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09/06/2017 | FRANCE | N°16/02331

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale c, 09 juin 2017, 16/02331


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR





R.G : 16/02331





ADAPEI [Localité 1]



C/

[K]

[H]







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MONTBRISON

du 15 Mars 2016

RG : F 15/00005











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE C



ARRÊT DU 09 JUIN 2017







APPELANTE :



ADAPEI [Localité 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]
>[Adresse 1]



représentée par Me Christian BROCHARD de la SCP JOSEPH AGUERA & ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON





INTIMÉES :



[B] [K]

née le [Date naissance 1] 1955 à

[Adresse 2]

[Adresse 2]



représentée par Mme [C] [S] (Délégué syndical ouvrier)





[D] [H] épou...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

R.G : 16/02331

ADAPEI [Localité 1]

C/

[K]

[H]

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MONTBRISON

du 15 Mars 2016

RG : F 15/00005

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE C

ARRÊT DU 09 JUIN 2017

APPELANTE :

ADAPEI [Localité 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Christian BROCHARD de la SCP JOSEPH AGUERA & ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON

INTIMÉES :

[B] [K]

née le [Date naissance 1] 1955 à

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Mme [C] [S] (Délégué syndical ouvrier)

[D] [H] épouse [E]

née le [Date naissance 2] 1972 à [Localité 2]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représentée par Mme [C] [S] (Délégué syndical ouvrier)

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 06 Avril 2017

Présidée par Elizabeth POLLE-SENANEUCH, Président magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Géraldine BONNEVILLE, Greffière.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

- Elizabeth POLLE-SENANEUCH, président

- Marie-Christine DE LA SALLE, conseiller

- Ambroise CATTEAU, vice président placé faisant fonction de conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 09 Juin 2017 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Elizabeth POLLE-SENANEUCH, Président et par Géraldine BONNEVILLE, Greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS PROCEDURE PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES.

L'association Départementale des Amis et Parents d'Enfants Inadaptés [Localité 1] (ADAPEI) est une association reconnue d'utilité publique soumise à la loi de 1901, qui intervient dans le domaine de la protection des enfants et adultes handicapés mentaux.

Elle emploie plus de 50 salariés bénéficiant de la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966, dite de l'enfance inadaptée.

Madame [D] [H] a été embauchée par l'ADAPEI en qualité d'animateur 2ème catégorie, selon contrat à durée indéterminée à temps plein. La durée contractuelle prévue est de 169 heures mensuelles.

Madame [B] [K] a été embauchée selon contrat de travail à temps partiel, en qualité d'agent ACC-CUISINE-ENTRETIEN/ASI. La durée contractuelle au dernier état de la relation de travail était de 86 heures mensuelles.

Suite à l'adoption de la Loi Aubry du 13 Juin 1998 fixant la durée légale du travail à 35 heures, deux accords cadres ont été conclus le 12 Mars et 1er Avril 1999 au sein de l'ADAPEI.

Ne parvenant pas à un accord avec les partenaires sociaux, l'ADAPEI a mis en place, de manière unilatérale, l'annualisation du temps de travail sur la base d'un horaire hebdomadaire moyen de 35 heures ou 1600 heures annuelles.

Contestant la mise en 'uvre de ces accords, le syndicat CFDT des services de santé et services sociaux [Localité 1] a le 13 août 2001 assigné l'ADAPEI devant le tribunal de grande instance de Saint Étienne aux fins de faire constater que l'association n'avait pas respecté les dispositions du code du travail dans la mise en 'uvre de l'annualisation du temps de travail faisant suite à la promulgation de la loi Aubry.

Par jugement du 13 Novembre 2002 le tribunal de grande instance de SAINT-ETIENNE a débouté le syndicat de l'ensemble de ses demandes. Le syndicat a régulièrement interjeté appel de cette décision. La cour d'appel de Lyon a selon arrêt du 25 mars 2004 confirmé le jugement déféré.

Le syndicat a formé un pourvoi en cassation.

La cour de cassation, selon arrêt du 12 juillet 2006 a cassé et annulé l'arrêt de la cour d'appel de LYON en toutes ses dispositions, renvoyant la cause et les parties devant la cour d'appel de RIOM.

La cour d'appel de renvoi a infirmé le jugement rendu par le tribunal de Saint-Étienne le 13 Novembre 2002 par arrêt du 18 Septembre 2007. Elle a ordonné une méthode de calcul de la durée annuelle du travail. L'ADAPEI [Localité 1]e a formé un pourvoi en cassation à l'encontre de cet arrêt, qui a été rejeté selon arrêt du 17 décembre 2008.

