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06/06/2013 | FRANCE | N°12/00407

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile a, 06 juin 2013, 12/00407


R.G : 12/00407









Décision du tribunal de commerce de Saint-Etienne

Au fond du 16 décembre 2011



4ème chambre



RG : 2010/361





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile A



ARRET DU 06 Juin 2013







APPELANTS :



[F] [T] [R] épouse [V]

née le [Date naissance 3] 1954 à [Localité 3] (LOIRE)

[Adresse 1]

[Localité 2]



représentée par la SCP LAFFLY & ASSOCIES, avocats au barreau de LYON

assistée de la SCP BONIFACE-HORDOT-FUMAT-MALLON, avocats au barreau de SAINT-ETIENNE



[A] [D] [V]

né le [Date naissance 2] 1954 à [Localité 4] (LOIRE)

[Adresse 1]

[Localité 2]
...

R.G : 12/00407

Décision du tribunal de commerce de Saint-Etienne

Au fond du 16 décembre 2011

4ème chambre

RG : 2010/361

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile A

ARRET DU 06 Juin 2013

APPELANTS :

[F] [T] [R] épouse [V]

née le [Date naissance 3] 1954 à [Localité 3] (LOIRE)

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par la SCP LAFFLY & ASSOCIES, avocats au barreau de LYON

assistée de la SCP BONIFACE-HORDOT-FUMAT-MALLON, avocats au barreau de SAINT-ETIENNE

[A] [D] [V]

né le [Date naissance 2] 1954 à [Localité 4] (LOIRE)

[Adresse 1]

[Localité 2]

représenté par la SCP LAFFLY & ASSOCIES, avocats au barreau de LYON

assisté de la SCP BONIFACE-HORDOT-FUMAT-MALLON, avocats au barreau de SAINT-ETIENNE

INTIME :

[K] [W] [J] [Q]

né le [Date naissance 1] 1969 à [Localité 3] (LOIRE)

[Adresse 2]

[Localité 1]

représenté par la SCP BAUFUME - SOURBE, avocats au barreau de LYON

assisté de la SELARL UNITE DE DROIT DES AFFAIRES, avocats au barreau de SAINT-ETIENNE

******

Date de clôture de l'instruction : 09 Octobre 2012

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 27 Mars 2013

Date de mise à disposition : 06 Juin 2013

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Michel GAGET, président

- François MARTIN, conseiller

- Philippe SEMERIVA, conseiller

assistés pendant les débats de Joëlle POITOUX, greffier

A l'audience, Philippe SEMERIVA a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Michel GAGET, président, et par Joëlle POITOUX, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 18 avril 2006, M. [Q] a vendu à M. et Mme [V] les parts qu'il détenait dans le capital de la société PAAP, puis il a démissionné de son poste de conducteur de travaux de la société Constructions métalliques de Pralong (CMP), dont les parts sociales constituaient l'actif unique de cette société PAAP.

M. et Mme [V] ont agi en annulation de la vente, remboursement du prix et paiement de dommages-intérêts en soutenant que leur consentement à l'achat était vicié par dol, M. [Q] leur ayant dissimulé la sous-évaluation du prix demandé pour l'exécution en sous-traitance d'un important marché à forfait, ce qui avait conduit à la mise en redressement judiciaire de la société CMP, puis à sa cession, et à la liquidation judiciaire de la société PAAP.

*

Ils sont appelants du jugement rendu par le tribunal de commerce de Saint-Etienne, qui :

- constate que M. [Q] n'a commis aucune réticence dolosive à leur égard,

- les déboute de leurs demandes d'annulation et de remboursement, ainsi que de toutes leurs demandes,

- déboute M. [Q] de sa demande de dommages-intérêts,

- les condamne à payer à M. [Q] une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que les dépens, dont les frais relatifs à la procédure suivie devant le tribunal de grande instance de Montbrison, initialement saisi et qui s'était déclaré incompétent, sont à leur charge.

*

M. et Mme [V] soutiennent que M. [Q] a commis une erreur de chiffrage particulièrement importante dans le chantier Métrotech, ce qu'il ne pouvait ignorer, dans la mesure où il a encore consenti un rabais lorsque le donneur d'ordre lui en a signalé le caractère anormalement bas, alors qu'eux-mêmes, bien qu'actionnaires de la société et y exerçant des responsabilités, ne pouvaient s'en rendre compte au moment de la cession, M. [Q] disposant d'une grande autonomie dans l'exercice de ses missions techniques et les travaux n'ayant pas encore débuté.

