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14/10/2010 | FRANCE | N°10/03262

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre de la protection juridique des majeurs et des mineurs, 14 octobre 2010, 10/03262


COUR D'APPEL DE DOUAI CHAMBRE DE LA PROTECTION JURIDIQUE DES MAJEURS ET DES MINEURS

No RG : 10/ 03262

NOTIFICATION de l'arrêt aux parties par lettre recommandée avec avis de réception adressée le :

ARRET DU 14 OCTOBRE 2010 MINUTE No 74/ 2010
APPELANTE :
Madame Véronique X... ...62600 BERCK SUR MER Comparante
AUTRES PARTIES INTERVENANTES :
Mademoiselle Anaîs Y... née le 18 Mai 1986 à LESQUIN ... Non Comparante
Madame Marianne Z... épouse X... ...59132 TRELON Non Comparante

SERVICE TUTELAIRE ET DE PROTECTION 1 rue du Gal de Gaulle B. P

. 90087 62166 ST POL SUR TERNOISE Comparant, représenté par M. SCRIBOT, Chef de Service et par ...

COUR D'APPEL DE DOUAI CHAMBRE DE LA PROTECTION JURIDIQUE DES MAJEURS ET DES MINEURS

No RG : 10/ 03262

NOTIFICATION de l'arrêt aux parties par lettre recommandée avec avis de réception adressée le :

ARRET DU 14 OCTOBRE 2010 MINUTE No 74/ 2010
APPELANTE :
Madame Véronique X... ...62600 BERCK SUR MER Comparante
AUTRES PARTIES INTERVENANTES :
Mademoiselle Anaîs Y... née le 18 Mai 1986 à LESQUIN ... Non Comparante
Madame Marianne Z... épouse X... ...59132 TRELON Non Comparante

SERVICE TUTELAIRE ET DE PROTECTION 1 rue du Gal de Gaulle B. P. 90087 62166 ST POL SUR TERNOISE Comparant, représenté par M. SCRIBOT, Chef de Service et par M. GRAHEK, délégué à la Tutelle
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE
Thierry VERHEYDE, Conseiller délégué à la protection des majeurs, faisant fonction de Président, désigné suivant ordonnance du Premier Président de la Cour d'appel de DOUAI en date du 14 décembre 2009
Marie-Charlotte DALLE, Bénédicte ROBIN Conseillers,
Nabyia JUERY, Greffière présente aux débats et au prononcé de l'arrêt,

Les débats ont eu lieu en Chambre du Conseil à l'audience du 23 Septembre 2010, au cours de laquelle Mme Marie-Charlotte DALLE a été entendue en son rapport.
Le dossier a été communiqué avant l'audience des débats au Ministère Public près la Cour d'appel de DOUAI, qui a également été avisé de la date de cette audience, à laquelle il n'a pas comparu.
A l'issue des débats, le président a avisé les parties présentes que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe de la Cour d'Appel de Douai à la date du 14 Octobre 2010.
ARRÊT CONTRADICTOIRE à l'égard de Mme Véronique X... et à l'égard du Service Tutélaire et de Protection et ARRÊT RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE à l'égard de Mme Z... Marianne ép. X... prononcé hors la présence du public par sa mise à disposition au greffe de la Cour d'appel, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues par l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

