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29/01/2019 | FRANCE | N°16/03055

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 1ère chambre c, 29 janvier 2019, 16/03055


Grosse + copie

délivrées le

à







COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



1ère Chambre C



ARRET DU 29 JANVIER 2019



Numéro d'inscription: N° RG 16/03055 - N° Portalis DBVK-V-B7A-MTA3







Décisions déférées à la Cour :



Arrêt , origine Cour de Cassation de PARIS, décision attaquée en date du 31 Mars 2016, enregistrée sous le n° 408-F-D

Arrêt Au fond, origine Cour d'Appel de NIMES, décision attaquée en date du 02 Octobre 2014, enregistrée sous le n° 13/05

254

Jugement Au fond, origine Tribunal d'Instance de NIMES, décision attaquée en date du 01 Octobre 2013, enregistrée sous le n° 11-13-249



DEMANDERESSE A LA SAISINE:



Madame [P]...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

1ère Chambre C

ARRET DU 29 JANVIER 2019

Numéro d'inscription: N° RG 16/03055 - N° Portalis DBVK-V-B7A-MTA3

Décisions déférées à la Cour :

Arrêt , origine Cour de Cassation de PARIS, décision attaquée en date du 31 Mars 2016, enregistrée sous le n° 408-F-D

Arrêt Au fond, origine Cour d'Appel de NIMES, décision attaquée en date du 02 Octobre 2014, enregistrée sous le n° 13/05254

Jugement Au fond, origine Tribunal d'Instance de NIMES, décision attaquée en date du 01 Octobre 2013, enregistrée sous le n° 11-13-249

DEMANDERESSE A LA SAISINE:

Madame [P] [R]

née le [Date naissance 1] 1949 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Marie Camille PEPRATX NEGRE de la SCP Eric NEGRE, Marie-Camille PEPRATX NEGREE, avocat au barreau de MONTPELLIER

Assistée de Me FERHMIN, avocat au barreau de Montpellier, loco Me ESCALE, avocat plaidant

DEFENDERESSE A LA SAISINE

SCI LES ROSES

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Pascal ADDE de la SCP GRAPPIN - ADDE - SOUBRA, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

Assisté de Me Vanessa MENDEZ, avocat au barreau de Montpellier, loco Me Pascal ADDE, avocat plaidant

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 28 NOVEMBRE 2018

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 19 DECEMBRE 2018, en audience publique, Madame Leila REMILI ayant fait le rapport

prescrit par l'article 785 du Code de procédure civile, devant la cour composée de :

Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre

Madame Nathalie AZOUARD, Conseiller

Madame Leïla REMILI, Vice-présidente placée

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Sylvia TORRES

ARRET :

- Contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre, et par Madame Sylvia TORRES, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Soutenant qu'elle avait consenti à Madame [P] [R] un bail verbal depuis le 15 janvier 1999 portant sur un logement situé à [Adresse 1] et que le commandement de payer la somme de 91 880,50 € d'arriérés de loyers et charges délivré le 20 septembre 2012 était resté infructueux, la SCI LES ROSES a fait assigner Madame [P] [R] afin de voir prononcer la résiliation du bail, son expulsion et sa condamnation au paiement des sommes dues.

Madame [P] [R] faisait valoir quant à elle que son mari était décédé le [Date décès 1] 2012, qu'il avait toujours dit qu'il connaissait bien le dirigeant de la SCI LES ROSES et que le logement avait été prêté à titre gratuit.

Par jugement du 1er octobre 2013, le tribunal d'instance de Nîmes a :

dit que la SCI LES ROSES ne justifie pas de l'existence d'un bail verbal liant les parties,

dit que l'occupation des lieux litigieux est effectuée dans le cadre d'un prêt gratuit,

condamné Madame [P] [R] à restituer à la SCI LES ROSES l'immeuble qu'elle occupe situé [Adresse 1],

à défaut de restitution de l'immeuble, ordonné l'expulsion de Madame [P] [R] et de tous occupants de son chef,

débouté les parties de toutes demandes contraires ou plus amples,

laissé à chaque partie la charge des dépens qu'elle a exposés.

