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02/07/2010 | FRANCE | N°09/06737

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale c, 02 juillet 2010, 09/06737


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE







R.G : 09/06737





SAS ALTEAD INDUSTRIES OUEST



C/

[E]







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes de LYON

du 08 Octobre 2009

RG : F 07/03312











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE C



ARRÊT DU 02 JUILLET 2010













APPELANTE :



SAS ALTEAD INDUSTRIES OUEST

[Adresse 5]

[Localité 3]




représentée par Maître Sabine LEYRAUD, avocat au barreau de GRENOBLE









INTIMÉ :



[H] [E]

né le [Date naissance 1] 1959 à [Localité 6] ( RHONE)

[Adresse 2]

[Localité 4]



comparant en personne, assisté de Maître Pierre MASANOVIC, avocat au barreau de LYON











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AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : 09/06737

SAS ALTEAD INDUSTRIES OUEST

C/

[E]

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes de LYON

du 08 Octobre 2009

RG : F 07/03312

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE C

ARRÊT DU 02 JUILLET 2010

APPELANTE :

SAS ALTEAD INDUSTRIES OUEST

[Adresse 5]

[Localité 3]

représentée par Maître Sabine LEYRAUD, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMÉ :

[H] [E]

né le [Date naissance 1] 1959 à [Localité 6] ( RHONE)

[Adresse 2]

[Localité 4]

comparant en personne, assisté de Maître Pierre MASANOVIC, avocat au barreau de LYON

PARTIES CONVOQUÉES LE : 11 janvier 2010

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 11 Juin 2010

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Michel GAGET, Président de Chambre

Hélène HOMS, Conseiller

Marie-Claude REVOL, Conseiller

Assistés pendant les débats de Malika CHINOUNE, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 02 Juillet 2010, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Michel GAGET, Président de Chambre, et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

EXPOSE DU LITIGE

En 1995, [H] [E] a été embauché par la société MONTALEV qui a été absorbée en 2001 par la S.A.S. ALTEAD INDUSTRIES OUEST ; le 1er juin 2006, il a été promu aux fonctions de chargé d'affaires et rattaché administrativement à l'agence de [O] ; cet agence devant être fermée et son poste supprimé, l'employeur a proposé trois postes à [H] [E] qui les a refusés ; le 22 juin 2007, la S.A.S. ALTEAD INDUSTRIES OUEST a licencié [H] [E] pour motif économique; [H] [E] a signé une convention de reclassement personnalisée.

[H] [E] a contesté son licenciement devant le conseil des prud'hommes de LYON ; il a réclamé des dommages et intérêts et une indemnité fondée sur les frais irrépétibles.

Par jugement du 8 octobre 2009, le conseil des prud'hommes a décidé que le licenciement ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse, a condamné la S.A.S. ALTEAD INDUSTRIES OUEST à verser à [H] [E] la somme de 40.000 € à titre de dommages et intérêts et la somme de 2.000 € au titre des frais irrépétibles, a ordonné le remboursement par la S.A.S. ALTEAD INDUSTRIES OUEST aux organismes concernés des indemnités chômage versées à [H] [E] dans la limite de trois mois d'allocations et a laissé les dépens de l'instance à la charge de la S.A.S. ALTEAD INDUSTRIES OUEST.

La S.A.S. ALTEAD INDUSTRIES OUEST a interjeté appel par lettre recommandée adressée au greffe le 26 octobre 2009.

Par conclusions reçues au greffe le 12 mai 2010 maintenues et soutenues oralement à l'audience, la S.A.S. ALTEAD INDUSTRIES OUEST :

- expose que l'insuffisance de résultats a nécessité une réorganisation de l'entreprise afin de sauvegarder la compétitivité du secteur d'activité et que la réorganisation passait par la fermeture de l'agence de [O] et la suppression des postes affectés sur cette agence,

- observe qu'elle a respecté loyalement son obligation de reclassement en offrant trois postes à [H] [E] qui les a refusés,

- au principal, demande le rejet des prétentions de [H] [E] et sa condamnation à lui restituer la somme de 43.000 € versée en exécution du jugement entrepris,

- au subsidiaire, estime excessif le montant des dommages et intérêts alloués à [H] [E],

- sollicite la somme de 2.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions reçues au greffe le 10 juin 2010 maintenues et soutenues oralement à l'audience, [H] [E] qui interjette appel incident :