FAITS ET PROCEDURE
Par courrier en date du 21 juillet 2005, le Conseil Général du NORD signale au juge des tutelles la situation d'Anaïs Y..., jeune majeure qui avait bénéficié d'une mesure d'AEMO jusqu'en mai 2004 et qui rencontre alors de graves difficultés de santé, tant au plan physique que psychologique, et se trouve sans domicile fixe. Elle est reconnue comme travailleur handicapée, classée en catégorie C pour cinq ans entre 2003 et 2008.
Par ordonnance du 19 septembre 2005, le juge des tutelles place la jeune fille sous sauvegarde de justice.
Par ordonnance du 20 octobre 2005, le juge des tutelles désigne la société des intérêts populaires de MAUBEUGE comme mandataire spécial de Anaïs Y....
Dans son rapport d'expertise du 2 janvier 2006, le docteur C..., médecin inscrit sur la liste du procureur de la République, désigné par le juge des tutelles, conclut que la jeune fille : «- présente un niveau intellectuel liminaire associé à de graves troubles caractériels et se met en danger, sur le plan sexuel en particulier ;- est incapable de voter et de gérer son budget et sa capacité civile est gravement diminuée d'une manière peu réversible ;- a besoin d'être représentée dans les actes de la vie dans le cadre d'une mesure de tutelle qui risque de ne pas être facile à assumer. » Le médecin précise qu'elle est en HDT suite à des troubles graves du comportement et menace suicidaire ; elle a subi très jeune, en raison d'une tumeur au cerveau, la pose d'une dérivation ventrilo-péritonéale. Elle a suivi une scolarité en IME et IMPRO, avec de grosses difficultés d'intégration. Elle n'est pas gravement déficiente sur le plan intellectuel, présente des symptômes de conversion hystérique afin de mobiliser l'attention de son entourage, et surtout de sa mère, elle est intolérante aux frustrations et anorexique, et ses parents sont incapables de poser des limites depuis des années. Elle a une attitude très provocante et aguicheuse sur le plan sexuel, déstabilisant les malades lors de son hospitalisation.
Par ordonnance en date du 28 février 2006, le juge des tutelles désigne le service tutélaire et de protection de SAINT POL SUR TERNOISE en remplacement de la Société d'intérêts populaires suite à l'éloignement géographique de Mademoiselle Y....
Par jugement en date du 3 avril 2006, le juge des tutelles a placé Mademoiselle Y... sous tutelle et désigné le service tutélaire et de protection de SAINT POL SUR TERNOISE comme tuteur.
La lecture du dossier démontre les très grandes difficultés de gestion de la mesure tenant :- au comportement de Mademoiselle Y... (hospitalisée à plusieurs reprises en psychiatrie puis de retour en foyer où elle rencontre des difficultés importantes d'intégration et de relations),- aux relations de Madame Véronique X... avec les instances médicales et les structures d'accueil de sa fille,- à l'intervention de la grand-mère de la majeure protégée,- aux relations complexes entre Anaïs et son père,- au désarroi et à l'épuisement exprimé par les équipes soignantes et le tuteur de la jeune fille,- aux interventions épistolaires comminatoires de l'association pour la défense des traumatisés crâniens.
Par décision du 12 février 2009, le juge des tutelles a ordonné une expertise psychiatrique de mademoiselle Y... afin de déterminer la pathologie dont elle est affectée et le type de prise en charge dont elle relève. Le juge souligne les échecs des prises en charges successives de la jeune fille en psychiatrie et en foyer médicosocial.
Le docteur D..., expert psychiatre désigné, rend son rapport le 16 mars 2009.
