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05/01/2012 | FRANCE | N°10/04163

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 2 section 1, 05 janvier 2012, 10/04163


République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 2 SECTION 1



ARRÊT DU 05/01/2012



***



N° de MINUTE :

N° RG : 10/04163



Jugement (N° 2007/04155)

rendu le 23 Février 2010

par le Tribunal de Commerce de LILLE



REF : JMD/CL





APPELANTES



SA COMPAGNIE REGIONALE DE PROPRETE (C.R.P)

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Ayant son siÃ

¨ge social [Adresse 8]

[Localité 7]



EURL NORD PROPRETE SERVICES (N.P.S)

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Ayant son siège social [Adresse 3]

[Localité 5...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 1

ARRÊT DU 05/01/2012

***

N° de MINUTE :

N° RG : 10/04163

Jugement (N° 2007/04155)

rendu le 23 Février 2010

par le Tribunal de Commerce de LILLE

REF : JMD/CL

APPELANTES

SA COMPAGNIE REGIONALE DE PROPRETE (C.R.P)

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Ayant son siège social [Adresse 8]

[Localité 7]

EURL NORD PROPRETE SERVICES (N.P.S)

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Ayant son siège social [Adresse 3]

[Localité 5]

Représentées par la SCP THERY - LAURENT, avoués à la Cour

Assistées de Me Thomas BUFFIN, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉES

Madame [P] [F]

née le [Date naissance 1] 1971 à

demeurant [Adresse 4]

[Localité 6]

E.U.R.L. EDP

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentées par la SCP LEVASSEUR CASTILLE LEVASSEUR, avoués à la Cour

Assistées de Me Annabelle LEFEBVRE substituant Me Francis DEFFRENNES, avocat au barreau de LILLE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

Christine PARENTY, Président de chambre

Jean Michel DELENEUVILLE, Conseiller

Philippe BRUNEL, Conseiller

---------------------

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Véronique DESMET

DÉBATS à l'audience publique du 03 Novembre 2011 après rapport oral de l'affaire par Jean Michel DELENEUVILLE

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 05 Janvier 2012 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Christine PARENTY, Président, et Véronique DESMET, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 08 SEPTEMBRE 2011

***

Vu le jugement contradictoire du 23 février 2010 du tribunal de commerce de Lille qui, après avoir dit n'y avoir lieu à surseoir à statuer, a condamné in solidum (les sociétés) CRP et NPS à payer à (la société) EDP et Mme [P] [F], chacune, la somme de 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et a débouté les parties de leurs autres demandes ;

Vu l'appel interjeté le 10 juin 2010 par la SA COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ ' CRP ' et l'EURL NORD PROPRETÉ SERVICES ' NPS ' ;

Vu les conclusions déposées le 14 avril 2011 pour ces dernières ;

Vu les conclusions déposées le 14 janvier 2011 pour Mme [P] [F] et l'EURL EDP ;

Vu l'ordonnance de clôture du 8 septembre 2011 ;

**

Attendu que les sociétés COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ et NORD PROPRETÉ SERVICES ont interjeté appel aux fins d'infirmation, condamnation pour concurrence déloyale de Mme [P] [F] et de la société EDP à payer la somme de 2 600 718 €, subsidiairement, celle de 849 549,88 €, à la société NORD PROPRETÉ SERVICES, la somme de 276 723 €, subsidiairement celle de 90 396,32 € à la société COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ, de Mme [P] [F], solidairement avec la société EDP, à payer à la société NORD PROPRETÉ SERVICES la somme de 520 095,75 € pour non respect des conventions réglementées, de Mme [P] [F] à payer à la société COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ la somme de 29 771,75 € pour la même cause, l'ensemble de ces sommes portant intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 26 septembre 2007, outre la condamnation solidaire de Mme [P] [F] et de la société EDP à leur payer la somme de 20 000 € HT en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Attendu que Mme [P] [F] et la société EDP sollicitent la réformation partielle, le rejet des pièces adverses numérotées 13, 15, 17, 19, 21, 23, 25, 27, 29, 31 35, 37, 40, 42, 44, 46, 48, 50, la production de la lettre de mission de M. [Y], la désignation d'un expert informatique, la confirmation en ce que le jugement déféré leur a donné acte de ce qu'elles envisageaient de déposer une plainte pénale et a débouté les appelantes de toutes leurs demandes, sur leur appel incident, condamnation solidaire des sociétés COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ et NORD PROPRETÉ SERVICES à payer 100 000 € à Mme [P] [F] et à la société EDP, chacune, à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et vexatoire, ainsi que, sous le bénéfice de la même solidarité, 15 000 € pour la couverture de leurs frais irrépétibles, et la publication de l'arrêt à intervenir dans deux publications régionales ;