Ils insistent sur le fait que ce chantier a été un facteur primordial de défaillance de la société CMP.

M. et Mme [V] en déduisent que M. [Q] leur a dissimulé cette information, importante pour l'appréciation de la situation de la société et de la valeur réelle des parts cédées.

Ils demandent de réformer le jugement, de dire que leur consentement a été vicié par réticence dolosive, en conséquence de prononcer l'annulation de la cession, de condamner M. [Q] à leur rembourser, respectivement, les sommes de 32 012 euros et 13 720 euros, de le condamner à leur payer la somme de 5 000 euros, à titre de dommages-intérêts ainsi que celle de 3 000 euros, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et de le débouter de ses demandes reconventionnelles, en mettant les frais et dépens à sa charge, y compris les sommes retenues par l'huissier en cas d'exécution forcée.

*

M. [Q] objecte que son chiffrage est correct, qu'il n'a pas consenti au rabais qui lui est reproché, qu'il n'a pas été informé d'une anomalie du devis, l'erreur en cause étant celle du donneur d'ordre, et que l'offre n'a pas été rejetée comme anormalement basse.

Il soutient que les difficultés décrites par les demandeurs ne sont pas, au plan technique, imputables à une erreur de chiffrage, mais à des problèmes de pose essentiellement dues à des erreurs de côtes et que les conséquences financières ne sont pas plus démontrées.

M. [Q] fait valoir qu'à supposer même une erreur, il n'est pas établi qu'il l'aurait connue et dissimulée et qu'au surplus les cessionnaires étaient pleinement informés de la gestion de la société.

Il considère que la procédure est abusive et conclut à la confirmation du jugement, sauf en ce qu'il l'a débouté de sa demande de dommages-intérêts, à son infirmation sur ce point et à la condamnation de M. et Mme [V] au paiement d'une somme de 10 000 euros à ce titre ; il réclame une indemnité de 4 000 euros pour ses frais irrépétibles d'appel.

* *

MOTIFS DE LA DÉCISION

' La société Aspen a présenté une offre pour la réalisation du lot n°3 du chantier Métrotech (étanchéité, couverture métallique), qui a été retenue ; cette offre intégrait le devis de sous-traitance établi par M. [Q] pour les charpentes métalliques.

Une attestation de M. [Y], directeur d'agence de la société Aspen à [Localité 4] à l'époque des faits, indique 'qu'après ouverture des plis, notre direction a été informée par le maître d'ouvrage de prix anormalement bas ; nous avons dû vérifier notre chiffrage avec M. [B], métreur Aspen ; nous avions immédiatement appelé M. [Q], responsable de ce dossier chez CMP, qui nous avait donné un prix de charpente métallique à 475 435,83 euros HT ; le jour-même, il nous répondait qu'il n'y avait pas d'erreur sur son devis ; par contre, nous avons découvert des problèmes sur le chiffrage Asten (concernant l'étanchéité et la couverture) ; notre prix initial étant très bas, M. [Q] nous a accordé un rabais de 3% sur sa proposition, qui a été ramenée à 461 172,75 euros HT'.

Me [U], liquidateur judiciaire de la société CMP, s'est fait confirmer par Saint-Etienne Métropole le montant exact des offres examinées à l'époque, soit :

Asten, marché attribué : 1 372 280,63 euros HT, dont charpente 447 336,84 euros,

Offre non retenue n°2 : 2 315 409,43 euros, dont charpente 609 559 euros,

Offre non retenue n°3 : 2 724 042,23, dont charpente 649 826 euros.

Le repreneur de la société CMP, retenu par le tribunal de la procédure collective, a exclu le contrat Metrotech du périmètre de sa proposition de reprise.

Pour soutenir que le prix du marché aurait dû être de 2,40 euros le kilo, et non de 1,36 euros, comme le retient le devis litigieux, M. et Mme [V] produisent une feuille détaillant leur calcul.

Par courrier du 9 octobre 2007, la société Guardino indiquait à la société CMP que 'son représentant n'avait jamais remédié aux problèmes de pose dus essentiellement à des erreurs de côtes sur les plans ; il ne nous a jamais informé de l'existence de ces nombreux vices de forme ; vous comprendrez, de ce fait, notre surfacturation de main-d'oeuvre due à des attentes d'acier'.

' Les éléments ainsi exposés montrent, d'abord, que le prix retenu par M. [Q], qu'on y intègre ou non celui des platines, était sensiblement plus bas que ceux des deux autres concurrents en lice, et qu'il a personnellement consenti une remise, comme l'indique M. [Y], peu important l'auteur matériel de la mention manuscrite figurant au devis à ce propos.

