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01/02/2022 | FRANCE | N°18/041171

France | France, Cour d'appel de nîmes, 4p, 01 février 2022, 18/041171


ARRÊT No

No RG 18/04117 - No Portalis DBVH-V-B7C-HFCI

YRD/ID

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DEPARTAGE D'ORANGE
22 octobre 2018

RG :16/00124

[C]

C/

[R]
S.A.R.L. TEXTILE DU MIDI - TEXTIMI

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE
5ème chambre sociale PH

ARRÊT DU 01 FEVRIER 2022

APPELANTE :

Madame [Y] [B] [C]
[Adresse 3]
[Localité 4]

Représentée par Me Frédéric FRANC, avocat au barreau D'AVIGNON

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2019/1933 du 27/03/

2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Nîmes)

INTIMÉS :

Monsieur [V] [R] Es qualité de Liquidateur amiable de la société TEXTILE DU MIDI «TE...

ARRÊT No

No RG 18/04117 - No Portalis DBVH-V-B7C-HFCI

YRD/ID

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DEPARTAGE D'ORANGE
22 octobre 2018

RG :16/00124

[C]

C/

[R]
S.A.R.L. TEXTILE DU MIDI - TEXTIMI

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE
5ème chambre sociale PH

ARRÊT DU 01 FEVRIER 2022

APPELANTE :

Madame [Y] [B] [C]
[Adresse 3]
[Localité 4]

Représentée par Me Frédéric FRANC, avocat au barreau D'AVIGNON

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2019/1933 du 27/03/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Nîmes)

INTIMÉS :

Monsieur [V] [R] Es qualité de Liquidateur amiable de la société TEXTILE DU MIDI «TEXTIMI »
[Adresse 2]
[Localité 5]

Représenté par Me Olivier BAGLIO de la SCP BAGLIO-ROIG-ALLIAUME-BLANCO, avocat au barreau D'AVIGNON
Représenté par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOUE NIMES, Postulant, avocat au barreau de NIMES

SARL TEXTILE DU MIDI - TEXTIMI
[Adresse 2]
[Localité 5]

Représentée par Me Olivier BAGLIO de la SCP BAGLIO-ROIG-ALLIAUME-BLANCO, avocat au barreau D'AVIGNON
Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOUE NIMES, avocat au barreau de NIMES

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 17 Novembre 2021

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, a entendu les plaidoiries, en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président
Mme Joëlle TORMOS, Conseillère
Mme Marie-Lucie GODARD, Vice présidente placée

GREFFIER :

Madame Isabelle DELOR, Greffière, lors des débats et Mme BERGERAS, Greffier lors du prononcé de la décision

DÉBATS :

À l'audience publique du 01 Décembre 2021, où l'affaire a été mise en délibéré au 01 Février 2022
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 01 Février 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS

Mme [Y] [B] [C] a été engagée à compter du 05 mai 2009 en qualité de vendeuse suivant contrat à durée indéterminée par la SARL Textile du Midi ( ci-après Textimi), exploitant un magasin sous l'enseigne «Un brin de Provence « à [Localité 5], régie par la convention collective du commerce de détail et articles textiles.

Du mois d'octobre 2015 au 19 janvier 2016, son contrat de travail était suspendu à raison d'un arrêt maladie.

Le 19 avril 2016, Mme [Y] [B] [C] sollicitait par courrier de son employeur sa réintégration dans ses fonctions antérieures, une requalification aux fonctions de responsable de magasin et un rappel de salaire à ce titre sur les trois dernières années.

Le 12 mai 2016, le SARL Textimi refusait par courrier de faire droit à la demande de Mme [Y] de [G] [C] et lui rappelait que ses fonctions relevaient bien de la qualification de vendeuse catégorie 4 de la convention collective.

Le 31 mai 2016, insatisfaite de la réponse de son employeur, Mme [Y] [B] [C] saisissait le conseil de prud'hommes d'Orange aux mêmes fins.

Le 11 juillet 2016, la SARL Textimi convoquait Mme [Y] de [G] [C] à un entretien préalable en vue de son éventuel licenciement après lui avoir proposé le 24 juin 2016 un poste de reclassement.

