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16/09/2014 | FRANCE | N°13/08209

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale a, 16 septembre 2014, 13/08209


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE







R.G : 13/08209





[S]



C/

SA SOCIÉTÉ DES TRANSPORTS PUBLICS DE L'AGGLOMERATION STEPHANOISE (TPAS)







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT-ETIENNE

du 26 Septembre 2013

RG : F12/00208











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE A



ARRÊT DU 16 SEPTEMBRE 2014













APPELANT :



[M] [S]

né le [Date naissance 1] 1974 à [Localité 3]

[Adresse 2]

[Localité 1]



comparant en personne, assisté de Me Chantal JULLIEN, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE substitué par Me Laétitia PEYRARD, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE







INTIMÉE :
...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : 13/08209

[S]

C/

SA SOCIÉTÉ DES TRANSPORTS PUBLICS DE L'AGGLOMERATION STEPHANOISE (TPAS)

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT-ETIENNE

du 26 Septembre 2013

RG : F12/00208

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 16 SEPTEMBRE 2014

APPELANT :

[M] [S]

né le [Date naissance 1] 1974 à [Localité 3]

[Adresse 2]

[Localité 1]

comparant en personne, assisté de Me Chantal JULLIEN, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE substitué par Me Laétitia PEYRARD, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

INTIMÉE :

SA SOCIÉTÉ DES TRANSPORTS PUBLICS DE L'AGGLOMERATION STEPHANOISE (TPAS)

exploitant sous la dénomination commerciale STAS

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Gérald POCHON, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 03 Juin 2014

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Didier JOLY, Président

Mireille SEMERIVA, Conseiller

Agnès THAUNAT, Conseiller

Assistés pendant les débats de Sophie MASCRIER, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 16 Septembre 2014, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Didier JOLY, Président, et par Sophie MASCRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

La société TRANSPORTS PUBLICS DE L'AGGLOMÉRATION STEPHANOISE (ci- après dénommé TPAS) emploie 689 salariés qui relèvent de la Convention Collective Nationale des Transports Publics Urbains Réseau de Voyageurs.

M. [M] [S] a été engagé par cette société à compter du 2 avril 2003, en qualité d'agent commercial de conduite, par contrat de travail à durée indéterminée à temps complet de 148 h46, avec un salaire brut mensuel de 1 513,69 €.

Le 14 décembre 2010, 1a Société TPAS, par lettre recommandée avec accusé de réception a convoqué M. [M] [S] pour une éventuelle sanction concernant des faits des 2 et 9 décembre 2010.

Le 19 janvier 2011, la Société TPAS, par lettre recommandée avec accusé de réception a notifié un blâme à M. [M] [S] dans les termes suivants :

« Dans le cadre d'un entretien préalable à sanction, vous avez été reçu le 6 janvier 2011 par M. [W], votre responsable de groupe et M. [F] votre responsable d'unité afin de vous expliquer sur les faits qui se sont déroulés les 2 et 9 décembre 2011 (sic).

Le jeudi 02 décembre 2010, vous étiez affecté au service 109 sur la ligne 06.

- A 09h38, suite à un retard cumulé de 17 minutes et malgré plusieurs actions de régulation de la part du PCC, afin de résorber votre retard en ligne, vous avez refusé par trois fois d'appliquer la consigne suivante :

o Effectuer un départ à battement nul du terminus du CHPL afin de garantir la continuité du service envers notre clientèle, un technicien de régulation avait pris les dispositions afin de vous faire remplacer par un conducteur disponible pour vous permettre de « souffler » à la course suivante.

Le PCC a du procéder à d'autres manoeuvres de régulation :

- En demandant au conducteur qui était derrière vous de repartir immédiatement

- En dégradant l'offre de la ligne.

Le jeudi 09 décembre 2010, vous étiez affecté au service 110 sur la ligne 06. Vers 17h30, vous avez signalé un retard de 08 minutes au PCC suite à un accident de la circulation. Votre heure d'arrivée au terminus du CHPL a été à 18h08 pour une arrivée théorique à 17h55.

Vous décidez alors, sans appel préalable au PCC ni aucune autorisation ; de quitter votre poste de conduite afin d'aller aux toilettes: Le PCC constate alors un retard en terminus de 19 minutes sans aucune explication

- Pendant 6 minutes, le PCC n'a pas pu vous joindre par radio.

Le PCC a alors :

Supprimé une course (compte tenu du retard de 19 minutes)

Fait appel à un conducteur disponible afin d'effectuer la course suivante.

Vous avez expliqué l'incident du 02 décembre 2010 par le fait que vous n'étiez psychologiquement pas en mesure d'effectuer un départ du terminus car vous aviez accumulé du stress pendant plusieurs courses.

