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24/02/2010 | FRANCE | N°08/00533

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 2, 24 février 2010, 08/00533


COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 1 SECTION 2



ARRÊT DU 24/02/2010



***



N° de MINUTE :



N° RG : 08/00533

Jugement (N° 07/6872) rendu le 15 Novembre 2007

par le Tribunal de Grande Instance de LILLE



REF : BM/VR





APPELANTE et Intimée



Association AUTOMOBILE CLUB DE PICARDIE

Prise en la personne de son Président Monsieur [V] [N]

ayant son siège social 472 avenue du 14 juillet 1789

[Localité 6]



représentée par la SCP CAR

LIER-REGNIER, avoués à la Cour

assistée de Maître Hubert DELARUE, avocat au barreau D'AMIENS







INTIMÉE et Appelante



Société AUTOMOBILE CLUB DU NORD DE LA FRANCE

agissant poursuites et diligen...

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 2

ARRÊT DU 24/02/2010

***

N° de MINUTE :

N° RG : 08/00533

Jugement (N° 07/6872) rendu le 15 Novembre 2007

par le Tribunal de Grande Instance de LILLE

REF : BM/VR

APPELANTE et Intimée

Association AUTOMOBILE CLUB DE PICARDIE

Prise en la personne de son Président Monsieur [V] [N]

ayant son siège social 472 avenue du 14 juillet 1789

[Localité 6]

représentée par la SCP CARLIER-REGNIER, avoués à la Cour

assistée de Maître Hubert DELARUE, avocat au barreau D'AMIENS

INTIMÉE et Appelante

Société AUTOMOBILE CLUB DU NORD DE LA FRANCE

agissant poursuites et diligences de son Président en exercice

ayant son siège social [Adresse 2]

[Localité 5]

représentée par la SCP DELEFORGE FRANCHI, avoués à la Cour

assistée de Maître Aymeric DRUESNE, avocat au barreau de LILLE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

Bernard MERICQ, Président de chambre

Dominique DUPERRIER, Conseiller

Véronique MULLER, Conseiller

---------------------

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Claudine POPEK

DÉBATS à l'audience publique du 23 Novembre 2009 après rapport oral de l'affaire par Bernard MERICQ

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 24 Février 2010, prorogation du délibéré en date du 10 Février 2010 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Bernard MERICQ, Président, et Claudine POPEK, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 19 Novembre 2009

*****

LA COUR,

FAITS ET PROCÉDURE :

1. L'association Automobile Club de Picardie (AC Picardie) et l'association Automobile Club du Nord de la France (ACNF) ont passé en date des 26 septembre et 4 octobre 1979 un 'protocole d'accord' par lequel la gestion administrative et financière des biens de l'AC Picardie a été confiée à l'ACNF ; par deux courriers en date des 16 puis 23 novembre 2004, l'ACNF a dénoncé ce 'mandat de gestion' à effet au 31 décembre 2004.

2. Saisi par l'AC Picardie qui réclamait à l'ACNF reddition de comptes et restitution de fonds à hauteur de 266 906,28 € alors que l'ACNF, après avoir fait état d'une fusion des deux associations décidée en 1980, invoquait au moins la compensation avec des déficits par elle pris en charge, le tribunal de grande instance de Lille a pour l'essentiel, selon jugement rendu le 15 novembre 2007 auquel il est entièrement fait référence pour l'exposé des données de base du procès et des prétentions et moyens respectifs des parties :

- constaté que l'ACNF a rendu le compte de résultat de la période de 1993 au 16 novembre 2004,

- débouté l'AC Picardie du surplus de ses demandes relativement à la reddition des comptes,

- condamné l'ACNF à restituer à l'AC Picardie la somme de 98 704,98 € outre intérêts au taux légal à compter du 16 novembre 2005,

- rejeté le surplus des demandes,

- laissé à chacune des parties la charge de ses dépens.

