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23/02/2012 | FRANCE | N°10/07140

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 1o chambre section ao1, 23 février 2012, 10/07140


COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
1o Chambre Section AO1
ARRET DU 23 FEVRIER 2012
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 07140
Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 JUILLET 2010 TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PERPIGNAN No RG 08 1146

APPELANTS :
S. C. P. D...- X...- E..., prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités au siège social... 11130 SIGEAN assistée de la SCP DIVISIA SENMARTIN, avocats postulants au barreau de MONTPELLIER, et de Me Gilles LASRY, avocat plaidant de la SCP BRUGUES-LASRY au barreau de

MONTPELLIER

Maître Grégoire X...... 11130 SIGEAN assisté de la SCP DIVISIA SENMART...

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
1o Chambre Section AO1
ARRET DU 23 FEVRIER 2012
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 07140
Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 JUILLET 2010 TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PERPIGNAN No RG 08 1146

APPELANTS :
S. C. P. D...- X...- E..., prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités au siège social... 11130 SIGEAN assistée de la SCP DIVISIA SENMARTIN, avocats postulants au barreau de MONTPELLIER, et de Me Gilles LASRY, avocat plaidant de la SCP BRUGUES-LASRY au barreau de MONTPELLIER

Maître Grégoire X...... 11130 SIGEAN assisté de la SCP DIVISIA SENMARTIN, avocats postulants au barreau de MONTPELLIER, et de Me Gilles LASRY, avocat plaidant de la SCP BRUGUES-LASRY, au barreau de MONTPELLIER

INTIMES :
SA CREDIT FONCIER DE FRANCE, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités au siège social... 75001 PARIS assistée de Me Jean-Louis CIRERA, avocat plaidant de la SELARL CIRERA-VAISSIERE, avocats au barreau de CARCASSONNE, et de la SCP Gilles ARGELLIES et Fabien WATREMET, avocats postulants au barreau de MONTPELLIER

S. C. P. Y...- F..., prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités au siège social... 11100 NARBONNE assistée de Me Fernand MOLINA, avocat plaidant de la SCP DE TORRES-PY-MOLINA-BOSC-BERTOU, avocats au barreau de Pyrénées-Orientales, et de la SCP CAPDEVILA et VEDEL SALLES, avocats postulants au barreau de MONTPELLIER

Maître Ghislaine Y...... 11100 NARBONNE assisté de de Me Fernand MOLINA, avocat plaidant de la SCP DE TORRES-PY-MOLINA-BOSC-BERTOU, avocats au barreau de Pyrénées-Orientales, et de la SCP CAPDEVILA et VEDEL SALLES, avocats postulants au barreau de MONTPELLIER

ORDONNANCE de CLOTURE du 4 JANVIER 2012
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le MERCREDI 18 JANVIER 2012 à 8H45 en audience publique, Madame Anne BESSON, Président ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :
Madame Anne BESSON, Président de Chambre Madame Sylvie CASTANIÉ, Conseiller Madame Caroline CHICLET, Conseiller qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Melle Marie-Françoise COMTE
MINISTÈRE PUBLIC :
L'affaire a été communiquée au ministère public, qui a fait connaître son avis.
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE,
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;
- signé par Madame Anne BESSON, Président, et par Melle Audrey VALERO, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE

Par acte notarié passé le 13 décembre 1993 par Maître X... notaire associé de la SCP D..., X... G..., le Crédit Foncier de France a consenti aux consorts Z... A... un prêt de 290 000 francs remboursable en 21 ans ; l'acte stipulait que les emprunteurs affectaient et hypothéquaient spécialement et solidairement une parcelle de terrain à bâtir leur appartenant, située à Sigean lot no5 du lotissement .... Il était précisé dans les annexes de l'acte que cette hypothèque devait venir en premier rang et sans concurrence sur les biens donnés en garantie.