Des salariés qui avaient saisi le conseil de prud'hommes de Saint-Étienne et dont l'instance avait fait l'objet d'un sursis à statuer en attente de l'arrêt de la cour de cassation, ont demandé la réinscription de leur affaire au rôle.

Par jugement du 4 Mai 2009 le conseil de prud'hommes a débouté les salariés de leurs demandes annexes en rappel de salaire relatives à des heures de surveillance de nuit mais a condamné l'ADAPEI au paiement de rappel d'heures supplémentaires pour la période du 29 Mai 2000 au 30 Septembre 2002 pour ceux travaillant dans le secteur adulte, et du 29 mai 2000 et au 31 Mai 2003 pour ceux travaillant dans le secteur enfant.

L'ADAPEI n'a pas interjeté appel de ce jugement qu'elle a exécuté.

Le syndicat CFDT a saisi à nouveau la Cour d'appel de RIOM aux fins de faire assortir d'une astreinte les condamnations prononcées dans l'arrêt du 18 septembre 2007.

Par arrêt du 22 Juin 2010, la Cour d'appel de RIOM a rejeté cette demande.

C'est dans ce contexte que de nombreux salariés de l'ADAPEI dont Mme [H] et Mme [K] ont saisi le conseil de prud'hommes de MONTBRISON le 25 Septembre 2011 aux fins d'obtenir le paiement d'un rappel d'heures supplémentaires ou complémentaires pour la période allant du 1er Janvier 2000 au 1er Janvier 2003.

Cette procédure a fait l'objet d'une radiation le 16 Avril 2013 concernant Mme [H] et Mme [K].

Par jugement du 11 Décembre 2013 le conseil de prud'hommes de Montbrison a concernant les autres salariés:

-dit que la décision de la cour d'appel de Riom doit s'appliquer à l'ensemble des salariés, y compris aux non adhérents de la CFDT

-condamné l'ADAPEI à calculer et régler les heures supplémentaires pour la période du 1er Janvier 2000 au 1er Juin 2003 selon les modalités précisées par la cour d'appel de Riom

-condamné l'ADAPEI au paiement de la somme de 5000€ au profit de l'ensemble des salariés au titre de la discrimination syndicale

L'association ADAPEI a interjeté appel de ce jugement devant la Cour d'appel de Lyon qui a infirmé la décision des premiers juges par arrêt du 5 décembre 2014 concernant les demandes en paiement de rappel de salaire au titre des congés trimestriels et congés payés afférents mais est entrée en voie de condamnation concernant le règlement des heures supplémentaires et congés payés afférents et a en outre condamné l'ADAPEI à dommages et intérêts en réparation de son manquement dans l'exécution loyale du contrat de travail.

Suite au pourvoi en cassation formée par l'ADAPEI [Localité 1], le cour de cassation, par arrêt du 8 Septembre 2016 a censuré l'arrêt de la cour d'appel de Lyon, et a renvoyé l'affaire devant la cour d'appel de Riom.

La cour de cassation a en effet estimé que, sur la recevabilité de l'action au titre des heures supplémentaires et congés payés, la cour avait violé l'article L 111-4 du code des procédures civiles d'exécution en faisant application aux salariés de la prescription prévue à ce texte alors qu'ils n'étaient pas partie à l'arrêt du 18 septembre 2007.

Le 5 Janvier 2015 Mesdames [D] [H] et [B] [K], dont le dossier avait été disjoint, ont réinscrits leur affaire au rôle.

Par jugement du 16 Mars 2016, le conseil de prud'hommes de Monbrison, section activités diverses a :

- dit que les demandes présentées par Madame [D] [H] et Madame [B] [K] ne sont pas prescrites et donc parfaitement recevables,

- condamné l'ADAPEI à calculer et à régler pour chacune des salariées le rappel d'heures supplémentaires pour la période allant du 1er janvier 2000 au 1er juin 2003 selon les modalités suivantes :

* pour les salariés bénéficiant de 9 jours de congés trimestriels :

365 fours-104 jours de repos hebdomadaire- 25 jours de congés payés-11 jours fériés (tels que prévus par l'article L 222 1 du code du travail)- 9 Jours de congés trimestriels = 216jours/5 x 35=1512 heures,

* pour les salariés bénéficiant de 15jours de congés trimestriels :

365 jours-104jours de repos hebdomadaire-25 jours de congés payés-11 jours fériés- 15 jours de congés trimestriels = 210 jours/5 x 35 = 1470 heures,

