ARRET No PH
DU 14 NOVEMBRE 2007
R. G : 05 / 00695
Conseil de Prud'hommes de NANCY F04 / 609 08 février 2005
COUR D'APPEL DE NANCY CHAMBRE SOCIALE
APPELANT :
Maître Alain X...... CS 4205 54042 NANCY CEDEX Représenté par Me Eric FILLIATRE (avocat au barreau de NANCY)
INTIMES :
Monsieur Bruno Y...... ... 54000 NANCY comparant en personne Assisté de Me Jean-Guy GAUCHER (avocat au barreau de NANCY) substitué par Me DIEUDONNE (Avocat au barreau de NANCY)
CENTRE DE GESTION ET D'ETUDES AGS NANCY 101 avenue de la Libération Bâtiment B2-3ème étage 54000 NANCY Représenté par Me Eric FILLIATRE (avocat au barreau de NANCY)
COMPOSITION DE LA COUR :
Lors des débats et du délibéré, Président de Chambre : Monsieur CUNIN Conseillers : Madame MLYNARCZYK Monsieur FERRON, Greffier (Lors des débats) Madame BOURT,
DEBATS :
En audience publique du 10 Octobre 2007 ; L'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 14 Novembre 2007 ; A l'audience du 14 Novembre 2007, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :
FAITS et PROCEDURE.
Le 1er octobre 2002, Monsieur Bruno Y... a été embauché par la S. A. R. L. Juricom en qualité de V. R. P. dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée.
Il était chargé de vendre à domicile, dans l'est de la France, les ouvrages juridiques qui lui étaient confiés par son cocontractant.
Selon l'avenant du 2 janvier 2003, sa rémunération était fixée à un pourcentage sur le chiffre d'affaires réalisé.
Le 21 octobre 2003, la société Juricom a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire, procédure convertie en liquidation judiciaire le 10 février 2004, maître X... étant désigné en qualité de mandataire liquidateur.
Par lettre adressée à son employeur le 13 janvier 2004, Monsieur Y... a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux motifs que son salaire ne lui était plus versé depuis le mois de novembre 2003, et que la société Juricom n'était plus en mesure de lui fournir du travail.
Le 28 mai 2004, il a saisi le conseil des Prud'hommes de Nancy pour obtenir le paiement de rappels de salaire, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour non respect de la procédure, ainsi que d'indemnités de rupture.
Par jugement du 8 février 2005, le conseil de Prud'hommes, après avoir relevé que la rupture du contrat incombait à l'employeur, et que le demandeur pouvait prétendre au bénéfice de l'article 5 de l'accord national interprofessionnel du 3 octobre 1975 instituant au profit des V. R. P. exclusifs une garantie de ressources minimale forfaitaire, a fixé comme suit la créance de Monsieur Y... à la liquidation judiciaire de la société Juricom :
*890,19 € à titre de salaire pour la période du 1er au 13 janvier 2004 * 8. 757,40 € à titre de salaires des mois de novembre et décembre 2003, et de rappels de salaire des mois de février, mars, juillet, août, septembre, octobre, novembre et décembre 2003, * 3. 560,76 € à titre d'indemnité de préavis * 356 € à titre d'indemnité de congés payés sur préavis * 1. 223,68 € à titre d'indemnité de congés payés pour la période du mois de juin 2003 au mois de janvier 2004.
Il a débouté Monsieur Y... de ses autres demandes.
Maître X... a régulièrement interjeté appel de cette décision, faisant valoir que Monsieur Y... ne pouvait ni se prévaloir des dispositions de l'accord national interprofessionnel du 3 octobre 1975 instituant au profit des VRP exclusifs une ressource minimale forfaitaire, ni reprocher à son employeur de ne pas lui avoir assuré cette garantie de rémunération. Il a donc conclu à l'infirmation du jugement et à la condamnation de Monsieur Y... au remboursement de la somme de 12. 256,32 €, ainsi qu'au paiement de la somme de 1. 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Le C. G. E. A.-A. G. S. de Nancy, appelé dans la cause, s'est associé aux moyens développés par Maître X..., rappelant qu'en tout état de cause, il ne pouvait être tenu à garantie que dans les limites légales et réglementaires.
Monsieur Y... a répliqué qu'embauché à temps plein avec une zone géographique déterminée par un seul employeur, et affilié en tant que tel à la caisse de retraite IRRET, il était fondé à solliciter, en qualité de V. R. P. exclusif le bénéfice d'une ressource minimale forfaitaire.
