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02/02/2010 | FRANCE | N°09/7510

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre, 02 février 2010, 09/7510


COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
2e chambre
ARRET DU 02 FEVRIER 2010
Numéro d'inscription au répertoire général : 09 / 07510
Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 OCTOBRE 2009 TRIBUNAL DE COMMERCE DE NARBONNE No RG 0904486

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 17 DECEMBRE 2009, en chambre du conseil, Monsieur Jean-Luc PROUZAT ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :
Monsieur Daniel BACHASSON, Président Madame Noële-France DEBUISSY, Conseiller Monsieur Jean-Luc PROUZ

AT, Conseiller qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie SABATON...

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
2e chambre
ARRET DU 02 FEVRIER 2010
Numéro d'inscription au répertoire général : 09 / 07510
Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 OCTOBRE 2009 TRIBUNAL DE COMMERCE DE NARBONNE No RG 0904486

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 17 DECEMBRE 2009, en chambre du conseil, Monsieur Jean-Luc PROUZAT ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :
Monsieur Daniel BACHASSON, Président Madame Noële-France DEBUISSY, Conseiller Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Conseiller qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie SABATON
Ministère public :
L'affaire a été communiquée au ministère public, qui a fait connaître son avis.
ARRET :
- réputé contradictoire
-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;
- signé par Monsieur Daniel BACHASSON, Président, et par Madame Sylvie SABATON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS et PROCEDURE – MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES
Le 6 août 2009, le président du tribunal de commerce de Narbonne a ouvert, en application de l'article L. 611-6 du code de commerce, une procédure de conciliation au bénéfice du « Groupe Narbonne Accessoires », composé de la société Narbonne Accessoires, la société Centre national des véhicules de loisirs, la société de Développement des véhicules de loisirs, la société Caracol Loisirs, la société Dax Accessoires, la société Bordeaux Accessoires, la société Mérignac Accessoires et la société Lyon Accessoires, et a désigné M. X... en qualité de conciliateur.
Par requête du 15 septembre 2009, les sociétés formant le « Groupe Narbonne Accessoires » ont sollicité du tribunal de commerce de Narbonne l'homologation, conformément à l'article L. 611-8 II du code de commerce, de l'accord de conciliation conclu entre elles et leurs partenaires financiers (la banque commerciale pour le marché de l'entreprise, la BNP-Paribas, la Banque Dupuy de Parseval, la Banque populaire des Alpes, la Banque populaire du Sud, la Banque populaire du Sud-Ouest, la Banque populaire Occitane, la Banque populaire du Val de France, la Caisse d'épargne et de prévoyance du Languedoc-Roussillon, la Caisse fédérale du crédit mutuel d'Anjou, la Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc, la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Charente-Périgord, le Crédit industriel de l'Ouest, le Crédit lyonnais, HSBC France, la Lyonnaise de Banque-CIC, la Société Bordelaise-CIC, la Société Générale, la Banque nationale de Paris-Paribas personnel finance, la Compagnie générale de location d'équipements, la Financo, la société GE Money Bank et la Sofinco).
Par jugement contradictoire du 5 octobre 2009, le tribunal a homologué cet accord et, conformément aux prescriptions de l'article R. 611-40, alinéa 2, du code de commerce, a précisé les montants garantis par le privilège institué par l'article L. 611-11 du même code.

Par déclarations des 6 novembre 2009 (no 09 / 7510) et 9 novembre 2009 (no 09 / 7523), la société Ge Money Bank a interjeté appel de ce jugement.

Ces deux procédures ont été jointes par ordonnance du 19 novembre 2009.
Autorisée à cette fin par ordonnance du 16 novembre 2009, la société appelante a fait assigner, selon la procédure à jour fixe, tous les intimés pour l'audience du 17 décembre 2009, par exploits délivrés les 23, 24, 25, 26, 27 et 30 novembre, 3 et 7 décembre 2009.
La société appelante a remis au greffe de la cour les copies de ces assignations avant la date fixée pour l'audience.
La société Ge Money Bank a développé ses conclusions tendant à la recevabilité de son appel, à l'infirmation du jugement entrepris quant aux montants garantis par le privilège de l'article L. 611-11 du code de commerce et à la condamnation de chaque intimé à lui payer 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient que :
- la notification du jugement par le greffe du tribunal de commerce selon lettre recommandée avec demande d'avis de réception datée du 5 octobre 2009, qu'elle a reçue le 7 octobre suivant, est nulle en ce qu'elle mentionne un délai d'appel d'un mois en matière contentieuse et de quinze jours en matière gracieuse, mais non le délai prévu par l'article R. 661-3 du code de commerce, qui est de dix jours,
- elle a été induite en erreur par cette indication erronée, qui lui cause un grief,
- seules peuvent bénéficier du privilège de l'article L. 611-11 du code de commerce, les créances relatives à un nouvel apport en trésorerie au débiteur en vue d'assurer la poursuite de son activité et sa pérennité, et non celles correspondant à des concours antérieurement consentis à certaines sociétés du groupe et transférés à d'autres dans le cadre de l'accord de conciliation.