3. L'AC Picardie a relevé appel principal de ce jugement, l'ACNF en a relevé appel incident.

PRÉTENTIONS ET MOYENS ACTUELS DES PARTIES :

1. L'AC Picardie, par ses dernières conclusions à fins d'infirmation pour l'essentiel, reprend ses moyens et prétentions (qu'elle actualise) de première instance pour faire valoir qu'elle a droit, en application des principes généraux du mandat, à la reddition des comptes et à la restitution de ses fonds, outre revalorisation en raison des opérations fructueuses que l'ACNF a effectuées en les consommant à son seul profit ; elle ajoute que l'ACNF a décidé de prendre en charge son passif en sorte qu'aucun compte de déficit ne saurait lui être opposé, et ce d'autant que l'ACNF n'est pas en mesure de produire des comptes crédibles et convaincants car elle a fait le choix -erroné- d'établir des comptes globaux.

Par ailleurs, elle rappelle que le mandat est en principe gratuit en sorte qu'elle ne saurait être tenue à un quelconque salaire ou à des frais prétendus de gestion.

Quant à son passif en 1979 ou son déficit de gestion ultérieur, elle soutient que l'ACNF a, par le protocole de 1979, entendu en faire son affaire personnelle par 'prise en charge'.

Elle ajoute, par rapport à la première instance, que doit lui être également restitué le prix de la vente de parts de la SCI Les terrasses de Paris, ce qui s'inscrit dans la continuité du procès principal et ne constitue donc pas une demande nouvelle en appel.

Enfin, elle s'oppose à toutes réclamations formulées contre elle par l'ACNF, certaines étant nouvelles en cause d'appel (et dès lors irrecevables) et en toute hypothèse mal fondées car non justifiées.

2. L'ACNF, par ses dernières conclusions au soutien de son appel incident et à fins de réformation partielle, relate l'historique des relations entre les deux associations à partir de 1979, engagées à cause du déficit chronique enregistré par l'AC Picardie qui n'était plus en mesure de régler ses dettes, et spécialement le mandat de gestion convenu en 1979 puis le projet de fusion en 1980 en sorte que l'AC Picardie a fonctionné en quelque sorte comme une succursale de l'ACNF.

Cela exposé, elle explique avoir reçu en 1979 des fonds de l'AC Picardie (qui ont été consacrés en premier lieu au paiement des dettes en cours) puis en 1980 le prix d'un immeuble qui a servi à racheter plusieurs immeubles successifs au nom de l'ACNF, toutes sommes dont elle admet devoir restitution mais selon les chiffres qu'elle propose et sans revalorisation.

Sur le remboursement de fonds provenant de la vente de parts de SCI, elle fait valoir que cette demande est irrecevable car nouvelle en appel ou mal fondée.

Par ailleurs, elle reprend sa demande reconventionnelle pour être remboursée du déficit récurrent des comptes de l'AC Picardie qu'elle a assumé, le dit déficit justifié par des documents comptables certifiés, étant ajouté que, dans son calcul, elle n'a inclus ni salaire du mandat ni frais de gestion : une fois rappelé qu'elle a entendu résilier le mandat en 2004 à cause de cette situation, elle s'explique sur le déficit avant dénonciation du mandat et sur le déficit postérieur, l'AC Picardie n'ayant pas donné suite utile à la résiliation à cause du litige sur les comptes.

3. L'exposé et l'analyse plus amples des moyens et des prétentions des parties seront effectués à l'occasion de la réponse qui sera apportée à leurs écritures opérantes.

* * *

DISCUSSION :

1. Le 'protocole d'accord' de 1979 a été passé entre les deux Automobile Club (l'ACNF et l'AC Picardie) car l'AC Picardie subissait un déficit récurrent caractérisé par une diminution de ses ressources (baisse du nombre des adhérents et du montant perçu des cotisations, manque d'attractivité de certains produits) et un accroissement de ses charges (notamment de nature salariale) ; il existait alors une volonté de rapprocher les deux Automobile Club voire de les fusionner à terme plus ou moins proche, une gestion commune de tous les adhérents du Nord et de la Picardie (regroupés ensemble ou restant identifiés comme relevant soit du Nord soit de la Picardie) et de tous les actifs devant permettre une rationalisation des coûts tout en maintenant en faveur des adhérents un niveau correct de prestations.

Il était en tout cas nécessaire de venir soutenir l'AC Picardie, dont les effectifs avaient diminué de moitié entre 1969 et 1979 et qui avait enregistré en 1979 un déficit de 65 573,12 F (voir 'résultats de l'exercice 1er octobre 1978 / 30 septembre 1979' relatés à la pièce AC Picardie n° 32, s'agissant du numéro du 1er trimestre 1981 de la revue 'L'automobile au pays picard' éditée par cette Automobile Club).

