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25/06/2009 | FRANCE | N°08/05050

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 2 section 2, 25 juin 2009, 08/05050


COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 2 SECTION 2



ARRÊT DU 25/06/2009



***



N° de MINUTE : /09

N° RG : 08/05050



Jugement (N° 04/01796)

rendu le 21 février 2007

par le Tribunal de Grande Instance de VALENCIENNES



REF : VNDM/CP



APPELANTS



Monsieur [W] [L]

né le [Date naissance 3] 1965 à [Localité 9]

demeurant [Adresse 8]



Représenté par la SELARL ERIC LAFORCE, avoués à la Cour



Mademoiselle [O] [P]

née le [D

ate naissance 1] 1976 à [Localité 11]

demeurant [Adresse 4]



Représentée par la SELARL ERIC LAFORCE, avoués à la Cour

Assistée de la SCP ARLAUD PANIE-DUJAC, avocats au barreau de PANTIN



INTIMÉS



Maître [H] [...

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 2

ARRÊT DU 25/06/2009

***

N° de MINUTE : /09

N° RG : 08/05050

Jugement (N° 04/01796)

rendu le 21 février 2007

par le Tribunal de Grande Instance de VALENCIENNES

REF : VNDM/CP

APPELANTS

Monsieur [W] [L]

né le [Date naissance 3] 1965 à [Localité 9]

demeurant [Adresse 8]

Représenté par la SELARL ERIC LAFORCE, avoués à la Cour

Mademoiselle [O] [P]

née le [Date naissance 1] 1976 à [Localité 11]

demeurant [Adresse 4]

Représentée par la SELARL ERIC LAFORCE, avoués à la Cour

Assistée de la SCP ARLAUD PANIE-DUJAC, avocats au barreau de PANTIN

INTIMÉS

Maître [H] [C]

demeurant [Adresse 2]

Représenté par la SCP THERY-LAURENT, avoués à la Cour

Ayant pour avocat Me DOUTRIAUX du barreau de VALENCIENNES

S.C.I. MILIS prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège social [Adresse 6]

Représentée par la SCP COCHEME-KRAUT-LABADIE, avoués à la Cour

Assistée de Me Vincent DUSART, avocat au barreau de VALENCIENNES

DÉBATS à l'audience publique du 31 mars 2009, tenue par Madame NEVE DE MEVERGNIES magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame NOLIN

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Madame OLIVIER, Président de chambre

Madame NEVE DE MEVERGNIES, Conseiller

Monsieur DELENEUVILLE, Conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 25 juin 2009 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Madame OLIVIER, Président et Madame NOLIN, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 12 février 2009

***

Par acte authentique établi par Maître [H] [C] notaire en date du 28 mai 1997, Monsieur [D] [E] a donné à bail commercial à Monsieur [W] [L] et Mademoiselle [O] [P] un immeuble à usage commercial désigné comme se trouvant situé [Adresse 5] et objet d'une description dans le dit acte, moyennant un loyer annuel de 30 000 F payable mensuellement et d'avance. Par acte signifié le 6 octobre 1997 à Monsieur [W] [L] alors détenu en maison d'arrêt de [Localité 11], et le 12 octobre 1997 à Mademoiselle [O] [P] alors domiciliée à [Localité 10] (Seine Saint Denis), le bailleur a délivré aux locataires un commandement, visant la clause résolutoire, d'avoir à payer la somme de 5 000 € correspondant aux loyers d'août et septembre 1997.

Enfin, par acte authentique établi par le même notaire le 27 février 2001, Monsieur [D] [E] a vendu à la SCI MILIS un immeuble à usage commercial situé [Adresse 7].

Par jugement du 21 février 2007, le Tribunal de Grande Instance de VALENCIENNES a, notamment, débouté Monsieur [W] [L] et Mademoiselle [O] [P] de leur demande tendant à voir être indemnisés de la perte de la valeur du fonds de commerce en raison de leur expulsion des locaux loués, expulsion qu'ils estiment fautive.

Par déclaration au Greffe en date du 1er mars 2007, Monsieur [W] [L] et Mademoiselle [O] [P] ont interjeté appel de cette décision. Dans leurs dernières conclusions déposées le 24 octobre 2008, ils demandent l'infirmation du jugement et, au principal, que soit ordonnée la vérification d'écriture de la pièce n° 6 de la SCI MILIS attestant de la restitution des clés des locaux, attribué faussement selon eux à Madame [Z] [I] soeur de Monsieur [L], et qu'il soit sursis à statuer dans l'attente du résultat de la comparaison des écritures.

