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14/04/2017 | FRANCE | N°14/08511

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale c, 14 avril 2017, 14/08511


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR





R.G : 14/08511



[I]



C/



Association OGEC NOTRE DAME DES COLLINES



APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT-ETIENNE

du 29 Septembre 2014

RG : F 12/00403

COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE C



ARRÊT DU 14 AVRIL 2017







APPELANTE :



[G] [I]

née le [Date naissance 1] 1952

[Adresse 1]

[Adresse 2]



rep

résentée par Me Laétitia PEYRARD, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE





INTIMÉE :



Association OGEC NOTRE DAME DES COLLINES

[Adresse 3]

[Adresse 4]



représentée par Me Christine ETIEMBRE de la SELAS CABINET JURIDIQUE SAONE RHONE, avoc...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

R.G : 14/08511

[I]

C/

Association OGEC NOTRE DAME DES COLLINES

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT-ETIENNE

du 29 Septembre 2014

RG : F 12/00403

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE C

ARRÊT DU 14 AVRIL 2017

APPELANTE :

[G] [I]

née le [Date naissance 1] 1952

[Adresse 1]

[Adresse 2]

représentée par Me Laétitia PEYRARD, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

INTIMÉE :

Association OGEC NOTRE DAME DES COLLINES

[Adresse 3]

[Adresse 4]

représentée par Me Christine ETIEMBRE de la SELAS CABINET JURIDIQUE SAONE RHONE, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 10 Février 2017

Présidée par Marie-Christine DE LA SALLE, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Carole NOIRARD, Greffier placé.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

- Elizabeth POLLE-SENANEUCH, président

- Marie-Christine DE LA SALLE, conseiller

- Ambroise CATTEAU, vice-président placé faisant fonction de conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 14 Avril 2017 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Elizabeth POLLE-SENANEUCH, Président et par Géraldine BONNEVILLE, Greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Madame [G] [I] a été embauchée par l'association OGEC NOTRE DAME DES COLLINES, le 1er septembre 1982, en qualité de personnel des services administratifs et économiques, selon contrat à durée déterminée.

Elle a occupé les fonctions de chef de cuisine à compter du 1er janvier 2005, après avoir obtenu le certificat de cuisinier gestionnaire de petites collectivités.

De 2008 à 2012 elle a été membre élu du comité d'entreprise.

En 2010, l'OGEC NOTRE DAME DES COLLINES a transféré l'activité de restauration scolaire à la société SHERPAS, à effet au 1er janvier 2011.

Madame [G] [I] a été en arrêt de travail du 23 septembre au 3 octobre 2010, puis en raison d'un accident du travail, du 19 décembre 2010 au 13 février 2011.

Le transfert du contrat de travail de madame [G] [I] à la société SHERPAS a été refusé le 8 février 2011, puis autorisé le 23 août 2011 par l'inspecteur du travail, avec effet au 1er octobre 2011.

Sur recours gracieux de la salariée, le Ministre du travail a finalement annulé le 22 décembre 2011, le transfert du contrat de travail de Madame [G] [I] qui a été réintégrée dans les effectifs de l'OGEC au 1er janvier 2012.

Dans ce contexte, en juillet 2010 un accord national avec avenant a entraîné une nouvelle classification conventionnelle des salariés des services administratifs et économiques, personnels d'éducation et documentalistes.

Le 24 Févier 2011, Madame [I] s'est vue remettre sa fiche de reclassification. Son poste était classé en strate II- 14 degrés

Madame [I] a contesté ce classement et obtenu finalement son classement en strate III - 8 degrés, en avril 2012.

Elle a signé sa fiche de définition de poste le 4 juillet 2012.

Le 20 juillet 2012, Madame [G] [I], a saisi le conseil de prud'hommes de Saint Etienne.

A compter du 17 septembre 2014, elle a été placée en arrêt de travail pour longue durée. La caisse primaire d'assurance maladie lui a demandé de faire liquider sa retraite pour inaptitude.

