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24/07/2018 | FRANCE | N°16/00459

France | France, Cour d'appel de Lyon, 8ème chambre, 24 juillet 2018, 16/00459


N° RG 16/00459









Décision du

Tribunal de Commerce de LYON

Au fond

du 16 décembre 2015



RG : 2013J667







SA X... A... VILLAGE



C/



Société ROLLET





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



8ème chambre



ARRET DU 24 JUILLET 2018







APPELANTE :



SA X... A... VILLAGE, anciennement dénommée SA INTERMAP - INTERNATIO

NAL METROPOLITAN AUTOMOTIVE PROMOTION

représentée par ses dirigeants légaux

[...]



Représentée par la SELARL LAFFLY & ASSOCIES - LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON (toque 938)

Assistée de Me Bruno Y..., avocat au barreau de PARIS







INTIMEE :



S.A.S. ...

N° RG 16/00459

Décision du

Tribunal de Commerce de LYON

Au fond

du 16 décembre 2015

RG : 2013J667

SA X... A... VILLAGE

C/

Société ROLLET

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

8ème chambre

ARRET DU 24 JUILLET 2018

APPELANTE :

SA X... A... VILLAGE, anciennement dénommée SA INTERMAP - INTERNATIONAL METROPOLITAN AUTOMOTIVE PROMOTION

représentée par ses dirigeants légaux

[...]

Représentée par la SELARL LAFFLY & ASSOCIES - LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON (toque 938)

Assistée de Me Bruno Y..., avocat au barreau de PARIS

INTIMEE :

S.A.S. ROLLET

représentée par ses dirigeants légaux

[...]

Représentée par la SCP BAUFUME ET SOURBE, avocat au barreau de LYON (toque 1547)

Assistée de la SELARL CROSET-BROQUET, avocat au barreau de LYON

******

Date de clôture de l'instruction : 11 Septembre 2017

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 29 Mai 2018

Date de mise à disposition : 03 Juillet 2018, prorogée au 24 Juillet 2018, les avocats ayant été avisés.

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Agnès CHAUVE, président

- Dominique DEFRASNE, conseiller

- Catherine ZAGALA, conseiller

assistés pendant les débats de Marine DELPHIN-POULAT, greffier

A l'audience, Dominique DEFRASNE a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Agnès CHAUVE, président, et par Marine DELPHIN-POULAT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

EXPOSE DU LITIGE

La société Intermap France, aujourd'hui dénommée X... A... Village France et qui distribue sur le territoire national les véhicules des marques du groupe Fiat, a entrepris dans le courant des années 2007 et 2008, sur plusieurs de ses sites, d'importants travaux confiés à la société Entreprise Générale du Bâtiment ACB, en qualité d'entreprise générale.

Un marché à forfait d'un montant de 2'750'800 euros TTC a été conclu le 27 novembre 2007 entre la société Intermap et la société ACB, intéressant le site de Lyon Vaise, situé [...], après permis de construire délivré le 23 juillet 2007 par la mairie de Lyon.

La société Rollet, spécialisée dans l'activité de métallerie, menuiseries aluminium-PVC, est intervenue sur le chantier.

La société Intermap a rencontré des difficultés avec la société ACB en raison de multiples malfaçons et désordres.

La société ACB a été placée en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Lyon, en date du 26 mai 2009, puis déclarée en liquidation judiciaire par jugement de ce même tribunal, en date du 5 juillet 2012.

Entre-temps, la société ACB a présenté à la société Intermap deux décomptes définitifs correspondant au marché de base et à des travaux supplémentaires, lesquels ont été, en grande partie, réglés.

Par acte d'huissier du 6 juillet 2009, la société ACB et ses mandataires judiciaires ont assigné la société Intermap devant le juge des référés du tribunal de commerce de Lyon aux fins d'expertise judiciaire.

Par ordonnance du 16 décembre 2009, monsieur Z... a été désigné en qualité d'expert.

Par courrier du 7 septembre 2009, la société Rollet, de son côté, a écrit à la société Intermap en faisant valoir sa qualité de sous-traitant de la société ACB pour lui demander de lui payer directement la somme de 164'777,70 euros TTC restant due sur le montant de ses travaux.

Parallèlement, la société Rollet a déclaré à la procédure collective une créance qui été admise, après contestation, pour un montant de 160'806,98 euros par décision du juge-commissaire en date du 22 juin 2010.

Par courrier du 16 septembre 2010, elle a mis en demeure la société Intermap d'avoir à lui payer ladite somme.

Par acte d'huissier du 20 mars 2013, la société Rollet a fait ensuite assigner la société Intermap devant le tribunal de commerce de Lyon pour la voir condamner, sur le fondement des articles 14-1 de la loi du 31 décembre 1975 et 1382 du code civil, à lui payer la somme principale de 160'806,98 euros TTC en réparation de son préjudice subi par équivalence du solde des travaux impayés, outre celle de 20'000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive.

Par jugement du 9 mai 2014, le tribunal de commerce a sursis à statuer dans l'attente du résultat de l'expertise judiciaire.

