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05/04/2011 | FRANCE | N°10/04728

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Chambre civile 2, 05 avril 2011, 10/04728


COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2o chambre

ARRET DU 05 AVRIL 2011

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 04728

Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 MAI 2010
TRIBUNAL DE COMMERCE DE MONTPELLIER
No RG 09009825

APPELANT :

Monsieur Michel X...
né le 02 Mai 1959 à MARSEILLE
Immeuble le Commodore
...
34280 LA GRANDE MOTTE
représenté par la SCP Yves et Yann GARRIGUE, avoués à la Cour
assisté de Me Jean Marie CHABAUD, avocat au barreau de NIMES

INTIMEE :

S. A. SMC, Société Mar

seillaise de Crédit, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités au siège social
75 Rue Paradis
13...

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2o chambre

ARRET DU 05 AVRIL 2011

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 04728

Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 MAI 2010
TRIBUNAL DE COMMERCE DE MONTPELLIER
No RG 09009825

APPELANT :

Monsieur Michel X...
né le 02 Mai 1959 à MARSEILLE
Immeuble le Commodore
...
34280 LA GRANDE MOTTE
représenté par la SCP Yves et Yann GARRIGUE, avoués à la Cour
assisté de Me Jean Marie CHABAUD, avocat au barreau de NIMES

INTIMEE :

S. A. SMC, Société Marseillaise de Crédit, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités au siège social
75 Rue Paradis
13000 MARSEILLE
représentée par la SCP JOUGLA Jean-Pierre-JOUGLA Sarra, avoués à la Cour
assistée de Me Nicolas BEDEL DE BUZAREINGUES, avocat au barreau de MONTPELLIER

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 24 Février 2011

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 1er MARS 2011, en audience publique, Monsieur Jean-Luc PROUZAT, conseiller, ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de procédure civile, devant la cour composée de :

Monsieur Daniel BACHASSON, président
Monsieur Hervé CHASSERY, conseiller
Monsieur Jean-Luc PROUZAT, conseiller
qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie SABATON

ARRET :

- contradictoire

-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Daniel BACHASSON, président, et par Madame Sylvie SABATON, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS et PROCEDURE – MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES :

La SARL Lunetterie Parisienne (la société LP) a obtenu l'ouverture, le 8 décembre 2006, d'un compte courant no 1906 250494 L, dans les livres de la Société Marseillaise de Crédit.
Par acte sous seing privé du 19 novembre 2007, M. X... s'est rendu caution solidaire de la société LP, dont il est le gérant, en garantie de tous les engagements de la société LP à l'égard de la banque, à hauteur de la somme de 36 000, 00 euros couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard.
Le 3 septembre 2008, le tribunal de commerce de Nîmes a ouvert une procédure de sauvegarde de la société LP, dont le compte courant présentait alors un solde débiteur de 29 909, 14 euros.
Par courrier du 22 septembre 2008, la Société Marseillaise de Crédit a mis en demeure M. X... de lui régler cette somme, l'informant de son intention de prendre des mesures conservatoires visant à garantir le paiement de sa créance.
La banque a déclaré sa créance entre les mains de Maître C..., mandataire judiciaire, puis a sollicité du président du tribunal de commerce de Montpellier l'autorisation d'inscrire une hypothèque provisoire sur un bien immobilier appartenant à M. X....

