R.G : 09/01181
Décision du tribunal de commerce de Villefranche-Tarare
Au fond du 12 février 2009
RG : 2007J155
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
1ère chambre civile A
ARRET DU 29 Septembre 2016
APPELANTE :
[Z] [W]
née le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 1] (ITALIE)
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représentée par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON
assistée de la SELARL MAYET - PERRAULT, avocat au barreau de VERSAILLES
INTIMEE :
Groupement d'Intérêt Economique (G.I.E.) BLANCHISSERIE HOSPITALIERE SAUCONA, représenté par l'administrateur Monsieur [E]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par la SCP BAUFUME ET SOURBE, avocat au barreau de LYON
assistée de Maître Isabelle GANDONNIERE, avocat au barreau de LYON
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Date de clôture de l'instruction : 08 Avril 2015
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 30 Juin 2016
Date de mise à disposition : 29 Septembre 2016
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
- Michel GAGET, président
- Françoise CLEMENT, conseiller
- Vincent NICOLAS, conseiller
assistés pendant les débats de Joëlle POITOUX, greffier
A l'audience, Michel GAGET a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.
Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Michel GAGET, président, et par Joëlle POITOUX, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
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Vu l'arrêt en date du 10 février 2011 rendu par cette Cour sur l'appel formé par [Z] [W] à l'encontre du jugement du 12 février 2011 qui la condamne à réparer le préjudice financier dont elle est responsable et causé au Groupement d'Intérêt Economique (Gie) Blanchisserie Hospitalière SAUCONA ;
Vu l'arrêt de la Cour de cassation en date du 30 avril 2014 qui rejette les pourvois formés contre l'arrêt de la chambre correctionnelle de cette Cour en date du 29 novembre 2012 qui condamne [Z] [W], pour abus de confiance à un an d'emprisonnement avec sursis, pour avoir perçu des sommes indues, obtenues des remboursements excessifs ou injustifiées de frais de déplacement et accordé à M.[Q] intervenant extérieur, des avantages matériels et financiers qu'il n'aurait pas dû percevoir ;
Vu les dernières conclusions de [Z] [W] dans les lesquelles elle sollicite la confirmation de la décision attaquée en ce qu'elle a reconnu que la révocation dont elle a été victime avait un caractère vexatoire et la réformation de cette décision en ce qu'elle l'a condamne, réclamant, à titre reconventionnel en appel le paiement des sommes suivantes :
a) une somme de 50 000 € de dommages intérêts pour révocation abusive, injurieuse et vexatoire ;
b) une somme de 50 000 € de dommages intérêts pour préjudice moral ;
c) une somme de 10 000 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ;
et en observant que la demande de dommages intérêts du Groupement d'Intérêt Economique (Gie) Blanchisserie Hospitalière SAUCONA relève de la compétence du Conseil de Prud'hommes de Villefranche-sur-Saône.
Vu les conclusions du Groupement d'Intérêt Economique (Gie) Blanchisserie Hospitalière SAUCONA en date du 12 janvier 2015, dans lesquelles il est soutenu le mal fondé de l'appel et des prétentions de [Z] [W] quant à la révocation et aux sommes qu'elle réclame, et dans lesquelles il est réclamé, en appel, par la Gie Saucona le paiement par [Z] [W], sur le fondement des articles 1382 et suivants du code civil des sommes suivantes :
1. Honoraires abusivement perçus19 210 €
2. Dommages intérêts pour préjudice moral 25 000 € ;
et, à titre subsidiaire, sur le fondement des article 1134, 1235, 1376 et 1147 du code civil, le paiement des sommes suivantes :
1. Sommes indues perçues149 226 €
2. Dommages intérêts 15 000 €
3. Article 700 du code de procédure civile 15 000 €
Vu l'ordonnance de clôture en date du 08 avril 2015.
DECISION
1. Il résulte des productions que le Gie Saucona, créé en septembre 2002, avait pour administrateur dès l'origine [Z] [W] dont le mandat a été renouvelé pour trois ans en juin 2005, et que la révocation de [Z] [W] a été prononcée le 12 juin 2007, pour faute grave.
2. Les premiers juges ont retenu que la révocation de [Z] [W] avait un caractère vexatoire, ouvrant droit à une somme de 5 000 € de dommages intérêts aux motifs qu'à l'issue de la séance du 12 juin 2007, elle avait dû assister au changement des serrures de son bureau et qu'elle n'avait pas pu récupérer ses affaires personnelles, alors que les premiers juges notaient qu'un débat contradictoire avait bien eu lieu avant la prise de décision et au cours duquel [Z] [W] a pu s'expliquer.
3. Mais il résulte des procès verbaux des séances du groupement, notamment celle du 27 février 2007 et celle du 12 juin 2007, pris ensemble avec les pièces pénales qui sont dans le débat dont l'arrêt de cette Cour, statuant en matière correctionnelle, devenue définitif que la révocation du mandat confié à [Z] [W], révocation dont les motifs sont graves et justes n'a pas de caractère abusif ou vexatoire dans la mesure où il est bien établi que [Z] [W] s'était attribué à l'insu des membres du conseil d'administration du groupement, une rémunération et qu'elle ne pouvait pas prétendre à l'intégralité des sommes perçues au titre des remboursements de frais de déplacement et où les mesures immédiates prises comme le changement des serrures de son bureau avaient un caractère nécessaire et évident, aucune confiance ne pouvant être maintenue à cet administrateur directeur du groupement.