Rien, en revanche, ne permet d'expliquer le processus par lequel le devis accepté pour 461 172,75 euros HT a été ramené à 447 336,84 euros, mais cette circonstance n'est pas directement reprochée à M. [Q].

Cependant, le prix revendiqué par M. et Mme [V] ne repose sur aucun justificatif et il n'est pas confirmé par les offres concurrentes.

Le prix fixé par M. [Q] est nettement moindre que celui indiqué dans ces offres, mais pas au point d'être considéré, en soi, comme anormalement bas, l'autorité adjudicatrice ayant d'ailleurs adressé une mise en garde, non au titre des charpentes, mais de l'entier devis de la société Asten, dont le réexamen a conduit cette dernière à déceler des erreurs sur d'autres postes.

L'exécution du chantier a rencontré des difficultés, imputées par le partenaire d'exécution à des circonstances liées à la définition des côtes, qui ne font l'objet d'aucune réfutation de la part de M. et Mme [V] et qui sont indépendantes des grief adressés à M. [Q].

Ce chantier a, certes, été assez déficitaire, en définitive, pour que le repreneur refuse de l'inclure dans son offre, mais il n'est pas établi que cette décision soit en rapport avec l'insuffisance du prix.

L'expert-comptable, qui se borne par ailleurs à rappeler 'les analyses financières réalisées a posteriori par les associés', sans objectiver leur résultat quant à une 'insuffisance de chiffrage', indique que 'la réalisation de ce chantier a été un élément primordial dans les difficultés financières de la société CMP, ayant entraîné sa liquidation judiciaire'.

En conséquence, même en tenant compte de la remise, modérée, consentie pour porter assistance au donneur d'ordre empêtré dans ses propres erreurs, il n'est pas démontré que le devis était anormalement bas, et il n'est pas plus démontré que ce prix est à l'origine des difficultés d'exécution du marché.

Il y a eu 'insuffisance de chiffrage', dans des proportions qui ne caractérisent cependant pas un écart assez perceptible pour remettre en question l'appréciation de la situation de la société et la valeur réelle des parts cédées, aucune démonstration d'un lien causal entre ce prix et les pertes induites par les erreurs de côtes dénoncées par la société Guardini n'étant au surplus établi.

L'action n'est pas fondée en ce qu'elle tend à remettre en question la valeur de ces parts.

' A supposer même le contraire, rien ne permet de retenir que M. [Q] en avait conscience, puisque, appelé à réexaminer ce prix, il n'a pas identifié le problème.

Enfin, si même encore il en avait conscience, aucune manoeuvre dolosive n'est caractérisée.

En effet, M. [V], dirigeant et Mme [V], qui tenait la comptabilité, disposaient des éléments leur permettant de faire, à l'époque, le calcul qu'ils proposent aujourd'hui et si même ils n'avaient pas de raison de douter de M. [Q] et si celui-ci disposait d'une large autonomie d'action, il était le salarié de la société CMP, relevant du contrôle de l'employeur, surtout pour un chantier dont le montant était important.

La réticence dolosive n'est pas caractérisée par le seul fait que M. [Q] n'a pas particulièrement attiré leur attention sur ce prix.

L'existence d'une insuffisance de chiffrage propre à influer sur la valeur des parts sociales, sa connaissance par M. [Q] et sa dissimulation volontaires ne sont pas démontrées.

Le jugement déboutant M. et Mme [Q] de leurs demandes doit être confirmé.

' Ce litige trouve son origine dans une certaine insuffisance de chiffrage du devis Métrotech ; si le dol prétendu n'est pas établi, cette erreur était de nature à justifier une réaction de la part des cessionnaires ; leur action n'est pas fondée, mais elle n'est pas abusive et, de façon générale, leur comportement ne peut être tenu pour fautif et justifiant une condamnation à des dommages-intérêts.

Le jugement doit encore être confirmé sur ce point.

Les dépens sont à la charge des appelants, qui succombent.

Aucune circonstance ne conduit à écarter l'application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

- Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

- Condamne M. et Mme [V] à payer à M. [Q] une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance d'appel,

- Condamne M. et Mme [V] aux dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile par ceux des mandataires des parties qui en ont fait la demande.

LE GREFFIERLE PRESIDENT

Joëlle POITOUXMichel GAGET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile a
Numéro d'arrêt : 12/00407
Date de la décision : 06/06/2013

Références :

Cour d'appel de Lyon 01, arrêt n°12/00407 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-06-06;12.00407 ?
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