* pour les salariés bénéficiant de 18jours de congés trimestriels :

365 jours-104jours de repos hebdomadaire- 25 jours de congés payés-11 jours fériés-18jours de congés trimestriels = 207 jours/5 x 35 = 1449 heures,

-condamné l'ADAPEI à verser Madame [D] [H] et Madame [B] [K] la somme de 300 Euros chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

débouté Madame [D] [H] et Madame [B] [K] au surplus de leurs demandes

débouté l'ADAPEI de sa demande reconventionnelle sur le fondement de l'article 700 CPC

condamné l'ADAPEI aux entiers dépens de l'instance ;

L'association ADAPEI a régulièrement interjeté appel de ce jugement.

Mesdames [H] et [K] ont formé appel incident par actes séparés qui ont fait l'objet d'une ordonnance de jonction.

Dans ses conclusions visées, communiquées et reprises oralement lors de l'audience, l'ADAPEI demande à la Cour de :

- surseoir à statuer en attente de l'arrêt de la Cour d'appel de Riom,

- débouter Madame [D] [H] et Madame [B] [K] de l'ensemble de leurs demandes

- les condamner chacune à la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC

- les condamner aux entiers dépens d'instance .

Dans leurs conclusions visées, communiquées et reprises oralement lors de l'audience, Madame [D] [H] et [B] [K] demandent à la Cour de :

- rejeter la demande de sursis à statuer,

- juger qu'elles n'ont pas reçu le rappel de salaire des heures supplémentaires suite à la régularisation ordonnée par la décision de la Cour d'appel de Riom du 18 Septembre 2007 confirmée par l'arrêt de la Cour de cassation du 17 Décembre 2008 et qui condamnait l'ADAPEI à calculer et régler le rappel d'heures supplémentaires des salariés pour la période allant du 1er Janvier 2000 jusqu'au 1er Juin 2003,

- juger que le point de départ du délai de la prescription quinquennale en matière de rappel de salaire est le jour de la confirmation de l'arrêt de la cour d'appel de Riom du 18 Septembre 2007 par la cour de cassation, le 17 Décembre 2008,

En conséquence,

- condamner l'ADAPEI à verser à Madame [H] la somme de 5233,78€ et à Madame [K] la somme de 3094,47 euros à titre de rappel de salaire (congés payés inclus),

- condamner l'ADAPEI à leur verser chacune la somme de 1500 euros à titre de dommages et intérêts pour mauvaise foi dans l'exécution du contrat de travail ,

- condamner l'ADAPEI à verser à leur verser chacune la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner l'ADAPEI aux intérêts légaux.

L'ADAPEI abandonne toutefois à l'audience de ce jour la demande de sursis à statuer qu'elle avait formulée.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé, pour un plus ample exposé des moyens des parties, aux conclusions qu'elles ont soutenues oralement lors de l'audience.

MOTIVATION.

Sur la demande de sursis à statuer .

Cette demande a été abandonnée par l'ADAPEI à l'audience du 6 AVRIL 2017, de sorte qu'il n'y a plus lieu de statuer de ce chef.

Sur l'irrecevabilité des demandes de rappels d'heures supplémentaires pour la période du 1er septembre 2000 au 1er juin 2002 pour cause de prescription.

L'ADAPEI considère en effet que l'action menée par Mme [H] et Mme [K] est irrecevable dès lors que celles-ci ne peuvent, à l'appui de leur demande, invoquer à leur profit un droit propre qu'aurait fait naître l'arrêt de la cour d'appel de RIOM du 18 Septembre 2007.

Elle rappelle en effet que cet arrêt est intervenu dans le cadre de l'action collective du syndicat CFDT et non de l'action en substitution de ce syndicat, ce que Mme [H] et Mme [K] reconnaissent.

Au surplus, et quand bien même ce droit propre serait retenu, elle considère que l'action serait irrecevable car prescrite, la période litigieuse s'étant en effet achevée au plus tard le 1er juin 2003, de sorte qu'au regard de la prescription quinquennale prévue à l'article 2224 du code civil, les parties auraient dû agir au plus tard le 1er juin 2008.

Or, elles ont agi bien après cette date.

