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15/11/2007 | FRANCE | N°05/02082

France | France, Cour d'appel de colmar, Ct0202, 15 novembre 2007, 05/02082


DEUXIÈME CHAMBRE CIVILESection A

MINUTE No 1004/07
Numéro d'inscription aurépertoire général : 2 A 05/02082

Copies exécutoires à :

Maître CROVISIER
La S.C.P. CAHN et ASSOCIES
Maîtres ROSENBLIEH,WELSCHINGER, WIESELet DUBOIS

Le 15 novembre 2007
COUR D'APPEL DE COLMAR
ARRET DU 15 novembre 2007
Décision déférée à la Cour : jugement du 18 mars 2005 du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de MULHOUSE

APPELANT et demandeur :

Le Syndicat de Copropriété LA RÉSIDENCE MARIGNYreprésenté par son syndic de copropriété la SOGIMayant son

siège social 9, rue FloraB.P. 314568063 MULHOUSE CEDEX

représenté par Maître CROVISIER, avocat à COLMARplaidant : Maître...

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILESection A

MINUTE No 1004/07
Numéro d'inscription aurépertoire général : 2 A 05/02082

Copies exécutoires à :

Maître CROVISIER
La S.C.P. CAHN et ASSOCIES
Maîtres ROSENBLIEH,WELSCHINGER, WIESELet DUBOIS

Le 15 novembre 2007
COUR D'APPEL DE COLMAR
ARRET DU 15 novembre 2007
Décision déférée à la Cour : jugement du 18 mars 2005 du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de MULHOUSE

APPELANT et demandeur :

Le Syndicat de Copropriété LA RÉSIDENCE MARIGNYreprésenté par son syndic de copropriété la SOGIMayant son siège social 9, rue FloraB.P. 314568063 MULHOUSE CEDEX

représenté par Maître CROVISIER, avocat à COLMARplaidant : Maître PAWLAS, avocat à MULHOUSE

INTIMÉES :

- défenderesse :
1 - La S.A. ELYO NORD ESTprise en la personne de son représentant légalayant son siège social 82, rue de la Hardt68400 RIEDISHEIM

représentée par la S.C.P. CAHN et ASSOCIES, avocats à COLMARplaidant : Maître GUERIN (Cabinet LONGUET), avocat à PARIS

- appelée en garantie :

2 - La C.A.M.B.T.P.prise en la personne de son représentant légalayant son siège social 5, rue Jacques Kablé67009 STRASBOURG CEDEX

représentée par Maîtres ROSENBLIEH, WELSCHINGER, WIESEL et DUBOIS, avocats à COLMAR

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 13 septembre 2007, en audience publique, devant la Cour composée de :
Michel WERL, Président de ChambreMartine CONTE, ConseillerIsabelle DIEPENBROEK, Conseillerqui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Corinne LAEMLE

ARRET :

- Contradictoire- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau Code de Procédure Civile.- signé par Michel WERL, Président et Corinne LAEMLE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Ouï Michel WERL, Président de Chambre en son rapport,

* **

Le Syndicat des Copropriétaires de la Résidence MARIGNY à MULHOUSE a confié à la Société DISTRICHALEUR aux droits de laquelle vient la S.A. ELYO NORD EST des travaux de remplacement des colonnes d'eau froide, eau chaude et recyclage d'eau chaude, dans l'immeuble situé 29 à 33 boulevard de l'Europe à MULHOUSE. Les travaux ont été achevés en 1985.
En raison de désordres ayant affecté le réseau des conduites d'eau installées par la Société ELYO NORD EST, ayant motivé de nombreuses interventions de cette entreprise, le Syndicat des Copropriétaires a assigné en 1998 la Société ELYO NORD EST devant le Juge des référés civils du Tribunal de grande instance de MULHOUSE aux fins de désignation d'un expert. Celui-ci a été désigné par ordonnance du 24 novembre 1998 et a déposé son rapport définitif en date du 25 octobre 2007, dont les conclusions, tout en mettant hors de cause le fabricant des conduites en cuivre, mettent en revanche en cause la Société ELYO NORD EST en raison "d'un mauvais respect des règles de l'art et d'un sous dimensionnement d'une partie du réseau".
Le Syndicat des Copropriétaires a donc assigné la S.A. ELYO NORD EST le 6 mai 2002 devant le Tribunal de grande instance de MULHOUSE, pour engager sa responsabilité sur le fondement des dispositions des articles 1792 et suivants du Code civil, le demandeur s'attachant à démontrer que le délai de la garantie décennale avait été interrompu par une reconnaissance explicite et non équivoque par l'entreprise de sa responsabilité dans les désordres dénoncés, et pour demander la condamnation de la Société ELYO NORD EST à lui payer une somme de 181.500 €, valorisée en fonction de l'évolution de l'indice du coût de la construction entre avril 2002 et la date du jugement, augmentée des intérêts légaux compter de cette décision.
La Société ELYO NORD EST s'est opposée à cette demande, a formé une demande reconventionnelle en paiement de factures et a appelé en garantie son assureur la C.A.M.B.T.P..