A titre subsidiaire, ils demandent condamnation solidaire de la SCI MILIS et de Maître [H] [C] notaire à leur payer la somme de 92 088 € à titre de dommages-intérêts en réparation de leur préjudice, et celle de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Ils fondent leur demande de dommages-intérêts sur le fait que :

* au moment de la vente de l'immeuble, le bail dont ils sont bénéficiaires n'était pas résilié, le document prêté à Madame [Z] [I] étant un faux et cette dernière n'ayant eu, en toute hypothèse, aucun mandat pour restituer ces clés ; par ailleurs, l'huissier Maître [U] n'a nullement constaté la remise des clés ; enfin, l'ordonnance de référé par laquelle leur expulsion a été ordonnée a été infirmée par cette Cour d'Appel,

* que Maître [H] [C] a commis une faute en ne vérifiant pas la réalité de la résiliation du bail, et en mentionnant dans l'acte de vente que l'immeuble était "libre de toute occupation",

* que c'est à tort qu'il est invoqué que les loyers visés au commandement étaient impayés, Monsieur [W] [L] ayant remis en main propre à Monsieur [D] [E] la somme de 15 000 F à ce titre, même si aucune quittance ne lui a été remise,

* que Maître [H] [C] a encore commis une autre faute professionnelle résidant dans l'erreur de numérotation des locaux,

* que le montant de l'indemnité qu'ils réclament en réparation de leur préjudice correspond à trois années de résultats d'exploitation.

La SCI MILIS, dans ses dernières conclusions déposées le 5 novembre 2008, demande la confirmation du jugement déféré et la condamnation solidaire de Monsieur [W] [L] et de Mademoiselle [O] [P] à lui payer la somme de 3 500 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

A titre subsidiaire, elle demande condamnation de Maître [H] [C] à la garantir de toutes condamnations éventuelles, et à lui payer la somme de 3 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Elle fait valoir notamment, à l'appui de sa position et de ses demandes :

* que le bail a bien été résilié antérieurement à la vente par les effets du commandement, et au surplus par la remise volontaire des clés par l'intermédiaire de Madame [Z] [I],

* qu'elle s'oppose à toute vérification d'écritures, soulignant à cet égard que la plainte avec constitution de partie civile déposée par Monsieur [W] [L] n'a pas été suivie d'effets faute par ces derniers de procéder à la consignation mise à leur charge,

* que les consorts [L]-[P] se sont réintroduits de force dans l'immeuble et que leur expulsion a été mise en oeuvre par elle-même en exécution d'une ordonnance de référé exécutoire,

* que le notaire a commis une faute en mentionnant, sans le vérifier réellement, que l'immeuble vendu était libre de toute occupation.

Maître [H] [C], dans ses dernières conclusions en date du 23 juillet 2007, demande la confirmation du jugement en reprenant le motif du jugement par lequel il est constaté que le bail a été résilié de plein droit par les effets du commandement et en y ajoutant :

* que, dès lors, il n'a commis aucune faute en indiquant, dans l'acte de cession de l'immeuble, que ce dernier était libre de toute occupation,

* que l'erreur de numérotation de voirie est sans aucune incidence sur la résiliation du bail et, en conséquence, sur le présent litige.

A titre subsidiaire, il conteste l'évaluation du préjudice en faisant remarquer que l'immeuble est resté inoccupé durant de nombreux mois avant même la résiliation du bail, notamment du fait de l'incarcération de Monsieur [W] [L], ce qui fait perdre toute consistance au fonds de commerce dont la privation est invoquée.

Il demande enfin condamnation de Monsieur [W] [L] et Mademoiselle [O] [P] à lui payer la somme supplémentaire de 2 500 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile

MOTIFS DE LA DÉCISION

La demande principale des consorts [L]-[P] reposant sur la perte de la valeur du fonds de commerce par la perte du droit au bail compte-tenu des circonstances de la vente des murs commerciaux à la SCI MILIS, il convient, dans un premier temps, de rechercher si, au moment de cette vente, le bail commercial était toujours en cours ou bien s'il était résilié.