L'ACNF subissait elle-même, déjà en 1979, une érosion du nombre des ses propres adhérents, et ce comme toutes les Automobile Club de France (voir pièce ACNF n° 13) ; dans les années ultérieures, elle a vu son propre déficit s'aggraver (voir sur ce point les réunions tenues en 2001, 2002 et 2003 du conseil d'administration de l'ACNF - pièces AC Picardie n° 49, 51 et 53) ; la même tendance se constatait pour de nombreuses autres Automobile Club de France, divers rapprochements étant envisagés.

C'est dans ce contexte de récession généralisée, et parce qu'elle considérait la poursuite de l'AC Picardie comme 'non viable' (les effectifs de l'AC Picardie étant tombés à 330 adhérents, le déficit annuel étant important et le déficit cumulé ne cessant de s'aggraver), que l'ACNF a dénoncé la convention de 1979, les conséquences pécuniaires n'ayant pu être réglées par les contractants.

Il faut ajouter que :

+ de fait, l'ACNF a continué de gérer les adhérents de l'AC Picardie en 2005 et 2006,

+ courant 2006, l'ACNF a résilié le bail qui permettait à l'AC Picardie d'occuper un local dans un immeuble sis [Adresse 4] (propriété de la SCI Club Nord Picardie, émanation au principal de l'ACNF) et a licencié la dernière salariée qui travaillait au service de l'AC Picardie mais dont la charge salariale était assumée par l'ACNF.

2. Il se déduit des conclusions partiellement concordantes des parties que le 'protocole d'accord' de 1979 doit être principalement analysé comme un mandat.

Ce document comporte un titre I I intitulé 'clauses financières', au rang desquelles figurent les articles 6 de première part, 7 et 8 de deuxième part, 11 de troisième part qui sont exactement reproduits aux conclusions ACNF p. 4.

3. Il est constant, comme ressortant des conclusions partiellement concordantes des parties, que :

* le 1er octobre 1979, l'AC Picardie a mis son actif de trésorerie à la disposition de l'ACNF, soit 194 305,12 F ou 29 621,12 €,

* en 1980, l'AC Picardie a mis le prix tiré de la vente de son immeuble [Adresse 3] (vendu le 20 juin 1980 pour 440 000,00 F ou 67 077,57 €) à la disposition de l'ACNF.

Il est par ailleurs soutenu par l'AC Picardie, en des termes qui sont contestés par l'ACNF, que l'AC Picardie a également, courant 1991, mis à la disposition de l'ACNF une somme de 37 500,00 F ou 5 716,84 € qui provenait de la vente de parts de la SCI Les terrasses de Paris.

Ce sont ces trois postes qui constituent la base des restitutions revendiquées par l'AC Picardie, laquelle sollicite en outre revalorisation.

4. Sur la somme de 29 621,12 €, l'ACNF ne conteste pas le principe de la restitution : celle-ci relève en toute hypothèse de la reddition de comptes due par le mandataire au mandant.

L'article 6 du protocole, qui stipule que : 'Les Comptes de bilan et de gestion de l'Automobile Club de Picardie arrêtés au 30 Septembre 1979 seront pris en charge par l'Automobile Club du Nord de la France avec effet au 1er octobre 1979', doit être entendu en ce sens que toute la trésorerie, telle qu'existant au 1er octobre 1979 en actif et en passif de l'AC Picardie, a été mise à la disposition de l'ACNF.

Cette trésorerie à cette date peut être reconstituée au travers du document 'résultats de l'exercice 1er octobre 1978 / 30 septembre 1979' relatés à la pièce AC Picardie n° 32 (déjà examinée supra par. 1), document qui mentionne non seulement un déficit sur l'exercice de 65 573,12 F mais encore deux postes (à savoir 'Provision pour charges à payer ... 30 300,00 F' et 'Dettes à court terme ... 53 469,39 F') qui représentent le chiffre en cumulé 83 769,39 F.

La 'prise en charge' confiée aux soins de l'ACNF implique qu'avec les fonds d'actif mis à disposition (194 305,12 F), l'ACNF a en premier lieu réglé les dettes en cours (83 769,39 F).

Elle doit donc être considérée comme ayant reçu en réalité au 1er octobre 1979 la somme de :

194 305,12 - 83 769,39 = 110 535,73 F ou 16 851,07 €.