Elle a adressé à son employeur une demande en ce sens et son contrat de travail a pris fin le 30 avril 2016.

Par jugement du 29 septembre 2014, le conseil de prud'hommes de Saint Etienne, a constaté les absences de discrimination syndicale, salariale et de harcèlement moral, a dit que Madame [G] [I] avait une classification conforme à ses fonctions et l'a déboutée de l'intégralité de ses demandes.

Madame [G] [I] a régulièrement interjeté appel du jugement déféré le 29 septembre 2014.

Dans ses conclusions, régulièrement visées, communiquées et reprises oralement à l'audience, Madame [G] [I] demande à la cour de réformer intégralement le jugement du conseil de prud'hommes et statuant à nouveau :

- de constater qu'elle devait être reclassée, à la date du 1er septembre 2010, en strate III -12 degrés coefficient 1825 points et de condamner en conséquence, l'OGEC NOTRE DAME DES COLLINES à lui régler la somme de 11 280,37 euros à titre de rappel de salaire pour la période du 1er septembre 2010 jusqu'à la fin de son contrat,

- à titre subsidiaire de constater qu'elle devait être reclassée, à la date du 1er septembre 2010, en strate III- 10 degrés coefficient 1685 points et de condamner l'OGEC NOTRE DAME DES COLLINES à lui régler la somme de 4 583,20 euros à titre de rappel de salaire pour la période du 1er septembre 2010 jusqu'au 30 avril 2016.

En tout état de cause,

- de constater qu'elle a été victime d'une éviction de son emploi et d'une attitude de discrimination et de harcèlement ou à tout le moins de manquements de l'employeur à l'exécution loyale du contrat de travail,

- en conséquence, de requalifier son départ en retraite en rupture aux torts de l'OGEC, à la date du 30 avril 2016, produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- de condamner L'OGEC NOTRE DAME DES COLLINES à lui régler les sommes suivantes :

*16 701,32 euros au titre de l'indemnité de licenciement,

*30 000,00 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

*10 000,00 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice subi avant la rupture,

* 3 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Sur la recevabilité de l'appel, Madame [I] soutient que l'article L1224-2 du code du travail ne fait pas obstacle à la recevabilité des demandes, formulées par la salariée, contre l'ancien employeur puisque le transfert de son contrat de travail à la société SHERPAS a fait l'objet d'une annulation et que par conséquent ce transfert est réputé n'être jamais intervenu.

Sur la classification, la salariée soutient que la reclassification conventionnelle a été mise en place de manière unilatérale par l'employeur, sans concertation préalable avec les représentants du personnel et que la reclassification qui lui a été attribuée ne correspond pas aux fonctions qu'elle a réellement exercées.

Sur les manquements de l'employeur dans l'exécution du contrat, la salariée excipe qu'après le transfert de l'activité de restauration à la société SHERPAS, elle a été reléguée à des fonctions qui ne correspondaient pas à sa qualification tandis qu'une autre personne avait été embauchée pour exercer les fonctions de chef de cuisine qui avait un comportement humiliant et dégradant à son égard ce qui a entraîné une dégradation de son état de santé, qui s'est manifestée par long arrêt de travail.

Elle relève qu'en outre, les conditions de travail se sont dégradées suite à la nomination d'une nouvelle directrice, madame [G] qui a procédé à des changements d'organisation et à une reclassification sans aucune concertation et qui a exprimé un sentiment de rétorsion envers la salariée parce qu'elle avait soutenu monsieur [R], un surveillant en conflit avec la direction.

Madame [I] soutient que la souffrance au travail de l'ensemble du personnel administratif et enseignant a été constatée par le contrôleur du travail, le médecin du travail et le cabinet ARAVIS, mandaté par le CHSCT.