Elle estime par ailleurs que la motivation retenue par la Cour d'appel de LYON dans son arrêt du 5 décembre 2014 ne peut être ici appliquée, la prescription décennale ayant permis de déclarer recevable les demandes d'heures supplémentaires ne pouvant en effet bénéficier qu'au créancier qui était partie et représentée dans la procédure ayant conduit au jugement dont il invoque les effets. Or, dans cette procédure l'action avait été menée par le syndicat CFDT dans l'intérêt collectif de la profession, sans que les salariés intimés s'y joignent.

Elle estime en outre que Mme [H] et Mme [K] ne peuvent prétendre que la prescription est interrompue par la reconnaissance du débiteur du droit .

Mme [H] et Mme [K] considèrent au contraire que :

- l'action du syndicat CFDT ayant conduit à l'arrêt de la Cour d'appel de RIOM de 2007 aurait dû conduire l'ADAPEI à calculer et régler le rappel d'heures supplémentaires jusqu'au 1er octobre 2002 pour les salariés travaillant dans le secteur adultes et jusqu'au 1er juin 2003 pour les salariés travaillant dans le secteur enfants , à l'ensemble de son personnel et non seulement à certains des adhérents de la CFDT, comme cela résulte du dispositif de cet arrêt confirmé par la Cour de cassation, de sorte qu'il est de principe que l'action du syndicat professionnel visant à la réparation d'un préjudice indirect subi par la profession tire bien son fondement du préjudice direct subi par les salariés du fait du non-respect par l'employeur de leurs droits individuels en violation de la réglementation,

- l'ADAPEI connait si bien ce principe que suite à un arrêt du 8 janvier 2002 rendu par la Cour d'appel de LYON elle a suite à une action intentée par le syndicat CFDT l'ayant condamnée à rappel de salaire , s'est conformée à cette décision, sans qu'aucun salarié n'ait à agir individuellement en justice,

- l'action individuelle des salariés n'est pas prescrite , le point de départ de la prescription quinquennale ayant commencé à courir, comme a eu à le décider la Cour de cassation, jusqu'à l'issue de la procédure judiciaire initiée par le syndicat, c'est-à-dire en l'espèce le 17 décembre 2008 ( arrêt de la Cour de cassation statuant sur l'arrêt de la Cour d'appel de Riom de 2007)

- l'ADAPEI n'a pas exécuté le contrat de travail de bonne foi. Elle a été condamnée de ce chef par l'arrêt de la Cour d'appel de Lyon du 5 décembre 2014 et ne peut en conséquence invoquer la prescription pour échapper aux condamnations dont elle a fait l'objet tant par la Conseil des prud'hommes de SAINT ETIENNE en 2009, que par l'arrêt de la Cour d'appel de RIOM en 2007 et celui de la Cour de cassation en 2008.

- l'ADAPEI doit être condamnée au paiement de la somme de 1500 euros à titre de dommages et intérêts pour mauvaise foi dans l'exécution du contrat de travail.

Le syndicat peut ester en justice conformément à l'article L 2132-3 du code du travail, soit pour la défense de ses intérêts propres soit pour la défense de ses adhérents.

En l'espèce, si le syndicat CFDT des services de santé et services sociaux [Localité 1] a agi en 2001 devant le tribunal de grande instance de SAINT-ETIENNE pour demander l'application des dispositions conventionnelles et légales au bénéfice de la collectivité des salariés concernés et non en paiement de sommes déterminées au profit de personnes dénommées, il n'en reste pas moins que l'arrêt de la cour d'appel de RIOM du 18 septembre 2007 intervenu dans le cadre de cette action a, dans son dispositif, clairement fixé les seuils de déclenchement des heures supplémentaires en fonction de la durée des congés trimestriels bénéficiant aux salariés, ordonnant ensuite à l'ADAPEI de calculer et régler le rappel d'heures supplémentaires en découlant jusqu'au 1er octobre 2002 pour les salariés travaillant dans le secteur adultes et jusqu'au 1er juin 2003 pour ceux travaillant dans le secteur enfants..

L'arrêt de la Cour de cassation du 17 décembre 2008, en rejetant le pourvoi exercé par l'ADAPEI, a validé la méthode de calcul définie par l'arrêt de la cour d'appel de RIOM ainsi que la régularisation en découlant dans les conditions ci-dessus rappelées.

Certes le Cour de cassation censure toutes décisions qui, dans le cadre de l'action collective d'un syndicat, reconnaîtraient le principe de l'octroi d'avantages individuels aux salariés et du reste, la Cour de cassation a validé l'arrêt de la Cour d'appel de Riom en considérant que l'atteinte à l'intérêt collectif de la profession résultait de la mauvaise interprétation par l'ADAPEI des dispositions du code du travail relatives au temps de travail et que l'action du syndicat ne tendait pas au paiement de sommes déterminées à des personnes nommément désignées.