Il n'y a pas lieu d'appliquer sur cette somme une quelconque revalorisation dès lors que le protocole de 1979 n'a rien prévu à ce sujet et que les sommes reçues ont été utilisées par le mandataire ACNF non pas 'à son usage' (article 1996 du code civil) mais pour assurer la gestion de l'AC Picardie qu'elle prenait en charge.

5. En ce que le présent procès a trait dès son origine à la reddition des comptes due par le mandataire ACNF au mandant AC Picardie, la revendication de la somme de 37 500,00 F ou 5 716,84 € en rapport avec la SCI Les terrasses de Paris ne peut être considérée comme irrecevable à hauteur d'appel : elle n'est que le complément, identifié grâce à une meilleure étude des pièces disponibles, des demandes d'origine.

Cela posé, l'AC Picardie justifie de ce que, à la suite de plusieurs rappels de l'ACNF (23 février 1990 - 5 juillet 1991) qui avait besoin de fonds pour l'aménagement de l'immeuble [Adresse 4] (destiné à recevoir un centre de contrôle technique Canopi et le siège local de l'AC Picardie) et qui revendiquait l'application du protocole de 1979, elle a versé cette somme à l'ACNF courant 1991 (voir pièce AC Picardie n° 5).

La restitution est ainsi due.

Il n'y a pas lieu à revalorisation.

6. Quant au prix de l'immeuble du [Adresse 3] appartenant à l'AC Picardie et par elle vendu en 1980, l'ACNF admet qu'elle en doit restitution dans les termes ordonnés par les premiers juges alors que l'AC Picardie revendique paiement d'un chiffre revalorisé.

Il doit être exposé que l'ACNF a acheté le 11 juillet 1980, grâce à ce produit de 440 000,00 F à elle remis, un premier immeuble (s'agissant de lots dans un immeuble collectif soumis au statut de la copropriété) sis [Adresse 1] puis qu'elle a participé, en tant qu'actionnaire de la SCI Club Nord Picardie, à l'investissement correspondant à l'achat de l'immeuble [Adresse 4] opéré le 28 décembre 1988 par la dite SCI ; elle a autorisé l'installation dans ces deux immeubles successifs de l'AC Picardie, sans loyer ou avec loyer (qu'en réalité elle prenait en charge dans le cadre de son mandat de gestion et qu'elle incluait à ses comptes).

Quant à la revalorisation, la cour exclut le raisonnement proposé par le président de l'ACNF dans son courrier adressé le 11 janvier 2006 au président de l'AC Picardie (pièce AC Picardie n° 9), qui repose sur l'analyse de l'article 7 alinéas 2 et 3 du protocole de 1979 relatifs aux remplois d'immobilisation et aux investissements.

En réalité, ces alinéas ne concernent pas les 'immeubles' que pourrait posséder l'AC Picardie (précisément, elle possédait l'immeuble [Adresse 3]), immeubles qu'ils ne visent pas.

Au contraire, quant au patrimoine immobilier, c'est le principe général du protocole édicté à l'article 7 alinéa 1 -à savoir que : 'Les postes d'actif et de passif du bilan (...) demeureront à l'ordre de l'Automobile Club de Picardie'- qui doit s'appliquer.

Or, avec les fonds provenant de la vente de l'immeuble [Adresse 3], l'ACNF a acheté à son nom un immeuble [Adresse 1] puis elle a financé sa participation, par le biais de la SCI Club Nord Picardie, à l'acquisition de l'immeuble 472 avenue du 14 juillet : elle a ainsi utilisé à son profit -et peu important que ce fût avec une optique de gestion administrative de l'AC Picardie y compris pour abriter son siège local- les fonds provenant de la vente de l'immeuble [Adresse 3].

Il faut ajouter que, dans un courrier adressé le 23 février 1990 par le président de l'ACNF au président de l'AC Picardie (pièce AC Picardie n° 8), le rédacteur, s'exprimant à propos des parts de la SCI Les terrasses de Paris, a indiqué que : 'S'agissant d'un poste d'actif de l'A.C. de Picardie, celui-ci lui reste attaché quoique la gestion en incombe à l'A.C. du Nord, et ceci conformément à l'Article 7 81 du Protocole de 1979' : un tel raisonnement mené à propos de parts de SCI est transposable au cas de l'immeuble.

