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26/01/2010 | FRANCE | N°08/07777

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 2, 26 janvier 2010, 08/07777


COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 1 SECTION 2



ARRÊT DU 26/01/2010



***



N° de MINUTE :



N° RG : 08/07777

Jugement (N° 07/0920) rendu le 26 Septembre 2008

par le Tribunal de Grande Instance de SAINT OMER



REF : GG/VR





APPELANTE



SAFER FLANDRES ARTOIS

prise en la personne de ses représentants légaux

demeurant [Adresse 5]

[Localité 3]



représentée par la SCP DELEFORGE FRANCHI, avoués à la Cour

assistée de Maît

re Vincent BUE, avocat au barreau de LILLE





INTIMÉE



S.C.I. DES BASSINS DU PONT D'ARDRES

prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 4]



représentée...

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 2

ARRÊT DU 26/01/2010

***

N° de MINUTE :

N° RG : 08/07777

Jugement (N° 07/0920) rendu le 26 Septembre 2008

par le Tribunal de Grande Instance de SAINT OMER

REF : GG/VR

APPELANTE

SAFER FLANDRES ARTOIS

prise en la personne de ses représentants légaux

demeurant [Adresse 5]

[Localité 3]

représentée par la SCP DELEFORGE FRANCHI, avoués à la Cour

assistée de Maître Vincent BUE, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉE

S.C.I. DES BASSINS DU PONT D'ARDRES

prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par la SCP THERY-LAURENT, avoués à la Cour

assistée de Maître Dominique DELERUE, avocat au barreau de LILLE

DÉBATS à l'audience publique du 15 Septembre 2009 tenue par Gisèle GOSSELIN magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Claudine POPEK

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Gisèle GOSSELIN, Président de chambre

Fabienne BONNEMAISON, Conseiller

Dominique DUPERRIER, Conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 26 Janvier 2010 après prorogation du délibéré en date du 24 Novembre 2009 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Gisèle GOSSELIN, Président et Claudine POPEK, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 09 Juillet 2009

*****

Par jugement rendu le 16 Septembre 2008, le Tribunal de Grande Instance de SAINT OMER a :

dit que les conditions d'exercice du droit de préemption de l'article L143-2-8° du code rural n'avaient pas été respectées par la SAFER FLANDRES ARTOIS ;

annulé la décision de préemption des terrains situés sur la commune d'[Localité 6], cadastrés AE [Cadastre 2] 'le Fort Rouge Sud' et AZ 73 'Les bassins de décantation', notifiée par la SAFER FLANDRES ARTOIS le 14 mars 2007 ;

dit que cette annulation remettait les parties dans l'état dans lequel elles se trouvaient le 13 mars 2007 ;

condamné le SAFER FLANDRES ARTOIS à payer à la SCI LES BASSINS DU PONT D'ARDRES la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Par déclaration du 14 octobre 2008, la société SAFER FLANDRES ARTOIS a fait appel de cette décision ;

Par conclusions déposées le 13 février 2009, la société SAFER FLANDRES ARTOIS sollicite :

Vu la charte de l'environnement (loi constitutionnelle n° 2005-205 du 11 mars 2005),

En application des articles L111-1, 112-2, L143-2-8°, 143-8, R141-1, 143-15, du code rural,

Vu l'inventaire approuvant la ZNIEFF et l'article L411-5 du code de l'environnement,

Vu l'effet direct de la directive 92/43 CEE du conseil du 21 mai 1992 dite 'habitats',

la réformation du jugement entrepris ;

demande de :

rejeter toutes fins, moyens et conclusions contraires ;

de déclarer la SCI DES BASSINS DU PONT D'ARDRES irrecevable et mal fondée en toutes les demandes et l'en débouter ;

de réclamer sa condamnation au paiement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Par conclusions déposées le 20 avril 2009, la SCI DES BASSINS DU PONT D'ARDRES, demande :

