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16/02/2017 | FRANCE | N°16/00947

France | France, Cour d'appel de chambéry, Chambre sociale, 16 février 2017, 16/00947


COUR D'APPEL DE CHAMBÉRY CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 16 FEVRIER 2017

RG : 16/ 00947 NH/ NC
Association ODELIA etc... C/ Fatima X...

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANNEMASSE en date du 29 Mars 2016, RG F 13/ 00349

APPELANTES :
Association ODELIA 96 boulevard Marius Vivier Merle 69423 LYON CEDEX 03 Association ODELIA (ETABLISSEMENT) 235 route des Collines Lieudit Le Reyret 74550 CERVENS

représentées par Me Cheraf MAHRI substitué par Me Mélisa SEMARI (ASSOCIATION MAHRI AVOCATS), avocats a

u barreau de LYON
INTIMEE ET APPELANTE INCIDENT :
Madame Fatima X......

représentée par Me ...

COUR D'APPEL DE CHAMBÉRY CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 16 FEVRIER 2017

RG : 16/ 00947 NH/ NC
Association ODELIA etc... C/ Fatima X...

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANNEMASSE en date du 29 Mars 2016, RG F 13/ 00349

APPELANTES :
Association ODELIA 96 boulevard Marius Vivier Merle 69423 LYON CEDEX 03 Association ODELIA (ETABLISSEMENT) 235 route des Collines Lieudit Le Reyret 74550 CERVENS

représentées par Me Cheraf MAHRI substitué par Me Mélisa SEMARI (ASSOCIATION MAHRI AVOCATS), avocats au barreau de LYON
INTIMEE ET APPELANTE INCIDENT :
Madame Fatima X......

représentée par Me Jérôme LUCE (SCP SCP MERMET et ASSOCIES), avocat au barreau de THONON-LES-BAINS
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 17 Janvier 2017 en audience publique devant la Cour composée de : Madame Claudine FOURCADE, Président, Madame Nathalie HACQUARD, Conseiller qui s'est chargée du rapport Madame Anne DE REGO, Conseiller qui en ont délibéré Greffier lors des débats : Madame Nelly CHAILLEY,

********
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Fatima X...a été embauchée le 14 janvier 2004 par la société PEILLEX ET FILS en qualité d'aide soignante à temps partiel puis à temps plein à compter du 1er février 2004 ;
Le 20 avril 2006 elle a été victime d'un accident du travail et a été reconnue travailleur handicapé le 23 novembre 2006 ;
En septembre 2007, son contrat de travail a été transféré à l'association ODELIA dans le cadre de la reprise de la société PEILLEX ET FILS ;
Le 1er mars 2012, madame X...a été placée en arrêt de travail suite à une rechute de son accident du travail ; le médecin du travail la déclarait inapte temporairement le 30 mars 2012 ; puis indiquait le 16 avril 2012 qu'il n'existait " pas de contre indication à la reprise dans un poste aménagé, apte à un poste à l'orangerie inapte charges lourdes " ; il confirmait cet avis le 27 avril en précisant qu'il devait revoir madame X...le 11 mai pour la deuxième visite ; à cette date, le médecin du travail a conclu à l'inaptitude à tout poste dans l'entreprise ;
Le 7 novembre 2012, après un premier refus, l'inspecteur du travail a autorisé le licenciement de madame X..., déléguée du personnel et membre du comité d'entreprise, pour inaptitude physique et le licenciement est intervenu le 14 novembre 2012 ;
Le 3 octobre 2013, madame X...a saisi le conseil de prud'hommes d'Annemasse de la contestation de son licenciement ;
Par jugement du 9 septembre 2014, le conseil de prud'hommes a ordonné un sursis à statuer dans l'attente de la décision du tribunal administratif saisi d'une requête en annulation de l'autorisation de licenciement ;
Le 1er juin 2015, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'autorisation de licenciement accordée par l'inspecteur du travail ;

Par jugement en date du 29 mars 2016, le conseil de prud'hommes a :- dit que le conseil de prud'hommes est compétent pour apprécier la cause réelle et sérieuse du licenciement,- dit que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse,- fixé la rémunération brute mensuelle de madame X...à 1772, 76 euros,- condamné l'association ODELIA à payer à madame X...: * 14182 euros soit 8 mois de salaire à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, * 11566 euros au titre du préjudice matériel résultant de l'annulation de la décision administrative et à verser aux organismes sociaux les charges correspondantes, * 100 euros au titre du préjudice moral, * 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,- débouté madame X...de sa demande au titre du complément de l'indemnité de préavis,- débouté ODELIA de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,- condamné ODELIA aux dépens,- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire autre que de droit,- fait courir les intérêts au taux légal sur les créances ayant un caractère de salaire, à compter du 3 octobre 2013 ;