Elle relève qu'elle-même a subi des manquements de l'employeur à ses obligations ayant été évincée de son poste et ayant subi des discriminations, un harcèlement et des conditions de travail dégradés, puisque malgré les préconisations du médecin du travail, elle levait les bras au-dessus des épaules, et portait des charges lourdes ce qui a détérioré son état de santé la contraignant à un long arrêt de travail auquel elle a mis fin par son départ à la retraite qui doit donc produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse à la date du 30 avril 2016.

Dans ses conclusions, régulièrement visées, communiquées et reprises oralement à l'audience, l'association OGEC NOTRE DAME DES COLLINES soulève :

- la forclusion des demandes de la salariée qui a signé le 30 avril 2016, le reçu pour solde de tout compte qui a un effet libératoire pour l'employeur, dès lors qu'il n'a pas été dénoncé dans un délai de 6 mois qui suit sa signature et que ce n'est que par conclusions déposées en octobre 2016 qu'elle a réactualisé les demandes de rappel de salaire sans avoir préalablement dénoncé son solde de tout compte ;

- l'irrecevabilité de la demande portant sur la requalification de la rupture aux torts de l'employeur, de son départ à la retraite au 30 avril 2016, étant précisé que le jugement du conseil de prud'hommes a été rendu le 20 septembre 2014 et que le fait générateur est postérieur à la première instance qui est terminée ;

- l'irrecevabilité d'une partie des demandes concernant un rappel de salaire sur la période du 1er octobre 2011 au 1er janvier 2012, période où son contrat de travail avait été tranféré à la société SHERPAS qui n'est pas dans la cause.

Sur les demandes relatives à la classification de Madame [I] et au rappel de salaire, l'association OGEC soutient que la classification qui avait comme objectif de classer les salariés eu égard aux fonctions réellement exercées par ces derniers a été faite de façon concertée et que la classification affectée à la salariée correspond à sa classification, conformément aux informations transmises par la salariée elle-même.

Par ailleurs, subsidiairement, l'association pointe un problème de calcul sur les indemnités journalières et les erreurs de calcul de rappels de salaire de madame [I] lors de ses arrêts maladie ;

Sur les absences de discrimination syndicale, salariale, harcèlement moral et exécution déloyale du contrat de travail, l'association OGEC soutient :

- que le transfert de l'activité à la société SHERPAS est sans lien avec des considérations syndicales, qu'il est intervenu après la consultation du comité d'entreprise,

- que la mise en place de la nouvelle classification a eu un effet rétroactif au 1.09.10 pour tous les salariés et que la procédure appliquée à Madame [I] a été identique aux autres salariés,

- que les faits invoqués par la salariée ne sont pas constitutifs de harcèlement moral (bureau commun qui aurait été vidé, pressions alléguées pour signer un nouveau contrat de travail non démontrées, conduite du véhicule non imposée, état de tension lié au conflit avec monsieur [X] [R]),

- que Madame [I] a bien exercé ses fonctions de chef de cuisine, et qu'elle a pu bénéficier d'une évolution dans son emploi grâce à la société SHERPAS, ce qui lui a permis d'être classée strate II, 6 degrés à compter du 1er avril 2012, alors qu'elle n'était titulaire que d'un diplôme de niveau V,

Sur l'absence de rupture aux torts de l'employeur, l'association fait valoir que la salariée ne démontre pas qu'elle aurait demandé son départ à la retraite du fait des manquements de son employeur à ses obligations, alors que sa décision de liquider ses droits à la retraite, doit être considérée comme étant claire et non équivoque et ne peut-être être requalifiée en rupture aux torts de l'employeur.

A titre subsidiaire, l'association conteste les montants réclamés puisque durant ces dernières années de travail la salariée a été en arrêt maladie sur une période d'au moins trois ans, que c'est à tort qu'elle calcule son indemnité de licenciement à partir d'un salaire réévalué à partir d'une classification à laquelle elle ne peut prétendre et qu'enfin elle ne démontre pas avoir subi de préjudice puisqu'elle n'est pas à la recherche d'un emploi de travail.