Dit que copie du présent jugement sera adressée par le greffe pour information au service des expulsions de la préfecture du Gard.

Le tribunal d'instance de Nîmes estime qu'aucun bail écrit n'a été signé entre les parties, que les relevés de compte de la SCI pour la période de 1999 jusqu'en 2001 font apparaître des versements mensuels de 15 000 FF (2286,74 €) qui ne permettent pas de déterminer leur cause et l'origine des fonds. Nul ne pouvant se constituer de preuve à soi-même, le fait que la SCI, son gérant et ses associés aient déclaré percevoir des loyers dans leur déclaration fiscale et les documents comptables de la SCI ne suffit pas à rapporter la preuve de l'existence du bail invoqué. Par ailleurs, la simple occupation des lieux ne suffit pas à rapporter la preuve de l'existence et de l'exécution d'un bail verbal. En revanche, pour le tribunal, il ressort des éléments du dossier que les époux [R] ont bénéficié d'un prêt à usage à titre gratuit en application des articles 1875 et suivants du code civil et dans la mesure où aucun terme n'a été convenu ou n'est prévisible, le prêteur est en droit d'y mettre fin à tout moment en respectant un délai de préavis raisonnable ; ce qui est le cas en l'espèce.

Madame [P] [R] a relevé appel du jugement par déclaration au greffe de la cour d'appel de Nîmes le 21 novembre 2013, invoquant un prêt à titre gratuit et soutenant que le prêteur ne justifiait pas d'une limitation de la durée du prêt et notamment d'un besoin pressant de reprendre le bien.

Par arrêt du 2 octobre 2014, la cour d'appel de Nîmes a :

infirmé le jugement du 1er octobre 2013 en ce qu'il a rejeté la demande tendant à constater l'existence d'un bail verbal liant les parties et à sanctionner le manquement du locataire dans le respect de ses obligations,

et statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

dit que la SCI LES ROSES a consenti à Monsieur [Z] [R] et à son épouse Madame [P] [R] un bail d'habitation sur un immeuble situé [Adresse 1] à compter du mois d'août 1999, moyennant le versement d'un loyer de 2286, 74 € par mois,

prononcé la résiliation du bail pour défaut de paiement des loyers,

ordonné qu'il soit procédé à l'expulsion de Madame [P] [R] et de tout occupant de son chef, dans les formes légales avec l'assistance de la force publique si nécessaire et autorise la SCI LES ROSES à faire séquestrer le mobilier s'y trouvant aux frais du locataire,

condamné Madame [P] [R] à payer à la SCI LES ROSES la somme de 142 189,08 € portant intérêt au taux légal à compter du 20 septembre 2012 sur la somme de 91 469, 60 € et à compter du présent arrêt sur le solde dû,

condamné Madame [P] [R] à payer à la SCI LES ROSES une indemnité d'occupation équivalente au montant du loyer de 2286 74 € par mois à compter de la résiliation du bail jusqu'à libération des lieux,

ordonné la transmission par le greffe de la présente décision au représentant de l'État dans le département,

débouté les parties de toutes autres demandes

laissé à chaque partie la charge de ses propres dépens de première instance et d'appel.

Pour accueillir la demande de résiliation du bail et l'expulsion, la cour d'appel retient que la SCI produit des déclarations fiscales mentionnant la perception de loyers ainsi que les déclarations des revenus fonciers de ses associés, que les sommes déclarées comme loyer figuraient également au crédit du compte bancaire de la SCI, qu'il existe une corrélation entre les opérations inscrites au livre journal et le commandement de payer visant des sommes qui ne se retrouvent pas sur ce document comptable ni sur les déclarations fiscales. Le cour en conclut que l'ensemble de ces éléments apporte la démonstration suffisante d'une occupation continue des lieux qui ne relève pas d'une simple tolérance du propriétaire mais se trouve assortie dès son origine d'une contrepartie onéreuse qui peut être qualifiée de loyer, la preuve étant ainsi établie de l'existence d'un bail.

