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23/11/2011 | FRANCE | N°10/08241

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 2, 23 novembre 2011, 10/08241


République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 1 SECTION 2



ARRÊT DU 23/11/2011



***



N° de MINUTE :

N° RG : 10/08241



Jugement (N° 09/00924)

rendu le 09 Novembre 2010

par le Tribunal de Grande Instance de BOULOGNE SUR MER

REF : BP/VD



APPELANT



Monsieur [P] [L]

né le [Date naissance 2] 1932 à [Localité 7]

Demeurant

[Adresse 3]

[Localité 4]



représenté par la SCP

DELEFORGE ET FRANCHI, avoués à la Cour

assisté de Me Dominique DELERUE, avocat au barreau de LILLE





INTIMÉE



COMMUNE DE [Localité 5]

Ayant son siège

[Adresse 6]

[Localité 5]



représentée par la SCP LEVASSEUR C...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 2

ARRÊT DU 23/11/2011

***

N° de MINUTE :

N° RG : 10/08241

Jugement (N° 09/00924)

rendu le 09 Novembre 2010

par le Tribunal de Grande Instance de BOULOGNE SUR MER

REF : BP/VD

APPELANT

Monsieur [P] [L]

né le [Date naissance 2] 1932 à [Localité 7]

Demeurant

[Adresse 3]

[Localité 4]

représenté par la SCP DELEFORGE ET FRANCHI, avoués à la Cour

assisté de Me Dominique DELERUE, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉE

COMMUNE DE [Localité 5]

Ayant son siège

[Adresse 6]

[Localité 5]

représentée par la SCP LEVASSEUR CASTILLE LEVASSEUR, avoués à la Cour

assistée de Me François DEROUET, avocat au barreau de BOULOGNE-SUR-MER

DÉBATS à l'audience publique du 28 Septembre 2011, tenue par Bruno POUPET magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Claudine POPEK

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Martine ZENATI, Président de chambre

Dominique DUPERRIER, Conseiller

Bruno POUPET, Conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 23 Novembre 2011 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Madame Martine ZENATI, Président et Claudine POPEK, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 5 septembre 2011

***

Monsieur [P] [L] est devenu propriétaire, d'abord en indivision avec sa soeur, puis seul, d'un immeuble situé [Adresse 1], recueilli dans la succession de son père, Monsieur [E] [L].

Cet immeuble a fait l'objet, à l'initiative de la commune de [Localité 5], d'un arrêté de péril et d'une démolition partielle mais aussi, parallèlement, d'une procédure d'abandon manifeste préalable à une procédure d'expropriation.

Par acte du 16 mars 2009, Monsieur [P] [L] et Maître [B] [U], agissant en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire des biens de Monsieur [L], ont fait assigner la commune de Boulogne-sur-Mer devant le tribunal de grande instance de Boulogne-sur-Mer.

Par une ordonnance du 17 novembre 2009, le juge de la mise en état a déclaré irrecevables les demandes de Maître [U] pour défaut de qualité à agir, la procédure de liquidation judiciaire ayant été clôturée le 17 mars précédent.

Monsieur [L], faisant valoir principalement que la démolition partielle de l'immeuble constituait une voie de fait et que la procédure d'abandon manifeste était irrégulière faute d'avoir été notifiée au liquidateur, a demandé au tribunal la condamnation de la commune et du maire de Boulogne-sur-Mer :

- à supporter les frais de démolition de l'immeuble et tous les frais annexes,

- à lui payer la somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- à lui verser une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La commune de Boulogne-sur-Mer a alors soulevé l'irrecevabilité des demandes de Monsieur [L] au motif tiré de ce que les arrêtés de péril imminent du maire ne sont pas susceptibles de recours et a conclu subsidiairement au débouté du demandeur ainsi qu'à la condamnation de celui-ci à lui payer une indemnité de 3 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le tribunal, par jugement du 9 novembre 2010, a déclaré Monsieur [P] [L] recevable en ses demandes mais l'en a débouté et l'a condamné à payer à la commune de Boulogne-sur-Mer la somme de 1 600 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Monsieur [P] [L] a interjeté appel de ce jugement le 22 novembre 2010.

Il demande à la cour de :

- constater que les travaux que le maire et la commune ont fait exécuter sur sa propriété sans son autorisation sont constitutifs d'une voie de fait,

- annuler le jugement,

- condamner la commune et le maire de [Localité 5] :

* à supporter les frais de démolition de l'immeuble et tous les frais annexes,

* à lui payer la somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts avec intérêts à compter du 16 mars 2009 et capitalisation annuelle des intérêts,

* à lui verser une indemnité de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

* aux dépens, dont distraction au profit de la SCP Deleforge-Franchi.

Il fait valoir à cet effet :

- que la procédure de péril engagée par le maire est irrégulière pour n'avoir pas été notifiée au liquidateur,

- qu'en toute hypothèse, le maire ne pouvait prendre que des mesures conservatoires, étant observé que l'expert préconisait dans un premier temps d'inviter le propriétaire à engager des travaux de mise en sécurité (étayage etc...), ce que le maire n'aurait pas fait, et n'envisageait la déconstruction qu'à défaut d'exécution de ces travaux,

- que la procédure d'abandon manifeste est également irrégulière pour n'avoir pas été notifiée au liquidateur et pour avoir en outre été poursuivie au mépris des dispositions de l'article L 2243-3 du code général des collectivités territoriales.

