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29/05/2008 | FRANCE | N°08/00001

France | France, Cour d'appel de Fort-de-France, Chambre sociale, 29 mai 2008, 08/00001


R. G : 08 / 00001
Du 29 / 05 / 2008

Conseil de Prud'hommes de Fort de France 22 novembre 2007 formation de référé

SOCIETE ANONYME D'ECONOMIE MIXTE DE PRODUCTION SUCRIERE ET RHUMIERE DE LA MARTINIQUE " SAEM PSRM "
C /
Monsieur K... et autres...

COUR D'APPEL DE FORT DE FRANCE
CHAMBRE SOCIALE
ARRET DU 29 MAI 2008
APPELANTE :
SOCIETE ANONYME D'ECONOMIE MIXTE DE PRODUCTION SUCRIERE ET RHUMIERE DE LA MARTINIQUE " SAEM PSRM " Usine du Gallion 97220 LA TRINITE

représentée par Me Hervé BOUCHEAU, avocat au barreau de FORT DE FRANCE
IN

TIMES :
Monsieur Joël K... et autres...

représentés par M. L... (délégué syndical) muni d'un pouvo...

R. G : 08 / 00001
Du 29 / 05 / 2008

Conseil de Prud'hommes de Fort de France 22 novembre 2007 formation de référé

SOCIETE ANONYME D'ECONOMIE MIXTE DE PRODUCTION SUCRIERE ET RHUMIERE DE LA MARTINIQUE " SAEM PSRM "
C /
Monsieur K... et autres...

COUR D'APPEL DE FORT DE FRANCE
CHAMBRE SOCIALE
ARRET DU 29 MAI 2008
APPELANTE :
SOCIETE ANONYME D'ECONOMIE MIXTE DE PRODUCTION SUCRIERE ET RHUMIERE DE LA MARTINIQUE " SAEM PSRM " Usine du Gallion 97220 LA TRINITE

représentée par Me Hervé BOUCHEAU, avocat au barreau de FORT DE FRANCE
INTIMES :
Monsieur Joël K... et autres...

représentés par M. L... (délégué syndical) muni d'un pouvoir régulier

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré

Monsieur Yves ROLLAND, Président de Chambre, Monsieur Pascal FAU, Président Monsieur Alain FOUQUETEAU, Conseiller,

GREFFIER

Monsieur Philippe BLAISE lors des débats et du prononcé
DÉBATS : A l'audience publique du 2 avril 2008
A l'issue des débats, le président a avisé les parties que la décision sera prononcée le 29 mai 2008 par sa mise à disposition au greffe de la Cour conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du nouveau code de procédure civile.
ARRÊT : CONTRADICTOIRE et en dernier ressort
*******
EXPOSE DU LITIGE.

Le 22 décembre 2000, un « ACCORD D'ENTREPRISE SUR LA RÉDUCTION DU TEMPS DE TRAVAIL » était signé entre le représentant légal de la Société Anonyme d'Economie Mixte de Production Sucrière et Rhumière de la Martinique, autrement appelée SAEM PSRM, dont le siège social est « usine du Galion-97 220 Trinité » et celui du syndicat CGTM représentatif dans l'entreprise.

L'article VI de cet accord portant sur le « TRAVAIL INTERMITTENT » stipule :
" L'entreprise emploie pendant la campagne sucrière des saisonniers.
Ce personnel qui revient chaque année à la même période est actuellement assimilé aux salariés à temps partiel annualisé.
Dans le cadre de la loi sur la réduction du temps de travail et tenant compte de sa situation particulière, les dispositions des articles L. 212-4 à L. 212-4-5 du code du travail s'appliqueront à cette catégorie de personnel qui signera un contrat de travail intermittent. "
En exécution de cet accord, un projet de « contrat de travail intermittent » était adressé à Messieurs Joël K..., et autres... bénéficiant tous d'une ancienneté importante dans l'entreprise (de 19 à 23 ans).
Ceux-ci refusaient de signer ces contrats au motif qu'ils n'étaient pas concernés par l'article VI de l'accord d'entreprise du 22 / 12 / 2000, lequel ne définirait pas les emplois considérés comme « intermittents ».
Par acte d'huissier du 20 septembre 2007, ils assignaient la SAEM PSRM pour le 27 septembre 2007 en paiement de rappels de salaires sur 5 ans sur la base d'un horaire de travail à temps complet, devant la formation de référé du Conseil de Prud'hommes de Fort-de-France qui, par ordonnance en date du 22 novembre 2007, faisait droit à l'intégralité des demandes " à titre de provisions ".
Par déclaration reçue au greffe de la cour d'appel le 28 décembre 2007, la société SAEM PSRM interjetait appel de cette décision qui lui avait été notifiée le 20 décembre 2007.
Elle fait valoir à titre liminaire que l'assignation est nulle faute de respecter les mentions prescrites par l'article 648 du Nouveau Code de Procédure Civile, les demandeurs organisant un détournement de procédure en articulant leur demande en référé sur la " cessation d'un trouble illicite " prévue par l'article R. 516-31 du code du travail, sans lui avoir donné au surplus les moyens de conclure avant l'audience.
Sur le fond, elle soutient que l'accord litigieux prévoit la conversion des emplois " saisonniers " en emplois " intermittents ", ce qui satisfait aux dispositions de la loi, qu'au surplus les demandes en paiement ne sont nullement justifiées et conclut à l'annulation de l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions et à la condamnation des intimés à lui payer 4000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Les intimés font valoir pour l'essentiel qu'il ressort des dispositions de l'article L. 212-4-12 du code du travail que la possibilité de recourir au travail intermittent est limitée à une catégorie particulière d'emploi qui doit être définie par l'accord collectif ayant prévu le recours au travail intermittent et que c'est donc à juste titre que l'ordonnance entreprise a considéré que la méconnaissance flagrante de ces dispositions était constitutive d'un trouble manifestement illicite et a fait droit aux demandes de provisions sur les salaires impayés.
Ils concluent à la confirmation de l'ordonnance en toutes ses dispositions, la société appelante étant en outre condamnée à payer à chacun d'entre eux 100 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION.