Par jugement prononcé le 18 mars 2005, le Tribunal de grande instance de MULHOUSE a déclaré prescrite l'action engagée par le Syndicat des Copropriétaires de la Résidence MARIGNY, l'a en conséquence débouté de ses prétentions et, statuant sur la demande reconventionnelle de la défenderesse, a condamné le Syndicat des Copropriétaires à payer à la Société ELYO NORD EST une somme de 14.452,41 €, ainsi que 2.500 € au titre des frais irrépétibles, et a constaté que l'appel en garantie de la C.A.M.B.T.P. était donc sans objet.

Pour se prononcer ainsi, le premier Juge, après avoir considéré que les travaux litigieux constituaient bien un ouvrage au sens de l'article 1792 du Code civil et fixé la date de réception tacite, "sans réserve alléguée ni justifiée", au 31 décembre 1985, ces deux points ne paraissant pas discutés, a constaté que l'assignation devant le Juge des référés est intervenue plus de dix ans après la réception des travaux.
Il a également écarté les moyens du demandeur tendant à soutenir que le délai de la prescription décennale avait été interrompu, considérant que les interventions aux fins de réparation de la Société ELYO NORD EST chargée de la maintenance de l'ouvrage, postérieurement à sa réception, étaient modestes et que le remboursement au syndicat demandeur d'une somme de 6.330 € (41.516,42 F), ne pouvaient être analysés comme une reconnaissance non équivoque de responsabilité, d'autant que la société défenderesse suspectait une défaillance du fabricant et fournisseur des conduites en cuivre, lesquelles étaient garanties pendant 30 ans.
Selon le premier Juge, l'analyse des correspondances entre les parties versées aux débats révèle une recherche constante de l'origine des désordres exclusive de toute acceptation de responsabilité de la Société ELYO NORD EST.
Le Tribunal a, sur la demande reconventionnelle tendant au paiement de factures émises entre 1996 et 2000 sur la base des bons de travaux dressés par les techniciens de la S.A. ELYO NORD EST approuvés en leur temps par le demandeur, constaté que les prestations mises en compte n'étaient pas contestées et que la défenderesse n'avait pas renoncé à réclamer le paiement de ses factures, un courrier du 11 décembre 1995 précisant que les avoirs annulant ces factures n'étaient émis qu'en raison de la garantie trentenaire sensée couvrir les installations en cause.

Par déclaration reçue le 15 avril 2005, le Syndicat des Copropriétaires de la Résidence MARIGNY a interjeté appel général contre ce jugement, intimant la S.A. ELYO NORD EST et la C.A.M.B.T.P.

Dans le dernier état de ses conclusions du 22 juin 2006, il demande à la Cour de :
Déclarer le Syndicat des Copropriétaires de la Résidence MARIGNY recevable et bien fondé en ses conclusions d'appel.
Infirmer le jugement attaqué et statuant à nouveau :
Dire et juger que le délai de la garantie décennale a été interrompu tant par la reconnaissance de responsabilité de la Société ELYO NORD EST que par l'exécution de travaux importants.
Dire et juger que la Société ELYO NORD EST est tenue de garantir le syndicat demandeur des conséquences dommageables de son intervention.

