La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/01/2012 | FRANCE | N°11/00027

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale a, 04 janvier 2012, 11/00027


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR





R.G : 11/00027





[I]



C/

SAS ALLOIN TRANSPORTS







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT-ETIENNE

du 30 Novembre 2010

RG : F 10/00206











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE A



ARRÊT DU 04 JANVIER 2012







APPELANT :



[L] [I]

né le [Date naissance 3] 1968 à [Localité 7] (42

)

[Adresse 1]

[Localité 4]



comparant en personne, assisté de M. [B] (Délégué syndical ouvrier)







INTIMÉE :



SAS ALLOIN TRANSPORTS

MME [K], directrice d'agence

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 5]



comparant en personne, assistée de Me Yves MERL...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

R.G : 11/00027

[I]

C/

SAS ALLOIN TRANSPORTS

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT-ETIENNE

du 30 Novembre 2010

RG : F 10/00206

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 04 JANVIER 2012

APPELANT :

[L] [I]

né le [Date naissance 3] 1968 à [Localité 7] (42)

[Adresse 1]

[Localité 4]

comparant en personne, assisté de M. [B] (Délégué syndical ouvrier)

INTIMÉE :

SAS ALLOIN TRANSPORTS

MME [K], directrice d'agence

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 5]

comparant en personne, assistée de Me Yves MERLE de la SELCA CHASSANY WATRELOT ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 02 Novembre 2011

Présidée par Didier JOLY, Président magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Sophie MASCRIER, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Didier JOLY, Président

Hervé GUILBERT, Conseiller

Mireille SEMERIVA, Conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 04 Janvier 2012 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Didier JOLY, Président, et par Sophie MASCRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

[L] [I] a été engagé par la société ALLOIN TRANSPORTS en qualité de conducteur hautement qualifié (ouvrier, groupe 7, coefficient 150 M) suivant contrat écrit à durée indéterminée du 21 avril 2008 soumis à la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires de transport. Son salaire mensuel brut a été fixé à 1 368,06 € pour 35 heures hebdomadaires de travail, augmenté d'une prime de non accident versée en vertu d'un usage.

[L] [I] a fait l'objet de deux avertissements le 14 novembre 2008 et le 5 février 2009, le premier pour mauvaise utilisation de sa carte conducteur, le second pour défaut de maîtrise de son véhicule.

Par lettre remise en main propre contre décharge le 3 mars 2009, la société ALLOIN TRANSPORTS a notifié à [L] [I] un avertissement pour avoir, effectuant la navette [Localité 7]/[Localité 6], refusé de se positionner en «'repos'» pendant 1 h 30 minimum sur les trois heures de coupure entre 23 h. 30 et 2 h. 30, comme il en avait pris l'engagement.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 12 mai 2009, la société TRANSPORTS ALLOIN a convoqué [L] [I] à un entretien préalable en vue de son éventuel licenciement fixé au 25 mai 2009.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 29 mai 2009 la société ALLOIN TRANSPORTS a notifié à [L] [I] son licenciement dans les termes suivants :

Vous occupez la fonction de conducteur PL depuis le 21 avril 2008 au sein de notre société et effectuez à ce titre des navettes, dont notamment la navette de nuit entre [Localité 7] et [Localité 6], une fois par semaine.

Votre arrivée sur le site de [Localité 6] est prévue à 23 h 30 pour un départ à 2 h 30 du matin.

Durant ces trois heures, vous n'avez aucun travail à effectuer et pouvez vaquer librement à vos occupations personnelles.

C'est pourquoi il a été convenu, lors d'une réunion de décembre dernier, avec votre Directrice d'Agence et votre Directeur Régional, que les conducteurs en charge de cette navette, se positionnent au moins 1 h 30 en repos durant les 3 heures de coupure

Mais quelques semaines après que ces directives aient été données, votre Directrice d'Agence a constaté que vous ne respectiez pas cette consigne, et ce, de manière récurrente.

C'est la raison pour laquelle nous vous avons sanctionné le 20 février 2009, afin de vous rappeler à vos obligations.

Or à ce jour, nous constatons que vous ne tenez aucunement compte de nos exigences et que vous persistez à ne vous positionner en «'repos'» que le minimum légal lorsque vous effectuez la navette [Localité 7]/[Localité 6].

Pour exemples :

'Le 3 avril 2009 : 46 minutes de repos,

'Le l5 avril 2009 : 47 minutes de repos.

Lors de l'entretien, vous avez justifié votre comportement par des oublis, et ce, malgré nos rappels fréquents.

Nous ne pouvons tolérer que vous n'appliquiez pas les directives légales données par votre hiérarchie, d'autant que vos collègues qui effectuent la même navette respectent ces consignes.

