque : A0707

Assistée de Me Olivier C..., avocat au barreau de PARIS, toque :B187

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 31 mai 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Sylvie D..., Présidente, et M. Thomas VASSEUR, Conseiller, chargés du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Sylvie D..., Présidente de chambre

M. Thomas VASSEUR, Conseiller

Mme Christina DIAS-DA-SILVA, Conseillère

Qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Patricia PUPIER

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Sylvie D..., présidente et par Mme Patricia PUPIER, greffière.

EXPOSE DU LITIGE

La SAS Laboratoires DEA, qui fabrique des compléments alimentaires a confié, sans exclusivité, la commercialisation de ses produits à la société JP-W entre novembre 2011 et janvier 2013. Ayant considéré que les produits que la SARL 2012 Bio France, filiale de la société La JP-W, commercialisait sur son site internet étaient identiques aux siens, la société Laboratoires DEA a fait assigner la société [...] devant le juge des référés du tribunal de commerce de Paris en formulant des demandes de deux ordres :

l'interdiction pour la société [...] de vendre, par tous moyens et sur tous supports, notamment sur son site internet, tous compléments alimentaires mis au point par la société Laboratoires DEA ;

la communication de la copie de l'intégralité des bons de commande et factures desdits produits litigieux.

Par ordonnance du 20 juin 2014, le juge des référés du tribunal de commerce de Paris, accueillant chacune de ces demandes, a :

ordonné à la société [...], sous astreinte définitive de 1.000 euros par jour de retard à compter du lendemain de la signification de l'ordonnance à intervenir et par infraction constatée, de cesser la vente, par tous moyens sur tous supports, notamment sur le site internet http://www.2012bio.fr de tous compléments alimentaires identiques dans leur formule à ceux vendus par la SASLaboratoires D.E.A. ;

enjoint à la société [...] de lui communiquer, sous astreinte définitive de 50 euros par jour de retard à compter de 15 jours de la signification de l'ordonnance et ce pendant six mois, la copie de l'intégralité des bons de commande et factures desdits produits ;

condamné la société [...] à payer à la SAS Laboratoires D.E.A. la somme de 1.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;

condamné en outre la société [...] aux dépens de l'instance.

Par arrêt rendu le 8 décembre 2015, la cour d'appel de Paris (pôle 1 - chambre 3) , a :

rejeté la demande de nullité de l'assignation ;

confirmé l'ordonnance entreprise ;

Y ajoutant :

condamné la société [...] à verser à la SAS Laboratoires DEA la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamné la société [...] aux dépens, distraits conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La SARL 2012 Bio France a formé un pourvoi en cassation contre l'arrêt du 8décembre2015.

Pendant le cours de l'instance en cassation, la société [...] a fait l'objet d'une procédure de placement en redressement judiciaire, qui a été ordonné par un jugement du tribunal de commerce d'Evreux prononcé le 27 avril 2017.

Par arrêt du 27 septembre 2017 (n° 16-10.962), la Cour de cassation, chambre commerciale, a:

cassé et annulé, mais seulement en ce qu'il ordonne à la société [...], sous astreinte, de cesser la vente, par tous moyens et sur tous supports, notamment sur son site internet de tous compléments alimentaires identiques dans leur formule à ceux vendus par la société Laboratoires DEA, l'arrêt rendu le 8 décembre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

a remis, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et les a renvoyées devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Par déclaration du 12 octobre 2017, la société [...] a saisi la cour de renvoi.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 27 février 2018, la société [...] demande à la cour de :

dire et juger que le simple fait de copier un produit concurrent qui n'est protégé par aucun droit privatif ne constitue pas en soi un acte de concurrence déloyale, comme tel susceptible de caractériser un trouble manifestement illicite, ainsi que l'a considéré la Cour de cassation ;

dire et juger que l'arrêt de la Cour de cassation du 27 septembre 2017, constitue une circonstance nouvelle permettant de rapporter la mesure ordonnée et en conséquence condamner la SAS Laboratoires D.E.A. à lui restituer la somme de 38.250 euros ;

constater qu'elle n'a nullement recherché à créer une confusion avec les produits de la SAS Laboratoires D.E.A. ;

constater en effet que compte-tenu des étiquettes adoptées, de ses conditionnements, notamment, aucune confusion n'est possible entre les produits en litige ;

dire et juger qu'une formule de complément alimentaire n'est pas protégeable ;

constater que les produits du marché présentent des formules similaires ou identiques ;

constater, en outre, que les formules des produits de la SAS Laboratoires ne sont pas appropriables et sont banales, que les conditionnements de la société appelante sont banals et revêtus d'une étiquette ne créant aucun risque de confusion entre eux et les produits de la SAS Laboratoires D.E.A. et constater notamment que cette dernière ne communique aucun de ses conditionnements, qu'elle se refuse en conséquence de verser aux débats ;

infirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance de référé du tribunal de commerce de Paris du 20 juin 2014 ;

condamner la SAS Laboratoires D.E.A. à lui payer la somme de 20.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, dont distraction au profit de Me Pascale Y..., conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 8 janvier 2018, la SAS Laboratoires D.E.A. demande à la cour de :

