AFFAIRE PRUD'HOMALE
RAPPORTEUR
R.G : 08/05725
[G]
C/
SA LEON GROSSE
APPEL D'UNE DÉCISION DU :
Conseil de Prud'hommes de SAINT ETIENNE
du 03 Juillet 2008
RG : F 06/00564
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE C
ARRÊT DU 05 JUIN 2009
APPELANT :
[O] [G]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
comparant en personne, assisté de Maître Géraldine VILLAND, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE, substituant Maître Yves CHEVALIER, avocat au même barreau
INTIMÉE :
SA LEON GROSSE
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par Maître Laurence BOUVIER, avocat au barreau de SAINT ETIENNE
PARTIES CONVOQUÉES LE : 22 septembre 2008
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 14 Mai 2009
Présidée par Marie-Claude REVOL, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Malika CHINOUNE, Greffier.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Bruno LIOTARD, Président
Hélène HOMS, Conseiller
Marie-Claude REVOL, Conseiller
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 05 Juin 2009 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Bruno LIOTARD, Président, et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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EXPOSE DU LITIGE
Le 1er juin 2006, [O] [G] a été embauché par la S.A. Léon GROSSE en qualité de chef de chantier ; le 2 novembre 2006, il a été licencié pour divergences de point de vue et d'appréciation sur les méthodes de travail de l'entreprise ;
[O] [G] a contesté son licenciement devant le Conseil des prud'hommes de SAINT-ETIENNE ; il a réclamé le paiement d'heures supplémentaires, une indemnité pour travail dissimulé, des dommages et intérêts pour licenciement abusif et la remise d'une attestation ASSEDIC et de bulletins de paie rectifiés ;
Par jugement du 3 juillet 2008, le conseil des prud'hommes a estimé le licenciement abusif, a condamné l'employeur à verser au salarié la somme de 1.500 € de dommages et intérêts, a débouté le salarié de ses demandes relatives aux heures supplémentaires et a partagé les dépens de l'instance entre les parties ;
Le jugement a été notifié le 2 août 2008 à [O] [G] qui a interjeté appel par lettre recommandée adressée au greffe le 1er août 2008 ;
Par conclusions reçues au greffe le 10 décembre 2008 maintenues et soutenues oralement à l'audience, [O] [G] :
- fait valoir que la lettre de licenciement n'est pas motivée et que la cause du licenciement n'est nullement vérifiable,
- souligne l'absence d'avertissement antérieurement au licenciement,
- prétend donc que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
- expose avoir subi un important préjudice dans la mesure où la S.A. Léon GROSSE l'avait débauché pour le prendre à son service et où il n'a pas retrouvé de contrat de travail à durée indéterminée et réclame des dommages et intérêts à hauteur de 20.000 €,
- affirme avoir réalisé de très nombreuses heures supplémentaires, produit plusieurs attestations, les horaires des livraisons du béton et son agenda au soutien de ses allégations,
- réclame la somme de 11.328,08 € en paiement des heures supplémentaires et la somme de 18.000 € représentant l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,
- demande la remise d'une attestation ASSEDIC et de bulletins de paie rectifiés ;
Par conclusions reçues au greffe le 3 février 2009 maintenues et soutenues oralement à l'audience, la S.A. Léon GROSSE qui interjette appel incident :
- soutient le bien fondé du licenciement, reprochant au salarié de nombreuses erreurs techniques ainsi qu'un manque d'organisation et de rigueur à l'origine de malfaçons coûteuses pour l'entreprise,
- prétend que les motifs invoqués dans la lettre de licenciement peuvent être précisés devant les juridictions et que l'insuffisance professionnelle constitue un motif de licenciement matériellement vérifiable,
- subsidiairement, invoque le caractère excessif de la demande de dommages et intérêts,
- dément que le salarié ait accompli des heures supplémentaires, et, subsidiairement, objecte que le calcul des sommes réclamées par le salarié est erroné,
- demande, en conséquence, le rejet des prétentions de [O] [G] ;
MOTIFS DE LA DECISION
Sur le licenciement :
L'article L. 1232-6 du code du travail exige que la lettre de licenciement comporte l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur ; le motif doit être précis et matériellement vérifiable ; à défaut de motif, le licenciement se trouve dépourvu de cause réelle et sérieuse;
La lettre de licenciement indique le motif suivant : 'divergence de point de vue et d'appréciation sur les méthodes de travail de l'entreprise qui ne permettent pas de continuer le chantier et notre collaboration dans un climat de confiance' ;