La décision a été notifiée aux parties par lettres recommandées avec demande d'accusé de réception le 30 mars 2016 ;

Par lettre recommandée en date du 29 avril 2016, l'association ODELIA a interjeté appel de la décision en sa globalité ;

Elle demande à la cour de :- infirmer la décision déférée en ce qu'elle a dit que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse et a alloué des dommages et intérêts à ce titre,- infirmer le jugement en ce qu'il a accordé à madame X...des dommages et intérêts au titre de son préjudice moral,- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté madame X...de sa demande de doublement de l'indemnité de préavis,- condamner madame X...à lui payer la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

Elle fait valoir :- que le conseil de prud'hommes a à bon droit retenu sa compétence pour apprécier la cause réelle et sérieuse du licenciement qui ne résulte pas en soi de l'annulation de la décision de licenciement dès lors que le juge administratif ne s'est pas prononcé sur les faits invoqués ; qu'en l'espèce l'annulation est fondée sur le non respect de la procédure de consultation du comité d'entreprise ce qui ne constitue qu'un vice de procédure et non une garantie du caractère réel et sérieux du licenciement, ainsi que le retenait d'ailleurs madame X...dans son mémoire devant le tribunal administratif ;- que le licenciement ne peut être déclaré nul en l'absence prétendue de deuxième visite médicale dès lors que le 27 avril le médecin du travail a retenu qu'il devait revoir madame X...pour deuxième visite " si pas de reclassement " et qu'il a conclu à l'inaptitude précisément à l'occasion de cette deuxième visite, dans le respect des préconisations de l'article R4624-31 du code du travail ;- que l'obligation de reclassement a été respectée ; qu'elle a à cet égard pris en compte les préconisations du médecin du travail dont elle s'est rapprochée pour obtenir des indications sur un possible reclassement oralement puis par écrit sur prescription de l'inspection du travail, les préconisations du médecin du travail étant alors les mêmes et ne nécessitant donc pas la reprise de tout le processus de recherche de reclassement déjà initiée ;- que les délégués du personnel ont été consultés et que l'avis du 13 septembre 2012 ne fait qu'acter celui du 11 juin 2012, survenu avant l'engagement de la procédure ;- que la recherche de reclassement a été opérée au sein des trois établissements pour personnes âgées, des résidences de retraite avec services et de la résidence hôtelière du mouvement ODELIA et s'est avéré impossible compte tenu des qualifications de la salariée et des restrictions médicales ; que la recherche a également été menée vainement au sein des autres sociétés du mouvement ;- subsidiairement que madame X...ne justifie pas de son préjudice et a retrouvé un emploi mieux rémunéré en septembre 2014 ;- que le doublement de l'indemnité de préavis qui bénéficie au salarié handicapé, est exclu lorsque le licenciement est prononcé pour inaptitude comme en l'espèce ;

Madame X...demande à la cour de :- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a-dit que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse,- fixé la rémunération brute mensuelle à 1772, 76 euros,- condamné l'association ODELIA à lui payer : * 14182 euros soit 8 mois de salaire à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, * 11566 euros au titre du préjudice matériel résultant de l'annulation de la décision administrative, * 100 euros au titre du préjudice moral, * 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,- condamné ODELIA aux dépens,- fait courir les intérêts au taux légal sur les créances ayant un caractère de salaire, à compter du 3 octobre 2013,- le réformer pour le surplus,- dire et juger que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse du fait de l'annulation de l'autorisation par le tribunal administratif de Grenoble,- dire et juger que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse du fait de l'absence d'étude du poste par le médecin du travail, de l'absence d'avis des délégués du personnel et de la violation de l'obligation de reclassement,- très subsidiairement, dire le licenciement nul en l'absence d'une seconde visite médicale d'inaptitude,- condamner ODELIA à lui verser : * une indemnité complémentaire pour licenciement sans cause réelle et sérieuse de 28418 euros ou encore une indemnité pour licenciement nul de 42000 euros, * une indemnité complémentaire de 4900 euros au titre du préjudice moral résultant de l'annulation de l'autorisation de licenciement, * un complément de préavis de 1772, 76 euros bruts outre 177, 27 euros bruts au titre des congés payés afférents, * une indemnité de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,- condamner ODELIA aux dépens ;