Reprochant à Maître X... de n'avoir pas assuré le premier rang de cette inscription d'hypothèque, prise le 12 janvier 1994, le Crédit Foncier de France a par acte du 9 mars 2006 assigné en responsabilité Maître X... et la SCP de notaires sur le fondement des art 1382 et 1383 du code civil et subsidiairement sur les art 1147, 1374 et 1992 du code civil.
Reprochant à son avocat Maître Y... de n'avoir pas exécuté en 2004 le mandat qui lui avait été donné d'assigner Maître X... et de ne pas les avoir utilement conseillés à l'occasion de la procédure d'ordre amiable ayant suivi la licitation du bien intervenue sur la poursuite des époux B... bénéficiaires d'une inscription de 1er rang, le Crédit Foncier a, par acte du 8 janvier 2007, assigné Maître Y... et la SCP d'avocats sur le fondement de la responsabilité de l'art 1147 du code civil.
Les affaires ont été jointes et renvoyées devant le tribunal de grande instance de Perpignan en application des articles 47 et 97 du code de procédure civile.
Par jugement du 15 juillet 2010, le tribunal de grande instance de Perpignan a :
- déclaré recevable l'action engagée à l'encontre de Maître X... et la SVP D..., X... G... ;
- dit que la responsabilité de Maître X... est engagée sur le fondement des art 1382 et 1383 du code civil pour manquement à ses obligations de rédacteur d'actes et celle de Maître Y... engagée sur le fondement de l'art 1147 du code civil pour manquement à son devoir de conseil ;
- condamné in solidum Maître X..., la SCP D..., X..., G..., Maître Y... et la SCP Y...- F... à payer au Crédit Foncier de France la somme de 26 575, 03 € avec intérêts au taux légal à compter du 7janvier 2007 ;
- condamné in solidum Maître X... et la SCP D..., X..., G..., à payer au CFF les intérêts sur la somme de 26 575, 03 € du 8. 2. 2002 au 6. 1. 2007 ;
- condamné à in solidum Maître X..., la SCP D..., X..., G..., Maître Y... et la SCP Y...- F... à payer au CFF la somme de 2. 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Maître Grégoire X... et la SCP D...- X...- E... ont régulièrement interjeté appel.

Vu les conclusions du 23. 12. 2010 des appelants, tendant à titre principal à déclarer l'assignation délivrée le 9 mars 2006 irrecevable comme étant prescrite ; à titre subsidiaire, juger l'action fondée sur l'article 1147 du Code Civil irrecevable tenant le caractère délictuel ou quasi délictuel de la responsabilité notariale ; à titre infiniment subsidiaire, juger que Maître X... n'a commis aucune faute et que le Crédit Foncier ne justifie d'aucun préjudice en relation directe de causalité ; en conséquence, le débouter de toutes ses prétentions et le condamner au paiement de la somme de 5. 000 HT € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

Vu les conclusions du 18. 1. 2011 de Maître Ghislaine Y... et la SCP Y...- F..., tendant à dire et juger Maître X..., notaire, responsable de l'entier préjudice causé au Crédit Foncier de France ; que la faute de Maître Y... de ne pas avoir engagé d'action contre Maître X... n'a entraîné aucun préjudice pour le Crédit Foncier ; que la perte de chance de voir l'inscription jugée caduque n'est pas sérieusement démontrée et que sa faute est par conséquent sans lien de causalité avec le préjudice ; donner acte à Me Y... qu'elle reconnaît effectivement avoir manqué à son devoir de conseil sur la prise d'hypothèque et juger que dans cette hypothèse le préjudice du CFF doit à ce titre être évalué distinctement de celui causé par le notaire, et ne saurait être en tout état de cause supérieur à la somme de 7 769. 17 € ; que Maître Y... ne saurait être tenue à une somme supérieure à 7 769. 17 € ; condamner le CFF à leur payer la somme de 2. 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
Vu les conclusions du 23. 3. 2011 du Crédit Foncier de France, tendant à confirmer purement et simplement le jugement ; vu les articles 1382 et suivants du Code Civil, juger que Maître X... a commis une faute professionnelle et que cette faute est en relation directe avec le préjudice subi par le CFF ; vu l'article 1147 du Code Civil, juger que Maître Y... a commis une faute professionnelle et que cette faute est en relation directe avec le préjudice subi par le CFF ; condamner in solidum Maître X..., la SCP D..., X..., E..., Maître Y... et la SCP Y...- F... à lui payer la somme de 26. 575, 03 € augmentée des intérêts au taux légal à compter du 8 février 2002 ; à titre subsidiaire et si son action à l'égard des notaires était déclarée prescrite, condamner solidairement Maître Y... et la SCP Y...- F... à lui payer la somme de 26 575, 03 € avec intérêts au taux légal à compter du 8 février 2002 et à le relever et garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son endroit dans le cadre de l'instance principale opposant la banque aux notaires ; condamner in solidum toutes parties succombantes à lui payer les sommes de 5. 000 € à titre de dommages et intérêts complémentaires et de 5. 000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi que les dépens ;
Vu la communication de la procédure au Procureur Général qui en a pris connaissance le 26 septembre 2011 ;
Vu l'ordonnance de clôture du 4. 1. 2011 ;

