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11/09/2012 | FRANCE | N°11/03414

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale a, 11 septembre 2012, 11/03414


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE







R.G : 11/03414





SAS PHILAGRO FRANCE



C/

[B]







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 21 Avril 2011

RG : F09/3111











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE A



ARRÊT DU 11 SEPTEMBRE 2012













APPELANTE :



SAS PHILAGRO FRANCE

[Adresse 2]

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[Localité 4]



représentée par Me Joseph AGUERA de la SCP JOSEPH AGUERA & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON substitué par la SCP JOSEPH AGUERA & ASSOCIES (Me Olivier GELLER), avocats au barreau de LYON







INTIMÉ :



[K] [B]

[Adresse 1]

[Localité 3]



comparant en per...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : 11/03414

SAS PHILAGRO FRANCE

C/

[B]

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 21 Avril 2011

RG : F09/3111

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 11 SEPTEMBRE 2012

APPELANTE :

SAS PHILAGRO FRANCE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Joseph AGUERA de la SCP JOSEPH AGUERA & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON substitué par la SCP JOSEPH AGUERA & ASSOCIES (Me Olivier GELLER), avocats au barreau de LYON

INTIMÉ :

[K] [B]

[Adresse 1]

[Localité 3]

comparant en personne, assisté de Me Fabien MBIDA, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 22 Mai 2012

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Didier JOLY, Président

Mireille SEMERIVA, Conseiller

Catherine PAOLI, Conseiller

Assistés pendant les débats de Sophie MASCRIER, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 11 Septembre 2012, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Didier JOLY, Président, et par Sophie MASCRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

Monsieur [B] a été engagé par la société RHODIAGRI par CDI en date du 30 octobre 1972 en, qualité de visiteur commercial agricole au coefficient 330 des industries chimiques du 30 octobre 1972 jusqu'au 31 décembre 1986.

A compter du 1er janvier 1987, Monsieur [B] était promu au coefficient 400 des industries chimiques en qualité d'agent technico-commercial.

Le 1er mai 1989, Monsieur [B] devenait responsable de secteur sans changement de coefficient.

Dans le courant de l'année 1993, la société PHILAGRO a repris plusieurs activités développées par la société RHONE POULENC.

C'est dans ce conteste que le contrat de travail de Monsieur [B] a été transféré le 1er juin 1993 à la société PHILAGRO au sein de laquelle il a été promu ingénieur commercial, coefficient 460.

Par courrier en date du 18 avril 2007, Monsieur [G], Directeur Régional Sud-est notifiait plusieurs griefs à Monsieur [B] et lui retirait la société SPDA de son portefeuille de clients.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 19 avril 2007, Monsieur [B] a été convoqué à un entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement par la société PHILAGRO.

L'entretien s'est tenu le 16 mai 2007 et par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 22 mai 2007, la société PHILAGRO a notifié au salarié son licenciement pour faute grave.

Contestant cette mesure, Monsieur [B] a saisi le conseil des prud'hommes de LYON (section encadrement), lequel , par jugement contradictoire en date du 21 avril 2011 a :

Dit que le licenciement de Monsieur [B] ne repose pas sur une faute grave mais sur une cause réelle et sérieuse.

Condamne la société PHILAGRO à payer à Monsieur [B] les sommes suivantes :

* 12 670 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis

* 1 267 euros au titre des congés payés afférents

* 105 584 euros à titre d'indemnité de licenciement

* 1 400 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Déboute la société PHILAGRO de sa demande à ce titre.

Ordonne l'exécution provisoire, au titre des dispositions de l'article 515 du code de procédure civile et ce sur la somme de 52 800 euros.

Condamne la société PHILAGRO à payer la somme de 2 740 euros au titre du droit individuel à la formation.

Ordonne le remboursement par la société PHILAGRO aux organismes concernés des indemnités de chômage payées à Monsieur [B] du jour de son licenciement au jour du présent jugement dans la limite de trois mois d'indemnités.

Fixe la moyenne des salaires de Monsieur [B] à la somme de 4 223 euros.

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Condamne la société PHILAGRO aux entiers dépens de la présente instance y compris les éventuels frais d'exécution.

Le jugement a été notifié à la SAS PHILAGRO FRANCE le 26 avril 2011 laquelle en a relevé appel par lettre recommandée du 10 mai 2011.

