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20/06/2012 | FRANCE | N°11/04764

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 2, 20 juin 2012, 11/04764


République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 1 SECTION 2



ARRÊT DU 20/06/2012



***



N° de MINUTE : 345/2012

N° RG : 11/04764



Jugement (N° 08/2493)

rendu le 31 Mai 2011

par le Tribunal de Grande Instance de BETHUNE



REF : FB/AMD





APPELANTE



SA PACIFICA venant aux droits de la SA D'ASSURANCE DU CREDIT AGRICOLE NORD DE FRANCE MRACA

ayant son siège social [Adresse 3]

[Localité 1]



représentée par ses dirigeants légaux



Représentée par Maître Virginie LEVASSEUR de la SCP LEVASSEUR LEVASSEUR, avocats au barreau de DOUAI constituée aux lieu et place de la SCP LEVASSEUR CASTILLE LEVA...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 2

ARRÊT DU 20/06/2012

***

N° de MINUTE : 345/2012

N° RG : 11/04764

Jugement (N° 08/2493)

rendu le 31 Mai 2011

par le Tribunal de Grande Instance de BETHUNE

REF : FB/AMD

APPELANTE

SA PACIFICA venant aux droits de la SA D'ASSURANCE DU CREDIT AGRICOLE NORD DE FRANCE MRACA

ayant son siège social [Adresse 3]

[Localité 1]

représentée par ses dirigeants légaux

Représentée par Maître Virginie LEVASSEUR de la SCP LEVASSEUR LEVASSEUR, avocats au barreau de DOUAI constituée aux lieu et place de la SCP LEVASSEUR CASTILLE LEVASSEUR, anciens avoués

Assistée de Maître Marjorie THUILLIEZ, avocat au barreau d'ARRAS,

INTIMÉE

SA MAAF ASSURANCES

ayant son siège social [Adresse 5]

[Localité 2]

représentée par son représentant légal

Représentée par Maître Brigitte VANDENDAELE de la SCP CONGOS ET VANDENDAELE, avocats au barreau de DOUAI, anciens avoués

Assistée de Maître François HERMARY, avocat au barreau de BETHUNE

DÉBATS à l'audience publique du 04 Avril 2012 tenue par Fabienne BONNEMAISON magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile). Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Claudine POPEK

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Martine ZENATI, Président de chambre

Fabienne BONNEMAISON, Conseiller

Dominique DUPERRIER, Conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 20 Juin 2012 après prorogation du délibéré en date du 13 Juin 2012 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Martine ZENATI, Président et Claudine POPEK, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 21 mars 2012

***

Par jugement du 31 Mai 2011, le Tribunal de Grande Instance de BETHUNE a débouté la SAS du CREDIT AGRICOLE NORD DE FRANCE de ses demandes formées à l'encontre de la société MAAF ès qualités d'assureur de L'EURL CHRIS ELEC et l'a condamnée à verser à cette dernière une indemnité de procédure de 2000€, rejetant par ailleurs la demande d'indemnité de procédure formulée par les SOUSCRIPTEURS DU LLOYD'S DE LONDRES à l'encontre de la MAAF.

La société d'assurance du CREDIT AGRICOLE DU NORD DE FRANCE MRACA a relevé appel le 4 Juillet 2011 de ce jugement dont la société PACIFICA venant aux droits de la MRACA a elle-même relevé appel le 11 Juillet 2011, jonction de ces deux instances ayant été ordonnée le 20 Septembre 2011, et dont elle a sollicité la réformation suivant conclusions déposées le 3 Octobre 2011 tendant à voir, au visa des articles 1792, 1148 sinon 1788 du code civil, constater la réception tacite de l'ouvrage, consacrer la responsabilité de la société CHRIS ELEC dans le sinistre, condamner par suite la MAAF ès qualités d'assureur décennal à lui verser les sommes de 560 860.01€ et 49 210.76€ en sa qualité de subrogée aux droits des sociétés BIG BROTHERS et FRENCHIES BROTHERS, sinon consacrer la responsabilité contractuelle de la société CHRIS ELEC et condamner la société MAAF à l'indemniser ès qualités d'assureur multirisques professionnels et à lui verser une indemnité de procédure de 7500€.

Au terme de conclusions déposées le 19 Mars 2012, la société MAAF conclut à l'irrecevabilité sinon au débouté des demandes adverses faute de réception et de preuve de l'imputabilité du sinistre à la société CHRIS ELEC et, très subsidiairement, à un partage de responsabilité entre les sociétés PACIFICA, MAAF, Mr [U] en tant qu'architecte maître d'oeuvre et son assureur le LLOYD'S et réclame la condamnation de la société PACIFICA à verser une indemnité de procédure de 4000€.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 21 Mars 2012.