Par arrêt du 31 mars 2016, la Cour de cassation, a cassé et annulé l'arrêt rendu le 2 octobre 2014 par la cour d'appel de Nîmes et remis, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant l'arrêt et a renvoyé devant la cour d'appel de Montpellier.

La Cour de cassation considère qu'en statuant comme elle l'a fait, sans réfuter les motifs du jugement dont Madame [R] demandait la confirmation, selon lesquels la cause et l'origine des versements invoqués par la SCI n'étaient pas déterminées, la cour n'a pas donné de base légale à sa décision.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 28 novembre 2018.

L'affaire a été fixée pour les débats devant la cour d'appel de Montpellier à l'audience collégiale du 19 décembre 2018.

Les dernières écritures prises par Madame [P] [R] ont été déposées le 27 novembre 2018.

Les dernières écritures prises par la SCI LES ROSES ont été déposées le 20 novembre 2018.

Le dispositif des écritures de Madame [P] [R] énonce :

Vu les articles 1134, 1315, 1583, 1741, 1876 du code civil,

vu la loi n° 89'462 du 6 juillet 89,

vu l'arrêt de la Cour de cassation du 31 mars 2016,

vu l'action de in rem verso,

vu le commandement de payer les loyers,

vu les pièces versées aux débats,

vu l'article 145 du code de procédure civile,

infirmer le jugement dont appel, en ce qu'il a condamné Madame [P] [R] à restituer à la SCI LES ROSES l'immeuble qu'elle occupe situé [Adresse 1] disant qu'à défaut de restitution de l'immeuble, elle sera expulsée ainsi que tous occupants de son chef,

statuant à nouveau,

à titre principal :

constater l'accord des parties sur la chose et le prix de vente du bien litigieux sur la somme de 279 848,54 €,

constater que cette somme a été intégralement réglée à la SCI LES ROSES,

en conséquence,

ordonner à la SCI LES ROSES de régulariser devant tel notaire qu'il plaira à la cour de désigner, l'acte définitif de vente sous astreinte de 1000 € par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt intervenir,

si par impossible, la cour estimait qu'il n'y avait aucun accord sur la chose et le prix,

à titre subsidiaire : dire et juger que le paiement de la somme de 279 848, 54 € est constitutif d'un enrichissement sans cause,

condamner la SCI LES ROSES à rembourser à Madame [P] [R] la somme de 279 848, 54 € avec intérêt au taux légal à compter du 1er octobre 2013, date du jugement dont appel,

faire application des dispositions de l'ancien article 1154 du code civil (devenu 1343'2),

à titre infiniment subsidiaire :

si par impossible, la cour estimait qu'un bail verbal existait :

ordonner la désignation d'un expert avec notamment pour mission de déterminer la valeur locative du bien, indiquer s'il existe des désordres et si l'immeuble loué remplit les conditions d'un habitat décent, chiffrer le coût de la remise en état, chiffrer le trouble de jouissance subi par les locataires,

constater, que faute d'expertise, le montant du loyer est fixé à 400 € par mois,

ordonner à la SCI LES ROSES le remboursement des sommes indûment perçues,

constater l'absence de délai de préavis initié par la SCI LES ROSES,

dire et juger qu'à défaut du délai de préavis, Madame [P] [R] sera autorisée à rester dans les lieux,

débouter la SCI LES ROSES de sa demande de voir constater la résiliation du bail verbal,

si la cour estimait que le défaut de préavis ne faisait pas obstacle à la demande d'expulsion de la SCI LES ROSES,

octroyer à Madame [P] [R] un délai de 12 mois pour quitter les lieux,

débouter la SCI LES ROSES de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions,

confirmer le jugement dont appel pour le surplus :

en ce qu'il a jugé que la SCI LES ROSES ne justifiait pas de l'existence d'un bail verbal liant les parties,

en ce qu'il a dit que l'occupation des lieux litigieux a été effectuée dans le cadre d'un prêt gratuit