C'est pourquoi, l'ensemble de ces faits ne nous permet pas de poursuivre nos relations contractuelles, et les explications que vous nous avez fournies lors de l'entretien ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation des faits.

Votre préavis d'un mois que nous vous dispensons d'exécuter commencera à courir à compter de la date de première présentation de cette lettre recommandée avec accusé de réception, et vous sera réglé aux échéances normales de paie. [...]

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 4 juin 2009, [L] [I] a contesté son licenciement.

[L] [I] a saisi le Conseil de prud'hommes de Saint-Etienne le 25 février 2010.

* * *

LA COUR,

Statuant sur l'appel interjeté le 3 janvier 2011 par [L] [I] du jugement rendu le 30 novembre 2010 par la formation de départage du Conseil de prud'hommes de Saint-Etienne (section commerce) qui a :

- dit et jugé que le licenciement de [L] [I] repose sur une cause réelle et sérieuse,

- condamné la société ALLOIN TRANSPORTS, prise en la personne de son représentant légal, à payer à [L] [I] la somme de 198, 28 € à titre de dommages et intérêts pour défaut de mention du droit individuel à la formation dans la lettre de licenciement,

- débouté [L] [I] de toutes ses autres demandes,

- débouté la société ALLOIN TRANSPORTS de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamné la société ALLOIN TRANSPORTS aux entiers dépens de l'instance ;

Vu les conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales du 2 novembre 2011 par [L] [I] qui demande à la Cour de :

- confirmer pour partie le jugement entrepris par le Conseil de prud'hommes de Saint-Etienne le 25 février 2010 en ce qu'il a condamné la société ALLOIN TRANSPORTS au paiement à [L] [I], de la somme de 198, 28 € net à titre de dommages-intérêts pour défaut de mention du droit individuel à la formation dans la lettre de licenciement,

- infirmer le jugement sur les autres point,

- condamner la société ALLOIN TRANPORTS au paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 7 mois de salaire 15 452, 92 € net,

- reconnaître que le licenciement de [L] [I] est abusif,

- condamner la société ALLOIN TRANSPORTS au paiement de dommages et intérêts pour compensation de la perte de salaire due au chômage soit 2 540, 97 € net,

- condamner la société ALLOIN TRANSPORTS au paiement suite aux frais réels au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, soit 224, 29 € net,

- condamner la société ALLOIN TRANSPORTS au paiement des intérêts courant depuis les faits,

- condamner la société ALLOIN TRANSPORTS au paiement, au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, d'une indemnité allouée au syndicat intervenant dans le cadre de cette procédure, concernant [L] [I] pour préjudice à la profession, plus importante du fait de l'appel, soit 1 500 € net,

- condamner la société ALLOIN TRANSPORTS aux entiers dépens de l'instance,

- débouter la société ALLOIN TRANSPORTS de l'intégralité de ses demandes ;

Vu les conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales du 2 novembre 2011 par la SAS ALLOIN TRANSPORTS qui demande à la Cour de :

- confirmer le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de Saint-Etienne,

- dire et juger que le licenciement de [L] [I] repose sur une cause réelle et sérieuse,

- constater le défaut d'intervention du syndicat,

- en conséquence, débouter [L] [I] de l'intégralité de ses demandes,

- le condamner à 1 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- le condamner aux entiers dépens ;

Sur le motif du licenciement :

Attendu que selon l'article 3 de la · Directive 2002/15/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 2002 relative à l'aménagement du temps de travail des personnes exécutant des activités mobiles de transport routier, on entend par 'temps de travail' :

1) dans le cas des travailleurs mobiles : toute période comprise entre le début et la fin du travail, durant laquelle le travailleur mobile est à son poste de travail, à la disposition de l'employeur et dans l'exercice de ses fonctions ou de ses activités, c'est à dire :

- le temps consacré à toutes les activités de transport routier [...]

- les périodes durant lesquelles le travailleur mobile ne peut disposer librement de son temps et est tenu de se trouver à son poste de travail, prêt à entreprendre son travail normal, assurant certaines tâches associées au service, notamment les périodes d'attente de chargement ou de déchargement lorsque leur durée prévisible n'est pas connue à l'avance, c'est-à-dire soit avant le départ ou juste avant le début effectif de la période considérée, soit selon les conditions générales négociées entre les partenaires sociaux et/ou définies par la législation des Etats membres ;