Elle était licenciée par courrier du 04 août 2016 pour motif économique en raison de la fermeture de l'établissement principal décidée par l'assemblée des associés et consécutive aux pertes cumulées importantes et à la baisse persistante du chiffre d'affaires sur 2015 et le premier quadrimestre 2016.

Contestant la légitimité de la mesure prise à son encontre elle demandait au conseil de prud'hommes d'Orange de prononcer la requalification du licenciement pour motif économique en licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamner la SARL Textimi au paiement de diverses sommes à caractère indemnitaire.

Par jugement de départage du 22 octobre 2018, le conseil a :

Vu la tentative infructueuse de conciliation du 23 juin 2016,

Vu le procès-verbal de partage de voix du 15 février 2018,

- débouté Mme [Y] [B] [C] de l'intégralité de ses demandes,

- dit n'y avoir lieu à l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de la SARL Textimi,

- condamné Mme [Y] [B] [C] aux entiers dépens,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire du présent jugement.

Par acte du 19 novembre 2018, Mme [Y] [B] [C] a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions d'appelante en date du 15 février 2019, Mme [Y] [B] [C] demande à la Cour de :

Vu la convention collective applicable
Vu la lettre de licenciement pour motif économique
Vu l'article L 1232-6, L 1233-1, L 1233-3 du code du travail

- réformer le jugement du 22 octobre 2018 dans toutes ses dispositions,

- débouter la société Textimi, prise en la personne de son liquidateur amiable, de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

- dire et juger qu'elle occupe un poste de responsable de magasin, statut agent de maîtrise, catégorie b,

- fixer son salaire à la somme de 2 249 euros brut par mois,

- condamner M. [R] pris en sa qualité de liquidateur amiable de la société Textimi et la société Textimi prise en la personne de son liquidateur amiable au paiement de la somme de 22 644 euros au titre du rappel de salaire sur les 3 dernières années à compter de la saisine du conseil, outre la somme de 2264,40 euros au titre des congés payés,

- ordonner la délivrance des bulletins de salaire conformes et de l'attestation ASSEDIC sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir,

- condamner M. [R] pris en sa qualité de liquidateur amiable de la société Textimi et la société Textimi prise en la personne de son liquidateur amiable au paiement de la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice financier subi,

- dire et juger que le licenciement économique est abusif et sans fondement,

- condamner M. [R] pris en sa qualité de liquidateur amiable de la société Textimi et la société Textimi prise en la personne de son liquidateur amiable au paiement de la somme de 20 000 euros en réparation du préjudice subi,

- dire et juger que l'employeur n'a pas exécuté loyalement le contrat de travail et a commis des faits de harcèlement moral sur sa personne,

- condamner M. [R] pris en sa qualité de liquidateur amiable de la société Textimi et la société Textimi prise en la personne de son liquidateur amiable au paiement de la somme de 20 000 euros en réparation du préjudice subi,

- condamner M. [R] pris en sa qualité de liquidateur amiable de la société Textimi et la société Textimi prise en la personne de son liquidateur amiable au paiement de la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Elle soutient essentiellement que :
- au vu des différentes fonctions qu'elle occupait réellement au sein du magasin, son poste de vendeuse, catégorie 4 devrait être requalifié en responsable de magasin, statut agent de maîtrise, catégorie B, elle effectuait les ventes,
- Sur le licenciement elle relève que la liquidation amiable est intervenue plus de 6 mois après le licenciement, que la réalité des difficultés économiques de la société n'est pas démontrée.
Elle soutient également que le véritable motif serait lié à sa demande de rappel de salaire, que c'est à partir de ce moment là que son employeur aurait fait en sorte de ne pas réapprovisionner le magasin correctement dans le but de ne pas satisfaire la clientèle et à plus long terme de fermer le magasin, qui était en bonne santé financière. De plus, elle soutient que son employeur ne justifie pas et n'apporte pas la preuve que la santé financière de la société était fragile,
- les relations se sont dégradées entre elle et son employeur à partir de sa demande de rappel de salaire, le comportement de son employeur devrait être qualifié en ce sens d'exécution déloyale du contrat de travail, et ses agissements s'apparenteraient à des faits de harcèlement moral.