Il fait les mêmes constatations que le docteur C... en 2006 sur le plan de l'état de santé mental de la majeure protégée. Il conclut :- qu'Anaïs Y... présente sur le plan psychiatrique un niveau intellectuel liminaire associé à des troubles graves de la personnalité et du caractère, à type de conduites d'opposition, d'intolérance à la frustration, de comportement d'allure hystéropathique, et des propos qui évoquent fortement la quête d'attention et une tendance mythomaniaque, outre des éléments abandonniques,- que les hospitalisations en psychiatrie de la jeune fille continueront d'être nécessaires ponctuellement mais non continues, et ce, en raison de ses crises d'agitation, d'opposition et ses troubles du caractère et du comportement qui nécessitent une telle hospitalisation,- relève d'une prise en charge spécialisée dans un établissement où elle puisse s'intégrer et bénéficier de prises en charge psychothérapeutiques et ergothérapiques adaptées à son niveau d'expression et de compréhension qui n'est pas mauvais.
Il ajoute que la mesure de tutelle est toujours justifiée en raison des troubles importants de la personnalité. La majeure protégée est décrite comme vulnérable, suggestible, et l'expert suggère une prise de distance ou une certaine autonomie par rapport au milieu familial.
Par requête du 17 septembre 2009, Madame Véronique X... sollicite d'être désignée comme tutrice de sa fille, contestant dans les détails la prise en charge de celle-ci par l'association tutélaire et faisant état de carences répétées de la part de cette dernière.
Elle réitère sa requête assistée de son conseil par courrier du 19 octobre 2009.
Dans son rapport de situation de décembre 2009, le délégué à la tutelle de Mademoiselle Y... suggére une proposition de division de la mesure entre une tutelle aux biens qui reste confiée au service tutélaire et une tutelle à la personne confiée à la mère de la majeure, en raison non seulement de la volonté de s'investir de la mère mais aussi du contexte relationnel très difficile entre le service tutélaire et le CHAM.
Madame X... a été entendue par le juge des tutelles le 2 mars 2010, ainsi que la grand-mère maternelle de la majeure protégée.
Par ordonnance en date du 23 mars 2010, le juge des tutelles rejette la demande de Madame Véronique X... d'être désignée tutrice de sa fille.
Par courrier déposé au greffe le 8 avril 2010, Madame Véronique X... a interjeté appel contre l'ordonnance qui lui a été signifiée le 27 mars 2010.
Madame Véronique X... régulièrement convoquée à l'audience d'appel du 23 septembre 2010, n'a pas réclamé sa convocation. Madame Marianne X... a signé l'accusé réception de sa convocation le 19 juillet 2010, et le service tutélaire et de protection l'a signé le 16 juillet 2010.
Le Procureur Général s'en rapporte.
Lors de l'audience d'appel, Madame X... soutient son appel ; elle indique que si elle est tutrice de sa fille, elle sera considérée différemment par les instances médicales et pourra avoir accès au dossier médical de sa fille et à toute information concernant sa santé. Elle indique qu'elle ne supporte pus d'être évincée de la vie de sa fille qu'elle ne voit qu'une heure touts les trois mois, et ajoute qu'Anaïs est isolée de tous ses proches par les autorités médicales qui la suivent au sein du foyer. Elle pense par ailleurs qu'elle pourra œ uvrer plus efficacement pour trouver un autre établissement plus adapté aux difficultés de sa fille, précisant qu'elle sait mieux que personne ce qu'il faut pour son enfant.
Le Service tutélaire et de protection (STP), est représenté ; il sollicite la confirmation du jugement, précisant qu'il ne souhaite finalement pas que la mesure soit divisée entre lui et la mère de la majeure protégée car cela serait compliqué à gérer au quotidien ; il est conscient que l'établissement où se trouve la jeune fille n'est pas le plus adapté à son état de santé mais pense qu'en l'état, il n'y a pas d'autre solution.