Cela revient à dire que, avec les fonds retirés de la vente de l'immeuble [Adresse 3] appartenant à l'AC Picardie, l'investissement immobilier nouveau aurait dû être réalisé au nom de l'AC Picardie ; de ce qu'il a été réalisé au nom de l'ACNF, il doit être déduit que l'ACNF a utilisé à son usage et à son profit les fonds d'origine immobilière appartenant à l'AC Picardie.

Une revalorisation doit en conséquence être décidée, dans les termes et selon les calculs tels que proposés par l'AC Picardie à son courrier recommandé du 16 novembre 2005.

La somme de 187 817,19 € est ainsi due par l'ACNF à l'AC Picardie.

Il n'y a pas lieu à revalorisation à 2007 compte tenu des intérêts qui courent depuis 2005.

D'autre part, il n'y a pas à ordonner de libération forcée des lieux (qui conditionnerait la restitution due à l'AC Picardie) non plus qu'à fixer une quelconque indemnité d'occupation dès lors que le propriétaire de l'immeuble, la SCI Club Nord Picardie, n'est pas en cause.

7. Au présent stade du raisonnement, il se constate que l'ACNF doit, au titre des sommes qu'elle a perçues en provenance de la trésorerie de l'AC Picardie et dont elle doit compte en tant que mandataire dont la mission a été dénoncée, restitution de la somme totale de :

16 851,07 + 5 716,84 + 187 817,19 = 210 385,10 €.

Les intérêts sont dus à compter de la mise en demeure du 16 novembre 2005.

8. L'ACNF forme demande reconventionnelle pour obtenir remboursement des sommes qu'elle a exposées pour le compte et le profit de son mandant l'AC Picardie : elle identifie ce remboursement au déficit cumulé relevant de la gestion de l'AC Picardie soit pendant la période du mandat (jusqu'au 31 décembre 2004) soit pendant la période 2005 et 2006 au cours de laquelle, faute d'accord entre les parties sur les conséquences de la dénonciation, l'ACNF a de fait continué d'assumer la gestion de l'AC Picardie c'est à dire essentiellement de ses adhérents et de la dernière salariée travaillant à son service.

Il doit à ce sujet être précisé que l'ACNF prouve utilement, notamment par des courriers circulaires envoyés par le président de l'AC Picardie à des adhérents en fin 2006, que l'AC Picardie n'a de fait repris le contrôle et la gestion de ses adhérents qu'à compter de début 2007, d'ailleurs en s'alliant à une autre Automobile Club.

Pour la première période, l'ACNF invoque les règles générales du mandat ; pour la seconde période, l'ACNF invoque le quasi contrat de la gestion d'affaires.

Quelle que soit la période en jeu et quel que soit le fondement juridique à mettre en oeuvre, il est exact que le mandataire (l'ACNF dans le cadre du protocole de 1979) ou le gérant d'affaires (l'ACNF après la dénonciation de 2004) a droit d'être remboursé des dépenses qu'il a exposées au profit de son mandant ou du géré.

Un tel principe doit être appliqué dès lors que le protocole de 1979 ne contient, à ses articles 7 ou 8 ou 11, aucune disposition contraire (si le seul article 6 pouvait prêter à interprétation, dans un sens qu'a proposé l'AC Picardie mais que la cour a rejeté supra par. 4, il reste que cette disposition ne visait que la situation identifiée au 1er octobre 1979 mais non l'exécution dans le temps du mandat).

Devant la cour, l'ACNF produit des comptes complets et précis afférents à l'AC Picardie et à compter de l'exercice 1991.

L'AC Picardie leur dénie toute sincérité et portée mais il se constate que :

# à plusieurs reprises durant l'exécution du mandat, l'ACNF a rendu compte à l'AC Picardie de la gestion de ses biens (actif et passif) : par exemple, une réunion a été tenue le 2 octobre 1984 du comité directeur de l'AC Picardie au cours de laquelle il a été procédé à la 'lecture des comptes établis par l'expert-comptable, et arrêtés à la date du 31 AOUT 1984 concernant l'A.C. Picardie' (voir pièce AC Picardie n° 10) ; d'autre part, à plusieurs reprises, l'ACNF a écrit à l'AC Picardie pour lui communiquer le 'compte de résultat (...) de l'Automobile Club de Picardie' (pièces ACNF n° 17),