SUR CE :

Attendu que la SA COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ, au capital de 38 110 €, a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Roubaix Tourcoing le 4 juin 1999, Mme [P] [F] en étant la directrice générale et M. [M] [E] devenant rapidement le principal associé ; que l'EURL NORD PROPRETÉ SERVICES, ayant la SA COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ pour associée unique, a été créée le 26 septembre 2000, sa gestion étant également confiée à Mme [P] [F] ; que cette dernière a parallèlement créé l'EURL EDP, dont elle était seule associée et dirigeante, le 14 mai 2002 ; que ces trois entités agissant dans le même domaine d'activité et dans le même secteur géographique, M. [M] [E] et Mme [P] [F], soucieux de ' disposer chacun d'une société contrôlée en propre ' ont, le 6 juin 2003, conclu une convention visant ' à permettre un développement harmonieux des activités jusqu'ici exercées en commun dans le cadre d'une étroite collaboration et dans le souci à terme de créer un véritable groupe ayant une importance significative sur le marché local ' ; qu'ils ont, dans ce but, conclu un pacte d'associés, défini le reclassement des contrats de travail et fixé un accord de coopération entre leurs sociétés respectives ; qu'en exécution de ces accords, Mme [P] [F] a cédé à M. [M] [E] la direction de la société COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ le 27 juin 2003 tout en restant seule gérante de la société NORD PROPRETÉ SERVICES jusqu'au 26 juin 2006, date à laquelle M. [M] [E] est devenu cogérant, puis gérant unique le 9 mai 2007 ;

Attendu les sociétés COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ et NORD PROPRETÉ SERVICES indiquent qu'elles ont d'abord constaté que l'ensemble de leurs cadres avaient démissionné sans raison apparente le 13 juin 2003 ; qu'en exigeant de Mme [P] [F], en sa qualité de gérante de la société NORD PROPRETÉ SERVICES, qu'elle respecte son devoir d'information de l'associé unique, la société COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ, celle-ci a, en novembre 2006, été destinataire d'un disque dur contenant, par erreur ou distraction, l'ensemble des documents comptables et administratifs de la société EDP qui lui ont permis d'apprendre que les salariés, démissionnaires en 2003, avaient tous été embauchés par la société EDP, laquelle avait également détourné des clients importants de la société COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ et de la société NORD PROPRETÉ SERVICES ; que, souhaitant pouvoir exploiter ces éléments arrivés fortuitement en leur possession, ces sociétés ont, le 22 février 2007, obtenu du président du tribunal de commerce de Roubaix Tourcoing une ordonnance autorisant un huissier à se rendre dans les locaux de la société EDP, lequel a, par constat, confirmé les données contenues sur le disque dur ; que le 19 mai 2007, Mme [P] [F] a été révoquée de ses fonctions de cogérante de la société NORD PROPRETÉ SERVICES ; que, par acte du 26 septembre 2007, la société COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ et la société NORD PROPRETÉ SERVICES ont assigné la société EDP et Mme [P] [F] devant le tribunal de commerce de Lille, leur reprochant des actes de concurrence déloyale ; que l'affaire a fait l'objet de multiples renvois avant d'être plaidée le 15 décembre 2009 et le jugement, dont appel, rendu le 23 février 2010 ;