Vu les articles L143-2-8° et R143-1 du code rural,

Vu les articles 699 et suivants du code de procédure civile,

de dire qu'il n'existe aucun projet approuvé de mise en valeur des bassins de décantation d'[Localité 6] ; que les conditions de l'article L143-2-8° du code rural ne sont pas remplies et que la SAFER FLANDRES ARTOIS ne peut exercer le droit de préemption ;

en conséquence sollicite la confirmation du jugement déféré ; l'annulation de la vente des parcelles en cause reçue par Maître [M] les 13 et 14 mars 2008 ;

la condamnation de la SAFER FLANDRES ARTOIS au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

réclame le rejet des demandes de la SAFER FLANDRES ARTOIS ;

SUR CE

Il est constant que depuis la loi d'orientation agricole du 07 juillet 1999, la SAFER FLANDRES ARTOIS a, outre la mission classique d'agir dans l'intérêt de l'agriculture et des ruraux non agriculteurs, de contribuer à la protection de l'environnement ;

Pour réaliser cette mission, elle dispose d'un droit de préemption qui doit s'exercer dans les termes de l'article L143-2 du code rural ;

Ces dispositions définissent les finalités affectées au droit de préemption dans le cadre des objectifs définis par l'article premier de la loi n° 99 574 du 09 juillet 1999 d'orientation agricole ;

Aux termes de l'alinéa 8 de l'article L143-2 en vertu duquel la SAFER FLANDRES ARTOIS agit en l'espèce, le droit de préemption doit avoir pour objet la réalisation de projets de mise en valeur des paysages et de protection de l'environnement approuvés par l'Etat ou les collectivités locales et leurs établissements publics ;

Aussi le droit de préemption est dans ce cas soumis à la condition de l'existence d'un projet de mise en valeur, préalablement approuvé par l'Etat ou les collectivités publiques ;

La décision de préempter en date du 14 mars 2007, objet du présent litige, porte sur la propriété à la vente d'un seul tènement d'anciens bassins de décantations constitués aujourd'hui de marais, terres incultes et de surfaces en eau pour 7-8 hectares ;

Il y est précisé que cet ensemble de haute qualité environnementale est repris dans le périmètre de la ZNIEFF (Zone Naturelle d'Intérêt Environnemental Faunistique et Floristique) de type 1 n° 27 'Watergangs des ATTAQUES et d'ANDRES et lac d'[Localité 6]' qui s'étend sur 1 900 hectares ;

Les ZNIEFFS organisées par l'article L415 du code de l'environnement sont des inventaires locaux et régionaux du patrimoine faunistique et floristique ;

Elles sont des instruments de connaissance des milieux naturels et des espèces ;

Il existe deux types de ZNIEFF, et notamment les zones de type 1 caractérisées par la présence d'espèces, d'association d'espèces ou de milieux rares, remarquables, ou caractéristiques du patrimoine naturel national ou régional ;

Il se déduit du classement en ZNIEFF simplement qu'il s'agit d'un espace naturel remarquable requérant une attention toute particulière et des études plus approfondies, et dont la protection peut apparaître souhaitable ;

Toutefois le classement en ZNIEFF n'est pas une procédure de protection des espaces naturels ; une ZNIEFF ne comporte aucune mesure de protection spécifique ;

Et donc sa prise en compte doit s'apprécier au cas par cas pour déterminer les mesures à prendre éventuellement ;

En conséquence, le classement en ZNIEFF de la propriété mise en vente, qui au demeurant est acquis, ne constitue pas en soi un projet ;

L'objectif mentionné dans la décision de la SAFER est la reproduction paraphrasée de l'alinéa 8 de l'article L143-2 du code rural ;

Effectivement sont ainsi visés la préservation du site sous l'angle de l'intérêt faunistique, floristique et paysager, le maintien de l'intérêt écologique du site ;

La SAFER FLANDRES ARTOIS souligne d'autre part que cette préservation doit être réalisée dans le cadre d'une gestion écologique adaptée et que dans cette perspective la rétrocession à une collectivité, à une association régionale pour la protection de l'environnement ou à la fondation nationale pour la protection des habitats de la faune sauvage reconnue d'utilité publique qui se porterait candidat constituerait une sécurité sur les conditions de maintien de l'intérêt écologique de ce site ;