- souligne que la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige se borne à évoquer la situation de l'agence de [O],

- fait valoir que la situation de la seule agence de [O] ne peut pas justifier le licenciement dans la mesure où l'entreprise connaît une prospérité florissante,

- reproche à l'employeur de ne pas avoir exécuté loyalement son obligation de reclassement,

- réclame la somme de 6.485,70 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 648,57 € de congés payés afférents, et la somme de 60.000 € à titre de dommages et intérêts,

- sollicite la somme de 2.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le licenciement :

[H] [E] a été licencié pour motif économique ; la S.A.S. ALTEAD INDUSTRIES OUEST a fermé l'agence de [O] et a supprimé le poste de [H] [E] qui était rattaché à cette agence.

La S.A.S. ALTEAD INDUSTRIES OUEST fait partie du groupe ALTEAD ; son activité consiste dans le transfert, le montage, le démontage, la manutention, le levage, la maintenance et le service aux industriels.

La réorganisation de l'entreprise constitue un motif économique du licenciement si elle est opérée pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise ou du secteur d'activité du groupe dont relève l'entreprise; l'employeur doit démontrer qu'une menace pèse sur la compétitivité et doit prouver que la fermeture d'un site est nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité du groupe ou du secteur d'activité.

Le 23 février 2007, la S.A.S. ALTEAD INDUSTRIES OUEST a informé le comité d'entreprise du projet de fermeture de l'agence de [O] qu'elle a motivé ainsi :

'raisons économiques, financières ou techniques :

résultats économiques insuffisants sur 2004/2005/2006,

recentrage des activités nécessaire sur [Localité 7],

rapatriement du matériel sur [Localité 7],

faciliter la gestion des chantiers ouvrages d'art et manutentions lourdes'.

Les difficultés économiques du groupe ou du secteur d'activité ne sont pas énoncées clairement.

Le 9 mars 2007, la S.A.S. ALTEAD INDUSTRIES OUEST a écrit à [H] [E] et lui a expliqué que la fermeture du site de [O] était une mesure 'destinée à améliorer notre fonctionnement, être plus réactif auprès de nos clients et assurer une meilleure coordination entre les différents services afin de sauvegarder notre compétitivité' ; il n'est pas question de difficulté économique.

La lettre de licenciement du 22 juin 2007 en expose les motifs économiques comme suit : ' fermeture de l'agence de [O] et rapatriement du matériel sur [Localité 7] décidés afin de sauvegarder la compétitivité de la société et de la branche industrie de notre groupe en présence de résultats économiques insuffisants sur les trois dernières années'.

Lors de la réunion du comité d'entreprise du 30 juillet 2007, le directeur de la région Ouest a déclaré: 'la fermeture de [O] n'est pas qu'économique, elle a été décidée pour des raisons de réorganisation, de cohérence (filiale ouest) et structurelles'.

Le comité d'entreprise ayant exercé son droit d'alerte, le cabinet comptable Secafi Alpha a été missionné ; le licenciement de [H] [E] est intervenu avant que le cabinet comptable rende son rapport.

Ainsi, l'employeur n'a pas fourni de motifs économiques précis.

La presse spécialisée a publié plusieurs articles sur le groupe ALTEAD ; un article du 26 février 2007 relate que le groupe ALTEAD emploie 1.600 personnes, réalise un chiffre d'affaires de 150 millions d'euros (manutention) et vient d'acquérir deux sociétés ; un article de juillet 2007 annonce que le groupe ALTEAD vient d'acquérir trois sociétés ; un article d'octobre 2007 informe que le nombre de salariés est passé à 1.900, que le groupe ALTEAD a acheté une société et que cette acquisition, comme que les précédentes, a été financée par dette et par une émission d'obligation convertibles.

Les bilans de la S.A.S. ALTEAD INDUSTRIES OUEST attestent d'un bénéfice de 103.138 € au 31 décembre 2005 et de 15.561 € au 31 décembre 2006 ; entre ces deux dates, les produits d'exploitation ont nettement augmentés passant de 7.788.772 € à 11.811.052 € ; les charges ont également connu une augmentation notable puisque les charges d'exploitation sont passées de 7.594.040 € à 11.548.527 €, les autres achats et charges externes sont passés de 4.696.609 € à 7.706.195 €, les charges exceptionnelles sont passées de 81.706 € à 171.899 € et les charges financières sont passées de 35.246€ à 106.751 €.