La société Narbonne Accessoires, la société Centre national des véhicules de loisirs, la société de Développement des véhicules de loisirs, la société Caracol Loisirs, la société Dax Accessoires, la société Bordeaux Accessoires, la société Mérignac Accessoires, la société Lyon Accessoires, et MM. Bruno Y... et Yannick Y... ont développé leurs conclusions tendant à l'irrecevabilité de l'appel et, subsidiairement, à son rejet.

Ils soutiennent que :
- l'appel est irrecevable comme ayant été interjeté plus d'un mois après la notification du jugement par le greffe,
- les sommes intitulées « montant des nouveaux apports aux nouveaux bénéficiaires » ont été justement retenues par le tribunal au titre du privilège de l'article L. 611-11 du code de commerce, puisqu'elles constituent bien des apports nouveaux faits à chaque entreprise individuellement identifiée, peu important que ces apports aient été antérieurement consentis à certaines sociétés du groupe et transférés vers d'autres.

La Banque populaire occitane a développé ses conclusions tendant, à titre principal, à l'irrecevabilité de l'appel, à titre subsidiaire, à la confirmation du jugement entrepris, à titre plus subsidiaire, à sa réformation partielle, demandant à la cour de dire que la somme de 938 000 euros est garantie par le privilège de l'article L. 611-11 du code de commerce, éventuellement d'ordonner une enquête et de procéder à l'audition du conciliateur, et en tout état de cause, de condamner la société Ge Money Bank à lui payer 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir que :
- l'appel, formé le 9 novembre 2009, alors que le jugement avait été notifié le 7 octobre 2009, est tardif et, partant, irrecevable,
- tenant cette tardiveté, la société Ge Money Bank n'est pas fondée à invoquer l'irrégularité de l'acte de notification qui ne lui cause aucun grief,
- l'appel incident de la société HSBC est donc également irrecevable,
- elle avait antérieurement consenti à la société de Développement des véhicules de loisirs une facilité de caisse de 762 000 euros, et a accepté, dans le cadre de la conciliation, de la remplacer par une autorisation de crédit de trésorerie de 1 700 000 euros tout en la transférant de la société Développement des véhicules de loisirs à la société Narbonne Accessoires,
- elle doit donc bien bénéficier du privilège de l'article L. 611-11 du code de commerce pour la somme de 1 700 000 euros, ou à tout le moins, pour la somme de 938 000 euros.

La caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc a développé ses conclusions de rapport à justice sur la recevabilité de l'appel, et a demandé à la cour, en cas de réformation du jugement entrepris, de constater qu'elle bénéficie du privilège de l'article L. 611-11 du code de commerce pour son apport en trésorerie de 700 000 euros et de rejeter la demande de la société appelante au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société HSBC a développé ses conclusions de rapport à justice sur la recevabilité de l'appel et d'appel incident tendant à l'infirmation du jugement entrepris et s'opposant à toute condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient que le premier juge a méconnu les dispositions de l'article L. 611-11 du code de commerce en faisant bénéficier du privilège qu'il institue des sommes ne constituant pas des apports au sens de ce texte.
La Caisse d'épargne et de prévoyance du Languedoc-Roussillon, la BNP-Paribas et la société Financo s'en sont rapportées à justice.

Les autres intimés, régulièrement assignés à personne, n'ont pas comparu ni se sont fait assister ou représenter.

La procédure a été communiquée au ministère public le 8 décembre 2009.