Dans ses écritures, auxquelles la cour invite les parties à se référer pour un exposé complet, Madame [P] [R] explique qu'en 1983, son mari avait acquis la maison dont il s'agit mais que suite à un revers de fortune, la maison a fait l'objet d'une vente judiciaire le 14 janvier 1999. Elle ajoute que son mari et Monsieur [W] [I], futur gérant de la SCI LES ROSES, qui étaient amis, ont alors convenu que la SCI se porterait acquéreur, laisserait le couple occuper les lieux à titre gratuit, la maison étant rachetée à tempérament par Monsieur [R] moyennant un paiement mensuel de 15 000 Frs et le transfert de propriété étant réalisé au terme du paiement complet. Madame [P] [R] prétend que cette somme a été versée jusqu'en 2012 comme en attestent les reçus de versements d'espèces établis par le CREDIT DU NORD, banque de la SCI. Elle indique cependant que dès le décès de son époux, elle a reçu un commandement de payer un arriéré de loyers.

L'appelante fait valoir qu'elle est parfaitement en droit, en application de l'article 563 du code de procédure civile, de faire valoir des moyens nouveaux et que les demandes formulées ne sont pas nouvelles au sens de l'article 565 du code de procédure civile, dans la mesure où elles tendent aux mêmes fins : faire constater qu'il n'y a pas de bail et que les sommes versées ne peuvent être qualifiées de loyer. En tout état de cause, les demandes formulées sont accessoires aux demandes initiales, comme l'est également la demande reconventionnelle de paiement de la somme de

279 848,54 € versée depuis 1999.

Madame [P] [R] fait valoir principalement que l'existence d'un bail verbal n'est pas démontrée, que la SCI LES ROSES ne s'est jamais comportée comme un véritable propriétaire, le logement étant insalubre et les loyers n'étant pas réclamés depuis plus de trois ans, puisque la SCI prétend que la somme mensuelle de 2286,74 € n'était plus versée depuis novembre 2008. L'appelante prétend ainsi que les sommes versées ne sont pas constitutives de loyers, faisant remarquer que la somme mensuelle représente cinq fois la valeur locative (400 €) mais qu'elles sont constitutives d'un paiement à tempérament du prix d'achat. Madame [P] [R] ajoute que la maison a fait l'objet d'un prêt à titre gratuit dans l'attente du paiement complet du prix de rachat.

L'appelante fait valoir ensuite, qu'à défaut de régularisation d'une vente, les sommes versées entre janvier 1999 et février 2011 doivent être restituées, puisqu'elle n'ont pas de cause, la preuve d'un bail n'étant pas rapportée.

Madame [P] [R] indique enfin que la SCI n'a pas adressé de mise en demeure préalable et respecté un délai de préavis raisonnable pour mettre fin au contrat, ce délai de préavis ne pouvant correspondre à la durée de la procédure comme admis par le premier juge.

Le dispositif des écritures de la SCI LES ROSES énonce :

VU les articles 564, 633 du Code de procédure civile et le décret 55-22 du 4 janvier1955

DECLARER IRRECEVABLES les prétentions et demandes nouvelles formulées par Madame [R]

REJETER L'APPEL PRINCIPAL comme injuste et non fondé

DECLARANT RECEVABLE ET BIEN FONDE L'APPEL INCIDENT

Y faisant droit

Vu les articles 1134, 1714 et suivants et 1741 du Code civil

Vu la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 ;

Vu les pièces versées aux débats ;

REFORMER le jugement déféré et statuant à nouveau

DIRE ET JUGER que la SCI LES ROSES justifie de l'existence d'un bail verbal liant les parties

PRONONCER la résiliation du bail verbal consentie entre la SCI LES ROSES et Madame [R] pour défaut de paiement des loyers et charges et ce, à compter de la décision à intervenir

CONDAMNER Madame [R] au paiement des loyers impayés à hauteur de 130 755.38 €, décompte arrêté au 31 mars 2014, à majorer des loyers à échoir jusqu'à la décision à intervenir, et des intérêts au taux légal à compter du 20 septembre 2012 date du commandement de payer ;

DIRE qu'à compter de la décision à intervenir prononçant la résiliation du bail, Madame [R] sera redevable d'une indemnité d'occupation mensuelle de 2 286,74 € ;

CONDAMNER Madame [R] à régler à la SCI LES ROSES la somme de 30.000 € à titre de dommages et intérêts ;