En conséquence,

Condamner la Société ELYO NORD EST à payer au Syndicat des Copropriétaires de la Résidence MARIGNY, sauf à parfaire, la somme de 181.500 € valorisée en fonction de l'évolution de l'indice du coût de la construction entre avril 2002 et la date du jugement à intervenir, montant augmenté des intérêts au taux légal à compter du jugement à intervenir.
Subsidiairement et en tant que de besoin :
Renvoyer le dossier à l'Expert Z... avec une mission complémentaire consistant à fournir au Tribunal les éléments nécessaires à un chiffrage précis et détaillé des travaux de remise en état à réaliser pour que la résidence dispose d'une installation conforme et en état, l'avance étant laissée à la charge d'ELYO NORD EST.
Débouter la Société ELYO NE de ses fins moyens et conclusions.
La condamner aux entiers dépens tant de première instance que d'appel.
La condamner à payer au SCR MARIGNY la somme de 3.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du NCPC.

Le Syndicat des Copropriétaires reprend son argumentation initiale, considérant notamment que la restitution par la S.A. ELYO NORD EST, le 11 décembre 1995, d'une somme de 41.516,42 F (ou 6.330 €) ne représentait pas un geste commercial mais caractérisait une reconnaissance explicite et non équivoque de sa responsabilité, le demandeur déduisant de ce fait ainsi que de correspondances échangées entre ces parties "qu'ELYO NORD EST assumait sans le dire clairement la garantie à laquelle elle se savait tenue."

L'appelant ajoute que l'importance des travaux de réparation "tout au long des années 1990 à 1995", représentant une cinquantaine d'interventions durant cette période, constituerait également la démonstration de sa reconnaissance de responsabilité, interruptive du délai de prescription.
La responsabilité de la Société ELYO NORD EST dans la survenance des désordres étant établie par l'expert judiciaire, du fait d'une erreur de conception de l'installation, elle doit supporter les conséquences pécuniaires de ces désordres qui sont généralisés et nécessitent une réfection complète de cette installation dont le coût est estimé, au vu des devis produits aux débats, à 181.500 €.
L'appelant demande enfin à la Cour de rejeter la demande reconventionnelle de la Société ELYO, estimant que celle-ci ne produit aucune facture correspondant aux interventions dont elle fait état, celles-ci étant de toute façon motivées par des désordres dont elle porte la responsabilité et auxquels elle n'a pas remédié par lesdites interventions.

Par ses dernières conclusions du 5 octobre 2006, la S.A. ELYO NORD EST demande à la Cour de :

Rejeter l'appel,
Confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris rendu le 18 mars 1995 par le Tribunal de grande instance de MULHOUSE,
Débouter le Syndicat de Copropriété de la Résidence MARIGNY de toutes ses fins, demandes, moyens et conclusions,
Le condamner au paiement des dépens des deux instances, y compris aux frais d'expertise, ainsi qu'au paiement d'une indemnité de procédure de 5.000 € par application de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile,
Subsidiairement,
En cas d'infirmation du jugement sur l'acquisition de la prescription décennale,
Juger que les vices de conception diagnostiqués par l'expert sont préexistants à l'intervention de réparation faite par ELYO sur une partie du réseau en 1985,
Juger que la Société ELYO ne saurait donc en être responsable en qualité de constructeur de l'installation,
Condamner la C.A.M.B.T.P. à garantir la Société ELYO intégralement de toute condamnation,
Juger que l'indemnisation des désordres ne saurait excéder 12.071 € H.T.,
Débouter le Syndicat de toutes demandes complémentaires,
Le condamner à régler à al Société ELYO 5.000 € au titre de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile, outre les dépens de première instance dont les frais d'expertise et les dépens d'appel.