SUR CE

Il est renvoyé pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties au jugement entrepris duquel il résulte essentiellement que la SCI FRENCHIES BROTHERS et la société BIG BROTHERS COMPANY sont respectivement propriétaire et locataire d'un immeuble sis à [Localité 9] dans lequel ont été réalisés en Octobre 2002, sous la maîtrise d'oeuvre de Mr [U] architecte assuré auprès du LLOYD'S, des travaux de rénovation parmi lesquels des travaux d'électricité confiés à la société CHRIS ELEC assurée auprès de la MAAF; qu'ensuite d'un incendie survenu en Octobre 2002, les sociétés FRENCHIES BROTHERS , BIG BROTHERS et l'assureur dommages-ouvrage, la société MRACA aux droits de laquelle vient PACIFICA, ont obtenu une mesure d'expertise judiciaire dont le rapport est intervenu le 21 Octobre 2006; qu'ayant indemnisé le propriétaire et l'exploitant des préjudices consécutifs à l'incendie, la société PACIFICA a assigné la MAAF sur le fondement des articles 1792 et 1788 du code civil en remboursement des indemnités versées, la MAAF ayant elle-même appelé en garantie le maître d'oeuvre et son assureur.

C'est dans ces conditions qu'est intervenu le jugement dont appel qui a débouté la société PACIFICA de toutes ses demandes et dit n'y avoir lieu à statuer par suite sur les appels en garantie.

La Cour constate à titre liminaire que la MAAF ne conteste pas le jugement en ce qu'il a rejeté le moyen d'irrecevabilité soulevé en première instance et que le Tribunal a analysé en une défense au fond.

Sur la garantie de la MAAF :

Au titre de la police responsabilité décennale:

La société PACIFICA fait grief au Tribunal d'avoir exclu la garantie décennale de la MAAF aux motifs que PACIFICA n'établissait pas la volonté expresse des signataires du marché confié à CHRIS ELEC de déroger à la procédure de réception instituée au contrat et que n'était pas démontrée la volonté non équivoque du maître de l'ouvrage, la société BIG BROTHERS COMPANY, de recevoir les travaux alors que l'aménagement contractuel des modalités de réception n'interdisait pas au maître de l'ouvrage de procéder à une réception tacite pourvu que soit établie sa volonté non équivoque de recevoir les ouvrages qui résulte en l'espèce de la prise de possession de l'immeuble, de son exploitation et du règlement quasi intégral du marché, le non paiement du solde des travaux étant motivé par la procédure de liquidation judiciaire dont avait fait l'objet la société CHRIS ELEC le 8 Septembre 2002.

La MAAF objecte qu'en présence de dispositions contractuelles prévoyant que la réception ne pourrait se faire que de manière expresse, à l'initiative du maître de l'ouvrage, par l'intermédiaire du maître d'oeuvre, la société BIG BROTHERS COMPANY ne peut se prévaloir d'une réception tacite qui ne saurait au demeurant résulter d'une prise de possession des lieux avant même l'achèvement des travaux d'électricité et leur contrôle et, de surcroît, sans régler le solde du marché de CHRIS ELEC.

La Cour considère que, telle qu'elle est formulée, la clause du contrat prévoyant une réception à l'initiative du maître de l'ouvrage, par l'intermédiaire du maître d'oeuvre, en précisant les délais de levée des réserves et les conséquences juridiques d'une réception, le contrat ne faisait jamais que rappeler les principes posés par l'article 1792-6 du code civil et n'exigeait pas des parties une réception expresse,

la seule particularité étant l'intervention prévue du maître d'oeuvre, dont le contrat ne faisait pas toutefois une condition impérative de sorte que la Cour estime que les parties pouvaient éventuellement s'en affranchir d'un commun accord, en se contentant d'une réception tacite, pourvu que soit établie la volonté non équivoque du maître de l'ouvrage de recevoir les ouvrages litigieux.

Ceci étant, des informations recueillies par les trois experts judiciaires lors de leurs investigations (rapport, pages 79, 8,143), il est ressorti que la société BIG BROTHERS COMPANY, maître de l'ouvrage de l'aménagement en friterie du local commercial situé au rez de chaussée, confrontée au retard pris par le chantier qui n'était pas terminé en Juillet 2002 (pour mémoire, les travaux de CHRIS ELEC devaient commencer le 21 Janvier 2002 et être exécutés dans un délai de 'deux mois et onze jours') a décidé de démarrer son activité commerciale dès le 1er Juillet alors que restaient à réaliser des travaux de finition et le contrôle de l'installation électrique (d'ailleurs mentionné au contrat de CHRIS ELEC ).