Sur la résiliation du bail au moment de la cession de l'immeuble

# sur la résiliation de plein droit par les effets de la clause résolutoire

Il est constant qu'en l'espèce, Monsieur [D] [E] a fait délivrer à Monsieur [W] [L] et Mademoiselle [O] [P] un commandement visant la clause résolutoire les 6 et 12 octobre 1997, pour défaut de paiement notamment des loyers d'août et septembre 1997. Aux termes de l'article L. 145-41 du Code de Commerce dont les dispositions sont rappelées dans le bail, il est exact que la résiliation du bail intervient de plein droit un mois après la délivrance du commandement resté infructueux. Néanmoins, le même texte prévoit que "les juges saisis d'une demande (...) peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'a pas été constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée". Cette faculté du juge, de même que la demande de délais qui la sous-tend, ne sont enfermées dans aucun délai, si ce n'est celui prévu par la fin du texte cité, c'est-à-dire l'intervention d'une décision de justice constatant la résiliation ayant acquis l'autorité de la chose jugée ; il en résulte qu'a contrario, tant qu'une telle décision n'est pas intervenue, les délais peuvent être demandés et accordés, et les effets de la clause résolutoire suspendus.

En l'espèce, il est constant qu'aucune décision de justice n'est, jusqu'à ce jour, intervenue en ce sens. En effet, si le Juge des Référés a constaté la résiliation du bail par ordonnance du 5 février 2002, cette ordonnance a été infirmée par arrêt de cette Cour du 10 avril 2003 ce qui a ôté toute autorité de chose jugée ou force de chose jugée à l'ordonnance de référé.

Il doit en être déduit que, dès lors que la résiliation de plein droit du bail n'avait pas été constatée par une décision ayant acquis force de chose jugée à la date du bail, cette résiliation, certes intervenue de plein droit à l'expiration du délai d'un mois de la délivrance du commandement, n'était pas définitive, dès lors qu'elle pouvait être remise

en question par l'octroi de délais et la suspension subséquente des effets de cette clause par le juge qui pouvait en être saisi à tout moment.

# sur la résiliation amiable par la remise des clés

La SCI MILIS et Maître [H] [C] invoquent encore la résiliation amiable du bail résultant du défaut d'occupation des locaux et de la remise des clés par l'intermédiaire de Madame [Z] [I], soeur de Monsieur [W] [L].

S'agissant du fait matériel de la remise de ces clés, la SCI MILIS veut en rapporter la preuve par la production aux débats d'un document daté du 19 février 1998 (sa pièce n° 6) attribué à Madame [Z] [L] épouse [I], qui mentionne que cette dernière "restitue les clés de l'immeuble (...) et déclare le rendre libre de toute occupation" et qu'en cela, elle "représente Monsieur [L] [W] (...) et Mademoiselle [P] [O]" et ce document se termine par une signature sur laquelle on peut lire le patronyme "[I]" ; or Monsieur [W] [L] et Mademoiselle [O] [P] versent aux débats une attestation de Madame [Z] [I] qui dénie formellement avoir signé ce document, et sa signature sur cette attestation de même que celle qui figure sur la copie de sa carte d'identité jointe ne permettent pas d'affirmer avec certitude que la signature figurant sur le document invoqué est bien celle de Madame [Z] [I]. En toute hypothèse, à supposer que ce document ait bien été signé par Madame [Z] [I] et établisse ainsi la réalité matérielle de la remise des clés, pour que ce simple fait entraîne la résiliation amiable du bail, il faut encore établir que Madame [Z] [I] détenait un mandat de Monsieur [W] [L] et de Mademoiselle [O] [P] pour agir en leur nom et, par cet acte, exprimer l'intention de ces derniers de mettre fin au bail qu'ils avaient conclu avec Monsieur [D] [E] ; tel n'est pas le cas, aucune pièce n'étant fournie en ce sens. Il n'est donc pas nécessaire d'ordonner une vérification d'écriture sur ce point.

Le procès-verbal de constat de Maître [U] en date du 20 février 2008 encore invoqué par la SCI MILIS (sa pièce n° 5) n'est pas plus opérant à cette fin ; en effet, sur ce point de la restitution des clés, l'huissier ne fait que rapporter les propos de Monsieur [D] [E] en ces termes "Monsieur [D] [E] (...) expose (...) que Monsieur [L] et Mademoiselle [P] ont quitté les lieux et restitué les clés", le reste de son procès-verbal portant sur le constat de l'état des lieux pour lequel il avait été requis.

Enfin, le simple défaut d'occupation effectif, qui ne résulte d'ailleurs pas formellement des pièces versées, l'huissier ayant constaté que les locaux étaient en cours de travaux ce qui pouvait expliquer l'absence de matériels ou d'effets personnels, ne suffit pas à entraîner de plein droit la résiliation du bail mais aurait pu simplement servir de fondement à une demande en justice en ce sens fondée sur l'inexécution des obligations du locataire, dont il n'est pas allégué ni a fortiori établi qu'elle ait jamais été introduite.