MOTIVATION

SUR L'ACTION A L'ENCONTRE DU NOTAIRE

Sur le fondement juridique de l'action

Ainsi que le rappelle le premier juge, les obligations du notaire, qui ne tendent qu'à assurer l'efficacité d'un acte instrumenté par lui et ne constituent que le prolongement de sa mission de rédacteur d'acte, relèvent de sa responsabilité délictuelle régie par les articles 1382 et suivants du Code Civil. Le demandeur ayant expressément visé ce fondement dans ses écritures, ce moyen d'irrecevabilité n'est donc pas sérieux.
Sur la prescription
La prescription d'une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance.
Il en est ainsi du délai décennal de l'article L. 110-4 ancien du code de commerce comme de celui de l'article 2270-1 ancien du Code Civil, lequel prévoit expressément que les actions en responsabilité civile extra contractuelle se prescrivent par dix ans à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation.
Le délai de prescription n'ayant donc pu courir à compter de l'acte notarié, la question est de déterminer la date de la manifestation du dommage qui en est le point de départ. Il peut s'agir, soit de la date du bordereau de collocation du 8 février 2002 comme l'a estimé le premier juge, soit de celle du courrier du 22 juillet 1994 démontrant que la banque savait alors que son inscription hypothécaire ne viendrait pas en premier rang.
A cet égard, même si en juillet 1994 le Crédit Foncier était désormais informé de son rang véritable et pouvait nourrir de légitimes inquiétudes sur les conséquences qui risquaient d'en résulter, son dommage n'était cependant à ce stade nullement certain mais seulement éventuel.
En effet, sa réalisation dépendait de plusieurs facteurs qui demeuraient des inconnues. Ainsi, tant que la vente n'était pas intervenue, on ignorait le montant de la somme à distribuer. Par ailleurs, le débiteur pouvait encore s'acquitter de tout ou partie de ses dettes tant à l'égard du Crédit Foncier que des époux B.... Enfin, le montant exact de la collocation de ces derniers n'était pas précisément arrêté. Au demeurant, ils ont été au final colloqués sur l'intégralité des fonds provenant de la saisie alors que leurs droits étaient limités uniquement à la moitié indivisaire.
Il était donc certes peu probable mais encore possible en 1994 que la banque recouvre intégralement sa créance. De sorte que si elle avait alors engagé une action en responsabilité fondée sur la seule faute du notaire, elle aurait été prématurée et vouée à l'échec puisqu'elle n'aurait pu justifier d'un préjudice né, certain et actuel.
En réalité, ainsi que le premier juge l'observe, c'est seulement après la vente du bien hypothéqué et au vu du bordereau de collocation du 8 février 2002 consécutif au procès verbal de règlement amiable du 20 décembre 2001, que le Crédit Foncier a su qu'il ne pourrait être rempli de ses droits compte tenu du montant total à répartir et des sommes revenant en premier rang aux époux B....
En conséquence, c'est cette date du 8 février 2002 qui doit être retenue comme celle de la manifestation du dommage ayant fait courir le délai de prescription décennal.
Dès lors le jugement est confirmé en ce qu'il déclare l'action non prescrite à la date de l'assignation délivrée le 9 mars 2006.