***

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé pour un plus ample exposé des moyens des parties, aux conclusions écrites des parties qui ont été soutenues oralement lors de l'audience de plaidoiries.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la forclusion

Aux termes de l'article L1234-20 du code du travail (modifié par la loi numéro 2008-596 du 25 juin 2008-article 4), le solde de tout compte, établi par l'employeur et dont le salarié lui donne reçu, fait l'inventaire des sommes versées au salarié lors de la rupture du contrat de travail.

Le reçu pour solde de tout compte peut être dénoncé dans les six mois qui suivent sa signature, délai au-delà duquel il devient libératoire pour l'employeur pour les sommes qui y sont mentionnées

Le 30 avril 2016, Madame [I] [G] a signé un 'bon pour acquit des sommes sous réserve d'encaissement ' au titre d'un reçu pour solde de tout compte qui prévoyait une indemnité de départ à la retraite (5 986.83 euros), un rappel de salaire sur heures sur la période 2011/2012 de 60.12 euros outre une indemnité compensatrice de congés payés de 197 euros et un salaire brut de 6 243.95 euros avec des indemnités journalières prévoyance de 568.23 euros et de 888.77 euros.

Mais les conclusions de Madame [I] réactualisant ses demandes devant la Cour ont été déposées le 13 octobre 2016, soit moins de 6 mois après la signature de son reçu pour solde de tout compte et par conséquent le reçu n'est pas libératoire.

L'exception de forclusion sera donc rejetée.

Sur l'irrecevabilité de la demande portant sur la requalification de la rupture aux torts de l'employeur pour son départ à la retraite pour inaptitude le 30 avril 2016.

L'instance devant le conseil de prud'hommes ayant été introduite avant le 1er août 2016, elle reste soumise aux dispositions antérieures au décret 2016-660 du 20 mai 2016, et plus précisément à l'ancien article R 1452-7 du code du travail selon lequel 'les demandes nouvelles dérivant du même contrat sont recevables même en appel...'

Or la demande de requalification de la rupture aux torts de l'employeur pour son départ à la retraite pour inaptitude le 30.04.2016 se fonde sur des faits antérieurs à la saisine de la juridiction prud'homale et cette demande nouvelle dérivant du même contrat est bien recevable même en appel.

Ce moyen d'irrecevabilité sera donc rejeté.

Sur l'irrecevabilité d'une partie des demandes concernant un rappel de salaire sur la période du 1er octobre 2011 au 1er janvier 2012, période où le contrat de travail de la salariée avait été tranféré à la société SHERPAS

Aux termes de l'article L1224-2 du code du travail, le nouvel employeur est tenu, à l'égard des salariés dont les contrats de travail subsistent aux obligations qui incombaient à l'ancien employeur à la date de la modification.

Mais en l'espèce, le transfert du contrat de travail de Madame [I] à la société SHERPAS ayant fait l'objet d'une annulation, par conséquent le transfert est réputé n'être jamais intervenu.

Ce moyen d'irrecevabilité sera également rejeté.

Sur la classification

La nouvelle classification, résultant d'un accord national du 7 juillet 2010 et d'un avenant du 10 novembre 2010 entrés en vigueur en juillet 2015, implique le classement des emplois en quatre strates.

En cas de changement de grille de classification, le salarié doit recevoir le coefficient correspondant dans la nouvelle classification aux fonctions réellement exercées par lui.

Ainsi à l'intérieur de chaque strate, le poste est classé par attribution de degrés sur les critères de technicité et expertise, responsabilité, autonomie, communication et management Enfin le salarié se voit attribuer des points personnels par prise en compte de l'ancienneté, la formation professionnelle et de son implication personnelle.

Lorsque l'emploi se compose de fonctions relevant de diverses strates, le poste est classé à la strate correspondant au plus important volume d'activité.

Enfin quelle que soit la date où intervient ce reclassement, l'accord national prévoit son application rétroactive au 1er septembre 2010.