Dès lors, ni la SCI MILIS ni Maître [H] [C] ne rapportent la preuve d'une résiliation amiable du bail avant la signature de l'acte de cession de l'immeuble.

Sur la demande en allocation de dommages-intérêts

Cette demande, pour aboutir, nécessite la démonstration d'une faute des personnes contre laquelle la demande est dirigée, et d'un préjudice résulté de cette faute et subi par les personnes qui forment cette demande, en application des dispositions de l'article 1382 du Code Civil.

# demande dirigée contre la SCI MILIS

Monsieur [W] [L] et Mademoiselle [O] [P] n'exposent ni a fortiori ne démontrent, dans leurs conclusions, aucune faute de la SCI MILIS telle qu'elle soit à l'origine du préjudice qu'ils invoquent. Le seul acte positif que la SCI MILIS ait mis en oeuvre à leur égard qui soit lié au bail est l'expulsion des consorts [L]-[P] ; mais cette expulsion est intervenue en exécution de l'ordonnance de référé rendue en faveur de la SCI MILIS le 5 février 2002 et avant que cette ordonnance soit infirmée en appel, cette décision étant revêtue de l'exécution provisoire de plein droit en application des dispositions de l'article 489 du Code de Procédure Civile ; il ne saurait donc être valablement soutenu qu'en ce faisant, la SCI MILIS ait eu un comportement fautif.

C'est donc à bon droit que le premier juge a rejeté toute demande dirigée contre la SCI MILIS, et le jugement déféré sera donc confirmé sur ce point.

# demande dirigée contre Maître [H] [C]

* sur la faute

Maître [H] [C] est le notaire rédacteur d'une part du contrat de bail commercial, d'autre part de l'acte authentique de vente du 27 février 2001, entre Monsieur [D] [E] et la SCI MILIS, de l'immeuble objet du bail. Nonobstant la différence de numérotation dans la rue, il est constant que c'est bien l'immeuble objet du bail qui a fait l'objet aussi de la cession en cause.

Il résulte de la lecture de l'acte de cession (pièce n° 1 de la SCI), que le notaire y a mentionné (page 3 sous le titre "PROPRIETE-JOUISSANCE") que l'immeuble est "libre de toute location et occupation ainsi que le VENDEUR le déclare". Or, ainsi qu'il vient d'être rappelé, Maître [H] [C] est aussi le Notaire qui a rédigé le bail commercial concernant le même immeuble en date du 28 mai 1997. Il lui appartenait en conséquence de ne pas se contenter, s'agissant de la fin de ce bail dont il avait nécessairement connaissance, des simples déclarations du vendeur son client, mais de procéder à une vérification personnelle de ce point avant de mentionner une telle précision dans l'acte ; en effet, en sa qualité de rédacteur de ce dernier, cet Officier Public est responsable de l'exactitude des mentions qui y sont portées particulièrement relativement à la situation juridique du bien vendu, ce en quoi consiste évidemment l'état d'occupation ou de location de ce bien. Il ne peut, à cet égard, justifier avoir procédé aux vérifications nécessaires par la simple production, par Monsieur [D] [E], de :

* l'attestation attribuée à Madame [Z] [I] qui, pour un professionnel du droit, ne pouvait en aucun cas se suffire à elle-même dès lors qu'il n'était en rien prouvé que Madame [Z] [I] ait détenu un mandat de l'un ou l'autre des locataires pour remettre ces clés et pour que, au surplus, cette simple remise entraîne la résiliation amiable du bail,

* le procès-verbal de constat de Maître [U] qui, s'agissant de la remise des clés, ne fait que rapporter les propos de Monsieur [D] [E],

* le commandement visant la clause résolutoire, certes délivré aux locataires, mais sans constatation judiciaire définitive que cet acte n'ait pas été suivi d'effet dans le mois de sa délivrance et qu'il ait bien, ainsi, entraîné la résiliation du bail.

Dans ces conditions, il apparaît bien que Maître [H] [C] a commis une faute dont les consorts [L]-[P] sont recevables à se prévaloir en application des dispositions de l'article 1382 du Code Civil.