Vous avez expliqué l'incident du 09 décembre 2010 par le fait que vous aviez besoin de vous rendre aux sanitaires.

Vos explications ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation des faits. En conséquence, et en application de l'article L 1332-2 du code du travail, nous vous notifions un blâme.(...)Nous vous rappelons que vous devez impérativement respecter les consignes ; lors de la formation « nouvel embauché », les formateurs vous commentent le Règlement Sécurité Exploitation et notamment :

- Avant toutes prises de décision informer le PCC.

Nous ne pourrions tolérer à l'avenir le renouvellement d'un tel comportement faute de quoi vous vous exposerez à des sanctions plus élevées. Nous vous incitons donc à prendre toutes vos dispositions afin de modifier votre attitude.

(...)'

Le 23 avril 2012, M. [M] [S] a saisi le Conseil de Prud'homme de SAINT ETIENNE afin de faire annuler cette sanction.

Par lettre recommandée en date du 23 septembre 2013, M. [M] [S] a été licencié pour faute grave dans les termes suivants:

'(...) Suite aux faits qui se sont déroulé les 8 et 11 juillet 2013, vous avez été convoqué à un Entretien Préalable en date du 26 août 2013 afin que vous nous donniez les explications concernant votre attitude.

En raison de l'absence pour congés payés de votre manager et également de vos propres congés payés, la convocation à l'Entretien Préalable à Sanction a été effectuée le 29 juillet 2013 pour un entretien le 26 août 2013. Malgré ce délai important de prévenance, vous n'avez pas daigné vous déplacer. En l'absence d'explication recueillie auprès de vous, nous avons été contraints de poursuivre la procédure e t conformément à la Convention Collective Nationale des Réseaux de Transports Publics Urbains de Voyageurs, vous avez été convoqué devant le Conseil de Discipline en date du 28 août 2013 pour une audition le 10 septembre dernier.

Le Conseil dans sa décision a retenu que les fautes qui vous sont reprochées sont matériellement établies et justifient une sanction.

La sanction que nous avons retenue compte tenu des faits reprochés et de vos antécédents disciplinaires est le licenciement pour faute grave.

Cette sanction correspond à la qualification de « licenciement avec indemnité » des sanctions du deuxième degré de l'article 49 de la Convention Collective des Transports Publics Urbains de Voyageurs.

Nous vous notifions donc par la présente votre licenciement pour fautes graves que nous vous rappelons :

-Violation délibérée et à répétition des consignes de travail et de sécurité sur le port de chaussures fermées.

Bien que cette consigne vous ait été rappelée le 8 juillet 2013 et qu'il vous ait été demandé de ne plus porter de sandales en guise de chaussures, votre Responsable de Groupe le 11 juillet 2013 a constaté que vous portiez les mêmes sandales.

-Le 11 juillet 2013, malgré une première demande le matin de votre supérieur de remplacer vos sandales par des chaussures fermées, vous avez refusé, et le même jour

en fin de journée votre supérieur a constaté que vous n'aviez pas respecté sa demande et que vous portiez toujours vos sandales.

-Insubordination ostentatoire visant à faire pression sur votre hiérarchie, accompagnée d'agissements contraires aux règles de sécurité et perturbateurs du bon fonctionnement de l'entreprise.

C'est ainsi que le 11 juillet 2013 non content de ne pas avoir respecté la consigne donnée le 8 juillet 2013 par votre supérieur concernant le port de chaussures fermées, et parce que vous refusiez de vous conformer à cette consigne vous avez intercepté, en courant sur la chaussée, le bus conduit par l'un de vos collègues de travail.

Ensuite devant ce collègue que vous avez forcé à ouvrir les portes de son véhicule et en vous positionnant sur le marchepied du bus intercepté, vous avez pris à parti votre supérieur en le défiant de redire que vous ne deviez pas porter de sandales.

En conséquence, le niveau de cette faute vous prive de l'exécution et du paiement de la période conventionnelle de préavis. Votre licenciement prend donc effet à compter de la notification de cette lettre recommandée (...)'.

LA COUR, ,

statuant sur l'appel interjeté par M. [M] [S] à l'encontre du jugement rendu le 26 septembre 2013 par le conseil de Prud'homme de Saint Etienne (section commerce) qui a:

DEBOUTE M. [M] [S] de l'ensemble de ses demandes;

DEBOUTE la société des TRANSPORTS PUBLICS DE L'AGGLOMERATION STEPHANOISE (TPAS) de sa demande reconventionnelle;

CONDAMNE M. [M] [S] aux entiers dépens de l'instance.