M. Z..., expert, a déposé son rapport le 29 août 2014.

Par jugement du 16 décembre 2015, le tribunal de commerce a :

' condamné la société Intermap à régler à la société Rollet la somme de 112165,40euros, outre intérêts de droit à compter de la première mise en demeure du 7 décembre 2009,

' ordonné la capitalisation des intérêts,

' débouté la société Rollet de ses autres demandes,

' rejeté l'ensemble des demandes de la société Intermap,

' condamné la société Intermap à régler à la société Rollet la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

' ordonné l'exécution provisoire du jugement,

' condamné la société Intermap aux entiers dépens d'instance et tous frais d'exécution.

Par déclaration du 19 janvier 2016, la société X... A... Village France, anciennement dénommée Intermap, a interjeté appel de cette décision.

La société X... demande à la cour :

' d'infirmer le jugement querellé sur les condamnations prononcées à son encontre,

' de juger la société Rollet irrecevable et à défaut, mal fondée en toutes ses demandes à son encontre,

' à titre subsidiaire, de juger que toute demande d'indemnisation formulée par la société Rollet à son encontre au titre des factures impayées par la société ACB ne peut excéder la somme de 66981,42 euros, et tout au plus, 93533,78 euros,

' en tout état de cause, de juger la société Rollet irrecevable et à défaut, mal fondée en son appel incident,

' de condamner la société Rollet à lui payer la somme de 15000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

A l'appui de ses prétentions, elle fait valoir :

' que la société Rollet ne justifie pas de sa qualité de sous-traitant de la société ACB, la société Rollet ayant essentiellement fourni à la société ACB des éléments de menuiserie et de serrurerie, et non la réalisation de prestations pouvant caractériser un contrat d'entreprise, de sorte que le contrat signé entre ces deux sociétés doit être requalifié en contrat de vente, exclusif de l'application de la loi du 31 décembre 1975,

' que le marché à forfait d'un montant de 2'300'000 euros HT qui la liait à la société ACB a été entièrement soldé auprès de la société ACB avant l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, en dehors d'un montant de 107480 euros TTC conservé compte tenu des non façons, malfaçons et désordres relevés,

' que la société Rollet n'a produit aucun devis ni marché à l'appui de son assignation, et que les pièces produites par elle devant la juridiction ont toutes été élaborées pour les besoins de la cause et sont dépourvues de toute sincérité et fiabilité,

' qu'aucune facture ne lui a été adressée par la société Rollet et que cette dernière ne saurait invoquer la moindre faute à son encontre, dès lors que le préjudice allégué a pour cause exclusive le non respect par sa propre faute de la délégation de paiement convenue entre elle et la société ACB,

' que le solde restant dû par la société ACB à la société Rollet au titre du chantier Fiat Vaise n'excède pas la somme de 80109,79 euros TTC,

' que dans le cadre de la responsabilité délictuelle, aucune TVA n'est applicable aux demandes d'indemnisation formulée par la société Rollet au titre de factures impayées par la société ACB,

' que la société Rollet ne prouve pas qu'elle a eu connaissance de sa présence sur les chantiers qu'elle revendique, ni de surcroît, en qualité de sous-traitant, et avant que la société ACB ne soit réglée de l'intégralité des factures qu'elle a présentées au titre des marchés.

La société Rollet demande, de son côté, à la cour :

' de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a condamné la société X... à lui payer une somme de 112165,40 euros, outre intérêts de droit à compter de la mise en demeure du 7 septembre 2009, outre capitalisation des intérêts,

' de réformer le jugement s'agissant des autres chantiers X... / ACB (hors le chantier Fiat Vaise) et des dommages et intérêts qu'elle a sollicités,

' faisant droit à son appel incident, de condamner la société X... à lui payer les sommes suivantes :

* 160806,98 euros à valoir sur réparation du préjudice subi par équivalence du solde des travaux impayés exécutés en qualité de sous traitant de l'entreprise principale ACB, outre intérêts de droit à compter de la mise en demeure du 7 septembre 2009, outre capitalisation des intérêts,

* 20000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive mauvaise foi de l'appelante,

' ajoutant à la condamnation retenue par le jugement, de condamner la société X... au paiement d'une somme de 12000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Elle fait valoir :

' que la société X... ne peut contester qu'elle avait connaissance de son intervention en qualité de sous-traitant de l'entreprise principale ACB sur les différents chantiers, notamment le chantier Fiat Vaise, la société X... ayant elle-même présentée la société ACB comme étant une entreprise générale qui soustraite l'intégralité des travaux,

' que ce sont bien des prestations de fourniture et de pose qu'elle a réalisées,

' que la société X..., maître d'ouvrage, a engagé sa responsabilité délictuelle à son égard, société sous-traitante demeurée impayée d'un solde de travaux conséquent sur le chantier Fiat Vaise, mais également sur d'autres chantiers dès lors que la société X... ne lui a pas permis d'être valablement agréée comme sous-traitante par l'intermédiaire de l'entreprise principale ACB, à défaut d'avoir mis en demeure cette dernière de remplir ses obligations à l'égard de son sous-traitant,