Attendu qu'en cours d'instance d'appel, le président du tribunal de commerce de Roubaix Tourcoing, saisi par Mme [P] [F] et la société EDP, a, par ordonnance du 20 novembre 2007, autorisé l'intervention d'un huissier dans les locaux des sociétés COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ, NORD PROPRETÉ SERVICES et CARONETT en vue de rechercher les éléments tendant à établir que M. [M] [E] avait lui-même détourné des clients des sociétés COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ et NORD PROPRETÉ SERVICES au profit de cette société CARONETT ; que, le 4 juin 2008, le président de ce même tribunal de Roubaix Tourcoing a rétracté les deux ordonnances, des 22 février et 20 novembre 2007, interdisant dès lors aux parties d'utiliser le moindre renseignement ou document obtenu en exécution de ces décisions ;

Sur la mise à jour des mentions du registre du commerce et des sociétés concernant la

société NPS

Attendu que Mme [P] [F] demande la rectification des mentions

du registre du commerce et des sociétés de Roubaix Tourcoing sur lequel elle figure

toujours comme cogérante de NPS ; que les parties s'accordant pour reconnaître

qu'une rectification en ce sens a été opérée en cours d'instance d'appel, cette demande

est devenue sans objet ;

Sur la demande de Mme [P] [F] de rejet de certaines pièces

Attendu que Mme [P] [F] conteste que des données concernant sa propre société EDP aient pu, en novembre 2006, être gravées par erreur sur un disque dur qui avait pour unique objet d'informer les associés de la société NPS dont elle était encore la gérante ; qu'elle en déduit que les renseignements que lui opposent ses adversaires ont été recueillis par l'huissier dont ils avaient obtenu la désignation par l'ordonnance du 22 février 2007 ; que cette ordonnance ayant été rétractée, elle sollicite le rejet des débats des pièces adverses numérotées 13, 15, 17, 19, 21, 23, 25, 27, 29, 31 35, 37, 40, 42, 44, 46, 48, 50, ainsi que la restitution de la disquette qui avait été emportée par l'huissier, à défaut la production du disque dur litigieux pour expertise ;

Attendu que les sociétés COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ et NORD PROPRETÉ SERVICES répondent, à juste titre, que les pièces en litige ne peuvent provenir de l'huissier car elles auraient alors été revêtues du cachet de celui-ci ; qu'une attestation émanant de la comptable de la société NORD PROPRETÉ SERVICES, Mme [I] [L], confirme que les informations utilisées dans la présente instance proviennent bien de la remise du disque dur opérée par erreur en 2006 ; que la Cour adopte enfin le motif retenu par les premiers juges pour écarter la demande, à savoir que la mission de l'huissier avait porté sur les années 2003 à 2006 alors que les pièces énumérées ci-dessus contiennent aussi des données de l'année 2002 ;

Attendu qu'il est inutile d'examiner les demandes reprises in fine de leurs conclusions par Mme [P] [F] et la société EDP (et non dans le corps de celles-ci) tendant à ce qu'il soit enjoint aux adversaires de produire la lettre de mission préalable au dépôt du rapport de M. [Y] et à la désignation d'un expert informatique chargé d'examiner le disque dur en litige ;

Attendu que le jugement déféré sera confirmé sur ce point ;