Par ordonnance du 25 mai 2009, le président du tribunal de commerce l'a autorisée à prendre une inscription provisoire d'hypothèque sur un appartement de M. X... formant les lots no 13 et 28 de l'état descriptif de division de l'immeuble dénommé « le Commodore » (bâtiment A) situé ...à la Grande Motte (34).
Elle l'a ensuite fait assigner, par acte du 11 juin 2009, devant le tribunal de commerce de Montpellier en vue d'obtenir le paiement de la somme de 36 000, 00 euros, montant de son engagement de caution, outre intérêts au taux légal.
Par jugement du 15 septembre 2009, le tribunal de commerce de Nîmes a homologué un plan de sauvegarde de la société LP.
C'est dans ces conditions que, par jugement du 12 mai 2010, la juridiction consulaire, saisie de l'action engagée par la banque, a notamment :
- condamné M. X... à payer à la Société Marseillaise de Crédit la somme de 29 909, 14 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 22 septembre 2008, capitalisables annuellement, précision étant apportée que le paiement devra intervenir selon les modalités fixées au titre du plan de sauvegarde, soit par échéances annuelles de 5 % les deux premières années et de 11, 25 % les huit années suivantes,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
- condamné M. X... à payer la somme de 600, 00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
M. X... a régulièrement relevé appel de ce jugement par déclaration reçue le 7 juin 2010 au greffe de la cour.
En cours de procédure, une ordonnance du juge-commissaire en date du 3 septembre 2010 a admis la créance de la Société Marseillaise de Crédit au passif de la procédure de sauvegarde de la société LP, pour la somme de 29 909, 14 euros à titre chirographaire.
En l'état des conclusions qu'il a déposées, M. X... demande à la cour d'infirmer le jugement, de débouter la Société Marseillaise de Crédit de l'ensemble de ses prétentions et d'ordonner, sous astreinte, la mainlevée de l'inscription provisoire d'hypothèque prise sur son immeuble ; il sollicite également l'allocation de la somme de 3 000, 00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Au soutien de son appel, il fait essentiellement valoir que :
- en sa qualité de caution, personne physique, il bénéficie des délais du plan de sauvegarde conformément aux dispositions de l'article L. 626-11 du code de commerce, nonobstant la stipulation d'une solidarité,
- selon l'article L. 622-28 du même code, il bénéficie également de la règle de l'arrêt du cours des intérêts, applicable à un découvert en compte, et les intérêts arrêtés lors de l'ouverture de la procédure collective ne reprennent pas leur cours lors de l'adoption du plan de sauvegarde,
- tenant sa qualité de caution, il se trouve, en cours de plan, débiteur de second rang derrière le débiteur principal, lequel honore ses échéances, en sorte que l'hypothèque sur son bien n'a pas lieu d'être.
La Société Marseillaise de Crédit conclut à la confirmation du jugement et à la condamnation de l'appelant à lui payer la somme de 2 000, 00 euros en remboursement de ses frais irrépétibles.
Elle soutient en substance que :
- les dispositions de l'article L. 626-11 du code de commerce ne font pas obstacle à ce que le créancier du débiteur principal, bénéficiant d'un plan de sauvegarde, sollicite le paiement de sa créance auprès de la caution,
- elle est d'ailleurs en droit de réclamer à M. X..., qui a également renoncé au bénéfice de discussion, le paiement de la somme due du fait du caractère solidaire du cautionnement,
- les intérêts au taux légal sont dus en vertu de l'article 1153 du code civil, d'autant que la créance a été admise au passif de la société LP,
- l'inscription provisoire d'hypothèque a pour objet de garantir le paiement de sa créance par M. X..., lequel n'apporte aucun élément de nature à démontrer que les échéances du plan seront bien réglées.
MOTIFS de la DECISION :
L'article L. 622-28 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi no 2005-845 du 26 juillet 2005, dispose, dans ses deuxième et troisième alinéas, que le jugement d'ouverture (de la procédure de sauvegarde) suspend jusqu'au jugement arrêtant le plan ou prononçant la liquidation toutes actions contre les personnes physiques coobligés ou ayant consenti un cautionnement ou une garantie autonome et que les créanciers bénéficiaires de ces garanties peuvent prendre des mesures conservatoires.
Selon l'article R. 622-26, les instances et les procédures civiles d'exécution suspendues en application du deuxième alinéa de l'article L. 622-28 sont poursuivies à l'initiative des créanciers bénéficiaires de garanties mentionnées au dernier alinéa de cet article sur justification du jugement arrêtant le plan, selon les dispositions applicables à l'opposabilité de ce plan à l'égard des garants.
L'article L. 626-11, dans sa rédaction de la loi du 26 juillet 2005, énonce à cet égard que le jugement qui arrête le plan en rend les dispositions opposables à tous et qu'à l'exception des personnes morales, les coobligés et les personnes ayant consenti un cautionnement ou une garantie autonome peuvent s'en prévaloir.