La formation de référé du Conseil de Prud'hommes de Fort-de-France, après avoir :

considéré que 6 jours francs étaient un délai suffisant pour permettre à la société défenderesse de s'expliquer sur des demandes en rappel de salaires sur 5 ans dont le montant total avoisine 800 000 euros (5 247 000 F),
retenu l'affaire malgré la demande de renvoi de cette dernière qui n'avait pas conclu dans ce délai,
a fait intégralement droit aux demandes, motif pris de l'existence d'un " trouble manifestement illicite ".
Ce faisant, les premiers juges ont, d'évidence, méconnu tant les dispositions de l'article 6-1 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales que le principe du contradictoire (Articles 14 et 15 du NCPC).

Sur l'assignation.

La société appelante s'abstient de s'expliquer sur l'irrégularité qui justifierait la nullité de l'acte introductif d'instance.
Ce moyen ne peut qu'être rejeté.

Sur le trouble manifestement illicite.

Les premiers juges ont fait une application manifestement erronée des dispositions des articles R. 516-30 et R. 516-31 du code du travail.
Il résulte en effet de ces textes que, si la formation de référé peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, " prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ", elle ne peut accorder de provisions qu'après avoir expressément constaté que " l'existence de l'obligation " n'était pas " sérieusement contestable ".
En fondant leur décision de condamnation au paiement de provisions sur le " trouble illicite " que constituerait à leurs yeux le non-respect par l'employeur des dispositions de l'article L. 112-4-12 du code du travail, les premiers juges ont mal apprécié les pouvoirs dont ils disposaient.

Sur les demandes de provisions.

L'article L. 212-4-12 du code du travail dispose que " Dans les entreprises (...) pour lesquels une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement le prévoit, des contrats de travail intermittents peuvent être conclus afin de pourvoir les emplois permanents, définis par cette convention ou cet accord, qui par nature comportent une alternance de périodes travaillées et de périodes non travaillées (...) ".
Le litige entre les parties porte sur le point de savoir si, en faisant référence aux personnes employées en qualité de " saisonniers " pendant la " campagne sucrière ", personnel " actuellement assimilé aux salariés à temps partiel annualisé ", l'article VI de l'accord du 22 / 12 / 2000 définit ou non les " contrats de travail intermittents qui peuvent être conclu (dans l'entreprise) afin de pourvoir des emplois permanents qui, par nature, comportent une alternance de périodes travaillées et de périodes non travaillées " au sens de l'article L. 212-4-12.
L'examen des demandes en rappel de salaires sur 5 ans présentés par chacun des demandeurs, fusse à titre de provision, suppose donc l'analyse préalable des termes de l'accord collectif du 22 / 12 / 2000, de ses conditions d'application à chacun des salariés demandeurs, en regard notamment de sa situation juridique précise en décembre 2000.
Cette analyse échappe manifestement à la compétence du juge des référés, juge de l'évident et de l'incontestable.
Alors au surplus que la seule évidence du dossier, admise par toutes les parties, est que la période de récolte de la canne à sucre (la " campagne sucrière "), d'une part génère un surcroît d'activité, d'autre part est par nature limitée à quelques mois dans l'année.
Il y a lieu en conséquence d'infirmer l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS.

LA COUR ;

Infirme en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue par la formation de référé du Conseil de Prud'hommes de Fort-de-France le 22 novembre 2007 ;
Statuant à nouveau ;
Rejette l'exception de nullité de la société appelante ;
Constate l'existence d'une contestation sérieuse s'opposant à ce qu'il soit fait droit aux demandes en paiement, à titre provisionnel et pour chacun des demandeurs, d'un rappel de salaires sur cinq ans ;
Les rejette ;
Rejette les demandes principales et reconventionnelles sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Condamne les intimés aux dépens de première instance et d'appel.
Et ont signé le présent arrêt Monsieur Yves ROLLAND, Président, et Monsieur Philippe BLAISE, Greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Fort-de-France
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08/00001
Date de la décision : 29/05/2008
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Fort-de-France, 22 novembre 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.fort-de-france;arret;2008-05-29;08.00001 ?
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