En l'état de ses dernières écritures d'intimé en date du 15 avril 2019, la SARL Textile du midi - Textimi ayant pour liquidateur M. [V] [R] demande à la Cour de :

Vu les pièces communiquées sous bordereau annexé aux présentes,

Statuant sur l'appel formé par Mme [Y] [B] [C], à l'encontre de la décision rendue le 22 octobre 2018 par le conseil de prud'hommes d'orange,

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [Y] [B] [C] de l'intégralité de ses demandes.

- dire et juger que Mme [Y] [B] [C] a justement été classée en qualité de vendeuse niveau 4.

- dire et juger le licenciement économique de Mme [Y] de [G] [C] légitime.

- débouter Mme [Y] [B] [C], de toutes ses demandes, fins et prétentions plus amples ou contraires.

- condamner Mme [Y] [B] [C], à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de 1ère instance et d'appel.

La SARL Textimi réplique de son côté que Mme [Y] [B] [C] a été justement classée vendeuse niveau 4, conformément à la convention collective du commerce de détail d'habillement et articles textiles, qui prévoit expressément l'hypothèse de vendeur isolé, travaillant seul au sein d'un magasin comme se fut le cas pour Mme [Y] de [G] [C]. Elle précise que Mme [Y] [B] [C] aurait toujours travaillé sous la responsabilité de son supérieur hiérarchique, Mme [R] et que les fonctions qu'elle occupait ne dépassaient pas celle de vendeuse niveau 4, ni au niveau des relations fournisseurs, ni de la banque, ni de la gestion du personnel stagiaire, ni de la gestion des marchandises. Elle indique également qu'elle n'aurait pas été au courant des cartes de visite effectuées par Mme [Y] de [G] [C] faisant état de la mention de responsable de magasin, ni de la page Facebook créée par Mme [Y] de [G] [C] en plus de la page officielle du magasin. S'agissant de la légitimité du licenciement pour motif économique, la SARL Textimi soutient qu'elle produirait des éléments chiffrés aux débats attestant de la réalité des difficultés financières qu'elle rencontrait, que ce serait sous les conseils de son expert-comptable qu'elle aurait décidé de cesser l'activité et que c'est en ce sens qu'elle aurait cherché à partir d'octobre 2015, un futur locataire pour les locaux. Elle précise aussi qu'elle aurait répondu à ses obligations légales en proposant à Mme [Y] de [G] [C] un poste de reclassement qu'elle aurait refusé. Enfin s'agissant de l'exécution déloyale du contrat, la SARL Textimi précise que Mme [Y] [B] [C] n'apporterait pas la preuve d'un comportement déloyal et que la résiliation du bail du logement qu'elle louait à la famille [R] est dû au relogement de la famille [R] qui serait dans son bon droit, enfin elle précise que Mme [Y] [B] [C] ne payait plus ses loyers à la famille [R] depuis septembre 2015 et que sa dette s'élevait à 9 00.00 euros.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.

Par ordonnance en date du 10 juin 2021, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 17 novembre 2021.

MOTIFS

Sur la classification de la salariée

Mme [C] occupait un emploi de vendeuse catégorie 4 ce qui, au regard de l'accord professionnel sur la classification des emplois du 12 octobre 2006, correspond aux activités suivantes :
« Filière vente/étalagisme
Vendeur(se) de 3 ans à 5 ans de pratique professionnelle ou vendeur(se) titulaire du bac professionnel vente :
– maîtrise les techniques de vente;
– assure l'implantation, l'animation et la mise en valeur des produits dans le rayon ou le magasin sur les indications de son supérieur hiérarchique.
Vendeur(se) isolé(e) :
– travaille seul(e) de façon permanente dans un magasin en liaison avec son supérieur hiérarchique ou le chef d'entreprise ;
– assure l'ouverture et la fermeture du magasin à l'égard de la clientèle
– assure le réapprovisionnement des rayons au fur et à mesure des ventes et signale à la direction les besoins de commande d'articles ;
– assure l'entretien du magasin »

La société intimée précise que Mme [C] relevait plus particulièrement la qualification de vendeur isolé.