Attendu qu'aux termes de l'article 5 du décret n°83-40 du 26 janvier 1983 relatif aux modalités d'application des dispositions du code du travail concernant la durée du travail dans les entreprises de transport routier de marchandises, dans sa rédaction issue du décret n°2002-622 du 25 avril 2002, la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; que la durée du travail effectif ci-dessus fixée est égale à l'amplitude de la journée de travail, définie au paragraphe 1 de l'article 6, diminuée de la durée totale des coupures et du temps consacré aux repas, à l'habillage et au casse-croûte, dans le respect des dispositions de l'article L. 212-4 du code du travail selon lesquelles le temps nécessaire à la restauration ainsi que les temps consacrés aux coupures sont considérés comme du temps de travail effectif lorsque les critères définis au premier alinéa de l'article L. 212- 4 sont réunis ; que les modalités selon lesquelles les temps de coupure et les temps de restauration sont considérés comme du temps de travail effectif en application des dispositions de l'article

L. 212-4 du code du travail peuvent être déterminées, pour la branche, par accord collectif de branche ou, pour l'entreprise ou l'établissement, par accord d'entreprise ou d'établissement ;

Que l'article 5 du décret renvoie ainsi à la négociation collective le soin de déterminer les modalités suivant lesquelles les temps de coupure peuvent être considérés comme du temps de travail effectif, pour le cas où ils ne répondraient pas déjà à la définition générale de ce temps conforme à l'article L. 212-4 du code du travail, devenu L 3121-1 à L 3121-3 ;

Attendu que selon l'article III-1 de l'accord du 23 novembre 1994 sur le temps de service, les repos récupérateurs et la rémunération des personnels de conduite marchandise 'grands routiers' ou 'longue distance', sont pris en compte pour 100 p. 100 de leur durée les temps à disposition tels que surveillance des opérations de chargement et déchargement, sans y participer, et/ou temps d'attente, durant lesquels, bien que n'étant pas tenu de rester à son poste, le conducteur ne peut disposer librement de son temps ; qu'en revanche, ne sont pas pris en compte au titre du temps de service l'ensemble des interruptions, repos, temps pendant lesquels le conducteur n'exerce aucune activité et dispose librement de son temps ;

Qu'en l'espèce, assurant une fois par semaine une navette [Localité 7]/ [Localité 6], [L] [I] arrivait à [Localité 6] à 23 heures 30 et repartait à 2 heures 30 du matin ; qu'au cours de ces trois heures d'attente, dont la durée était prédéterminée et constante, il n'était astreint à aucune activité telle que, par exemple, le chargement ou le déchargement d'un véhicule ; que l'employeur ayant accepté de prendre en charge la rémunération de ce temps dans la limite d'une heure et demie, le salarié n'a pas placé le sélecteur de son appareil de contrôle sur la position repos pendant une heure et demie au moins ; que la réitération de ce comportement en dépit de l'avertissement du 3 mars 2009 démontre son caractère délibéré, que confirme encore la tentative d'auto-justification de [L] [I] tant devant le Conseil de prud'hommes qu'en cause d'appel ; que les considérations développées par l'appelant dans son courrier du 4 juin 2009, à savoir :

'que le camion est propriété de l'entreprise et qu'à ce titre il ne peut s'en servir pour vaquer à ses occupations personnelles,

'que l'entreprise est située dans la zone industrielle, éloignée de tous commerces, et qu'il ne peut donc librement vaquer à ses occupations personnelles, étant à pied,

sont indifférentes ; qu'en effet, les seules circonstances de lieu et d'horaires, à l'exclusion de toute constatation relative à des directives de l'employeur qui auraient pu empêcher le salarié de disposer librement de son temps et de pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles, ne permettent pas de requalifier le temps de coupure en temps de travail effectif ; que [L] [I], qui avait la possibilité au moins théorique de vaquer librement à des occupations personnelles, quelle que soit la nature de celles-ci, n'a pas fait un usage régulier de l'appareil de contrôle en ne plaçant le sélecteur en position repos que pendant l'interruption obligatoire de quarante-cinq minutes après quatre heures et demie de conduite ; qu'il existait donc une cause réelle et sérieuse de licenciement ;

Qu'en conséquence, le jugement entrepris doit être confirmé ;

Sur le droit individuel à la formation :

Attendu que la Cour n'est saisie d'aucun moyen contre cette disposition du jugement ;

PAR CES MOTIFS,

Reçoit l'appel régulier en la forme,

Confirme le jugement entrepris,

Y ajoutant :

Déboute les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne [L] [I] aux dépens d'appel.

Le greffierLe Président

S. MASCRIERD. JOLY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale a
Numéro d'arrêt : 11/00027
Date de la décision : 04/01/2012

Références :

Cour d'appel de Lyon SA, arrêt n°11/00027 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-01-04;11.00027 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award