Par conclusions développées oralement à l'audience du 3 juin 2014, M. [M] [S] a principalement demandé à la cour de:

-REFORMER le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes de SAINT ETIENNE le 26 septembre 2013 et, statuant à nouveau, annuler le blâme notifié le 19 janvier 2011

-DECLARER son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et, en conséquence, condamner la société TPAS à lui régler les sommes suivantes :

*4 470 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis

*447 € à titre d'indemnité de congés payés sur préavis

*683.70 € à titre d'indemnité de 13ème et 14ème mois sur préavis

outre intérêts légaux à compter du jour de la demande sur ces trois premières condamnations

*30 000 € net à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

outre intérêts légaux à compter de l'arrêt à venir sur cette dernière condamnation

-ORDONNER à la société TPAS de remettre à M. [S], sous astreinte de 50 € par jour de retard, un certificat de travail et une attestation destinée à l'ASSEDIC rectifiés en conséquence du jugement (sic);

-DIRE que la moyenne des trois derniers mois de salaire s'élève à 2 235 €

- CONDAMNER la société TPAS au paiement d'une somme de 2 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Par conclusions développées oralement à l'audience du 3 juin 2014, la société des TRANSPORTS PUBLICS DE L'AGGLOMERATION STEPHANOISE (TPAS) a principalement demandé à la cour de :

-DIRE ET JUGER que les faits des 2 et 9 décembre 2010 sont établis et constituent une faute,

-DIRE ET JUGER que ces faits justifient le blâme prononcé à l'encontre de M. [S] le 19 janvier 2011,

-CONFIRMER le jugement du Conseil de Prud'hommes de Saint-Etienne,

-DIRE ET JUGER que le refus réitéré de M. [S] de respecter les consignes de sécurité consistant à porter des chaussures fermées, de même que son insubordination ostentatoire à l'égard de sa hiérarchie constituent des fautes graves empêchant son maintien dans l'entreprise ne serait-ce même que pendant le temps du préavis,

-DIRE ET JUGER le licenciement bien-fondé,

-DEBOUTER M. [S] de l'intégralité de ses demandes,

Accueillant la demande reconventionnelle de la société TPAS,

-CONDAMNER M. [S] à la somme de 2 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

SUR LE BLAME DU 19 JANVIER 2011

Ce blâme a été notifié au salarié le 19 janvier 2011 pour les faits s'étant déroulés le 2 décembre 2010 et le 9 décembre 2010.

Dans le rapport d'information qu'il a rédigé le 9 décembre 2010, M. [M] [S] explique l'incident du 2 décembre de la façon suivante:« après plusieurs courses accomplies dans des conditions anormales et excessives d'affluence, occultant les temps de battement et de récupération, j'accusais un retard de 17mn. Au CHPL, le PCC m'a demandé d'effectuer «avec le retard» la course CHPL -[Adresse 3], sachant que j'étais relevé et qu'un HLP (haut le pied) aurait épongé le retard et permis à la relève de partir à l'heure. Malgré les injonctions répétées du PC, j'ai dû refuser en essayant de lui faire comprendre mon incapacité morale à cause d'une tension nerveuse arrivée à saturation. Mon refus a donc été motivé par le souci de préserver ma santé et ma sécurité, ainsi que la sécurité des usagers».

M [S] a réitéré cette explication lors de l'entretien précédant la sanction.

Le salarié verse aux débats à l'appui de ses dires sa fiche médicale tenue par l'ELSM de la Loire, service de la CNAMTS ainsi que ses différents arrêts de travail pour maladie professionnelle, reconnue par la CPAM. Il en résulte que le 20 décembre 2010, il n'a pu repartir du terminus de sa ligne en raison d'une oppression thoracique, conduit au CHU le problème cardiaque a été écarté, mais le salarié a été placé en arrêt de travail jusqu'au 8 décembre 2011, puis à mi-temps thérapeutique pendant deux mois, pour état d'anxiété et stress. Le salarié a subi un nouvel accident du travail le 27 février 2012, pour une nouvelle attaque de panique, puis a été placé en mi-temps thérapeutique du 23 mars 2012 au 23 mai 2012.

Dans ce contexte médical, les explications du M. [M] [S] données dès l'origine sur les motifs de son refus, auraient dû être prises en compte par l'employeur et son refus d'assurer une course supplémentaire, ne pouvaient donner lieu à sanction.

En ce qui concerne le deuxième incident, il est reproché au salarié d'avoir, alors que le bus accusait un retard sur l'horaire prévu, retard qui n'était pas de son fait, décidé sans appel préalable au PCC ni aucune autorisation de quitter son poste pour aller aux toilettes.