Sur la concurrence déloyale

Attendu que les sociétés COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ et NORD PROPRETÉ SERVICES reprochent à Mme [P] [F] d'avoir manqué à son devoir de loyauté découlant du mandat de direction de ces sociétés dont elle a bénéficié jusqu'au 19 mai 2007, en ayant créé la société EDP, ayant un objet strictement identique, et en transférant à celle-ci les salariés et 19 clients de la société NORD PROPRETÉ SERVICES, 13 clients ayant été purement et simplement détournés comme l'établit le rapprochement entre la résiliation des contrats qu'ils avaient conclus avec les sociétés COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ et NORD PROPRETÉ SERVICES et la conclusion de nouveaux contrats avec la société EDP, et 6 ayant été incités à confier à cette dernière le nettoyage d'autres locaux que ceux concernés par le contrat initial qui s'est normalement poursuivi ; qu'elles ajoutent que Mme [P] [F] s'est livrée à un débauchage concomitant des salariés d'encadrement de la société COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ lors de son départ en juin 2003, ne laissant que les équipes d'exécution, suivis par la comptable de la société NORD PROPRETÉ SERVICES, qui a quitté la société en 2006 pour rejoindre la société EDP ; qu'elles indiquent enfin que la liste des salariés transférés, annoncée au protocole du 6 juin 2003, n'a jamais été établie et annexée, de sorte qu'aucun accord n'a jamais été conclu au sujet de leur transfert vers EDP ;

Sur le détournement de clientèle

Attendu que la simultanéité entre la résiliation des contrats liant les 13 entreprises en litige aux sociétés COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ et NORD PROPRETÉ SERVICES et la conclusion de contrats de remplacement avec la société EDP n'est pas significative dès lors que ces clientes devaient nécessairement poursuivre le nettoyage de leurs locaux, les contraignant à faire appel à un prestataire de remplacement dès la rupture de leur relation avec l'une des appelantes ;

Attendu que la liberté de contracter a pour corollaire la faculté de tout cocontractant de se tourner vers un concurrent susceptible de lui offrir des conditions plus avantageuses ; qu'aucune clause contractuelle n'obligeait les sociétés concernées à motiver leur décision de mettre un terme à leurs relations avec les sociétés COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ et NORD PROPRETÉ SERVICES ;

Attendu que la concurrence déloyale s'apprécie à partir d'actes positifs de détournement de clientèle, tels des actes de dénigrement ou tout autre procédé employé sciemment de nature à dissuader un client de poursuivre sa relation avec son cocontractant actuel ; que l'obligation de loyauté à laquelle était tenue Mme [P] [F] à l'égard des sociétés COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ et NORD PROPRETÉ SERVICES ne lui interdisait pas d'enregistrer passivement le souhait des clients de celles-ci de se tourner désormais vers sa société EDP ; que les appelantes, qui invoquent un arrêt de la Cour de Cassation (chambre commerciale, 6 juin 2001, pourvoi n° 98-16390) pour justifier leurs prétentions, omettent de relever que, dans l'affaire déférée à la Haute Juridiction, il a été retenu, à l'encontre de la société bénéficiaire du détournement de clientèle, le fait qu'elle ' avait acquis une clientèle fautivement détournée par son gérant ' ; qu'aucune faute n'est démontrée à la charge de Mme [P] [F] ; qu'il est exclu, dans ces conditions, de considérer que tout transfert de contrat des sociétés COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ et NORD PROPRETÉ SERVICES vers la société EDP serait mécaniquement constitutif d'un détournement de clientèle ;

Attendu que certains des clients ont par ailleurs attesté avoir changé de prestataire uniquement en raison du fait qu'ils étaient mécontents des services rendus par les sociétés COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ et NORD PROPRETÉ SERVICES ; que le fait qu'ils ont témoigné en cours d'instance, plusieurs années après leur décision, n'enlève rien à la qualité ou à la portée de leurs déclarations ;