Toutefois, il convient de relever que la décision de préemption ne comporte pas d'indications concrètes constitutives d'un descriptif d'un projet susceptible de répondre aux objectifs à atteindre ;

En fait, la SAFER FLANDRES ARTOIS se contente d'exprimer en termes généraux la mission de protection de l'environnement que lui a confiée le législateur ;

En conséquence, il ne saurait être considéré que la SAFER FLANDRES ARTOIS définit ainsi un ou des projets de protection de l'environnement justifiant l'exercice du droit de préemption aux termes de l'article L143-2 alinéa 8 du code rural ;

Aux termes de l'article R143-1 dernier alinéa du code rural, si le projet de mise en valeur des paysages et de protection de l'environnement ne s'inscrit pas dans une opération soumise à enquête publique, la SAFER FLANDRES ARTOIS ne peut exercer son droit de préemption que sur proposition du directeur régional de l'environnement ;

Par courrier du 19 février 2007, le directeur régional de l'environnement saisissait la SAFER FLANDRES ARTOIS afin de faire valoir le droit de préemption à titre environnemental 'compte-tenu de la haute qualité environnementale' des sites concernés ;

Certes le directeur régional de l'environnement autorisait ainsi l'exercice du droit de préemption ; mais cette autorisation ne peut valoir approbation d'un projet spécifique dont il n'était alors fait aucunement mention ;

Et la SAFER FLANDRES ARTOIS ne peut justifier a posteriori sa décision en date du 14 mars 2002 en produisant un courrier daté du 20 décembre 2007 du Conseil Régional de la Région Nord, Pas-de-Calais, indiquant que le site en question était identifié comme un 'coeur de nature' dans le schéma régional TRAME Verte et bleue, ce qui justifiait sa préemption à titre environnemental en vue de son classement en réserve naturelle régionale, ou des courriers des 14 et 16 janvier 2007 de l'office national de la chasse et de la faune sauvage et de la fédération départementale des chasseurs du Pas-de-Calais faisant état d'un projet consistant à donner à ce site le statut de réserve et pérenniser le comptage des oiseaux hivernaux et observations pour l'étude sur la chronologie de la reproduction ;

Aussi alors que le contrôle du juge porte sur le respect de la procédure et non sur l'opportunité d'exercer le droit de préemption dans le cadre des missions d'aménagement et de développement durable de l'espace, étant observé au demeurant que l'intérêt écologique et environnemental des lieux n'est pas contesté ; il convient de constater que les conditions prévues par l'article L143-2-8° du code rural ne sont pas remplies, en ce que la décision de préemption litigieuse ne mentionne pas de projet spécifique préalablement approuvé par l'Etat ou les collectivités publiques ;

En conséquence cette décision de préemption doit être annulée avec toutes conséquences de droit sur la procédure subséquente ;

Aussi le jugement déféré sera-t-il confirmé en toutes ses dispositions ;

Et y ajoutant la vente par rétrocession suivant actes des 13 et 14 mars 2008 sera annulée ;

Enfin la SAFER FLANDRES ARTOIS sera condamnée à payer à l'intimée la somme complémentaire de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

DIT que par voie de conséquence la rétrocession des parcelles susvisées au conservatoire des sites naturels du Nord et du Pas-de-Calais et à la Fédération Départementale des Chasseurs du Pas-de-Calais suivant acte reçu par Maître [M] les 13 et 14 mars 2008 est nulle ;

CONDAMNE la SAFER FLANDRES ARTOIS à payer à la SCI DES BASSINS DU PONT D'ARDRES la somme complémentaire de 1 500 euros pour les frais irrépétibles d'appel ;

CONDAMNE la SAFER FLANDRES ARTOIS aux dépens d'appel avec distraction au profit de la SCP THERY LAURENT conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier,Le Président,

Claudine POPEKGisèle GOSSELIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 1 section 2
Numéro d'arrêt : 08/07777
Date de la décision : 26/01/2010

Références :

Cour d'appel de Douai 1B, arrêt n°08/07777 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-01-26;08.07777 ?
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