Toutefois, l'atteinte constatée à l'intérêt collectif de la profession constituée par une mauvaise interprétation des dispositions légales et conventionnelles régissant la durée annuelle du travail et les congés trimestriels des salariés de l'ADAPEI permet aujourd'hui à ceux-ci, dans la limite de la prescription, d'agir, aux fins de rappel d'heures supplémentaires éventuellement acquises, sur la base du seuil de déclenchement retenu dans l'arrêt de la Cour d'appel de RIOM et validé par la Cour de cassation.

Mesdames [H] et [K] ont donc pu légitimement agir pour le paiement de leurs heures supplémentaires en invoquant à leur profit la méthode de calcul posée par ces décisions.

Cette action personnelle des salariés ne peut toutefois bénéficier de la prescription décennale de l'article L 111-4 du code des procédures civiles d'exécution puisque les salariées n'étaient pas partie à l'arrêt du 18 septembre 2007 et ne peuvent donc demander l'exécution forcée de cette décision.

Leur action est donc soumise à la prescription quinquennale, restant à déterminer le point de départ de cette prescription .

Il résulte de la lecture des bulletins de paie des intimées , des pièces versées aux débats et notamment des procès-verbaux de réunions du comité d'entreprise, particulièrement ceux datés du 19 novembre 2007 et du 21 janvier 2008, que Mesdames [K] et [H] n'ont été en mesure de connaître le statut collectif dont relevait l'ADAPEI concernant le temps de travail et le seuil de déclenchement des heures supplémentaires, qu'à l'issue de la procédure engagée par le syndicat CFDT des services de santé et services sociaux [Localité 1] et qui, sur les principes rappelées ci-dessus a abouti à la décision de la Cour de cassation du 17 décembre 2008.

Partant, c'est à cette date qu'a couru la prescription quinquennale s'appliquant à l'action en paiement d'heures supplémentaires présentées par Mesdames [K] et [H].

Celles-ci ayant agi à cette fin le 25 septembre 2011, il apparaît que leur action n'est pas prescrite et est donc recevable, comme l'ont retenu justement les premiers juges.

Sur le bien fondé des demandes de rappel au titre des heures supplémentaires.

Se basant sur la méthode de calcul arrêtée par la cour d'appel de RIOM, Mme [K] demande la condamnation de l'ADAPEI au paiement de la somme de 3094,47 euros à titre de rappel de salaire ( congés payés inclus) et Mme [H] demande quant à elle la somme de 5233,78 euros ( congés payés inclus).

L'ADAPEI ne discute pas les chiffrages opérés par les salariés et ne remet pas en cause le nombre d'heures supplémentaires de Mme [H] salariée à temps complet mais estime la demande de Mme [K] salariée à temps partiel mal fondée, cette salariée ne démontrant pas, selon elle, avoir franchi les seuils fixés par la cour d'appel de RIOM.

Il convient de rappeler d'abord que la cour d'appel de RIOM a reconnu d'une part que les jours de congés trimestriels doivent être déduits de la durée annuelle de travail et a ordonné une méthode de calcul de la durée totale annuelle de travail suivante :

- pour les salariés bénéficiant de 9 jours de congés trimestriels : 365 jours ' 104 jours de repos hebdomadaire- 25 jours de congés payés ' 11 jours fériés ( tels que prévus par l'article L 222-1 du code du travail) ' 9 jours de congés trimestriels=216 jours,

216:5x35=1512 heures,

- pour les salariés bénéficiant de 15 jours de congés trimestriels : 365 jours ' 104 jours de repos hebdomadaire- 25 jours de congés payés ' 11 jours fériés ( tels que prévus par l'article L 222-1 du code du travail) ' 15 jours de congés trimestriels=210 jours, 210:5x35=1470 heures,

- pour les salariés bénéficiant de 18 jours de congés trimestriels : 365 jours ' 104 jours de repos hebdomadaire- 25 jours de congés payés ' 11 jours fériés ( tels que prévus par l'article L 222-1 du code du travail) ' 18 jours de congés trimestriels=207 jours, 207:5x35=1449 heures,

D'autre part, elle a reconnu que cette durée ainsi définie constitue bien le seuil de déclenchement des heures supplémentaires: en effet, la durée annuelle de travail ainsi définie correspond à la durée légale et conventionnelle de 35 heures par semaine, de sorte que les heures de travail effectuées au-delà sont bien des heures supplémentaires et l'ADAPEI doit donc calculer le rappel d'heures supplémentaires qui en découle jusqu'au 1er octobre 2012 pour les salariés travaillant dans le secteur adultes et jusqu'au 1er juin 2013 pour les salariés travaillant dans le secteur enfants.