Attendu que les appelantes reprochent encore à Mme [P] [F] d'avoir omis de faire ' état des conventions réglementées entre EDP et les deux sociétés qu'elle dirigeait par ailleurs ', ajoutant qu'elle ' a refusé à Monsieur [E] toute communication des dossiers clients ', et qu'elle ' a détruit ou conservé ces dossiers clients chez EDP afin de dissimuler encore aujourd'hui les circonstances de résiliation des contrats de prestation concernés ' ; que de tels éléments sont impropres à établir des faits constitutifs de concurrence déloyale en ce qu'ils ne se rattachent pas à la relation entre les 19 clients en litige et les sociétés COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ et NORD PROPRETÉ SERVICES mais concernent exclusivement les rapports entre Mme [P] [F] et ces sociétés dans la mesure où elle était parallèlement gérante de la société EDP ;

Sur le détournement de salariés

Attendu que le protocole conclu le 6 juin 2003 entre Mme [P] [F] et M. [M] [E] a prévu ' sous réserve de l'accord des salariés intéressés, un transfert des contrats de travail entre les différentes sociétés selon un détail figurant à l'annexe 6 ' ; que M. [M] [E] ayant apposé ses initiales en face de ces mentions, il ne peut contester les avoir approuvées ;

Attendu que, s'il n'existe aucune annexe 6 au dossier de la Cour, les parties convenant d'ailleurs qu'elle n'a pas été rédigée, il n'en demeure pas moins acquis aux débats qu'il avait été convenu qu'un transfert de salariés s'opérerait entre les trois sociétés visées audit protocole ; que M. [M] [E] ne peut, dès lors, s'étonner que l'encadrement des sociétés COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ et NORD PROPRETÉ SERVICES, informé des négociations en cours entre ces sociétés et celle gérée par Mme [P] [F], ait choisi de démissionner dès le 27 juin 2003 pour se tourner vers la société EDP, ni davantage en déduire que ces cadres auraient forcément agi à l'instigation de Mme [P] [F] ;

Attendu de surcroît que les appelantes ne démontrent pas que ces salariés auraient été liés à leur ancien employeur par une clause de non concurrence ; qu'elles ne peuvent s'affranchir de cette démonstration en relevant que ces contrats de travail ont ' curieusement ' disparu, cette allégation constituant une accusation voilée de détournement de documents, portée à l'encontre de Mme [P] [F] sans aucun commencement de preuve pour l'étayer ;

Attendu en conséquence que les faits de concurrence déloyale invoqués ne sont pas caractérisés ; que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté les sociétés COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ et NORD PROPRETÉ SERVICES de leurs prétentions ce chef ;

Sur les fautes contractuelles de Mme [P] [F]

Attendu que la société NORD PROPRETÉ SERVICES reproche à Mme [P] [F] d'avoir enfreint les dispositions des articles L. 223-19 et L. 225-38 du Code de commerce en lui ayant, en sa double qualité de gérante des sociétés EDP et NORD PROPRETÉ SERVICES jusqu'en 2006, facturé des frais de gérance, de personnels administratifs et techniques et de fonctionnement pour 272 099,55 € HT et 233 860 € HT au titre des exercices clos le 31 décembre des années 2004 et 2005 respectivement, ainsi que 14 136,20 € HT à titre de participation aux loyers des locaux pour l'année 2005 sans aucune autorisation préalable ni aucune justification de fond ;

Attendu que la circonstance que ce reproche n'aurait jamais été formulé dans le passé ne le rend pas, comme Mme [P] [F] le prétend, ' parfaitement inacceptable ' ; qu'elle ne peut, pour échapper à ses obligations en matière de conventions conclues entre sociétés dans lesquelles elle était associée ou dirigeante, invoquer les manquements de M. [M] [E] à ses propres obligations découlant du protocole du 27 juin 2003 ;

Attendu en conséquence que la société EDP, qui ne conteste pas le quantum de la demande formulée à son encontre, sera condamnée à rembourser à la société NORD PROPRETÉ SERVICES la somme de 520 095,75 € ;

Attendu que Mme [P] [F], qui a agi uniquement en sa qualité de gérante des sociétés en cause, ne saurait être solidairement tenue de ce paiement, faute d'avoir recherché un avantage personnel dans ces opérations ; que les appelantes seront déboutées de leur demande de condamnation solidaire de l'intéressée de ce chef ;