Mme [C] revendique la classification d'agent de maîtrise catégorie B répondant aux conditions suivantes :
« Filière vente/achats
Responsable de magasin/responsable de rayon : en plus d'assurer de manière permanente la gestion courante du magasin ou du rayon, assure la bonne marche commerciale du rayon ou du magasin, suit l'état des stocks et procède au réapprovisionnement et à l'achat de nouveaux articles »

A l'appui de ses demandes, Mme [C] fait valoir qu'elle effectuait les tâches suivantes :
- Vente, étiquetage des articles, rangement
- Animation et mise en valeur des produits
- Ouverture et fermeture du magasin
- Réapprovisionnement des marchandises
- Gestion des stocks
- Choix des commandes de produits auprès des fournisseurs
- Gestion de la caisse
- Prise de monnaie à la banque, dépôt des chèques en banque
- Conception des vitrines
- Réception des marchandises
- Fixation des prix de vente des marchandises
- Gestion de la relation avec les fournisseurs
- Gestion des contrats avec les stagiaires.

Elle produit les éléments suivants :
- une carte de visite à son nom la présentant en qualité de « Responsable » dont elle soutient qu'elle aurait été élaborée et payée par l'employeur en produisant comme preuve sa pièce no 11 censée correspondre à une facture libellée au nom de «martin chapuis [Adresse 1]». Or rien ne permet d'affirmer que ces cartes ont bien été commandées par l'employeur en 2013, alors que ce dernier déclare avoir pris connaissance de leur existence qu'en 2015 intimant à la salariée de ne plus en faire usage et la remboursant pour qu'elle procède à leur destruction, alors qu'il résulte de cette pièce no 11 que ces cartes ont été commandées à une entreprise hollandaise d'impression de cartes de visite que tout un chacun peut se procurer avec une faute d'orthographe concernant l'adresse de livraison et l'absence de TVA intra-communautaire en sorte qu'il est plus qu'improbable que cette commande émane de l'employeur, la pièce no47 de l'appelante confirme qu'en 2011 elle avait fait confectionner ces mêmes cartes pour lui être livrées à son nom personnel à l'adresse du magasin, ces commandes indiquant au demeurant le numéro de téléphone personnel de Mme [C] et son adresse de messagerie électronique personnelle,
- des attestations de personnes qui ont effectué une brève période stage qui décrivent que Mme [C] «gérait entièrement le magasin» alors qu'elles ne pouvaient que constater que Mme [C] assurait seule la présence au sein du magasin en sa qualité de vendeuse isolée, les seules constatations qu'elles peuvent sérieusement restituer sont la mise en rayon, la réception de marchandises et toutes autres taches se rattachant à la fonction de vendeuse isolée ; concernant les remises de fonds en banque, la pièce no18 versée par l'intimée démontre que les versements d'espèces portaient la signature de M. [R], Mme [C] ne disposant d'aucune procuration à cet effet, au demeurant la société intimée constate que Mme [C] prétend qu'elle se rendait à la BNP alors la société n'avait plus de compte à la BNP depuis plusieurs années, celle-ci ayant ses comptes auprès de la SMC,
- des courriers qui lui étaient adressés concernant des factures et commandes passées auprès des fournisseurs, or Mme [C] de par ses fonctions était chargée du réassort des produits, l'accord de classification prévoyant effectivement que la vendeuse isolée assure le réapprovisionnement des rayons au fur et à mesure des ventes et signale à la direction les besoins de commande d'articles, la pièce no29 de la société intimée à savoir le document retraçant l'entretien du 19 janvier 2016 avant reprise après arrêt maladie, indiquant « Désormais aucune commande ne sera passée sans l'accord de [X] [R] », a pour objet de replacer Mme [C] dans le cadre de ses attributions.