MOTIFS DE LA DECISION
L'article 449 du code civil dispose :
A défaut de désignation faite en application de l'article 448, le juge nomme, comme curateur ou tuteur, le conjoint de la personne protégée, le partenaire avec qui elle a conclu un pacte civil de solidarité ou son concubin, à moins que la vie commune ait cessé entre eux ou qu'une autre cause empêche de lui confier la mesure. A défaut de nomination faite en application de l'alinéa précédent et sous la dernière réserve qui y est mentionnée, le juge désigne un parent, un allié ou une personne résidant avec le majeur protégé ou entretenant avec lui des liens étroits et stables. Le juge prend en considération les sentiments exprimés par celui-ci, ses relations habituelles, l'intérêt porté à son égard et les recommandations éventuelles de ses parents et alliés ainsi que de son entourage.
L'article 450 du même code dispose :
Lorsqu'aucun membre de la famille ou aucun proche ne peut assumer la curatelle ou la tutelle, le juge désigne un mandataire judiciaire à la protection des majeurs inscrit sur la liste prévue à l'article L. 471-2 du code de l'action sociale et des familles. Ce mandataire ne peut refuser d'accomplir les actes urgents que commande l'intérêt de la personne protégée, notamment les actes conservatoires indispensables à la préservation de son patrimoine. A la lecture des nombreuses pièces du dossiers sus-mentionnées, et au terme des débats devant la Cour, il convient de constater que c'est par des motifs particulièrement justes, pertinents et très complets que le premier juge a pu considérer que les défaillances reprochées par Madame X... au tuteur, désigné depuis avril 2006, ne sont pas fondées en ce que :- le tuteur a poursuivi les démarches entreprises par la mère pour trouver un accueil adapté pour la jeune fille, et il les poursuit toujours devant les difficultés rencontrées au sein du foyer actuel ;- le tuteur n'est pas responsable de la qualité des soins médicaux et des décisions prises par les différents médecin d'Anaïs ;- le tuteur ne pouvait se substituer à la prise en charge hospitalière de la jeune fille lors de l'épisode concernant la valve de dérivation en août 2008 qui a nécessité une hospitalisation en urgence ; et la mère qui vient de reprendre une activité professionnelle ne lui permettant pas de rendre visite à sa fille au foyer en semaine ne serait pas plus disponible que le tuteur en cas de nécessité d'intervention médicale rapide ;- le tuteur n'est pas responsable des difficultés d'accès de la mère au dossier médical de sa fille et aux informations concernant son suivi médical, ces difficultés relevant des relations entre Madame X... et le CHAM.
En outre le juge des tutelles a relevé à juste titre qu'actuellement, seul le foyer de CAMPAGNE LES HESDIN qui dépend du CHAM accepte d'accueillir la fille de l'appelante ; au vu des pièces du dossier (courriers de l'appelante auprès du CHAM, du foyer et du STP, courriers très virulents de l'association A. E. M. T. C.), c'est par une juste appréciation de la situation que le premier juge a considéré que le conflit entre Madame X... et ce foyer est tel que si elle était désignée tutrice de sa fille, cela ne pourrait que compromettre la poursuite de l'accueil d'Anaïs dans cet établissement.
Certes, il est possible que cet établissement ne soit pas spécialement adapté à la pathologie de la jeune fille, mais la mère d'Anaïs et le tuteur ont confirmé qu'en l'état, aucune autre solution n'était possible ; ce constat est souligné par l'expert psychiatre, le docteur D... qui, dans son expertise du 16 mars 2009, indique que trouver l'établissement qui offre la prise en charge la plus adaptée aux troubles de la jeune fille n'est pas une tâche aisée.
Par ailleurs, le docteur D... relève dans son expertise « une relation très ambivalente avec la mère, qu'on peut qualifier de « confusionnante », et « qu'il semblerait que les interactions relationnelles entre Mademoiselle Anaïs Y... et sa mère n'aient pas toujours été favorables sur l'évolution de son comportement ». L'expert conclut « qu'une prise de distance ou une certaine autonomie par rapport au milieu familial pourrait apparaître souhaitable ».
L'état des relations entre Madame X... et sa fille, d'une part, et entre Madame X... et les instances médicales et le foyer d'accueil d'Anaïs d'autre part, peut dans ces conditions être analysé comme une cause qui empêche de confier la mesure à l'appelante ; il convient dès lors de confirmer l'ordonnance entreprise.

PAR CES MOTIFS,
La Cour, statuant par arrêt réputé contradictoire à l'égard de Mme Marianne Z... ép. X... et par arrêt contradictoire à l'égard de Mme Véronique X... et de l'association STP :
- CONFIRME en toutes ses dispositions l'ordonnance entreprise ;
- LAISSE les dépens à la charge du Trésor Public.

Le greffier, Le président,

Nabyia JUERY Thierry VERHEYDE

LA COUR,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre de la protection juridique des majeurs et des mineurs
Numéro d'arrêt : 10/03262
Date de la décision : 14/10/2010
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.douai;arret;2010-10-14;10.03262 ?
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