Titulaire du certificat de cuisinier gestionnaire de petites collectivités, Madame [I] occupait, depuis le 1er janvier 2005, le poste de chef de cuisine en catégorie 3 ' 2 selon l'ancienne classification.

Ce classement correspondait à l'emploi de chef de cuisine ainsi défini :

« Organise et gére l'ensemble du processus de production des plats, des mets ou des repas dont il est responsable : approvisionnement et fabrication (quantité, qualité et coût), présentation et distribution jusqu'à la consommation. Assure notamment la coordination des personnes de cuisine et de salle' Veille à l'application des consignes' Supervise les techniques de fabrication,, les règles de présentation et d'hygiène alimentaire, contrôle l'entretien de la cuisine et de ses installations effectuent la gestion de l'ensemble des denrées' Élaborent les menues adaptent les recettes calculées qu'est déterminé prix de reviens et peut être responsable du budget de fonctionnement de la cuisine.' ».

Cette définition correspond exactement au libellé de la fonction 59 d'encadrement et de supervision d'un service de restauration de la nouvelle classification, relevant de la strate III.

D'ailleurs l'OGEC a finalement reconnu la prépondérance de la fonction 59 d'encadrement et de supervision d'un service de restauration puisqu'elle a attribué à madame [I] le classement en strate III en avril 2012 sans que les fonctions de Madame [I] aient changé et sans effet rétroactif au 1er septembre 2010.

Madame [I] aurait donc dû bénéficier de la strate III dès le 1er septembre 2010.

Au vu des pièces du dossier (contrat de travail, référentiel conventionnel, témoignages, évaluations), il ressort que si la salariée ne pouvait réclamer 12 degrés, n en remplissant pas les conditions, elle était bien fondée à réclamer 10 degrés, disposant d'une technicité et d'une expertise permettant de réaliser tous les travaux relevant de son domaine d'activité (2 degrés), étant responsable du respect des règles de l'art de son travail au sein de l'établissement (2 degrés), étant autonome dans l'organisation de ses priorités (2 degrés) communiquant avec ses interlocuteurs internes ou externes de façon pertinente et pouvant conduire des négociations simples (2 degrés) et enfin manageant des salariés de strate 1 et /ou 2 et pouvant être animateur d'un groupe de travail sur un projet simple (2 degrés).

Madame [I] aurait donc dû ainsi bénéficier au 1er septembre 2010 du coefficient suivant : strate III, 10 degrés avec une ancienneté de 27 ans soit au total au 1er septembre 2010 de 1685 points (Majoré de 5 points au 1er novembre de chaque année).

Ainsi le rappel de salaire pour la période du 1er septembre 2010 au 22 avril 2014 s'établit à la somme de 4 583,20 euros.

Il convient donc d'infirmer la décision du conseil de prud'hommes de ce chef et de condamner l'association OGEC à payer à Madame [I] la somme de 4 583.20 euros à titre de rappel de salaire.

Sur les manquements de l'employeur dans l'exécution du contrat

Il appartient en droit à celui qui se prévaut d'une violation des dispositions de l'article L1222-1 du code du travail et d'une exécution déloyale du contrat de travail de prouver l'existence de manquement fautif de son cocontractant à ses obligations.

En appel, Madame [I], qui a changé de conseil, modifie ses demandes au titre de la discrimination syndicale et salariale et au titre d'un harcèlement moral pour solliciter la somme de 10 000 euros à titre de dommages intérêts, à la fois pour harcèlement moral, discrimination salariale et syndicale et exécution déloyale du contrat de travail, en se limitant à développer des manquements aux obligations contractuelles de l'employeur

Ainsi, Madame [I] qui soutient que dans le conflit qui opposait monsieur [R], surveillant, à la nouvelle direction, en 2010, les salariés qui avaient soutenu ce dernier ont été 'maltraités' par mesure de rétorsion, se contente de relever que trois autres salariés qui ont soutenu Monsieur [R] contre la direction ont également fait l'objet de discrimination salariale et syndicale.