MOTIFS DE LA DECISION
1 / Sur la recevabilité de l'appel
Attendu qu'aux termes de l'article R. 661-3 du code de commerce, le délai d'appel des décisions en matière de conciliation est de dix jours à compter de leur notification ;
Attendu que l'absence de mention ou la mention erronée dans l'acte de notification d'un jugement de la voie de recours ouverte, de son délai ou de ses modalités, ne fait pas courir le délai de recours ;
Qu'en l'espèce, la lettre du 5 octobre 2009 de notification du jugement par le greffe du tribunal de commerce de Narbonne mentionne : « … le délai de recours par une voie ordinaire est d'un mois en matière contentieuse ; il est de quinze jours en matière gracieuse » ;
Que cette mention relative au délai d'appel étant erronée et imprécise, la notification n'a pas fait courir ledit délai ;
Que, dès lors, l'appel interjeté par la société Ge Money Bank est recevable ;
Attendu que l'article L. 611-10 du code de commerce prévoit que le jugement d'homologation de l'accord de conciliation est susceptible d'appel de la part des parties à cet accord en cas de contestation relative au privilège mentionné à l'article L. 611-11 du même code ;
Que tel est le cas de la voie de recours exercée par la société Ge Money Bank, partie à l'accord homologué, qui conteste les montants retenus par le premier juge au titre du privilège susvisé ;
2 / Sur le fond
Attendu que selon l'alinéa 2 de l'article R. 611-40 du code de commerce, le jugement homologuant l'accord de conciliation précise les montants garantis par le privilège institué par l'article L. 611-11 du même code, lequel bénéficie aux personnes ayant consenti un nouvel apport en trésorerie au débiteur en vue d'assurer la poursuite d'activité de l'entreprise et sa pérennité, mais non aux créanciers signataires de l'accord au titre de leurs concours antérieurs à l'ouverture de la conciliation, lesdits créanciers ne pouvant, aux termes du dernier alinéa de ce texte, bénéficier directement ou indirectement de cette disposition ;
Attendu que l'accord de conciliation signé par les parties les 4 et 7 septembre 2009 et homologué par le tribunal, comporte notamment une annexe 6 constituée d'un tableau de synthèse reprenant les engagements de chacune des parties (pages 26 et 28 de l'accord) ;
Que ce tableau comporte, entre autres, deux colonnes intitulées « New Money » et « Montant des nouveaux apports aux nouveaux bénéficiaires », correspondant, respectivement, aux apports nou-veaux consentis par les établissements financiers (« New Money ») et aux concours antérieurement consentis à certaines sociétés du « Groupe Narbonne Accessoires » et transférés à d'autres dans le cadre de l'accord (« Montant des nouveaux apports aux nouveaux bénéficiaires ») ;
Attendu qu'aux termes mêmes des dispositions légales précitées, seuls les nouveaux apports bénéficient du privilège qu'elles instituent ;
Que, dès lors, c'est par une fausse appréciation que le premier juge a consenti ce privilège au titre des sommes portées dans ces deux colonnes, c'est-à-dire tant les apports nouveaux que les concours antérieurs à la conciliation ;
Que le jugement entrepris sera donc infirmé de ce chef, et les montants garantis par le privilège de l'article L. 611-11 du code de commerce, mentionnés comme indiqué au dispositif du présent arrêt ;
Attendu que, concernant la Banque populaire occitane, alors qu'elle avait antérieurement consenti à la société de Développement des véhicules de loisirs une facilité de caisse de 762 000 euros, elle a accepté, dans le cadre de la procédure de conciliation, de lui substituer un billet de trésorerie de 1 700 000 euros, puis de transférer ce billet de la société de Développement des véhicules de loisirs à la société Narbonne Accessoires ;
Que l'apport de trésorerie ainsi réalisé s'élève à 938 000 euros (1 700 000-762 000), montant pour lequel la banque doit bénéficier du privilège institué par l'article L. 611-11 du code de commerce ;
Attendu qu'il n'y a pas lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Que les dépens seront laissés à la charge du Trésor public ;

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, après débats en chambre du conseil et communication de la procédure au ministère public,
Déclare l'appel recevable.
Infirme le jugement entrepris sur les montants garantis par le privilège institué par l'article L. 611-11 du code de commerce.
Et statuant à nouveau, précise que les montants garantis par le privilège institué par l'article L. 611-11 du code de commerce sont les suivants :
Banque commerciale pour le marché de l'entreprise 150 000 €
BNP Paribas 500 000 €
Banque populaire du Val de France 140 000 €
Crédit agricole du Languedoc 700 000 €
HSBC 950 000 €
Crédit Lyonnais 750 000 €
Banque populaire occitane 938 000 €
Financo 350 000 €
Le confirme pour le surplus.
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.
Dit qu'en application des articles R. 611-41 le présent arrêt sera notifié aux sociétés débitrices et aux créanciers signataires de l'accord et communiqué au conciliateur et au ministère public.
Ordonne les mesures de publicité prévues à l'article R. 611-43 du code de commerce.
Laisse les dépens à la charge du Trésor public.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 09/7510
Date de la décision : 02/02/2010

Analyses

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 26 juillet 2005) - Prévention des difficultés - Procédure de conciliation

Le privilège institué par l'article L. 611-11 du code de commerce ne bénéficie qu'aux seules personnes ayant consenti un nouvel apport en trésorerie au débiteur en vue d'assurer la poursuite d'activité de l'entreprise et sa pérennité, et non aux créanciers qui lui avaient accordé des concours antérieurement à la procédure de conciliation, quand bien même, alors que le débiteur étant constitué d'un groupe de sociétés, ces concours auraient été, dans le cadre de l'accord de conciliation, transférés à d'autres sociétés du groupe que celles à qui ils avaient été initialement octroyés


Références :

Article L. 611-11 du code de commerce.

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Narbonne, 05 octobre 2009


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2010-02-02;09.7510 ?
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