Les bilans d'ALTEAD INDUSTRIES révèlent des pertes de 571.379 € au 31 décembre 2006 et de 1.990.198 € au 31 décembre 2007 ; durant cette même période, les charges exceptionnelles sont passées de 349.782 € à 1.056.320 € ; cet accroissement très net s'explique par une dotation exceptionnelle aux amortissements, dépréciations et provisions d'un montant de 706.490 € en 2007 laquelle n'a pas été opérée en 2006.

Les bilans reflètent nécessairement la politique d'acquisitions de sociétés par le groupe ; les bilans de

la S.A.S. ALTEAD INDUSTRIES OUEST ne sont pas révélateurs de difficultés économiques dans la mesure où les produits d'exploitation ont nettement augmentés et n'ont pas permis de dégager des bénéfices, essentiellement en raison du fort accroissement des autres achats et charges externes.

Dans ces conditions, l'employeur ne rapporte pas la preuve qui lui incombe qu'une menace pesait sur la compétitivité de l'entreprise ou du secteur d'activité du groupe et que la fermeture du site de [O] était nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité du groupe ou du secteur d'activité.

En conséquence, le licenciement se trouve dénué de cause réelle et sérieuse et le jugement entrepris doit être confirmé.

Eu égard à son ancienneté et à son statut de cadre, [H] [E] bénéficiait d'un préavis d'une durée de trois mois ; dans le cadre de la convention de reclassement personnalisée qu'il a signée, il a perçu un mois de salaire ; l'absence de motif économique au licenciement a privé de cause la convention de reclassement personnalisée ; dès lors, l'employeur doit régler à [H] [E] l'indemnité compensatrice de préavis après déduction de la somme versée en exécution de la convention de reclassement ; l'employeur doit donc l'équivalent de deux mois de salaire ; l'employeur ne discute pas le montant réclamé par [H] [E] ; aussi, il doit être fait droit à la demande nouvelle présentée en appel par [H] [E].

En conséquence, la S.A.S. ALTEAD INDUSTRIES OUEST doit être condamnée à verser à [H] [E] la somme de 6.485,70 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 648,57 € de congés payés afférents.

[H] [E] comptabilisait une ancienneté supérieure à deux ans et la S.A.S. ALTEAD INDUSTRIES OUEST emploie plus de onze personnes.

En application de l'article L. 1233-3 du code du travail, [H] [E] a droit à une indemnité qui ne peut être inférieure aux rémunérations des six derniers mois ; [H] [E] a été au chômage jusqu'à la fin du mois de novembre 2009, soit durant 29 mois ; il a touché des allocations chômage de 1.850 € par mois alors que sa rémunération mensuelle brute moyenne se montait à 3.366 € ; ces éléments conduisent à chiffrer les dommages et intérêts à la somme de 40.000 €.

En conséquence, la S.A.S. ALTEAD INDUSTRIES OUEST doit être condamnée à verser à [H] [E] la somme de 40.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause et le jugement entrepris doit être confirmé.

En application de l'article L. 1235-4 du code du travail, la S.A.S. ALTEAD INDUSTRIES OUEST doit être condamnée d'office à rembourser aux organismes concernés les allocations chômage versées à [H] [E] du jour du licenciement au jour du jugement dans la limite de trois mois d'indemnités et le jugement entrepris doit être confirmé.

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

L'équité commande de confirmer le jugement entrepris en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et de condamner la S.A.S. ALTEAD INDUSTRIES OUEST à verser à [H] [E] en cause d'appel la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La S.A.S. ALTEAD INDUSTRIES OUEST qui succombe doit supporter les dépens de première instance et d'appel et le jugement entrepris doit être confirmé.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme le jugement entrepris,

Ajoutant,

Condamne la S.A.S. ALTEAD INDUSTRIES OUEST à verser à [H] [E] la somme de 6.485,70 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 648,57 € de congés payés afférents,

Condamne la S.A.S. ALTEAD INDUSTRIES OUEST à verser à [H] [E] en cause d'appel la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la S.A.S. ALTEAD INDUSTRIES OUEST aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

Malika CHINOUNE Michel GAGET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale c
Numéro d'arrêt : 09/06737
Date de la décision : 02/07/2010

Références :

Cour d'appel de Lyon SC, arrêt n°09/06737 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-07-02;09.06737 ?
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