' que c'est bien l'intégralité du solde de travaux dû à l'entreprise sous-traitante qui doit être couverte par l'indemnisation et ce, sans distinction de la TVA applicable, dès lors qu'il s'agit pour l'entreprise sous-traitante de couvrir des prestations effectivement réalisées sur les chantiers,

' que l'expert judiciaire retient bien le fait que, pour elle, les quantités de travaux réalisés correspondent aux quantités facturées à la société ACB et qu'il lui reste dû la somme de 112165,40 euros TTC ; en retenant au titre des désordres, malfaçons et autres finitions, seulement 250 euros HT pour réglage du système de fermeture de la porte automatique coulissante donnant sur la rue Marietton, tout en constatant qu'elle est intervenu au cours d'expertise pour la reprise d'un boulon manquant pour finition des escaliers en colimaçon,

' que si la délégation de paiement n'a pas été rendue possible, c'est parce qu'elle n'a pas été agréée par le maître d'ouvrage selon la procédure qui demeurait à l'initiative de l'entreprise principale, la société ACB.

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1975, la sous-traitance est l'opération par laquelle un entrepreneur confie par un sous-traité et sous sa responsabilité à une autre personne, appelée « sous-traitant » l'exécution de tout ou partie du contrat d'entreprise ou d'une partie du marché public conclu avec le maître de l'ouvrage ;

Attendu, en l'espèce, s'agissant du chantier de Lyon Vaise, qui constitue l'objet principal du litige, que la société Rollet produit les conditions générales d'un contrat de sous-traitance signée par elle et la société ACB, à la date du 24 septembre 2008, pour la somme globale et forfaitaire de 461'654,21 euros HT ainsi qu'un devis établi par elle le 18 décembre 2008, soit trois mois plus tard, et d'un montant inférieur de 385'998,50euros HT ;

Attendu qu'il y a lieu toutefois de constater que ce devis, les quatre situations de septembre, octobre, novembre 2008 et janvier 2009 ainsi que le décompte définitif du 27 février 2009 qui indique un autre montant de marché de 387'298,90 euros HT, font tous mention de la fourniture d'éléments de menuiserie et de serrurerie, sans prestation de pose ou de mise en 'uvre, à la seule exception de la fourniture et de la pose de ferme porte sur porte métallique au prix de 775 euros HT ;

Qu'il n'apparaît pas que les éléments fournis par la société Rollet sont des produits individualisés, façonnés la demande et non substituables ; que l'attestation, produite devant la cour, de l'expert-comptable de cette société qui se contente d'affirmer, en termes généraux, qu'elle transformerait des matières premières avant de les poser ne peut suffire à démontrer cette individualisation des fournitures ;

Qu'il n'existe pas davantage de contrat d'entreprise ;

Attendu, dans ces conditions, que la preuve de la qualité de sous-traitant de la société Rollet, en ce qui concerne le chantier Lyon Vaise, n'est pas rapportée ;

Qu'il s'ensuit que même si l'expert Z... a retenu que la société ACB restait devoir à la société Rollet la somme de 112'165,40 euros au titre de son intervention sur ce chantier, la société Rollet ne peut se prévaloir des dispositions de la loi du 31 décembre 1975 et notamment, rechercher la responsabilité délictuelle de la société X..., maître de l'ouvrage, sur le fondement de l'article 14-1 de ladite loi ;

Attendu que la société Rollet qui se prévaut de l'admission de sa créance au passif de ACB à hauteur de 160'806,98 euros, prétend également rechercher la responsabilité délictuelle du maître de l'ouvrage pour d'autres chantiers que le chantier de Lyon Vaise, examiné par l'expert judiciaire (chantiers de Vienne, Le Cannet, Coignères, Boulogne Billancourt) ;

Qu'elle ne produit pas de contrats de sous-traitance concernant ces chantiers mais seulement des factures de travaux et ne précise pas le détail des sommes réclamées pour chacun d'eux ;

Que par ailleurs, ainsi que l'ont relevé à cet égard les premiers juges, elle ne démontre nullement que la société Intermap avait connaissance de son intervention en qualité de sous-traitant sur ces chantiers, condition nécessaire à la mise en 'uvre de l'action en responsabilité découlant de l'article 14-1 de la loi de 1975 ;

Attendu en conséquence que la société Rollet doit être également déboutée de ses prétentions sur ce point ;

Attendu le jugement querellé sera infirmé ;

Attendu que la société Rollet supportera les entiers dépens ;

Qu'elle devra régler à la société X... la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement querellé et statuant à nouveau,

Déboute la SAS Rollet de l'intégralité de ses prétentions,

Condamne la SAS Rollet à payer à la SA X... A... Village France, anciennement dénommée Intermap, la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SAS Rollet aux dépens de première instance d'appel qui seront recouvrés, conformément à l'article 699 du code de procédure civile, par ceux des mandataires des parties qui en ont fait la demande.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 16/00459
Date de la décision : 24/07/2018

Références :

Cour d'appel de Lyon 08, arrêt n°16/00459 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-07-24;16.00459 ?
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