Ce faisant, la cour d'appel de RIOM a invalidé le mode de calcul choisi par l'employeur pour l'annualisation du temps de travail et plus précisément la prise en compte des congés trimestriels pour déterminer la durée annuelle du travail, l'ADAPEI n'ayant pas déduit de la durée annuelle du travail les jours de congés trimestriels.

Du reste, la Cour de cassation dans son arrêt de 2006 avait cassé l'arrêt de la cour d'appel de LYON en 2004, lui reprochant de ne pas avoir recherché si la durée effective pratiquée par le salariés après l'annualisation n'était pas plus longue que celle à laquelle ils auraient été soumis sans sa mise en 'uvre.

C'est bien ce que soutiennent aujourd'hui les salariées, à savoir qu'en ayant calculé la durée annuelle du travail en y intégrant les jours de congés trimestriels , l'ADAPEI avait allongé leur durée effective du travail et qu'en conséquence des heures supplémentaires leur étaient dues.

Concernant Mme [K], salariée à temps partiel, il apparaît établi qu'elle bénéficiait de congés trimestriels, comme en attestent ses fiches de paie et que l'employeur n'avait pas déduit ces jours de congés de son temps de travail annuel, de sorte qu'il en résulte que, comme Mme [H], salariée à temps complet, elle avait nécessairement accompli les heures supplémentaires résultant de la différence entre le temps de travail annuel décompté sans déduction des congés trimestriels et le temps de travail annuel décompté après déduction des congés trimestriels.

Dans ces conditions, il sera fait droit à la demande de Mme [K] salariée à temps partiel, comme à la demande de Mme [H] salariés à temps complet , les chiffrages n'étant pas discutés s'agissant des heures supplémentaires comme des congés payés afférents .

Il sera donc alloué à Mme [K] la somme de 3094,47 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires, somme incluant les congés payés et à Mme [H] la somme de 5233,78 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires, somme incluant les congés payés .

Le jugement déféré doit être en conséquence confirmé en ce qu'il a retenu le principe du seuil de déclenchement des heures supplémentaires mais sera complété par la condamnation de l'ADAPEI aux sommes susvisées.

Sur la demande de dommages et intérêts.

Mesdames [K] et [H] demandent chacune la condamnation de l'ADAPEI au paiement de la somme de 1500 euros à titre de dommages et intérêts non au titre de la discrimination mais de l'exécution déloyale du contrat de travail.

L'article L 1222-1 du code du travail pose le principe d'exécution de bonne foi du contrat de travail.

En l'espèce, au regard de la complexité du litige soumis, de l'arrêt de la cour de cassation intervenu en 2016, cassant l'arrêt de la cour d'appel de LYON de 2014 et renvoyant devant la cour d'appel de RIOM, de la radiation du dossier des intimés entre 2013 et 2015, de l'absence de démonstration du préjudice résultant les concernant de la non-d'exécution spontanée de l'arrêt de 2007 par l'ADAPEI, il convient , par confirmation de la décision entreprise, de rejeter leur demande de dommages et intérêts.

Il convient enfin de confirmer la décision déférée en ce qu'elle a alloué à Mesdames [K] et [H] une somme de 300 euros chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de leur allouer de ce chef en cause d'appel la somme de 500 euros chacune.

L'ADAPEI condamnée justement aux dépens de première instance sera également condamnée aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS.

CONFIRME la décision entreprise en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'elle a débouté mesdames [H] et [K] du surplus de leurs demandes

Statuant à nouveau et y ajoutant:

CONDAMNE l'ADAPEI à payer à Mme [B] [K] la somme de 3094,47 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires, somme incluant les congés payés et à Mme [D] [H] la somme de 5233,78 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires, somme incluant les congés payés .

CONDAMNE l'ADAPEI à payer à Madame [B] [K] et Mme [D] [H] pour chacune la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

LA DEBOUTE de sa demande de ce chef,

LA CONDAMNE aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

Géraldine BONNEVILLE Elizabeth POLLE SENANEUCH


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale c
Numéro d'arrêt : 16/02331
Date de la décision : 09/06/2017

Références :

Cour d'appel de Lyon SC, arrêt n°16/02331 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-06-09;16.02331 ?
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