Au contraire, l'employeur rapporte la preuve que le groupement d'employeurs OSIRIS facturait de façon régulière les interventions de Mme [R], en sa qualité de responsable du magasin, au profit de la Société TEXTIMI étant précisé que l'expert-comptable de la société atteste de leur véracité et de leur enregistrement en comptabilité.

La société intimée relève par ailleurs qu'à côté de la page Facebook officielle du magasin animée par M. [R], Mme [C] avait créé une page Facebook du même nom attachée à son profil personnel dans lequel elle publiait sans l'aval de la direction et avec de nombreuses fautes d'orthographe, page qu'elle a fermé depuis.
Elle ajoute que Mme [C] prétend également que la possession d'un diplôme de gestion depuis 1977, lui octroierait des compétences de responsable de magasin alors que les différentes personnes employées lors de ses absences (congés payés ou maladie) étaient des vendeuses sans expérience particulière qui ont donné totalement satisfaction dans l'exercice de la tenue du magasin en l'absence de Mme [C] ce que confirment les pièces no 21 et 22 de l'intimée.
Il convient tant pour les motifs qui précèdent que ceux non contraires des premiers juges de confirmer de ce chef le jugement déféré.

Sur le licenciement

En application de l'article L 1233-3 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige « Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié d'un élément essentiel du contrat de travail consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques ».

Mme [C] a été licenciée par courrier du 4 août 2016 pour le motif économique suivant :
«- La fermeture de l'établissement principal de la société décidée par l'assemblée générale des associés du 11/05/2016 consécutive aux pertes cumulées importantes et à la baisse persistante du chiffre d'affaires confirmée par le bilan 2015 et le chiffre d'affaires du 1er quadrimestre 2016.
Cette décision conduit à la suppression de votre poste de vendeuse.
Conformément à notre obligation légale, nous avons procédé à des recherches de reclassement au sein de notre groupe familial ; Un poste de vendeur magasinier livreur au sein du GE OSIRIS vous a été proposé en date du 27/06/2016, par courrier recommandé AR, distribué le 01/07/2016, proposition déclinée, car incompatible avec votre état de santé constaté le 05/07/2016 par la médecine du travail. Malheureusement, aucun autre poste disponible n'a pu être mis en évidence.
Lors de l'entretien préalable du 22/07/2016 nous avons souhaité vous remettre en mains propres une note d'information économique vous précisant les motifs économique de ce projet de suppression de poste. Sur conseil de votre conseiller du salarié qui vous assistait, vous avez refusé de recevoir ce document que nous vous avons adressé par LRAR le 25/07/2016.
Par ailleurs, nous nous sommes rapprochés de la DGFIP et de la CCI afin de solliciter une aide publique, cependant la situation économique et fiscale de notre société ne permet pas d'être éligible aux aides.
Lors de l'entretien précité, nous vous avons remis les documents relatifs au Contrat de Sécurisation Professionnelle ; vous disposez d'un délai de 21 jours pour éventuellement adhérer à ce dispositif.
Nous vous rappelons que l'absence de réponse au terme du délai de 21 jours équivaut à un refus du bénéfice du dispositif du Contrat de Sécurisation Professionnelle.
Dans l'hypothèse où vous accepteriez le Contrat de Sécurisation Professionnelle, votre contrat sera rompu d'un commun accord à l'issue du délai de réflexion de 21 jours.
Dans cette hypothèse, le présent courrier constituera le point de départ du préavis de deux mois.
Nous vous informons que vous bénéficiez d'une priorité de réembauchage pendant une durée d'un an a compter de la date de rupture de votre contrat de travail à condition que vous manifestiez le désir d'user de cette proposition.
Cette priorité concerne les emplois compatibles avec votre qualification actuelle ou celle que vous viendriez à acquérir sous réserve que vous nous ayez informé de celle-ci.
Par ailleurs, vous disposez d'un délai de douze mois à compter de la notification de la présente
pour contester la régularité ou la validité de ce licenciement.
Vous trouverez ci-joint, les documents relatifs à la portabilité des régimes de prévoyance et de complémentaire santé.
Nous vous adresserons par pli séparé vos certificats de travail, solde de tout compte et attestation POLE EMPLOI.»