Il résulte de ces textes qu'en cas d'adoption d'un plan de sauvegarde à l'issue de la période d'observation, les coobligés et garants continuent à bénéficier de la suspension des poursuites, puisqu'ils sont en droit, à la différence de la situation créée par l'adoption d'un plan de redressement judiciaire, d'opposer aux créanciers les dispositions du plan ayant consenti au débiteur des délais et remises pour le règlement du passif déclaré ; permettre à ces derniers de se prévaloir des dispositions du plan revient ainsi à les mettre à l'abri des poursuites des créanciers, lesquels ne peuvent prétendre qu'aux répartitions des dividendes arrêtés par le plan, versés par le débiteur ; le bénéfice de cette suspension des poursuites profite aux coobligés et garants, personnes physiques, que leurs engagements soient solidaires ou non.

Par ailleurs, la faculté reconnue aux créanciers par l'article L. 622-28 de pratiquer, durant la période d'observation, des mesures conservatoires contre les coobligés et garants conduit nécessairement les intéressés, une fois obtenue l'autorisation de réaliser une telle mesure, à introduire une procédure visant à l'obtention d'un titre exécutoire, conformément à l'article 215 du décret no 92-755 du 31 juillet 1992 ; après l'adoption d'un plan de sauvegarde, dont les coobligés et garants peuvent se prévaloir, l'exécution du titre obtenu sera, en ce cas, automatiquement suspendue pendant la durée du plan ou jusqu'à ce que celui-ci soit résolu ; il ne peut être soutenu que les créanciers perdent le bénéfice des mesures conservatoires qu'ils ont pratiquées sur les biens des coobligés et garants, du seul fait de l'arrêt du plan de sauvegarde, qui n'entraîne à leur égard qu'une suspension des poursuites.

En l'occurrence, M. X... ne soutient pas que la créance de la Société Marseillaise de Crédit, correspondant au solde débiteur du compte courant de la société LP, n'était pas exigible lors de l'ouverture, le 3 septembre 2008, de la procédure de sauvegarde de la société débitrice ; la créance de la banque a ainsi été admise à titre chirographaire pour la somme de 29 909, 14 euros, échue, par une ordonnance du juge-commissaire en date du 3 septembre 2010 ; compte tenu de la défaillance de la société LP, son engagement de caution était donc susceptible d'être mis en œ uvre, bien que les poursuites engagées à son encontre se soient trouvées suspendues par l'effet du jugement d'ouverture puis de l'adoption du plan de sauvegarde, dont il entend se prévaloir.

Il est donc justifié de prononcer sa condamnation au paiement de la somme, non contestée, de 29 909, 14 euros, montant du solde débiteur du compte courant, en sa qualité de caution de la société LP, mais de dire que les poursuites à son encontre seront suspendues pendant la durée du plan de sauvegarde de la société LP, arrêté par jugement du tribunal de commerce de Nîmes du 15 septembre 2009, ou jusqu'à la résolution dudit plan.

L'inscription provisoire d'hypothèque, qu'a prise la Société Marseillaise de Crédit, durant la période d'observation, en vertu de l'autorisation donnée le 25 mai 2009 par le président du tribunal de commerce de Montpellier, demeure quant à elle valable ; la réalisation de la sûreté judiciaire, une fois opérée la publicité définitive, demeure simplement suspendue pendant la durée du plan ou jusqu'à sa résolution ; il s'ensuit que M. X... ne saurait obtenir la mainlevée de l'inscription ainsi prise sur un bien immobilier lui appartenant.