Vu l'article 1240 nouveau du code civil :

Vu les articles 872 et 873 du code de procédure civile,

déclarer la SARL 2012 Bio France mal fondée en son appel, et par conséquent :

confirmer l'ordonnance de référé du 20 juin 2014 en toutes ses dispositions ;

débouter la SARL 2012 Bio France en toutes ses demandes, fins et conclusions;

fixer à 8.000 euros sa créance au passif du redressement judiciaire de la SAS2012 Bio France en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ;

ordonner l'emploi des dépens en frais privilégiés du redressement judiciaire.

SUR CE, LA COUR

Sur la demande d'interdiction de commercialisation, par la société [...], des compléments alimentaires mis au point par la société Laboratoires DEA :

L'article 873 du code de procédure civile dispose en son premier alinéa que le président du tribunal de commerce peut, dans les limites de la compétence de ce tribunal, et même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

En l'espèce, la société Laboratoires DEA expose que la vente par la société [...] de compléments alimentaires identiques aux siens procède d'un trouble manifestement illicite, tel que prévu par l'article précité.

Cependant, il est constant que les compléments alimentaires de la société Laboratoires DEA ne sont protégés par aucun droit privatif, le fait que la commercialisation de ses produits soit précédé d'une déclaration auprès de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes étant indifférent à cet égard.

A supposer même que la société [...] aurait copié les produits de la société Laboratoires DEA, ce simple fait ne serait pas, en soi, de nature à caractériser un acte de concurrence déloyale constitutif d'un trouble manifestement illicite.

Au surplus, en demandant à ce que la société [...] se voie interdire de 'vendre tous compléments alimentaires identiques à ceux vendus par la société Laboratoires DEA', cette dernière, formule une demande trop imprécise pour que la mesure d'interdiction sollicitée puisse être proportionnée avec les droits de la société [...] peut se prévaloir. En effet, la société Laboratoires DEA n'indique dans ses écritures aucune liste des produits commercialisés par son adversaire et qui correspondraient à une copie de ceux qu'elle même propose à la vente. Comme le souligne la société [...], ni les conditionnements ni même les dénominations des produits litigieux ne sont indiqués. Ainsi, la mesure sollicitée, si elle était accordée, aboutirait à une interdiction imprécise quant aux produits auxquels elle s'appliquerait, de sorte qu'elle ne saurait être ordonnée en référé sans porter atteinte aux droits de la société [...].

Aussi convient-il, en infirmant l'ordonnance du juge des référés du tribunal de commerce de Paris prononcée le 20 juin 2014, de rejeter la demande d'interdiction formulée par la société Laboratoires DEA.

Sur la demande de la société [...] tendant à l'infirmation de l'ordonnance en ce qu'elle lui a enjoint de communiquer ses bons de commandes et factures :

L'arrêt de la chambre commerciale de la Cour de cassation du 27 septembre 2017 n'a cassé que partiellement l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 8 décembre 2015, seulement en ce qu'il a ordonné à la société [...], sous astreinte, de cesser la vente, par tous moyens et sur tous supports, notamment sur son site internet de tous compléments alimentaires identiques dans leur formule à ceux vendus par la société Laboratoires DEA. Elle n'a en revanche pas cassé cet arrêt en ce qu'il avait confirmé l'ordonnance ayant enjoint à la société [...] de lui communiquer, sous astreinte définitive de cinquante euros par jour de retard à compter de quinze jours de la signification de l'ordonnance et ce pendant six mois, la copie de l'intégralité des bons de commande et factures desdits produits.

En cas de cassation partielle et si certains chefs de la décision n'ont pas été attaqués, la cassation ne s'étend à ces chefs qu'en cas d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire, ainsi qu'il résulte de l'article 624 du code de procédure civile. Dès lors qu'il n'y a pas indivisibilité ou dépendance nécessaire, les chefs non cassés subsistent. Le juge de renvoi n'est alors pas saisi des chefs de dispositifs non cassés.