Aux termes de ses écritures déposées le 23 décembre 2011 soutenues lors de l'audience du 22 mai 2012, la SAS PHILAGRO FRANCE conclut en demandant à la Cour :

- Confirmer le jugement en ses dispositions satisfactoires ;

- Réformer le jugement pour le surplus ;

- Débouter Monsieur [B] de l'ensemble de ses demandes ;

En conséquence,

Ordonner la restitution de la somme de 52 800 euros versée par la concluante à Monsieur [B] au titre de l'exécution provisoire de la décision déférée ;

En toute hypothèse,

Condamner Monsieur [B] à verser à la société PHILAGRO FRANCE la somme de 2500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'instance et d'appel.

Aux termes de ses écritures déposées le 5 décembre 2011 et soutenues lors de l'audience du 22 mai 2012, Monsieur [B] demande à la Cour de :

Dire et juger le licenciement de Monsieur [B] non fondé.

En conséquence,

Condamner la société PHILAGRO SAS au paiement des sommes de :

* 12 670,00 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis

* 1 267,00 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis

* 105 584,00 euros à titre d'indemnité de licenciement

* 29 561,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse

* 2 740,00 euros au titre du droit individuel à la formation

* 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Condamner la même aux entiers dépens de l'instance.

L'affaire est venue à l'audience du 17 janvier 2012 à laquelle elle a fait l'objet d'un renvoi à l'audience du 22 mai 2012. A l'issue des plaidoiries, l'affaire a été mise en délibéré au 11 septembre 2012.

MOTIFS DE LA DECISION :

1 - Il résulte des dispositions combinées des articles L.1234-1, L.1232-6 et L.1235-1 du code du travail que devant le juge saisi du litige dont la lettre de licenciement qui fixe les limites, il incombe à l'employeur qui a licencié un salarié pour faute grave, d'une part d'établir l'exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre, d'autre part de démontrer que ceux-ci constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée limitée du préavis.

Par ailleurs il résulte de l'article L. 1332-4 du code du travail que lorsque un fait fautif a eu lieu plus de deux mois avant de déclenchement des poursuites disciplinaires, il appartient à l'employeur de rapporter lui-même la preuve qu'il a eu connaissance de ceux-ci dans les deux mois ayant précédé l'engagement de la procédure disciplinaire.

Il résulte de l'article L. 1333-2 du code du travail qu'un même faute ne peut donner lieu à de sanctions, et que l'employeur ayant épuisé son pouvoir disciplinaire en prononçant un avertissement ne peut, sauf persistance du fait fautif, invoquer les mêmes faits à l'appui d'un licenciement.

2 - La lettre de licenciement notifiée à M. [B], qui fixe les limites du ligite, fait état de deux griefs. Le premier est relatif à l'abus de fonction de ce salarié qui a eu un comportement non professionnel à l'égard d'un client auprès de qui il a pris des engagements à caractère personnel, débordants des conditions commerciales habituelles, et qui n'avaient donc pas reçu l'aval de l'employeur. Le second a trait à l'utilisation là encore à des fins personnelles d'un téléphone professionnel pour des montants importants. L'employeur rappelle ainsi en page deux de la lettre de licenciement que ce comportement qui consiste à confondre les ressources de l'entreprise avec celle du salarié et à faire de la cavalerie auprès de la clientèle de l'entreprise constitue une attitude irresponsable du salarié qui entache l'image de la société de manière certaine et qui justifie qu'il soit mis fin à la relation de travail en raison de la faute grave qu'il constitue.

3 - L'employeur justifie de la matérialité de ces griefs par la production des factures litigieuses tant téléphoniques que du client concerné la société SDPA, des reconnaissances de dettes effectuées par le salarié au nom de la société et des relances que ce client a faites à M [B] (pièces 4 et 7) ; il soutient que ces éléments caractérisent la faute grave fondant le licenciement. Pour sa part le salarié ne conteste pas la matérialité des ces deux griefs, il soutient que le premier grief non seulement est prescrit mais a également déjà fait l'objet d'une sanction le 18 avril 2007 et que le second grief n'est pas d'une gravité suffisante pour justifier la faute grave.