Mais elle n'établit pas que l'ensemble de toutes les personnes qui ont soutenu Monsieur [R] ont fait l'objet des mêmes discriminations, ni que celles qui n'ont pas soutenu Monsieur [R] ont fait l'objet de bienveillance, notamment en matière de surclassification.

Or, il ressort des développements précédents que la mise en place de la nouvelle classification a eu un effet rétroactif au 1er septembre 2010 pour tous les salariés, que la procédure appliquée à madame [I] a été identique aux autres salariés, que le transfert de l'activité de cuisine à la société SHERPAS est intervenu après la consultation du comité d'entreprise et que la déclassification dont elle a fait l'objet ne caractérise pas une exécution déloyale du contrat par l'employeur.

Par ailleurs, Madame [I] se contente de faire état qu'elle aurait été victime de reproches injustifiés, de propos vexatoires, d'une ambiance délétère dans l'établissement et d'un sentiment de rétorsion, sans relever des faits précis et vérifiables à l'appui de ses allégations, se retranchant uniquement derrière le conflit de la direction avec Monsieur [R] pour lequel elle avait pris parti, alors qu'il ressort des éléments du dossier que la situation s'est fortement apaisée après le départ de celui-ci .

Madame [I] prétend que l'association OGEC NOTRE DAME DES COLLINES lui aurait retiré de façon humiliante, ses fonctions et responsabilités unilatéralement depuis l'arrivée de la société SHERPAS ainsi que son bureau.

Mais Madame [I] verse au débat ses propres entretiens et évaluations, dans lesquels elle reconnaissait que suite à son retour en février 2011, les restrictions médicales la concernant étaient encore plus strictes et que de ce fait, elle ne pouvait plus faire ce qu'elle estimait le plus intéressant en termes de responsabilité, à savoir, la préparation des plats chauds qui physiquement la fatiguait trop.

Or, elle ne fait nullement état d'un retrait de ses autres responsabilités.

Au surplus, Madame [I] a reconnu elle-même que la présence de la société SHERPAS a été bénéfique pour l'organisation générale du restaurant scolaire.

Elle soutient également qu'elle a été évincée de son poste de chef de cuisine par Monsieur [L], mais le fait d'occuper un niveau hiérarchique intermédiaire n'entraîne pas en soi une rétrogradation.

Elle verse au débat une attestation de madame [K] qui n'a pas entendu les propos humiliants que lui aurait tenus le responsable de SHERPAS concernant un nettoyage de la cuisine et d'autre part, elle ne justifie pas avoir bénéfécié de l'usage exclusif d'un bureau et ne peut donc se plaindre que ce bureau commun ait été organisé pour y mettre un ordinateur.

Il ressort de tous ces éléments, que madame [I] ne justifie pas de l'éviction de son poste, ni des humiliations qu'elle aurait subies à ce titre.

En outre, elle soutient que suite aux manquements à son obligation de sécurité de son employeur, elle a subi une grave détérioration de son état de santé devant porter des charges lourdes, malgré les préconisations du médecin du travail ce qui l'a contrainte à un long arrêt de travail pour inaptitude.

Mais d'une part les attestations de madame [K], madame [W] qu'elle produit ne sont pas circonstanciées et se contentent de relever que madame [I] occupait le poste de madame [Y], durant ses absences, ce qui impliquait de porter des charges lourdes, sans fait précis ni vérifiable et sans indication de la période, ce qui ne permet pas de contredire le support de l'entretien annuel d'activité et de développement de madame [I] effectué le 29 mai 2012 d'où il ressort qu'elle n'effectuait plus les 'plats chauds', suite à sa visite de reprise du 21 février 2011, conformément aux prescriptions du médecin du travail.

Enfin, le certificat médical de son médecin traitant, en date du 29 septembre 2016 qui ne fait que reproduire les propos de madame [I] est inopérant.