Sur la responsabilité

Tenu de s'assurer avant la signature de l'acte du 13 décembre 1993 de l'efficacité de l'inscription hypothécaire de premier rang à prendre sur l'immeuble en garantie du prêt, le notaire avait l'obligation de lever un état hypothécaire. Cette diligence élémentaire lui aurait permis de constater l'existence de l'hypothèque provisoire inscrite le 3 mars 1993 par les époux B... sur la part indivise de Mme C... et de satisfaire à son devoir de conseil en attirant l'attention du Crédit Foncier qui aurait eu alors la possibilité de refuser le prêt ou de solliciter d'autres garanties.
En omettant de procéder à cette vérification préalable et en ne remédiant pas à cette omission avant de libérer les fonds, Me X... a commis une faute qu'il a d'ailleurs expressément reconnue dans son courrier du 20 juillet 1994 en écrivant :
« Je pense qu'il faut réclamer à l'emprunteur le remboursement de la partie du prêt débloqué et à défaut faire saisir et réaliser le gage. Bien entendu si cette réalisation ne permet pas de vous désintéresser, compte tenu de l'existence de l'inscription en cause, vous serez en droit de mettre en cause ma responsabilité »

Ainsi que le premier juge l'observe à bon droit, Me X... ne peut être déchargé de ses obligations à raison d'éventuelles compétences du Crédit Foncier en matière de suretés dès lors que celui-ci a fait appel à lui en sa qualité de rédacteur d'acte.
Par ailleurs, le lien de causalité entre cette faute initiale et l'entier préjudice subi par le Crédit Foncier est clairement établi. En effet, c'est parce que le premier rang hypothécaire ne lui a pas été assuré qu'il a été primé par un autre créancier et n'a pu recouvrer l'intégralité de sa créance.
Enfin, Me X... ne peut s'exonérer partiellement ou totalement de sa responsabilité en arguant de l'inaction du Crédit Foncier, alors que n'étant pas un professionnel du droit, celui-ci n'était nullement tenu d'engager des actions judiciaires afin de tenter de pallier les conséquences de la faute de son notaire. Il ne saurait donc être considéré comme responsable du fait que l'inscription faite par les consorts B... aurait pu, au final, être déclaré caduque ou qu'il aient été colloqués à tort sur la totalité du prix de vente.
De même, la faute alléguée du conseil du Crédit Foncier, si elle est susceptible d'avoir entraîné la persistance du dommage, est sans aucune incidence en revanche sur celle du notaire qui en est la cause originelle.
Maître X... et la SCP de notaires étant ainsi entièrement responsables du préjudice résultant du défaut d'inscription de premier rang, le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur le préjudice

Le tribunal a exactement apprécié le préjudice en fonction des éléments objectifs, précis et concordants réunis en la cause et en particulier l'acte de prêt et le tableau d'amortissement produits par la banque.
C'est donc à bon droit qu'il a condamné in solidum Maître X... et la SCP de notaires à payer au Crédit Foncier de France la somme de 26 575, 03 € augmentée des intérêts au taux légal à compter du 8 février 2002, ce complément indemnitaire étant justifié par le fait qu'il était en droit de bénéficier de cette somme dès cette date.