4 - Il ressort des pièces de l'employeur et des propres écrits de ce dernier, que rien dans le dossier du salarié ne vient invalider, que la société Philagro n'a été en mesure de connaître et apprécier l'étendue du problème posé par les factures litigieuses que le 5 mars 2007 en se rendant au siège de la société SDPA qui lui a alors donné connaissance des reconnaissances de dettes et du courrier de relance au salarié. Dans ce contexte, la procédure de licenciement ayant été initiée le 19 avril 2007 par la lettre convoquant le salarié à un entretien préalable, il convient de constater que l'employeur ne peut se voir reprocher un manque de célérité, eu égard notamment à l'ancienneté du salarié, ou une prescription des faits.

5 - La lettre litigieuse du 18 avril 2007, que le salarié analyse comme étant une sanction pour son comportement à l'égard du client, la société SDPA, commence par un rappel chronologique des éléments portés à la connaissance de l'employeur, elle se poursuit par les qualificatifs que l'employeur donne à ces manquements avec l'annonce que le dossier est transmis au Directeur des Ressources Humaines qui aura la charge de formuler les sanctions qu'impliquent ces comportements, elle s'achève par l'indication suivante :

« Pour ma part, afin de rétablir un climat de confiance réciproque avec notre client, et comme je vous l'ai annoncé verbalement, je retire SDPA de votre portefeuille de clients secteur 241 pour le confier au secteur 243.

Je vous demande donc de ne plus avoir de contact professionnels avec les collaborateurs de cette entreprise.»

Dans le contexte sus-rappelé et eu égard à la teneur de ce courrier, celui-ci doit s'analyser en une mesure conservatoire prise par l'employeur pour remédier aux débordements professionnels de son salarié avec ce client et rétablir l'image et la confiance de la société à l'égard du dit client.

Eu égard à la nature des faits reprochés au salarié, leur importance financière, leur renouvellement sur plusieurs années et factures, ceux-ci ont exactement été qualifiés par l'employeur de graves rendant impossible le maintient du salarié dans l'entreprise même pendant le temps du préavis et ce sans qu'il soit besoin d'examiner le second grief, l'utilisation à des fins personnelle d'un téléphone professionnel, non contesté par le salarié et qui ne peut que corroborer et conforter l'analyse du comportement de son salarié faite par l'employeur.

Le jugement doit être infirmé en ce qu'il a considéré qu'il n'y avait pas de faute grave.

6 - S'agissant des conséquences pécuniaires du licenciement l'employeur conteste tant les sommes réclamées par le salarié que celles allouées par le premier juge.

En ce qui concerne les demandes relatives à l'indemnité compensatrice de préavis et aux congés payés y afférents, par application des dispositions de l'article L.1234-1 du code du travail, celles-ci sont exclus lorsque le licenciement est fondé sur une faute grave comme en l'espèce.

Il ressort tant des dispositions de l'article L 1234-9 du code du travail que des stipulations de la convention collective applicable en l'espèce (Annexe III article 14 ) qu'en cas de faute grave le salarié n'a droit ni à une indemnité conventionnelle ni à l'indemnité légale de licenciement.

Par ailleurs, le licenciement reposant sur une cause réelle et sérieuse, M [B] ne subit aucun préjudice de ce chef, ses demandes de dommages et intérets à ce titre ne sont donc pas fondées.

Le jugement en ce qu'il a alloué des sommes de ces chefs de demandes doit être infirmé.

S'agissant du droit individuel à la formation, il résulte là encore des dispositions de l'article L 6323-17 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable, que ce droit n'était pas transférable aux salariés licenciés pour faute grave ou lourde.

Le jugement doit sur cet autre point être réformé et, là encore M [B] débouté de ses demandes.

L'employeur est bien fondé à réclamer la restitution des sommes versées au titre de l'exécution provisoire. Il sera rappelé que la présente disposition vaut titre exécutoire à cet effet.

7 - M [B] succombe en ces prétentions, il supportera la charge des dépens de première instance et d'appel ainsi que celle d'une indemnité de procédure d'un montant de 1000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs

La Cour,

Infirme le jugement entrepris

Statuant à nouveau

Dit le licenciement de M [B] pour faute grave régulier en la forme et au fond.

Déboute M [B] de l'ensemble de ses demandes

Condamne M [B] aux dépens de première instance et d'appel

Condamne le même à payer à la société PHILAGRO la somme de 1000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile

Le greffierLe Président

S. MASCRIERD. JOLY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale a
Numéro d'arrêt : 11/03414
Date de la décision : 11/09/2012

Références :

Cour d'appel de Lyon SA, arrêt n°11/03414 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-09-11;11.03414 ?
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