ORDONNER l'expulsion de Madame [R] et tout occupant de leur chef du logement ;

DIRE que faute par elle de le faire, la SCI LES ROSES pourra faire procéder à l'expulsion tant de toutes personnes que de tous biens se trouvant dans les lieux de leur chef, en la forme ordinaire, en faisant s'il y a lieu procéder à l'ouverture des portes, éventuellement avec l'assistance de la Force Publique ;

AUTORISER la SCI LES ROSES à faire transporter les meubles et objets mobiliers garnissant les lieux, dans tout garde meuble de son choix, aux frais et risques et périls de Madame [R] ;

CONDAMNER Madame [R] à régler à la SCI LES ROSES la somme de 6.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNER Madame [R] aux entiers frais et dépens de l'instance et de ses suites, en ce compris les frais déjà exposés et notamment coût du commandement de payer et de l'assignation, conformément à l'article 639 du code de procédure civile;

DIRE que la copie de l'arrêt sera adressée par le greffe pour information au service des expulsions de la préfecture du Gard.

Dans ses écritures, auxquelles la cour invite les parties à se référer pour un exposé complet, la SCI LES ROSES fait valoir que pour la première fois, quatre ans après l'assignation introductive d'instance, Madame [P] [R] soutient que les sommes payées ne sont pas constitutives d'un loyer mais d'un paiement à tempérament du prix d'achat en l'état d'un accord des parties. L'intimée, outre qu'elle nie fermement l'existence d'un tel accord au demeurant non démontré, fait valoir que les demandes sont nouvelles et donc irrecevables en application de l'article 564 du code de procédure civile.

La SCI LES ROSES indique que l'appelante ne démontre pas, par ailleurs, l'existence d'un prêt à usage gratuit alors qu'il y a bien eu une contrepartie, des versements réguliers de 1999 à novembre 2008. Elle ajoute que la pièce adverse n° 2, document manuscrit provenant de Monsieur [E] [R], établit que les paiements étaient des loyers. Elle indique produire toutes les pièces permettant de démontrer que l'occupation des lieux s'est faite en vertu d'un bail verbal (relevés de compte mais aussi livre-journal, déclarations fiscales de la SCI au titre de revenus fonciers).

L'intimée conteste la valeur locative prétendue de 400 € par mois et fait valoir que l'état du logement résulte du défaut d'entretien.

S'agissant de l'action de in rem verso, elle fait valoir qu'elle est prescrite et qu'à défaut, elle se heurte au principe de la concentration des moyens ; elle est sinon infondée, dans la mesure où le paiement n'est pas sans cause puisqu'il s'agit de loyers.

L'intimée indique enfin qu'une expertise est en l'espèce sans objet et constitue une man'uvre dilatoire, la résiliation et l'expulsion devant être prononcées, alors qu'aucun paiement n'est intervenu depuis le commandement de payer de décembre 2012.

MOTIFS

Sur la recevabilité des demandes nouvelles

Aux termes de l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

L'article 565 du même code disposant que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent.

Enfin, aux termes de l'article 567 du code de procédure civile, les demandes reconventionnelles sont également recevables en appel.

Madame [P] [R] soutient pour la première fois devant la cour d'appel de Montpellier l'existence d'une vente à tempérament de la maison d'habitation, prétendant jusqu'alors bénéficier d'un prêt à usage à titre gratuit. Or, cette demande qui tend à se voir reconnaître la qualité de propriétaire est une demande nouvelle.

Il convient donc de la déclarer irrecevable.

Par ailleurs, l'action en répétition de l'indu, demande reconventionnelle, n'est ni la conséquence, ni le complément, ni l'accessoire de la demande principale en résiliation du bail et en expulsion.

Elle sera donc déclarée également irrecevable.

Sur le fond

- Sur la qualification du contrat liant les parties

En application de l'article 1715 du code civil, le versement de mensualités régulières par l'occupant d'un logement à un propriétaire est insuffisant pour établir l'existence d'un bail verbal.