Madame [I] n'établit donc pas que ses arrêts de travail pour inaptitude serait en lien avec un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité.

C'est donc par de justes et pertinents motifs que la cour adopte que le conseil de prud'hommes a débouté madame [I] de ses demandes au titre des discriminations syndicales et salariales et au titre du harcèlement moral.

En conséquence, n'établissant pas les manquements de son employeur à ses obligations, elle sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail.

Sur le départ à la retraite de madame [I]

Le départ à la retraite du salarié est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail ; lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de son départ à la retraite, remet en cause celui-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de son départ qu'à la date à laquelle il a été décidé, celui-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d'un départ volontaire à la retraite.

Or en l'espèce, madame [I] a saisi le conseil de prud'hommes de Saint Etienne, le 20 juillet 2012 pour obtenir un rappel de salaire suite à une reclassification de son poste et des dommages et intérêts pour manquement de l'employeur à ses obligations.

C'est à compter du 17 septembre 2014, qu'elle a été placée en arrêt de travail pour une longue durée et c'est la caisse primaire d'assurance maladie qui lui a demandé de faire liquider sa retraite pour inaptitude.

Or madame [I] dans sa lettre non datée (pièce n° 68) fait part à son employeur de façon claire et non équivoque de sa volonté de partir à la retraite le 1.05.2016, sans reprocher le moindre grief à son employeur.

Cependant, elle n'a formulé pour la première fois, sa demande de requalifier son départ en retraite en rupture aux torts de l'OGEC, produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse que lors de ses conclusions déposées le 17.10.16, soit presque 6 mois après l'effectivité de son départ à la retraite.

Par ailleurs madame [I] soutient que son départ en retraite peut être remis en cause lorsqu'il est provoqué par les manquements de l'employeur dans les mêmes conditions que la prise d'acte ou la démission.

Mais il résulte des développements qui précèdent que l'OGEC a exécuté de manière loyale le contrat de travail de Madame [I] et qu'aucun manquement ne peut lui être reproché à ce titre.

Son départ en retaite ne pouvant dès lors être motivée par la détérioration des conditions de travail de la salariée et les dysfonctionnements dont elle a fait état, il est intervenu pour convenance personnelle et dès lors est non équivoque ;

Il convient donc de rejeter la demande de la salariée en requalification de son départ en retraite en une prise d'acte aux torts de l'employeur.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

L'équité commande d'allouer à Mme [I] une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant contradictoirement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a dit que madame [I] [G] avait une classification conforme à ses fonctions et l'a déboutée de sa demande de rappel de salaire et de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens.

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déclare non forcloses et recevables les demandes de madame [I] [G] ;

Constate que madame [I] [G] devait être reclassée à la date du 1er septembre 2010 en strate II, 9 dégrés et coefficient 1215 points

Condamne l'association OGEC NOTRE DAME DES COLLINES à payer à madame [M] [Y] la somme de 4 583.20 € à titre de rappel de salaire.

Déboute madame [I] [G] de sa demande au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail

Déboute madame [I] [G] du surplus de ses demandes

Condamne l'association OGEC NOTRE DAME DES COLLINES à payer à madame [I] [G] la somme de 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile pour la première instance.

Condamne l'association OGEC NOTRE DAME DES COLLINES à payer à madame [I] [G] la somme de 1 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel

Condamne l'association OGEC NOTRE DAME DES COLLINES aux dépens de la première instance et de l'instance d'appel.

Confirme le jugement sur le surplus en ce qu'il a débouté madame [I] [G] du surplus de ses demandes.

Le greffierLe président

Géraldine BONNEVILLEElizabeth POLLE-SENANEUCH


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale c
Numéro d'arrêt : 14/08511
Date de la décision : 14/04/2017

Références :

Cour d'appel de Lyon SC, arrêt n°14/08511 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-04-14;14.08511 ?
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