L'article L. 622-28, toujours dans sa rédaction de la loi du 26 juillet 2005, dispose également que le jugement d'ouverture arrête le cours des intérêts légaux ou conventionnels, ainsi que de tous intérêts de retard et majorations, à moins qu'il ne s'agisse des intérêts résultant de contrats de prêt conclus pour une durée égale ou supérieure à un an ou de contrats assortis d'un paiement différé d'un an ou plus et que les personnes physiques cautions, coobligés ou ayant donné une garantie autonome peuvent se prévaloir de ces dispositions.

Au cas d'espèce, l'ouverture de crédit-assimilable à un contrat de prêt-consentie par la Société Marseillaise de Crédit sous la forme d'un découvert en compte, l'ayant été, non pour une durée égale ou supérieure à un an, mais pour une durée indéterminée, la règle de l'arrêt du cours des intérêts susvisée s'applique, en sorte que les intérêts au taux légal sur la somme de 29 909, 14 euros, réclamés par la banque, ne sont pas dus par M. X..., qui n'a été mis en demeure que postérieurement au jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde.

Le jugement entrepris doit en conséquence être infirmé en toutes ses dispositions.

Compte tenu de la solution apportée au règlement du litige, M. X... doit être condamné aux dépens de première instance et d'appel, mais sans que l'équité commande l'application, au profit de la Société Marseillaise de Crédit, des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Infirme le jugement entrepris et statuant à nouveau,

Condamne M. X..., en sa qualité de caution de la société LP, à payer à la Société Marseillaise de Crédit la somme de 29 909, 14 euros, correspondant au montant du solde débiteur du compte courant de la société,

Dit toutefois que les poursuites à son encontre seront suspendues pendant la durée du plan de sauvegarde de la société LP arrêté par jugement du tribunal de commerce de Nîmes du 15 septembre 2009, ou jusqu'à la résolution dudit plan,

Rejette toutes autres demandes,

Condamne M. X... aux dépens de première instance et d'appel, les dépens d'appel étant recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile,

Dit n'y avoir lieu à l'application, au profit de la Société Marseillaise de Crédit, des dispositions de l'article 700 du même code,

LE GREFFIER LE PRESIDENT

JLP


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 10/04728
Date de la décision : 05/04/2011
Type d'affaire : Civile

Analyses

ENTREPRISE EN DIFFICULTE

Il résulte des dispositions des articles L 622-28, R 622-26 et L 626-11 du code de commerce qu'en cas d'adoption d'un plan de sauvegarde à l'issue de la période d'observation, les coobligés et garants continuent à bénéficier de la situation créée par l'adoption du plan de redressement judiciare, d'opposer aux créanciers les dispositions du plan ayant consenti au débiteur des délais de remises pour le règlement du passif déclaré; permettre à ces derniers de se prévaloir des dispositions du plan revient à les mettre à l'abri des poursuites des créanciers, lesquels ne peuvent prétendre qu'aux répartitions des dividendes arrêtés par le plan, versés par le débiteur. par ailleurs, la faculté reconnue aux créanciers par l'article L. 622-28 de pratiquer, durant la période d'observation, des mesures conservatoires contre les coobligés et garants conduit nécessairement les intérressés, une fois obtenue l'autorisation de réaliser une telle mesure, à introduire une procédure visant à l'obtention d'un titre exécutoire conformément à l'article 215 du décret nº 92-755 du 31 juillet 1992; après l'adoption d'un plan de sauvegarde, dont les coobligés et garants peuvent se prévaloir, l'exécution du titre obtenu sera, en ce cas, automatiquement suspendue pendant la durée du plan ou jusqu'à ce que celui-ci soit résolu.


Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Montpellier, 12 mai 2010


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2011-04-05;10.04728 ?
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