La commune de Boulogne-sur-Mer sollicite la confirmation du jugement ainsi que la condamnation de Monsieur [L] aux dépens, dont distraction au profit de la SCP Levasseur-Castille-Levasseur, et à lui payer une indemnité complémentaire de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR CE

Attendu qu'il ressort clairement des écritures de Monsieur [P] [L] et de ses prétentions telles qu'elles sont rapportées ci-dessus que le double objet de la présente procédure est de faire juger que la démolition partielle de son immeuble constitue une voie de fait de l'administration municipale et d'obtenir en conséquence la condamnation de la commune de Boulogne-sur-Mer à l'indemniser du préjudice résultant pour lui de cette voie de fait ;

attendu, en premier lieu, qu'il y a voie de fait lorsque l'administration a porté une atteinte grave au droit de propriété ou à une liberté fondamentale, soit par une décision manifestement insusceptible de se rattacher à un pouvoir de l'administration, soit par l'exécution grossièrement irrégulière d'un acte ;

qu'en l'espèce, la démolition partielle de l'immeuble de Monsieur [L], dont on peut certes considérer qu'elle porte une atteinte grave à son droit de propriété, a été réalisée entre le 10 avril et le 5 mai 2006 en exécution d'un arrêté de péril imminent pris le 3 octobre 2005 par le maire de [Localité 5] (notifié les 12 et 17 octobre 2005, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, à Monsieur [P] [L] et à Madame [W] [L], alors propriétaires indivis, publié le 7 octobre 2005 à la Conservation des hypothèques et affiché en mairie du 7 octobre au 7 novembre 2005) ;

qu'elle est donc intervenue au cours d'une procédure (fût-elle irrégulière, comme le soutient Monsieur [L], notamment en ce qui concerne les notifications) qui relève bien de la compétence du maire en vertu spécifiquement de l'article L 511-3 du code de la construction et de l'habitation et, plus généralement et traditionnellement, de son pouvoir de police ;

qu'il est par ailleurs constant que les mesures que peut prendre le maire en vertu du texte susvisé, en cas de péril grave et imminent constaté par expert, peuvent aller jusqu'à la démolition partielle voire, exceptionnellement, totale, de l'immeuble si cela s'avère nécessaire pour garantir la sécurité des personnes et des biens ;

qu'au cas présent, la décision du maire a été prise au vu du rapport déposé le 26 septembre 2005 par l'expert désigné le 15 septembre précédent par le président du tribunal d'instance de Boulogne, lequel expert concluait précisément que cet immeuble risquait de s'effondrer à tout instant et préconisait soit, à titre subsidiaire, la solution qui a été mise en oeuvre, soit, de préférence, la déconstruction complète de l'édifice ;

qu'il en résulte que la démolition litigieuse ne constitue ni une mesure insusceptible de se rattacher à un pouvoir de l'administration, ni l'exécution grossièrement irrégulière d'une décision et ne peut être qualifiée de voie de fait ;

qu'une irrégularité telle que celle que dénonce Monsieur [L] (défaut de dénonciation au liquidateur) n'est pas de nature à lui faire revêtir cette qualification ;

attendu, en second lieu, que dans la mesure où Monsieur [L] entend voir juger que la démolition partielle de son immeuble constituait une voie de fait ouvrant droit à dommages et intérêts et où cette démolition ne résulte que de la procédure de péril imminent, ses moyens tendant à voir consacrer l'irrégularité de la procédure d'abandon manifeste qui a été menée parallèlement et qui a abouti à un arrêté d'abandon manifeste contre lequel Monsieur [L] a exercé un recours que le tribunal administratif a rejeté, sont inopérants ;

attendu, par conséquent, que c'est à bon droit que le premier juge a débouté Monsieur [L] de sa demande tendant à voir consacrer l'existence d'une voie de fait comme de la demande de dommages et intérêts qu'elle induisait ; qu'il y a donc lieu de confirmer sa décision en toutes ses dispositions et de débouter en outre Monsieur [L] de sa demande d'indemnité pour frais irrépétibles ;

attendu que l'article 696 du code de procédure civile dispose que la partie perdante est condamnée aux dépens ;

attendu qu'il serait inéquitable de laisser à la commune de Boulogne-sur-Mer la charge intégrale des frais irrépétibles qu'elle a été contrainte d'exposer pour assurer la défense de ses intérêts en cause d'appel ;

vu l'article 699 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Déboute Monsieur [P] [L] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

Le condamne à payer à la commune de Boulogne-sur-Mer une indemnité de mille deux cents euros (1 200) par application dudit article ;

Le condamne aux dépens et dit que la SCP Levasseur Castille Levasseur pourra recouvrer directement contre lui les dépens d'appel dont elle a fait l'avance sans avoir reçu de provision.

Le GreffierLe Président,

C. POPEKM. ZENATI


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 1 section 2
Numéro d'arrêt : 10/08241
Date de la décision : 23/11/2011

Références :

Cour d'appel de Douai 1B, arrêt n°10/08241 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-11-23;10.08241 ?
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