Grosse + copie
délivrée le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
1ère Chambre D
ARRET DU 06 JUIN 2019
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/03726 - N° Portalis DBVK-V-B7C-NX7X
Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 JUIN 2018
TRIBUNAL D'INSTANCE DE NARBONNE
N° RG11-17-781
APPELANTE :
Madame [T] [P]
[Adresse 3]
[Localité 2]
absente
Représentée par Me Bruno BLANQUER de la SCP BLANQUER//CROIZIER/CHARPY, avocat au barreau de NARBONNE
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2018/011471 du 10/10/2018 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de [Localité 5])
INTIMES :
Monsieur [M] [Y]
[Adresse 4]
[Adresse 2]
[Localité 1]
absent
Représenté par Me Aude DARDAILLON substituant Me Philippe SENMARTIN de la SELARL CHABANNES, SENMARTIN ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER
Société ADVANZIA BANK
[Adresse 5]
[Localité 4]
non représentée
CAF DE L'AUDE
[Adresse 1]
[Localité 3]
non représentée
Les parties ont été régulièrement convoquées conformément à l'article 937 du code de procédure civile modifié par décret 2015-282 du 11/05/2015
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 945-1 du Code de Procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 MARS 2019, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, Mme Nelly SARRET, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Daniel MULLER, Président de Chambre
Madame Myriam GREGORI, Conseiller
Mme Nelly SARRET, Conseiller
Greffier, lors des débats : Mme Ginette DESPLANQUE
L'affaire, mise en délibéré au 09/05/19, a été prorogée au 16/05/19 au 23 mai 2019 puis au 6 juin 2019.
ARRET :
- Réputé contradictoire.
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour ;
- signé par Monsieur Daniel MULLER, Président de Chambre, et par Mme Ginette DESPLANQUE, Greffier présent lors du prononcé.
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Le 8 août 2017, la Commission de Surendettement des Particuliers de l'Aude a dit [M] [Y] recevable au bénéfice d'une procédure de surendettement.
Le 24 octobre 2017, la Commission a imposé le rééchelonnement de tout ou partie des dettes sur une durée de 84 mois au taux de 0% en retenant trois paliers, le premier d'une durée de 17 mois sans aucun remboursement, le deuxième d'une durée de 12 mois avec une mensualité de remboursement de 222, 55 € au profit d'ADVANZIA BANK jusqu'à extinction de cette dette et de 16, 23 € au profit de Madame [T] [P] et le troisième d'une durée de 55 mois avec une mensualité de remboursement de 238, 78 € au profit de Madame [T] [P] et effacement du solde de sa créance à l'issue du plan.
A la suite de la contestation formée par Madame [T] [P] , créancière, à l'encontre des mesures recommandées, le Tribunal d'Instance de Narbonne par jugement du 18 juin 2018 a déclaré recevable son recours et a confirmé les mesures recommandées et imposées par la commission.
Ce jugement a été notifé à Madame [T] [P] le 11 juillet 2018.
Par lettre recommandée du 16 juillet 2018 reçue au greffe de la cour le 17 juillet suivant, Madame [T] [P] a interjeté appel de cette décision.
A l'audience du 12 mars 2019, l'appelante représentée par son conseil, développant oralement ses conclusions signifiées par la voie électronique le 29 janvier 2019, demande à la Cour de :
- réformer le jugement entrepris
- annuler les mesures recommandées par la Commission de surendettement au profit de M. [Y]
- condamner M. [Y] à lui payer la somme de 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel.
Elle fait valoir que la commission de surendettement a retenu un premier palier d'une durée de 17 mois sans aucun remboursement au profit des créanciers alors qu'a été dégagée une capacité de remboursement mensuelle de 243, 65 € qui rend injustifié ce premier palier, le débiteur étant en mesure de débuter le remboursement de ses dettes immédiatement.
Elle ajoute que la Commission de surendettement a donné priorité pour le réglement des créances à ADVANZIA BANK, priorité qu'elle conteste, compte tenu de la part infime de remboursement qu'elle doit percevoir au cours du deuxième palier, cette inégalité introduite entre les créanciers étant contraire aux dispositions légales relative au surendettement des particuliers qui n'institue aucune priorité au prêteur de deniers dans le cadre d'un crédit à la consommation.
Elle conteste également l'effacement du solde de sa créance en fin de plan, effacement non justifié au regard de la capacité de remboursement du débiteur.
Elle fait valoir enfin sa situation d'indigence au regard de ses ressources d'un montant de 907, 28 € et de ses charges qui s'élèvent à 857, 09 € ne lui permettant pas de faire face à ses besoins courants et alors qu'un incendie a ravagé le premier étage de sa maison d'habitation, nécessitant des dépenses exceptionnelles au titre de travaux de réparation qu'elle doit financer au moyen d'un prêt. Elle considère que les mesures élaborées par la commission la place dans une situation d'endettement.
Monsieur [M] [Y], comparant en personne, assisté de son avocat, développant oralement des conclusions notifiées par la voie électronique le 7 mars 2019, demande à la Cour de :
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris
- débouter Madame [P] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Il expose que le tribunal d'instance de Narbonne a retenu que Madame [P] n'apportant pas la preuve que les mesures recommandées par la commission étaient inadaptées, le plan élaboré devait s'appliquer, que le premier palier de 17 mois sans remboursement est déterminant pour la bonne exécution des deuxième et troisième palier et que les dispositions de l'article L. 733-1-4° du code de la consommation permettent la suspension de l'exigibilité des créances autres qu'alimentaires sans subordonner l'exercice de cette mesure à une absence de capacité de remboursement immédiate du débiteur.