La Société ELYO approuve le premier Juge en ce qu'il a dit que l'action du Syndicat des Copropriétaires était prescrite, l'intimée précisant que non seulement il n'y a jamais eu de reconnaissance expresse de responsabilité de sa part, mais encore qu'il ne peut être déduit aucune reconnaissance tacite et non équivoque du remboursement d'une somme de 6.329 € au titre d'interventions qu'elle a faites, un remboursement ne valant pas en tant que tel reconnaissance de responsabilité et ce remboursement n'ayant expressément visé que "les travaux sanitaires couverts par la garantie trentenaire". Au surplus les travaux effectués avant l'écoulement du délai de 10 ans n'étaient pas importants et ne révélaient aucune intention de procéder à la réparation de la totalité des ouvrages réalisés en 1985. Il n'y a donc pas eu interruption de la prescription décennale et celle-ci était acquise en 1995.

S'il devait être jugé que la prescription avait été interrompue, la S.A. ELYO NORD EST soutient que sa responsabilité ne peut être retenue dans la mesure où elle est intervenue en 1985 sur un réseau ancien et préexistant et que les vices de conception relevés par l'expert sont ceux du réseau d'origine, et ne peuvent donc lui être imputés. Quant à l'évaluation du préjudice, la S.A. ELYO NORD EST se base sur le rapport d'expertise judiciaire pour estimer qu'il peut être fixé à 12.071 € H.T..
Sur l'appel en garantie de la C.A.M.B.T.P. auprès de laquelle elle avait souscrit deux polices d'assurance couvrant sa responsabilité décennale, en 1982 et 1984, la Société ELYO soutient que l'interruption de la prescription de la garantie décennale entraîne la mise en jeu de l'assurance.

Par ses conclusions du 26 février 2007, la C.A.M.B.T.P. demande à la Cour de :

I. Sur la demande principale, constater que la forclusion décennale est acquise et confirmer en conséquence en toutes ses dispositions le jugement du Tribunal de grande instance de MULHOUSE du 18 mars 1995,
Condamner l'appelant aux dépens d'appel et au paiement de 2.500 € au titre de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile,
II. Sur l'appel en garantie, dire et juger que la Société ELYO NORD EST est forclose dans tous ses droits et moyens à l'encontre de la C.A.M.B.T.P.,

Dire et juger que la reconnaissance de la responsabilité par la Société ELYO NORD EST n'est pas opposable à la C.A.M.B.T.P.,

Constater que le rapport d'expertise judiciaire n'est pas opposable à la C.A.M.B.T.P.,
Condamner la Société ELYO NORD EST en tous les dépens nés de l'appel en garantie ainsi qu'au paiement d'une indemnité de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.

La C.A.M.B.T.P. approuve le Tribunal en ce qu'il a constaté la prescription de l'action du Syndicat des Copropriétaires, pour les motifs développés par le premier Juge, et développe sensiblement les mêmes moyens que la S.A. ELYO NORD EST sur ce point.

L'intimée adopte également la même position que son assurée, concernant la responsabilité de celle-ci et l'évaluation du préjudice.
Sur l'appel en garantie, elle souligne qu'elle n'a été assignée que le 10 février 2003, 18 ans après la réalisation des travaux, alors qu'elle n'avait jamais été attraite aux opérations d'expertise et que le rapport d'expertise ne lui est pas opposable. Elle oppose donc la forclusion décennale à l'appel en garantie de son assuré.
Elle précise en outre que seul l'un des contrats d'assurance souscrit par la S.A. ELYO NORD EST, le contrat Assurance Construction à effet du 1er janvier 1984 peut trouver à s'appliquer, mais faute d'avis du sinistre donné par l'assuré à l'assureur dans les dix jours au plus tard après connaissance du sinistre, la déchéance de la garantie est acquise par application des dispositions des conditions générales de la police d'assurance.

Vu l'ordonnance de clôture du 25 mai 2007 ;

Vu les conclusions susvisées, l'ensemble de la procédure et les pièces produites par les parties ;

EN CET ETAT :

Attendu qu'il n'est pas discuté par les parties que les travaux réalisés par la S.A. DISTRICHALEUR aux droits de laquelle vient la S.A. ELYO NORD EST constituent un ouvrage au sens de l'article 1792 du Code civil, et ont fait l'objet d'une réception tacite sans réserve à la date

fixée par le premier Juge, soit le 31 décembre 1985 ; que la garantie dont ce constructeur était éventuellement débiteur envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, pouvait donc être recherchée pendant un délai de dix ans à compter de cette réception, soit jusqu'au 31 décembre 1995, sauf interruption de ce délai décennal, par application de l'article 2270 du Code civil ;