En l'espèce, les deux chefs de condamnation fixés par l'ordonnance de première instance n'entretiennent entre eux aucun lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire. En effet, la mesure d'interdiction de commercialiser des produits, ordonnée sur le fondement de l'article 873 alinéa 1er du code de procédure civile, et celle de communication de pièces, ordonnée sur celui de l'article 145 du même code, peuvent être exécutées séparément l'une de l'autre et sans que l'une d'elles ne soit dans la dépendance de l'autre.

Dès lors, la cassation opérée n'induit pas de réexaminer le chef de dispositif relatif à cette communication ordonnée.

En outre, la nouvelle situation des parties résultant de cette cassation ne constitue pas une circonstance nouvelle de nature à justifier que ce chef de dispositif soit modifié ou rapporté en référé. En effet, la société [...] ne rapporte aucun élément tendant à établir que le rejet de la demande d'interdiction de la commercialisation prive son adversaire de l'intérêt légitime, tel que retenu par le premier juge, de voir ordonner la communication des documents évoqués afin de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige.

Aussi convient-il de rejeter la demande que la société [...] formule de ce chef.

Sur la demande de restitution de la somme de 38.250 euros :

En application de l'article 873 du code de procédure civile, le président du tribunal de commerce peut, dans les limites de la compétence de ce tribunal, peut, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier.

En l'espèce, il est constant que la société Laboratoires DEA a demandé la liquidation de l'astreinte procédant de l'ordonnance du juge des référés du tribunal de commerce et que, par un arrêt du 12 mai 2016, la cour d'appel de Paris, pôle 4 chambre 8, a :

liquidé l'astreinte assortissant l'interdiction de vente des produits à la somme de 20.000 euros ;

liquidé l'astreinte assortissant l'injonction de communication des bons de commande et factures à la somme de 9.250 euros ;

condamné la société [...] au paiement d'une somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

En application du présent arrêt, seul est supprimé le chef de dispositif relatif à l'interdiction de la vente des produits ; demeure en conséquence celui relatif à l'injonction faite à la société [...] de communiquer à la société Laboratoires DEA, sous astreinte définitive de cinquante euros par jour de retard à compter de quinze jours de la signification de l'ordonnance et ce pendant six mois, la copie de l'intégralité des bons de commande et factures desdits produits.

En conséquence, la demande en paiement de la somme de 9.250 euros, relative à cette obligation, ainsi que celle de 6.000 euros, correspondant à la somme versée en application de l'article 700 du code de procédure civile, se heurte à une contestation sérieuse.

Au demeurant, sur la base de ces trois seuls chiffres, qui font un total de 35.250 euros, la société [...] demande une somme de 38.250 euros, sans aucunement expliquer la différence de 3.000 euros entre ces deux montants.

En revanche, celle en paiement de la somme de 20.000 euros, qui correspond à l'obligation faite à la société [...], sous astreinte, de cesser la vente, par tous moyens et sur tous supports, notamment sur son site internet de tous compléments alimentaires identiques dans leur formule à ceux vendus par la société Laboratoires DEA est justifiée sans contestation sérieuse, dès lors que cette obligation est supprimée par le présent arrêt.

Aussi convient-il d'accueillir la demande en paiement de la société [...] à hauteur de 20.000 euros.

Sur les mesures accessoires :

Les parties, qui succombent chacune partiellement en leurs prétentions, garderont à leur charge les dépens qu'elles ont respectivement exposés.

PAR CES MOTIFS

Confirme l'ordonnance, sauf en ce qu'elle a ordonné à la société [...], sous astreinte définitive de 1.000 euros par jour de retard à compter du lendemain de la signification de l'ordonnance à intervenir et par infraction constatée, de cesser la vente, par tous moyens sur tous supports, notamment sur le site internet http://www.2012bio.fr de tous compléments alimentaires identiques dans leur formule à ceux vendus par la SAS Laboratoires D.E.A. ;

Statuant à nouveau sur ce chef,

Déboute la société Laboratoires DEA de sa demande tendant à ce qu'il soit ordonné à la société [...] de cesser la vente de compléments alimentaires identiques à ceux vendus par elle ;

Condamne la société Laboratoires DEA à payer à la société [...] la somme de 20.000 euros à titre de provision ;

Rejette les demandes de chacune des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

Dit que les parties conserveront chacune la charge des dépens d'appel qu'elles ont respectivement exposés.

La greffière, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 17/18798
Date de la décision : 06/07/2018

Références :

Cour d'appel de Paris A8, arrêt n°17/18798 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-07-06;17.18798 ?
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