La perte de confiance de l'employeur ne peut pas constituer une cause de licenciement ;
La lettre n'énonce pas les motifs de la perte de confiance ; notamment, elle ne fait pas état de l'insuffisance professionnelle alléguée par l'employeur dans le cadre de l'instance ;
En conséquence, le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse et le jugement entrepris doit être confirmé ;
En application de l'article L. 1235-5 du code du travail, [O] [G] dont l'ancienneté est inférieure à deux ans peut prétendre à une indemnité correspondant au préjudice subi ;
[O] [G] a quitté un emploi pour lequel il touchait une rémunération bien moindre afin de rejoindre la S.A. Léon GROSSE ; il ne prouve pas avoir été débauché par la S.A. Léon GROSSE ; dans cette entreprise, il percevait un salaire mensuel brut de 2.950 € ; il n'a pas retrouvé de travail sous contrat de travail à durée indéterminée malgré des recherches actives ; la S.A. Léon GROSSE lui a versé une gratification de 2.250 € en décembre 2006 ;
Ces éléments conduisent à chiffrer le préjudice à la somme de 5.000 € ;
En conséquence, la S.A. Léon GROSSE doit être condamnée à verser à [O] [G] la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause et le jugement entrepris doit être infirmé ;
Sur les heures supplémentaires :
En cas de litige relatif aux heures supplémentaires, l'article L.3171-4 du code du travail oblige le salarié à apporter des éléments à l'appui de sa demande et à l'employeur de fournir les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ;
[O] [G] réclame le paiement des heures supplémentaires accomplies aux mois d'août, septembre et octobre 2006 ;
[O] [G] produit les attestations de collègues de travail, [C] [R], [B] [H] et [M] [S] ; il s'agit de salariés d'entreprises de travail temporaire mis à la disposition de la S.A. Léon GROSSE ; [C] [R] témoigne que [O] [G] était présent sur le chantier de 6 heures à 18 heures et parfois de 5 heures à 18 heures en septembre et octobre ; [B] [H] témoigne que [O] [G] était présent sur le chantier de 6 heures à 19 heures et parfois de 5 heures à 19 heures en août, septembre et octobre ; [M] [S] témoigne que [O] [G] était présent sur le chantier de 6 heures à 19 heures et parfois de 5 heures à 19 heures en septembre et octobre ; les emplois du temps produits par l'employeur et renseignés par [O] [G] démontrent qu'aucun des témoins n'a travaillé au mois d'août et qu'aux mois de septembre et octobre 2006, ils accomplissaient 7 heures 75 de travail les lundi, mardi, mercredi et jeudi et 7 heures de travail le vendredi ; ils n'ont donc pas pu constater personnellement que [O] [G] effectuait des journées de travail de 12 ou 13 heures comme ils l'affirment ; d'ailleurs, [B] [H] a établi une nouvelle attestation dans laquelle il indique que l'attestation rédigée en faveur de [O] [G] a été faite sur ses instructions et par complaisance ;
[O] [G] produit les horaires des livraisons de béton sur le chantier BIOPARC qu'il dirigeait ; ces horaires sont les suivants : 10 heures, 11 heures, 13 heures, 13 heures 30, 14 heures 30, 15 heures et, pour le jeudi 17 août, 6 heures ; ces horaires n'étayent nullement la thèse de la réalisation d'heures supplémentaires ;
[O] [G] fournit son agenda de l'année 2006 lequel n'apporte aucune indication sur ses horaires de travail ;
Dans ces conditions, [O] [G] n'apporte pas d'élément au soutien de sa demande relative aux heures supplémentaires ;
En conséquence, [O] [G] doit être débouté de sa demande en paiement d'heures supplémentaires et de ses demandes subséquentes en règlement de l'indemnité pour travail dissimulé et en remise des bulletins de paie et de l'attestation ASSEDIC rectifiés et le jugement entrepris doit être confirmé ;
Sur les dépens :
Le jugement entrepris doit être confirmé en ses dispositions relatives aux dépens ;
La S.A. Léon GROSSE qui succombe sur le licenciement doit supporter les dépens d'appel ;
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, en ce qu'il a débouté [O] [G] de sa demande en paiement d'heures supplémentaires et de ses demandes subséquentes en règlement de l'indemnité pour travail dissimulé et en remise des bulletins de paie et de l'attestation ASSEDIC rectifiés et en ses dispositions relatives aux dépens,
Infirmant sur les dommages et intérêts et statuant à nouveau,
Condamne la S.A. Léon GROSSE à verser à [O] [G] la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause,
Ajoutant,
Condamne la S.A. Léon GROSSE aux dépens d'appel.
Le Greffier Le Président
Malika CHINOUNE Bruno LIOTARD