Attendu en l'espèce qu'il est constant que l'assignation de la S.A. ELYO NORD EST devant le Juge des référés du Tribunal de grande instance de MULHOUSE aux fins de désignation d'un expert, est intervenue en 1998 alors que le délai susvisé était écoulé ; que le Syndicat des Copropriétaires de la Résidence MARIGNY soutient vainement que ledit délai a été interrompu avant le 31 décembre 1995 par la reconnaissance par la Société ELYO EST de sa responsabilité ; qu'il ressort en effet de l'échange des correspondances entre ces parties avant cette date, relatives aux désordres en litige (annexes 9 à 21 du demandeur et appelant) qu'à aucun moment la S.A. ELYO NORD EST n'a reconnu de quelque manière que ce soit sa responsabilité, la défenderesse exprimant d'abord son ignorance quant à l'origine des fuites survenues sur les colonnes d'eau chaude et froide, ainsi que ses recherches pour en déterminer l'origine, puis sa suspicion à l'égard du fournisseur des tubes en cuivre qui ont été utilisés pour le remplacement des colonnes, à savoir la S.A. NOZAL ; que la S.A. ELYO NORD EST s'exprimait en effet ainsi dans ses lettres au demandeur :

- "Nous sommes en train de rechercher l'origine exacte de ces fuites et ainsi les éventuels remèdes à y apporter"(lettre du 7 juin 1995).

- "Nous envoyons ce jour un courrier à la Société NOZAL pour élucider conjointement l'origine de ces fuites." (lettre du 31 juillet 1995).

- "Dès le 31 juillet 1995, nous avons entrepris des démarches auprès du fournisseur. Celles-ci n'ont à ce jour pas encore abouti de manière définitive."(lettre du 29 août 1995).

- "Nous envisageons de rechercher la responsabilité du fournisseur de tubes. Pour ce faire, j'ai transmis l'ensemble du dossier à notre service contentieux."(lettre du 25 octobre 1995).

Le syndic de la copropriété (SOGIM) relevait lui-même dans une lettre du 19 octobre 1995 adressée à la Société ELYO NORD EST : "la cause des fuites n'étant pas déterminée, rien n'interdit de soutenir que les fuites ne s'arrêteront pas", cette formulation confirmant que le demandeur était parfaitement conscient que la défenderesse n'avait jamais admis sa responsabilité ; que le syndic était au surplus destinataire d'une lettre du 30 octobre 1995 de la Société ELYO NORD EST qui lui communiquait la correspondance qu'elle avait adressée le 27 octobre 1995 à la Société NOZAL, dont les termes mettaient en cause sans ambiguïté la responsabilité de la Société NOZAL :
" ... veuillez trouver ci-joint ... une copie des factures que nous avons émises suite à nos multiples interventions en réparation des fuites résultant de la défaillance du matériel que vous nous avez fourni. La somme des deux factures ... correspond à ce jour, sous réserve, à l'évaluation du préjudice que nous subissons puisque le paiement fait l'objet de la part de l'utilisateur final d'une contestation motivée par ladite garantie trentenaire qui lui a été transférée....Nous vous mettons en demeure ... de nous communiquer les dispositions que vous entendez prendre aux fins de prévenir les défaillances futures." ;

Attendu qu'il ressort de ce qui précède que la S.A. ELYO NORD EST n'a jamais reconnu, au cours du délai décennal, sa responsabilité dans les désordres affectant l'ouvrage litigieux, qu'elle imputait au contraire à la seule défaillance du matériel fabriqué et fourni par la S.A. NOZAL, pour lequel celle-ci avait donné une garantie trentenaire ; que c'est dans ce contexte que la Société ELYO NORD EST a communiqué au syndic de la copropriété LA RÉSIDENCE MARIGNY, par lettre du 11 décembre 1995,

"- des avoirs annulant toutes les factures émises à ce jour visant les travaux sanitaires couverts par la garantie trentenaire,
- un chèque d'un montant de 41.516,42 F correspondant aux factures déjà payées." ;