Le salarié a toujours expliqué qu'il avait besoin de se rendre aux sanitaires. Il soutient qu'il aurait appelé le PCC, mais que celui-ci ne l'aurait pas rappelé et qu'il avait préféré s'y rendre sans plus attendre, afin d'éviter un nouveau retard.

La cour constate qu'il n'est pas contesté que le PCC n'a pu joindre le salarié pendant 6mns, ce qui a été de nature à désorganiser le service. M. [M] [S] ayant déjà été antérieurement sanctionné, le blâme qui lui a été infligé ne paraît pas excessif.

SUR LE LICENCIEMENT POUR FAUTE GRAVE.

Le licenciement prononcé pour faute grave a nécessairement un caractère disciplinaire. Les motifs invoqués par l'employeur doivent être précis, objectifs et vérifiables.

Il résulte des dispositions combinées des articles L 1232-6 et L 1235-1 du code du travail que devant le juge, saisi d'un litige dont la lettre de licenciement fixe les limites, il incombe à l'employeur qui a licencié un salarié pour faute grave, d'une part d'établir l'exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre, d'autre part de démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien de ce salarié dans l'entreprise pendant la durée limitée du préavis.

En application de l'article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles; si un doute subsiste, il profite au salarié.

En l'espèce, le règlement intérieur dans son article 15 des dispositions générales relatives à la discipline au travail précise que «l'ensemble du personnel (') devra en particulier se conformer aux ordres donnés par les responsables hiérarchiques directs ainsi qu'aux prescriptions et consignes portées à sa connaissance par voie d'affichage (')» et dispose :«qu'il est obligatoire de façon générale: de porter tenues de travail, vêtements, écharpes et accessoires de sécurité dans les conditions décrites aux conventions prévoyant leurs fournitures et en fonction des dotations: la direction se réserve la faculté d'interdire la prise de poste aux salariés qui se présentent sans respecter cette règles et de la sanctionner (') de respecter les règles de sécurité à l'intérieur et à l'extérieur de l'entreprise«qu'il est interdit de façon générale:(...) de porter des chaussures et tous équipements ne permettant pas de garantir la sécurité et l'hygiène».

Il est constant qu'à l'époque des faits, les conducteurs de bus n'étaient pas dotés de chaussures d'uniforme et qu'il n'existait pas de note de service définissant le type de « chaussures et tous équipements (... ) permettant (...) de garantir la sécurité et l'hygiène», visé au règlement intérieur. Ce n'est que le 8 novembre 2013, que le CHSCT a émis un avis sur la rédaction d'une note précisant 'les critères d'acceptabilité du modèle de chaussure pour la conduite'. Il n'est également pas contesté qu'un certain nombre de conducteurs et de conductrices portaient alors des chaussures ouvertes découvrant les orteils.

Il n'est pas contesté que le 8 juillet 2013, M. [W] responsable hiérarchique direct de M. [M] [S] lui a demandé de porter des chaussures fermées alors qu'il portait des chaussures ouvertes.

L'entreprise établit que le 9 juillet 2013, il y eu une déclaration d'accident du travail dans l'entreprise, un salarié ayant glissé dans les toilettes et que par courriel du même jour, aux différents responsables, dont M [W], M. [F] a rappelé:que les conducteurs /conductrices doivent avoir des chaussures fermées pendant leur service pour des raisons de sécurité au travail (en clair il ne faut pas que leurs poutoux (sic) soit à l'air libre). Il est donc impératif de faire dans un premier temps un rappel à la règle à tout conducteur / conductrice qui ne porterait pas de chaussures conformes et de vérifier ensuite si cette consigne est respectée. Dans le cas contraire, après rappel à la règle, le conducteur/ conductrice ne doit pas prendre son service. Vous devez faire appel à un disponible via le PCC et demander à l'agent de se mettre en conformité.Merci de me signaler tout cas afin de définir ensemble la marche à suivre».

Le salarié soutient que suite aux observations de M. [W], le 8 juillet, il a mis des chaussures fermées les 9 et 10 et qu'il a consulté les délégués syndicaux pour savoir «s'il pouvait porter des chaussures ouvertes mais sécurisées (tenant aux pieds) suite aux fortes chaleurs». M. [G], délégué syndical, atteste qu'il lui a répondu positivement, car «effectivement depuis des années celles-ci étaient acceptées dans l'entreprise et aucune note de services ne contredisait ceci.» Ce délégué soutient que le 11 juillet après conversation avec M [F] responsable hiérarchique, M. [M] [S] a repris son service en attendant de changer de chaussures ce qu'il a fait plus tard en allant récupérer une paire dite conforme.