Il indique que si les dispositions légales relatives au surendettement des particuliers n'introduisent aucune priorité du prêteur de deniers dans le cadre d'un crédit à la consommation, la procédure instituée dans l'intérêt du débiteur et non pour garantir le désintéressement de tous les créanciers n'impose pas non plus une égalité de traitement entre créanciers et ce , même s'il ne conteste pas la situation d'indigence de Madame [P], telle que celle-ci l'a exposée.
Les autres intimés convoqués par lettre recommandée dont ils ont accusé réception n'ont pas comparu.
Il sera statué par arrêt réputé contradictoire.
MOTIFS DE L'ARRÊT
Il ressort du plan établi par la commission de surendettement que celle-ci a reporté le paiement des créances pour une durée de 17 mois dans le cadre d'un premier palier, alors que M. [Y] dispose d'une capacité mensuelle de remboursement retenue à hauteur de 243, 65 €.
Si la décision de la commission n'explicite pas les motifs de ce premier palier retenu sans aucun remboursement, il ressort du tableau des mesures recommandées que M. [Y] est redevable d'une dette de 3990, 24 € auprès de la CAF d el'Aude, dette exclue du plan de surendettement en raison de sa nature (indûs de RSA et d'APL) en application de l'article L 711-4- du code de la consommation. Il convient de relever que la durée de 17 mois de report d'exigibilité des créances d'ADVANZIA BANK et de Madame [P] correspond très exactement à la capacité de remboursement que M. [Y] est susceptible de dégager pendant cette période pour solder la dette contractée à l'égard de la CAF , soit 16 versements de 243, 65 € et le 17ème versement correspondant au solde de la créance.
Dés lors, il est aisé de comprendre que ce premier palier sans aucun remboursement en faveur des créanciers inclus dans le plan est motivé par la nécessité pour M. [Y] de procéder au remboursement préalable de la créance CAF.
Il convient donc de considérer que ce premier palier sans remboursement est parfaitement justifié.
Par ailleurs, s'il est exact que la commission dans le cadre du deuxième palier de son plan a privilégié le remboursement de la créance d'ADVANZIA BANK au titre d'un prêt à la consommation en fixant une mensualité de remboursement de 222, 55 € pendant 12 mois jusqu'à extinction de cette créance, soit un montant supérieur à la mensualité fixée pour le remboursement de la créance de Madame [P] à hauteur de 16, 23 €, il convient de rappeler que les textes applicables au surendettement ne prévoient aucun principe d'égalité ou de priorité des créanciers (à l'exception des créances locatives) dans la mise en oeuvre du plan et que la commission ou le juge peut donc procéder à un traitement différencié des dettes. Ce traitement doit cependant toujours s'effectuer en fonction de l'intérêt du débiteur en tenant compte de l'attitude du créancier et des caractéristiques de chaque dette.
En l'espèce, la créance de Madame [P] est fondée sur un prêt en vertu d'une reconnaissance de dette , la défaillance de M. [Y] dans le règlement de cette dette ayant donné lieu à un jugement définitif du Tribunal de Grande Instance de Narbonne du 23 octobre 2003. Cette créance a été arrêtée par la commission à un montant de 15 091 € .
La créance d'ADVANZIA BANK dont il n'est pas contesté qu'elle se rapporte à un crédit à la consommation a été arrêtée à un montant de 2670, 65 €.
Il est légitime que la Commission ait entendu faire porter la majorité de la capacité de remboursement de M. [Y] au règlement de la créance d'ADVANZIA BANK d'un montant moindre que celle de Madame [P] pour consacrer dans le cadre du troisième palier la totalité de cette capacité au remboursement de la créance de Madame [P].
Madame [P] n'établit pas, en outre, que sa situation doit être traitée en priorité à celle d'ADVANZIA BANK alors qu'elle ne produit que des pièces parcellaires relatives à sa situation de revenus et à sa situation patrimoniale et en l'absence de production de son avis d'imposition. Il convient de relever, en outre, que le règlement total de la créance d'ADVANZIA BANK permettra à Madame [P] de bénéficier dans un délai très raisonnable de la totalité de la capacité de remboursement de M. [Y].
Enfin, il ne peut davantage être fait reproche à la commission d'avoir recommandé l'effacement partiel de la créance de Madame [P] à l'issue du plan, lequel ne peut excéder la durée maximale de rééchelonnement de 84 mois prévue par l'article L. 733-1 du code de la consommation, cet effacement partiel à hauteur de 1763, 34 € étant, par voie de conséquence, la seule solution aux fins de rémédier à la situation de surendettement du débiteur.
Il convient donc de considérer que les mesures recommandées et imposées par la commission appréhendent l'ensemble de la situation de M. [Y], laquelle necessite qu'il soit procédé dans son intérêt au traitement de son état de surendettement selon les mesures qu'elle a déterminées.
Il convient donc de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions.
Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de Madame [P] les sommes non comprises dans les dépens. Sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile sera rejetée.
Madame [P], qui succombe en son appel supportera les dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
DIT l'appel recevable,
CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions,
LAISSE à la charge de l'appelante les éventuels dépens d'appel.
LE GREFFIERLE PRESIDENT
NS