SUR L'ACTION A L'ENCONTRE DE L'AVOCAT

Au titre du mandat d'assigner le notaire
Si Maître Y... a manqué au mandat qui lui avait été donné d'assigner Maître X... alors qu'elle s'était engagée par courrier du 12 décembre 2002 à le faire immédiatement, cette faute est cependant sans conséquence préjudiciable pour le Crédit Foncier dès lors que l'action n'est pas prescrite et que le jugement confirmé de ce chef rétablit intégralement ses droits à l'encontre du notaire.
Au titre du devoir de conseil dans le cadre de la procédure d'ordre amiable
En écrivant à son client le 14 novembre 2001 : « je ne vois pas 1'opportunité d'ouvrir un ordre judiciaire, ce que je vous déconseille fortement », Maître Y... a doublement failli à son obligation de conseil.
D'une part, en effet, l'inscription d'hypothèque dont bénéficiaient les époux B... ne concernait que la part indivise de Mme C..., alors qu'ils ont été colloqués à tort pour la totalité. Ce qui commandait à l'avocat de contester cette collocation.
D'autre part, les époux B... n'ont pris leur inscription définitive que le 7 novembre 1995 sur la base d'un arrêt rendu le 16 novembre 1993, alors que selon l'article 263 du décret du 31 juillet 1992, « la publicité définitive doit être effectuée dans un délai de deux mois courant (…) du jour où le titre constatant les droits du créancier est passé en force de chose jugée ».
Maître Y... fait valoir que la force de chose jugée attachée à un arrêt ne peut avoir pour effet de priver une partie d'un droit tant que cette décision ne lui a pas été notifiée.
Or il convient de rappeler qu'un arrêt de cour d'appel a force de chose jugée dès son prononcé, sauf pourvoi en cassation suspensif d'exécution dans certaines matières déterminées, et que l'inscription d'hypothèque définitive n'est qu'une mesure conservatoire, indépendante du caractère exécutoire de l'arrêt et non soumise à la signification préalable de ce dernier.

En l'espèce, rien ne permettant de supposer l'existence d'un recours suspensif d'exécution, l'arrêt du 16 novembre 1993 était passé dès son prononcé en force de chose jugée, de sorte que l'inscription définitive aurait du intervenir le 16janvier 1994 au plus tard.
Ainsi, la saisine du juge de l'exécution aurait nécessairement entraîné un constat de caducité. En s'abstenant d'engager cette action, l'avocat a donc engagé sa responsabilité contractuelle au regard des conséquences qui en sont résulté pour le Crédit Foncier.
Dans ces circonstances, le premier juge a exactement apprécié les faits au regard des règles de droit applicables en jugeant que la perte de chance était totale et que la faute de l'avocat avait privé son client d'un rétablissement certain dans ses droits de créancier hypothécaire de premier rang, ce qui lui aurait permis de recouvrer sa créance, et en le déclarant tenu au paiement de dommages et intérêts équivalant à la part attribuée aux époux B..., avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation.
Maître Y... ne saurait valablement faire valoir que le préjudice aurait été moindre si les époux Z... avaient été colloqués pour la moitié indivise de leur créance et non pour sa totalité, alors qu'elle a précisément manqué à son obligation de contester cette collocation.
Enfin, les fautes du notaire et de l'avocat ayant contribué chacune à la réalisation de l'entier dommage, c'est à bon droit que le tribunal les a l'un et l'autre condamnés in solidum, s'agissant du principal et des intérêts à compter du 7 janvier 2007.
Le Crédit Foncier ne rapportant pas la preuve d'un préjudice plus important complémentaire ou distinct, le rejet de sa demande d'indemnisation complémentaire mérite également confirmation.
Le jugement déféré est ainsi confirmé en tous points.

P A R C E S M O T I F S

Confirme le jugement déféré.

Y ajoutant :
Condamne in solidum Maître Grégoire X..., la SCP D...- X...- E..., Maître Ghislaine Y... et la SCP Y...- F... aux dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du Code de Procédure Civile, et à payer à la SA CREDIT FONCIER DE FRANCE la somme de 3. 000 € sur le fondement de l'article 700 du même code.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT

AB


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 1o chambre section ao1
Numéro d'arrêt : 10/07140
Date de la décision : 23/02/2012

Analyses

La prescription d'une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou à la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance; Si la force de chose jugée attachée à un arrêt de cour d'appel dès son prononcé ne peut avoir pour effet de priver une aprtie d'un droit tant que cette décision ne lui a pas été notifiée, une inscription d'hypothèque définitivé n'est qu'une mesure conservatoire, indépendente du caractère exécutoire de l'arrêt et non soumise à la signification préalable de ce dernier


Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Perpignan, 15 juillet 2010


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2012-02-23;10.07140 ?
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