Attendu que ces "avoirs" et ce chèque ne sauraient, sans dénaturation des faits et des termes des correspondances susvisées, être analysés comme une reconnaissance dépourvue de toute équivoque de sa responsabilité par la Société ELYO NORD EST, alors qu'ils correspondaient à un geste commercial de la défenderesse à l'égard de son client, ce qu'elle indique dans sa lettre du 27 octobre 1995 à la Société NOZAL en évoquant sa "bonne volonté", sans aucunement renoncer à la mise en cause de la responsabilité exclusive de cette dernière, débitrice de la garantie trentenaire, qu'elle met en demeure, dans la même lettre, de lui payer les factures de ses interventions sur les conduites d'eau ; que, dès lors, il ne peut être tiré du versement effectué le 11 décembre 1995, aucune reconnaissance de responsabilité de la S.A. ELYO NORD EST susceptible d'interrompre la prescription décennale ;

Attendu qu'aucune reconnaissance de cette nature ne peut en outre être tirée de "l'exécution de travaux importants" sur l'ouvrage litigieux, comme le soutient le Syndicat des Copropriétaires, alors qu'il n'est fait état que de modestes interventions qui, bien que répétées sur une période de cinq ans et dans une importante copropriété dans un immeuble de 13 étages, n'ont représenté qu'une dépense globale effective de 6.329,14 € (11.809 € avec les "avoirs") ; que ces travaux ont en outre été exécutés à titre onéreux par la Société ELYO NORD EST, à la charge du Syndicat des Copropriétaires dans un premier temps ou pour le compte de la Société NOZAL, mise en demeure par la défenderesse de régler ces montants dans les conditions qui ont été rappelées ci-dessus, lesquelles excluent toute admission non équivoque de sa responsabilité ;

Attendu qu'il résulte de tout ce qui précède que le demandeur ne peut se prévaloir d'une interruption du délai de garantie décennale par la reconnaissance volontaire de sa responsabilité par la Société ELYO NORD EST, et que la prescription était acquise depuis le 31 décembre 1995 lorsque le Syndicat des Copropriétaires de la Résidence MARIGNY a assigné en 1998 la défenderesse devant le Juge des référés du Tribunal de grande instance de MULHOUSE ; que le jugement entrepris sera en conséquence confirmé de ce chef ;

Attendu que cette décision sera également confirmée sur la demande reconventionnelle de la S.A. ELYO NORD EST, laquelle est justifiée par les bons de travaux produits aux débats, correspondant à l'ensemble des prestations mises en compte, dont l'exécution et le prix ne sont pas contestés par le Syndicat des Copropriétaires, prestations considérées au surplus comme "indispensables" par le demandeur ; que ce dernier ne peut utilement invoquer la responsabilité de la Société ELYO NORD EST comme "cause des interventions facturées" alors que cette responsabilité n'est pas reconnue ni établie sur l'action introduite par le demandeur, du fait de la prescription de celle-ci ainsi qu'il ressort des motifs développés dans le présent arrêt ;

Attendu que l'issue du litige conduit à dire que le Syndicat des Copropriétaires de la Résidence MARIGNY supportera les entiers dépens de l'instance d'appel et sera condamné à payer, au titre de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile, à la S.A. ELYO NORD EST une somme de 1.500 € et la même somme à la C.A.M.B.T.P. qu'elle a également intimée ;

PAR CES MOTIFS================

DÉCLARE l'appel recevable, mais mal fondé,
Le REJETTE,
CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
CONDAMNE le Syndicat des Copropriétaires de la Résidence MARIGNY aux entiers dépens de l'instance d'appel, ainsi qu'à payer 1.500 € (MILLE CINQ CENTS EUROS) à la S.A . ELYO NORD EST et 1.500 € (MILLE CINQ CENTS EUROS) à la C.A.M.B.T.P., au titre de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de colmar
Formation : Ct0202
Numéro d'arrêt : 05/02082
Date de la décision : 15/11/2007

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Mulhouse, 18 mars 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.colmar;arret;2007-11-15;05.02082 ?
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