Au demeurant, le versement désormais reconnu par Madame [P] [R] de la somme de 2286,74 € concerne la période de janvier 1999 à décembre 2000 puis de janvier 2002 à novembre 2009, en avril 2010 et en février 2011. Il n'est pas expliqué à la cour qui est Madame [C] [Y] qui a émis des chèques de 15 000 FF pendant l'année 2001.

Ainsi, si l'origine des versements sur la période de janvier 1999 à décembre 2000 puis de janvier 2002 à novembre 2009 est désormais déterminée, leur cause ne l'est pas pour autant.

La production des déclarations fiscales de la SCI, du livre-journal ainsi que les déclarations de revenus fonciers et les avis d'imposition de contributions sociales des associés, de même que du commandement de payer ne permet pas de rapporter la preuve de l'existence d'un bail verbal.

Le document manuscrit émanant de Monsieur [R] employant le mot loyer « loyer septembre 2006 non réglé » ne saurait davantage démontrer l'existence d'un contrat de location entre les parties.

Madame [P] [R] fait justement remarquer que la SCI LES ROSES ne s'est jamais comportée en bailleresse, qu'elle n'a notamment adressé aucune mise en demeure de payer un quelconque loyer entre novembre 2009 et le 20 septembre 2012, soit pendant près de trois ans.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement rendu le 1er octobre 2013 par le tribunal d'instance de Nîmes en ce qu'il a considéré que la preuve de l'existence et de l'exécution d'un bail verbal n'était pas rapportée et en ce qu'il a débouté la SCI LES ROSES de l'ensemble de ses demandes à ce titre.

Le tribunal a ensuite justement retenu la qualification de prêt à usage régi par les dispositions de l'article 1875 du code civil, étant indiqué qu'il ne résulte pas du versement régulier d'une somme de 2286,74 € au demeurant sur la seule période de janvier 1999 à décembre 2000 puis de janvier 2002 à novembre 2009, le caractère onéreux de la mise à disposition.

- Sur la restitution de l'immeuble et l'expulsion

En application de l'article 1888 du code civil, lorsque aucun terme n'a été convenu pour le prêt d'une chose d'un usage permanent, sans qu'aucun terme naturel soit prévisible, le prêteur est en droit d'y mettre fin à tout moment en respectant un délai de préavis raisonnable.

Madame [P] [R] fait valoir que la SCI LES ROSES ne peut réclamer la restitution du bien prêté faute d'avoir adressé une mise en demeure préalable, seule de nature à faire courir le délai de préavis raisonnable.

Il résulte sans équivoque du commandement de payer du 20 septembre 2012 puis de l'assignation qui a suivi, que la SCI LES ROSES entendait récupérer les lieux. Le tribunal a, à bon droit, considéré que le délai de procédure constituait un délai de préavis raisonnable dont on ne peut que constater qu'il est aujourd'hui de six ans.

Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné Madame [P] [R] à restituer à la SCI LES ROSES l'immeuble occupé au [Adresse 1] et à défaut, a ordonné son expulsion.

Compte tenu des délais de fait déjà obtenus, la demande d'octroi d'un délai de 12 mois sera rejetée.

Sur les demandes accessoires

En l'absence de preuve d'une faute, la demande de dommages et intérêts formée par l'intimée n'est pas fondée.

Le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions, en ce compris celles relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.

Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

L'appelante qui échoue en toutes ses prétentions supportera les entiers dépens de l'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe,

DECLARE irrecevables les demandes formées par Madame [P] [R] au titre d'une vente à tempérament et en répétition de l'indu,

CONFIRME le jugement rendu le 1er octobre 2013 par le tribunal d'instance de Nîmes en toutes ses dispositions,

REJETTE le surplus des demandes,

DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

CONDAMNE Madame [P] [R] aux dépens de l'appel.

DIT que copie du présent arrêt sera adressée par le greffe pour information au service des expulsions de la préfecture du Gard.

Le greffier, Le président,

L.R.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 1ère chambre c
Numéro d'arrêt : 16/03055
Date de la décision : 29/01/2019

Références :

Cour d'appel de Montpellier 1D, arrêt n°16/03055 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-01-29;16.03055 ?
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