Il résulte de l'instruction de la procédure disciplinaire que le 11 juillet, M. [U] et [G] délégués syndicaux contactés par M. [M] [S], sont entrés en contact avec M [F] qui aurait déclaré que M. [M] [S] pouvait reprendre son service si quelqu'un lui apportait des chaussures fermées. M. [M] [S] reconnaît qu'il a repris son service avec ses sandales, personne ne lui ayant apporté de chaussures fermées.

Il n'est pas contesté qu'après sa coupure de 17H20, M. [W], constatant que le salarié n'avait toujours pas changé de chaussures, lui a demandé de rentrer chez -lui. Il n'est pas contesté que M. [M] [S] a fini son service avec des chaussures fermées.

La cour constate que le premier ordre donné par M. [W], le 11 juillet à M. [M] [S] de rentrer chez lui pour changer de chaussures dépassait les instructions qui lui avait été données par M [F] dans son courriel du 9 juillet qui ne

prévoyaient dans un premier temps qu'un rappel à la règle et seulement dans un deuxième temps une non prise de service. Le rappel à la règle qui avait été fait le 8 juillet était antérieur au courriel de M. [F] et ne pouvait être pris en compte.

La cour considère qu'en ne respectant pas l'ordre qui lui était donné de rentrer chez lui changer de chaussures et en prenant à témoin un collègue de travail, au risque de gêner la circulation routière, M. [M] [S] a commis une faute constituant une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Il résulte des dispositions combinées des articles L 1232-1, L 1232-6, L 1234-1 et L 1235-1 du code du travail qu'il incombe à l'employeur qui a licencié un salarié pour faute grave de démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien de ce salarié dans l'entreprise pendant la durée limitée du préavis.

.

Malgré le passé disciplinaire de l'intéressé, les faits qui sont reprochés à M. [M] [S] ne rendaient pas immédiatement impossible le maintien de celui-ci dans l'entreprise, en effet, si la réaction du salarié de prendre à témoin un collègue de travail sur l'ordre qui lui était donné de rentrer chez lui était fautive, elle pouvait s'expliquer par le manque de précision du règlement intérieur et les conseils qui lui avait été donnés par les représentants syndicaux, ce qui retire à ladite faute son caractère de gravité rendant impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis .

SUR LES INDEMNITES DE RUPTURE

La société des TRANSPORTS PUBLICS DE L'AGGLOMERATION STEPHANOISE (TPAS) ne remet pas en cause, même à titre subsidiaire, les bases sur lesquelles M. [M] [S] a calculé l'indemnité compensatrice de préavis outre congés payés incidents Il sera donc fait droit à ces chefs de demande.

Par ailleurs c'est à bon droit que le salarié, qui bénéficiait d'un treizième et d'un quatorzième mois dans l'entreprise sollicite la somme de 683,70€ , calculé sur le préavis.

SUR LES AUTRES DEMANDES

La société des TRANSPORTS PUBLICS DE L'AGGLOMERATION STEPHANOISE (TPAS) qui succombe dans ses prétentions doit être condamnée aux dépens. L'équité commande d'accorder à M. [M] [S] une indemnité de 2.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Confirme le jugement entrepris,

y ajoutant,

DIT que le licenciement de M. [M] [S] ne repose pas sur une faute grave, mais sur une cause réelle et sérieuse,

Condamne la société des TRANSPORTS PUBLICS DE L'AGGLOMERATION STEPHANOISE (TPAS) à payer à M. [M] [S] :

-la somme de 4.470 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

-la somme de 447 € à titre de congés payés y afférents,

-la somme de 683,70€ à titre d'indemnités des 13ème et 14ème mois sur préavis,

Dit que les dites sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 10 février 2014, date de la demande devant la cour d'appel,

Ordonne à la société TPAS de remettre à M. [S] un certificat de travail et une attestation destinée à l'ASSEDIC rectifiés en conséquence de l'arrêt,

Dit n'y avoir lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte,

Condamne la société des TRANSPORTS PUBLICS DE L'AGGLOMERATION STEPHANOISE (TPAS) à payer à M. [M] [S] la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés devant la cour,

Condamne la société des TRANSPORTS PUBLICS DE L'AGGLOMERATION STEPHANOISE (TPAS) aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

Sophie MASCRIER Didier JOLY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale a
Numéro d'arrêt : 13/08209
Date de la décision : 16/09/2014

Références :

Cour d'appel de Lyon SA, arrêt n°13/08209 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-09-16;13.08209 ?
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