Le licenciement de Mme [C] procède donc d'une suppression d'emploi consécutive à des difficultés économiques.

La fermeture de l'établissement n'est pas discutable les murs ayant été proposés à la location. La société a été volontairement liquidée. La suppression d'emploi ne peut être contestée. Le magasin a été immédiatement fermé, l'inventaire s'étant déroulé dès le 30 août 2016.
Les difficultés économiques ayant motivé cette fermeture résultent du bilan comptable 2015 ( résultat d'exploitation de - 4.648 euros pour un chiffre d'affaires passé de 126.386 en 2014 à 120.657 euros en 2015), les pertes cumulées s'élevait à 70.735 euros. L'expert comptable commentait ainsi le bilan : « les trois derniers mois (mars-avril-mai) d'activité de 2016 affichent une baisse du chiffre d'affaires de plus de 15 % par rapport à l'année précédente ( 27.271 euros contre 32.169 euros en 2015). Comme je vous l'ai plusieurs foi évoqué la fermeture de ce magasin semble inéluctable».

Mme [C] ne peut reprocher à son employeur d'avoir organisé la réduction de l'activité dès le mois d'avril 2016 alors que l'arrêt de toute activité avait été programmé dès octobre 2015 au vu de la baisse du chiffre d'affaires.

Au demeurant l'affirmation de la salariée selon laquelle «depuis [qu'elle] a réclamé un rappel de salaire par lettre du 19 avril 2016, l'employeur a pris la décision de fermer le magasin en
empêchant la réalisation d'un bon chiffre d'affaires» est totalement inopérante alors que la décision de l'employeur a été prise dès octobre 2015 soit bien avant ses revendications.

C'est à bon droit que le premier juge a décidé que le licenciement de Mme [C] reposait sur une cause réelle et sérieuse.

Sur l'exécution déloyale du contrat de travail et les faits de harcèlement

Au soutien de sa demande Mme [C] produit les éléments suivants :
- l'employeur a pris les mesures ne lui permettant pas de réaliser correctement son travail,
- elle a vu sa situation se dégrader, afin de se protéger, elle a dû, à chaque fois qu'elle constatait un fait anormal ou ne lui permettant pas de travailler, adresser un courrier électronique à son employeur,
- elle qui louait une maison appartenant au gérant de la société TEXTIMI s'est vu signifier un congé portant résiliation de son bail d'habitation pour reprise de la maison le jour de l'audience de la tentative de conciliation.

Ces éléments pris dans leur ensemble ne peuvent laisser supposer l'existence d'un harcèlement moral.

En effet, il a été constaté que la décision de fermer le magasin était justifiée par des considérations économiques avérées.
Mme [C] ne précise pas quels faits jugés anormaux nécessitaient l'envoi d'un courrier à son employeur sauf à considérer qu'il s'agit de son courrier de revendication d'une classification ne correspondant pas à la réalité de la situation.
Enfin, les relations des parties découlant d'un bail d'habitation sont étrangères au contrat de travail d'autant que Mme [C] ne payait plus ses loyers depuis le 1er septembre 2015, accusant une dette de plus de 9 000,00 euros comme l'établit le décompte de l'employeur en pièce no 25. Le couple [U] a bénéficié de recommandations élaborées par la commission de surendettement des particuliers.

Il convient tant pour les motifs qui précèdent que ceux non contraires des premiers juges de confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré.

L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en l'espèce.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Par arrêt contradictoire, rendu publiquement en dernier ressort

- Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré,

- Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamne Mme [C] aux dépens d'appel.

Arrêt signé par Monsieur ROUQUETTE-DUGARET, Président et par Madame BERGERAS, Greffière.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de nîmes
Formation : 4p
Numéro d'arrêt : 18/041171
Date de la décision : 01/02/2022
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.nimes;arret;2022-02-01;18.041171 ?
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