Il a ajouté qu'il avait connu de graves difficultés financières à la suite de la rupture de son contrat, et formé appel incident pour demander à la Cour de :
-de confirmer le jugement ;-de fixer en outre sa créance à la liquidation judiciaire de la société Juricom aux sommes suivantes :
* 1. 780,38 € à titre de dommages-intérêts pour non respect de la procédure * 7. 121,52 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
-de déclarer la décision à intervenir opposable au C. G. E. A.-A. G. S. de Nancy.
MOTIFS DE LA DECISION.
Lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire d'une démission.
Dans la lettre de prise d'acte du 13 janvier 2004, M. Y... reprochait à son employeur d'une part de ne pas lui verser son salaire, d'autre part de ne plus lui fournir de travail.
S'agissant du premier grief, il fait valoir qu'il pouvait prétendre au bénéfice de l'accord national interprofessionnel instituant au profit des V. R. P. exclusifs une ressource minimale forfaitaire.
L'accord national interprofessionnel des voyageurs, représentants, placiers, du 3 octobre 1975, stipule en son article 5 que si la fixation de la rémunération relève du libre accord des représentants de commerce et de leurs employeurs, néanmoins, lorsqu'un représentant de commerce est engagé à titre exclusif par un seul employeur, il aura droit, au titre de chaque trimestre d'emploi à temps plein, à une ressource minimale forfaitaire qui, déduction faite des frais professionnels, ne pourra être inférieure à 520 fois le taux horaire du salaire minimum de croissance, le taux applicable étant celui en vigueur à la fin du dernier mois échu pris en compte à chaque paiement.
Par décision du Conseil d'Etat du 17 janvier 1986, ont été exclus du champ d'application de cet accord les V. R. P. des professions de la vente et du service à domicile.
L'accord national du 12 janvier 1982 a été arrêté en vue de l'application, dans les entreprises réalisant des ventes au sens de la loi du 22 décembre 1972, de la convention collective nationale interprofessionnelle du 3 octobre 1975 ; il règle les rapports entre les employeurs dont l'activité est définie à l'alinéa ci-après et leurs voyageurs, représentants, placiers.
Entrent dans le champ d'application de cet accord les entreprises adhérentes au syndicat national de la vente et du service à domicile réalisant des ventes au sens de la loi du 22 décembre 1972 par l'intermédiaire de voyageurs, représentants, placiers, sur le territoire français.
Alors qu'il résulte du contrat souscrit entre la société Juricom et M. Y... que celui-ci était chargé de faire de la vente à domicile, il n'est pas établi que la société Juricom ait adhéré au syndicat national de la vente et du service à domicile de sorte qu'à bon droit, maître X... soutient qu'elle n'était pas tenue de lui verser la rémunération minimale prévue par cet accord.
En conséquence, M. Y... qui ne prétend pas que le pourcentage auquel il avait droit sur le chiffre d'affaires par lui réalisé ne lui aurait pas été versé doit être considéré comme ne rapportant pas la preuve du premier grief contenu dans sa lettre de prise d'acte.
S'agissant du deuxième grief, M. Y... à qui il appartenait, selon le contrat versé aux débats, de prendre l'initiative de démarcher la clientèle au moyen de son propre véhicule, ne démontre pas qu'il en aurait été empêché par son employeur qui n'aurait pas mis à sa disposition les ouvrages qu'il était chargé de vendre.
Ainsi, les griefs adressés par M. Y... à son employeur n'étant pas établis, la prise d'acte dont il a pris l'initiative doit s'analyser en une démission.
Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a considéré que la rupture du contrat incombait à l'employeur, et dit que M. Y... pouvait prétendre à des indemnités de rupture ainsi qu'à la rémunération minimale prévue par la convention collective pour une somme totale de 14. 188,03 €.
Maître X... est donc fondé à agir en répétition de la somme de 12. 256,32 € qui a été versée à M. Y... le 8 mars 2005 en exécution du jugement infirmé.
M. Y... qui succombe sera condamné aux dépens.
Enfin, il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR statuant en audience publique et contradictoirement,
Infirme le jugement rendu le 8 février 2005 par le Conseil de prud'hommes de Nancy et, statuant à nouveau,
Déboute M. Y... de toutes ses prétentions,
Le condamne à payer à maître X..., en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Juricom, la somme de 12. 256,32 €,
Déclare la présente décision opposable au C. G. E. A.-A. G. S. de Nancy,
Déboute maître X..., en la même qualité, de sa demande fondée sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Ainsi prononcé à l'audience publique ou par la mise à disposition au Greffe du quatorze novembre deux mil sept par Monsieur CUNIN, Président,
Assisté de Madame BOURT, Greffier,
Et Monsieur le Président a signé le présent arrêt ainsi que le Greffier.