* sur le préjudice et le lien direct avec la faute

Monsieur [W] [L] et Mademoiselle [O] [P] demande réparation du préjudice consistant, pour eux, dans la perte de la valeur du fonds de commerce. Pour qu'ils puissent obtenir condamnation de Maître [H] [C] à indemniser ce préjudice, il faut qu'ils prouvent que la faute commise par ce dernier dans la rédaction de l'acte est directement à l'origine de ce préjudice et que dès lors, si cette faute n'avait pas été commise, ils auraient conservé la propriété commerciale dont ils invoquent aujourd'hui la privation. Or, tel n'est pas le cas dès lors que le maintien du bail commercial s'est trouvé, en l'espèce, particulièrement compromis par les éléments relatifs à la situation des locataires et notamment :

* la délivrance les 6 et 12 octobre 1997 d'un commandement visant la clause résolutoire pour défaut de paiement des loyers d'août et septembre 1997 pour un montant de 5 000 F, ce sans que les consorts [L]-[P] établissent avoir, ce jour, réglé cette somme ni a fortiori les loyers postérieurs, la simple attestation du frère de Monsieur [L] certifiant le paiement de ces loyers en espèce étant insuffisante dès lors qu'elle constitue en quelque sorte une preuve à soi-même, alors que par ailleurs les locataires ne produisent aux débats aucune quittance du propriétaire pour les dits loyers,

* l'absence d'occupation et d'exploitation dans les lieux loués durant plusieurs mois, au moins durant l'incarcération de Monsieur [W] [L] concordant avec le moment de la délivrance du commandement, ce dernier acte ayant été signifié à Monsieur [W] [L] en maison d'arrêt de [Localité 11], et à Mademoiselle [O] [P] à son domicile d'alors à [Localité 10] (Seine-Saint-Denis), cette absence d'occupation constituant une autre violation des obligations du preneur stipulées à la clause B- 17°) du bail page 10.

L'existence incontestable de ces violations des locataires à leurs obligations résultant du bail plaçait le propriétaire dans la situation de pouvoir, à tout moment, faire constater ou à défaut prononcer en justice la résiliation du bail, ce sans que les consorts [L]-[P] allèguent ni a fortiori établissent qu'ils auraient été, pour leur part, en mesure de s'y opposer utilement en assurant effectivement l'exécution de leurs obligations à cet égard.

Dans ces conditions, il ne saurait être valablement soutenu que la perte de la propriété commerciale soit la conséquence de la seule faute du Notaire dans la rédaction de l'acte de cession, le caractère erroné de la mention qu'il a portée dans cet acte relativement à l'occupation de l'immeuble cédé, si elle a pu effectivement induire en erreur le cessionnaire à cet égard, n'étant pas de nature à entraîner quelque conséquence juridique que ce soit, et notamment à faire disparaître un droit que le locataire tirait du bail ou à entraîner la cessation de ce dernier. A fortiori ne l'est pas davantage l'indication erronée d'une numérotation de voirie dans l'acte de bail commercial, dont il n'est pas allégué ni a fortiori démontré en quoi il serait à l'origine de la perte de la propriété commerciale, le contenu effectif des locaux loués n'ayant jamais été l'objet d'une quelconque difficulté entre bailleur et preneurs.

C'est donc à bon droit que le premier juge a rejeté toutes demandes de Monsieur [W] [L] et Mademoiselle [O] [P], et il y a donc lieu de confirmer le jugement déféré, par substitution de motifs.

Sur les demandes accessoires

Monsieur [W] [L] et Mademoiselle [O] [P] qui succombent en leur appel, devront supporter les dépens conformément aux dispositions de l'article 696 du Code de Procédure Civile. Pour les mêmes motifs, il ne peut être fait application de l'article 700 du Code de Procédure Civile en leur faveur.

Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de la SCI MILIS tout ou partie des frais exposés dans le cadre de la présente et non compris dans les dépens ; il y a donc lieu de lui allouer la somme de 1 800 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile en sus de celle allouée par le premier juge à ce titre, qu'il apparaît équitable de confirmer. En revanche, l'équité ne conduit pas à accorder indemnité au même titre à Maître [H] [C], dont le comportement dans la rédaction de l'acte n'est pas exempt de reproche même si cela ne suffit pas à fonder la demande en dommages-intérêts des appelants.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

CONFIRME, par substitution de motifs, le jugement déféré,

Y ajoutant,

CONDAMNE solidairement Monsieur [W] [L] et Mademoiselle [O] [P] à payer à la SCI MILIS la somme de 1 800 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

REJETTE toutes les autres demandes.

CONDAMNE solidairement Monsieur [W] [L] et Mademoiselle [O] [P] aux dépens, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,

Cécile NOLINNicole OLIVIER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 2 section 2
Numéro d'arrêt : 08/05050
Date de la décision : 25/06/2009

Références :

Cour d'appel de Douai 22, arrêt n°08/05050 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2009-06-25;08.05050 ?
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