Le Tribunal a légitimement considéré que cette prise de possession hâtive des locaux, manifestement dictée par des impératifs financiers, sans être assortie du règlement du solde du marché, même si 90% des travaux avaient d'ores et déjà été payés sur les appels successifs de fonds reçus entre Janvier et Mai 2002, ne pouvaient caractériser une volonté non équivoque du maître de l'ouvrage de recevoir les travaux réalisés par l'électricien dont le rapport d'expertise souligne (page 150) qu'il était encore en activité à cette époque (la procédure collective date du 8 Septembre 2002), ce qui rend peu vraisemblable l'hypothèse d'une réception tacite à laquelle le maître de l'ouvrage se serait résolu par suite de l'abandon du chantier par l'entreprise et d'un non paiement du solde du marché motivé par son dépôt de bilan .

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il exclut toute réception tacite des ouvrages de CHRIS ELEC et, par suite, la garantie de la MAAF au titre de la responsabilité décennale de l'entreprise.

Au titre de la police multirisques professionnelle:

Subsidiairement, la société PACIFICA fonde, au visa des articles 1134 et 1147 du code civil, sa réclamation à l'encontre de la MAAF sur la responsabilité contractuelle de la société CHRIS ELEC dès lors qu'il est acquis que la cause du sinistre se trouve dans l'installation électrique de la société CHRIS ELEC dont la faute procède d'un manquement à son obligation de livrer un ouvrage exempt de vices.

La MAAF objecte tout d'abord que ce fondement n'a pas été invoqué en première instance sans toutefois en tirer de conséquence juridique: la Cour rappelle en tant que de besoin qu'une partie peut toujours invoquer un fondement nouveau en appel au soutien de ses prétentions.

Elle dément, par ailleurs, toute démonstration d'une faute de son assurée et d'un lien de causalité entre cette faute et le préjudice dont il est sollicité réparation.

La Cour constate qu'au terme de quatre années d'expertise, les trois experts judiciaires désignés sont parvenus à la conclusion que si, indubitablement, l'incendie avait démarré dans le local où était implanté le tableau des protections électriques installé par la société CHRIS ELEC, il était impossible compte-tenu des destructions occasionnées par l'incendie de déterminer l'origine exacte du sinistre et donc l'imputabilité de celui-ci à telle ou telle entreprise (rapport, pages 159,186, 188).

La Cour estime dans ces conditions non caractérisé le manquement de la société CHRIS ELEC à ses obligations contractuelles et sa responsabilité dans l'incendie.

La demande de garantie formée par la société PACIFICA sera donc rejetée de ce chef, observation étant faite que cette dernière ne saurait déduire du partage de responsabilité, plaidée à titre 'infiniment subsidiaire' par la société MAAF une reconnaissance implicite de la 'faiblesse de son argumentation' et de la responsabilité de son assurée.

Enfin, s'agissant des dispositions de l'article 1788 du code civil sur l'application duquel la société PACIFICA n'argumente plus en appel mais qu'elle vise néanmoins dans le dispositif de ses conclusions, la Cour rappelle que ce texte fait peser sur l'entreprise qui 'fournit la matière' la perte de la chose survenue avant la livraison.

Force est de constater en l'espèce qu'au jour de l'incendie, la livraison de l'installation électrique était effective depuis plusieurs mois puisque la société BIG BROTHERS COMPANY avait pris possession de l'immeuble et exploitait la friterie installée au rez de chaussée alimentée par l'installation électrique réalisée par la société CHRIS ELEC à 90% .

La Cour fait sienne en tant que de besoin l'analyse des premiers juges qui, rappelant que ce texte ne permet pas au maître d'ouvrage ou à l'assureur subrogé dans ses droits d'obtenir l'indemnisation de l'ensemble des préjudices consécutifs à la perte de la chose, relève au cas d'espèce que la société PACIFICA n'a pas distingué dans ses réclamations la part de la chose fournie par la société CHRIS ELEC;

Le jugement sera donc confirmé en toutes ses dispositions.

Sur les demandes accessoires:

L'équité commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la MAAF suivant modalités prévues au dispositif

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Y ajoutant :

Condamne la société PACIFICA à verser à la société MAAF une indemnité de procédure de 1500€.

Condamne la société PACIFICA aux dépens d'appel avec faculté de recouvrement au profit de la SCP CONGOS VANDENDAELE distrait conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier,Le Président,

Claudine POPEK.Martine ZENATI.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 1 section 2
Numéro d'arrêt : 11/04764
Date de la décision : 20/06/2012

Références :

Cour d'appel de Douai 1B, arrêt n°11/04764 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-06-20;11.04764 ?
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