En conséquence, la réformation de la décision du 12 février 2009 sur ce point s'impose et aucune demande de dommages intérêts de [Z] [W] n'est fondée à l'égard du groupement qui a été victime de l'abus de confiance.
4. A titre principal, le groupement sollicite sur le fondement de l'article 1382 du code civil la confirmation de la décision attaquée en ce qu'elle condamne [Z] [W] à verser la somme de 130 119,00 € en réparation de son préjudice financier, soit 128 431 € de salaires et charges indus, plus 1 688,00 € de mutuelle, soit donc un total de 130 119,00€ avec intérêts au taux légal à compter du jour des conclusions récapitulatives devant le tribunal de commerce.
5. Il est bien évident qu'en l'état actuel des décisions pénales prononcées contre [Z] [W], à savoir l'arrêt de la Cour d'appel de Lyon du 29 novembre 2012, l'arrêt de la Cour de cassation du 30 avril 2014 et la décision de la Cour européenne de Justice du 20 novembre 2014 qu'il n'y a pas lieu de surseoir à statuer sur les demandes du groupement qui a été victime de l'abus de confiance commis pour [Z] [W].
6. Il est également évident, contrairement à ce que soutient [Z] [W], qu'il n'existe pas de contrat de travail entre elle et le groupement qui lui avait confié un mandat, observation faite que [Z] [W] s'était proclamée, elle même, salariée à l'insu des organes du groupement, pour s'attribuer des rémunérations. En conséquence, la présente Cour a pleine compétence pour statuer sur les dommages intérêts réclamés, aucune instance prud'homale ne pouvant prospérer, d'autant que celle qui avait été initiée par [Z] [W] a fait l'objet d'une radiation le 23 novembre 2009 devant le Conseil des Prud'hommes de Villefranche.
7. Et sur le fond, comme le soutient, bon droit, le groupement, les prélèvements faits par [Z] [W] et qualifiés d'abus de confiance, ne s'inscrivent dans aucune relation contractuelle quelconque conclue entre elle et le groupement de sorte que l'indemnisation du préjudice subi par le groupement relève bien de l'application de l'article 1382 du code civil.
8. Le préjudice en rapport direct avec l'abus commis par [Z] [W] doit être évalué, sur la base du rapport d'expertise comptable Auditis pour les années 2004 et 2007, comme l'a fait le premier juge en retenant la somme juste et justifiée de 130 119,00 € avec intérêt au taux légal à compter de la demande reconventionnelle faite en première instance.
9. A cette somme doit être ajoutée la somme de 19 210 € comme le réclame le groupement, car cette somme qui correspond à une facture d'indemnité pour exercice professionnel, émise par [Z] [W] n'est pas une dépense autorisée par les membres du groupement dans une décision prise par eux en assemblée : en effet, le procès verbal porte des signatures qui ne peuvent être identifiées sauf la sienne et qui semblent avoir été ajoutées en 2006 alors que le procès verbal date de mars 2003.
10. Cette somme de 19 210 € constitue donc bien un préjudice financier en rapport avec l'abus de confiance et doit être ajouté, de sorte que [Z] [W] doit bien la somme globale de 149 226 € avec intérêts au taux légal à compter de la demande initiale en première instance.
11. La Cour considère que la date de la demande initiale est celle du jour de l'audience devant le tribunal de commerce, audience du 18 décembre 2008, au cours de laquelle les parties se sont expliquées oralement avec leur conseil devant le tribunal de commerce avant la mise en délibéré.
12. La réticence à ne pas vouloir rembourser les sommes obtenues dans le cadre de l'infraction pénale retenue contre elle cause un préjudice moral certain au groupement qui a été trompé et qui subit le préjudice financier. Ce préjudice moral doit être évalué à la somme de 10 000 € eu égard aux éléments de la cause et à la durée des procédures d'indemnisation dont l'origine est imputable à la personne qui doit.
13. Il n'y a donc pas lieu d'examiner les moyens subsidiaires.
14. L'équité commande d'allouer au groupement la somme de 15 000 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile.
15. [Z] [W] qui perd supporte tous les dépens.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
- réforme, en toutes ses dispositions, le jugement du 12 février 2009 ;
- statuant à nouveau, sur l'ensemble du litige ;
- déclare [Z] [W] recevable mais mal fondée en sa demande de dommages intérêts pour révocation vexatoire de son mandat ;
- la déboute de toutes ses prétentions et de tous ses moyens formulés devant cette Cour ;
- condamne [Z] [W] à verser au Groupement d'Intérêt Economique (Gie) Blanchisserie Hospitalière SAUCONA la somme de 149 226,00 € de préjudice financier avec intérêts au taux légal à compter du 18 décembre 2008, et la somme de 10 000 € de dommages intérêts en réparation du préjudice moral subi, outre 15 000 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamne [Z] [W] aux entiers dépens de première instance et aux entiers dépens d'appel ;
- autorise pour ceux ci la SCP BAUFUME-SOURBE, avocat à les recouvrer aux formes et conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIERLE PRESIDENT
Joëlle POITOUXMichel GAGET