# l'ACNF convainc ainsi que des comptes afférents spécifiquement à l'AC Picardie ont été tenus sur toute la période, et régulièrement communiqués à l'AC Picardie qui n'a jamais formulé aucune observation,

# il faut ajouter que l'AC Picardie a, selon le protocole de 1979, conservé sa personnalité morale distincte et son existence mais aucun document relatif à un fonctionnement continu réel (sauf le comité directeur du 2 octobre 1984 cité supra ou un acte de signature de bail en date du 3 janvier 2002) n'est communiqué au dossier ce qui laisse à penser qu'il n'y avait plus qu'un fonctionnement sporadique,

# les documents comptables communiqués par l'ACNF ont été visés par son commissaire aux comptes qui a conclu à l'absence d'anomalie, n'y ayant lieu à 'observation à formuler sur la sincérité des résultats de chaque exercice' (pièce ACNF n° 18),

# ces documents sont détaillés, les postes de recettes ou de charges sont libellés avec précision alors que l'AC Picardie ne formule aujourd'hui aucune critique aussi précise (par exemple, les comptes font ressortir chaque année, au rang des 'autres charges externes', un poste 'locations immobilières' qui n'est pas critiqué alors précisément que l'AC Picardie a signé un bail pour son siège social),

# ces documents enfin dégagent un déficit de gestion qui est d'autant plus crédible que les effectifs de l'AC Picardie ont 'fondu' en quelques années en sorte qu'aucun redressement n'a jamais été rendu possible.

La cour en conséquence retient les chiffres proposés par l'ACNF, exclusion faite des 'frais de gestion' qui ne sauraient être réclamés ni au titre du mandat (par essence gratuit) ni au titre de la gestion d'affaires.

L'ACNF peut ainsi prétendre se voir dédommager du déficit de gestion qu'elle a supporté :

+ pour la période 1991 / 2004 à hauteur de 198 048,00 €,

+ pour la période 2005 / 2006 à hauteur de 70 243,00 €

+ soit le chiffre total de 198 048,00 + 70 243,00 = 268 291,00 €.

Les intérêts sont dus à compter de la première réclamation officielle en paiement, formalisée à l'audience tenue devant le tribunal de grande instance de Lille le 27 septembre 2007.

9. En définitive, la cour ne retient aucune faute qu'aurait commise l'ACNF dans l'exécution de son mandat ; l'AC Picardie elle-même n'a pas été, du moins avant le présent procès, de mauvaise foi en ce que son déficit cumulé de gestion ne lui a jamais été réclamé et que les parties n'ont pu se mettre d'accord sur les conséquences pécuniaires à tirer de la dénonciation par l'ACNF du protocole de 1979, le tout dans un contexte de crise qui frappait les deux Automobile Club en présence (plus encore l'AC Picardie que l'ACNF).

Il ne peut être alloué à l'AC Picardie, qui les réclame, de dommages-intérêts alors que le comportement prétendument fautif de l'ACNF n'est pas caractérisé.

Cette situation conduit à laisser à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés, sans application en faveur de l'une ou de l'autre de l'article 700 du code de procédure civile

* * *

PAR CES MOTIFS :

- infirme en toutes ses dispositions le jugement déféré ;

ET, STATUANT À NOUVEAU :

- condamne l'ACNF à restituer à l'AC Picardie la somme de 210 385,10 € (deux cent dix mille trois cent quatre vingt cinq euros et dix cts), outre intérêts au taux légal à compter du 16 novembre 2005 ;

- condamne l'AC Picardie à payer à l'ACNF la somme de 268 291,00 € (deux cent soixante huit mille deux cent quatre vingt onze euros), outre intérêts au taux légal à compter du 27 septembre 2007 ;

- ordonne compensation ;

- rejette toutes autres prétentions plus amples ou contraires ;

- dit que chacune des parties conservera la charge des dépens de première instance et d'appel par elle exposés.

Le Greffier,Le Président,

Claudine POPEKBernard MERICQ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 1 section 2
Numéro d'arrêt : 08/00533
Date de la décision : 24/02/2010

Références :

Cour d'appel de Douai 1B, arrêt n°08/00533 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-02-24;08.00533 ?
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