Attendu que la société COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ demande la condamnation de Mme [P] [F] à lui restituer une somme de 29 771,71 € qui a été versée à cette dernière sous forme de primes, ou à la suite d'une augmentation de son salaire, non autorisées par le conseil d'administration ; que Mme [P] [F], qui ' conteste le reproche ' sans mieux s'expliquer sur ces versements non autorisés, sera condamnée à reverser cette somme ;

Attendu que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 26 septembre 2007 ;

**

Attendu qu'un ' donné acte ' étant sans portée, la demande de Mme [P] [F] et de la société EDP concernant leur projet de dépôt d'une plainte pénale à l'encontre de leurs adversaires sera ignorée ;

Attendu que Mme [P] [F] et la société EDP, qui succombent partiellement en cause d'appel, seront déboutées de leur demande de condamnation des sociétés COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ et NORD PROPRETÉ SERVICES à leur payer, à chacune, 100 000 € pour procédure abusive et vexatoire, étant au surplus précisé qu'elles n'établissent nullement la réalité d'un dommage susceptible de justifier l'allocation de dommages et intérêts de ce chef ;

Attendu que la demande de publication de l'arrêt sera rejetée, faute pour Mme [P] [F] et la société EDP d'établir qu'elles ont souffert d'un quelconque préjudice susceptible d'être réparé de cette manière ;

Attendu qu'il est équitable de condamner Mme [P] [F] et la société EDP, solidairement, à payer aux sociétés COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ et NORD PROPRETÉ SERVICES la somme de 15 000 € en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS 

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort, par arrêt mis à disposition au greffe,

Déboute Mme [P] [F] et la société EDP de leur demande de rejet des débats des pièces adverses numérotées 13, 15, 17, 19, 21, 23, 25, 27, 29, 31 35, 37, 40, 42, 44, 46, 48, 50,

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté les sociétés COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ et NORD PROPRETÉ SERVICES de leurs demandes, tant principale que subsidiaire, de condamnation de Mme [P] [F] et de la société EDP à leur payer des dommages et intérêts pour concurrence déloyale,

Le réforme pour le surplus,

Condamne la société EDP à payer à la société NORD PROPRETÉ SERVICES la somme de 520 095,75 €, Mme [P] [F] à payer à la société COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ la somme de 29 771,71 €, dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 26 septembre 2007,

Déboute les sociétés COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ et NORD PROPRETÉ SERVICES de leur demande de condamnation de Mme [P] [F], solidairement avec la société NORD PROPRETÉ SERVICES, à leur payer la somme de 520 095,75 €,

Ordonne, en tant que de besoin, la rectification des mentions figurant au registre du commerce et des sociétés concernant le maintien de Mme [P] [F] en qualité de gérante de la société NORD PROPRETÉ SERVICES postérieurement à sa démission,

Déboute Mme [P] [F] et la société EDP de leur demande de condamnation des sociétés COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ et NORD PROPRETÉ SERVICES à leur payer, à chacune, 100 000 € pour procédure abusive et vexatoire, et à supporter les frais de publication du présent arrêt,

Condamne Mme [P] [F] et la société EDP, solidairement, à payer aux sociétés COMPAGNIE RÉGIONALE DE PROPRETÉ et NORD PROPRETÉ SERVICES, ensemble, la somme de 15 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamne Mme [P] [F] et la société EDP aux dépens de première instance et d'appel, qui pourront être recouvrés, pour ceux d'appel, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Le GreffierLe Président

Véronique DESMETChristine PARENTY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 2 section 1
Numéro d'arrêt : 10/04163
Date de la décision : 05/01/2012

Références :

Cour d'appel de Douai 21, arrêt n°10/04163 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-01-05;10.04163 ?
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