Sur son préjudice moral, elle fait valoir qu'il est constitué par les frais de procédure engagés, l'angoisse générée par cette procédure et la privation de chance d'obtenir une augmentation ;
Sur le défaut de cause réelle et sérieuse du licenciement, elle soutient :- qu'il résulte à titre principal de l'annulation de l'autorisation administrative par le tribunal administratif de Grenoble qui se fonde sur le non respect des dispositions relatives à la consultation du comité d'entreprise qui constitue un motif de légalité interne et non externe et ne permet donc pas au juge judiciaire d'apprécier de nouveau le caractère réel et sérieux du motif de licenciement ;- subsidiairement, que l'employeur n'a pas respecté ses obligations telles que définies par l'article L1226-10 du code du travail en ne sollicitant pas du médecin du travail une étude du poste et un avis sur son aptitude à bénéficier d'une formation destinée à lui proposer un poste adapté, en ne recueillant pas l'avis des délégués du personnel sur le reclassement avant d'engager la procédure de licenciement et en ne procédant pas à une recherche de reclassement dans tous les établissements de l'association ni toutes les sociétés du groupe ou du mouvement ;- que la sanction du licenciement sans cause réelle et sérieuse est égale au minimum à 12 mois de salaire et que l'équivalent de 24 mois de salaire correspond au préjudice qu'elle a subi ;- que le doublement de l'indemnité de préavis est dû si le licenciement pour inaptitude est considéré comme étant dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Très subsidiairement, elle soutient que l'avis d'aptitude avec réserves émis le 27 avril 2012 ne peut constituer le premier avis prévu par l'article R4624-31 du code du travail dès lors qu'il n'est pas un avis d'inaptitude ;
Pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier et développées lors de l'audience des débats ;

SUR QUOI

Les dispositions du jugement concernant d'une part la compétence de la juridiction prud'homale pour statuer sur le bien fondé du licenciement au moment de son prononcé, d'autre part l'indemnisation du préjudice matériel tiré de l'annulation de l'autorisation de licencier, ne sont pas contestées et seront donc confirmées ;

- Sur l'indemnisation du préjudice matériel

L'annulation de l'autorisation de licenciement ouvre droit pour la salariée au paiement d'une indemnité correspondant à la totalité du préjudice subi entre le licenciement et sa réintégration et, en l'absence de réintégration, entre le licenciement et l'expiration du délai de deux mois suivant la date à laquelle la décision d'annulation est devenue définitive ;
Il n'existe pas de discussion sur le montant du préjudice matériel pour les années 2012 et 2013 ;
En 2014, il convient de retenir que la salariée aurait dû percevoir un salaire net de 1316, 75 euros sur lequel s'accordent les parties, qu'elle a recommencé à travailler à compter du 1er août 2014 ainsi que l'atteste l'employeur One Placement et que, compte tenu de ses conclusions, son salaire est à compter de cette date, supérieur à ce qu'elle aurait dû percevoir, l'indemnité due concerne les 7 premiers mois de l'année ; elle aurait dû percevoir pour 7 mois 9217, 25 euros nets, et elle a obtenu de Pôle Emploi, la somme de 8203, 86 euros nets ; il lui est donc dû pour 2014, la somme de 1013, 39 euros ;
L'indemnité totale au titre du préjudice matériel doit donc être fixée au montant retenu par l'association ODELIA dans ses dernières écritures soit 10453, 34 euros et dans l'hypothèse où le jugement de première instance fixant cette indemnité à 11566 euros aurait été exécuté, madame X...devrait restituer à l'association ODELIA la somme de 1112, 66 euros le cas échéant par compensation ;

- Sur l'indemnisation du préjudice moral

Si la totalité du préjudice subi doit être indemnisé, madame X...ne justifie pas du préjudice moral qu'elle invoque ; il apparaît qu'en tout état de cause elle ne pouvait espérer poursuivre à son poste compte tenu de son inaptitude ni en conséquence y obtenir une progression ; elle ne peut davantage arguer des difficultés à obtenir un emploi dès lors qu'il apparaît au contraire qu'elle a pu retrouver un nouvel emploi mieux rémunéré ; elle ne justifie pas de l'angoisse invoquée et ne peut obtenir au titre du préjudice moral l'indemnisation de frais pris en compte par la décision administrative et relèvent, devant les juridictions prud'homales, de l'article 700 du code de procédure civile ;
Elle sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral ;

- Sur le caractère réel et sérieux du licenciement

Si le juge administratif annule une décision de l'autorité administrative autorisant un licenciement, la rupture du contrat de travail, si elle a été prononcée, est nulle, sans qu'il y ait lieu de distinguer si l'annulation a été décidée au regard de la violation d'une règle de forme ou par appréciation de la réalité du motif du licenciement ;
Outre l'indemnisation du préjudice résultant de l'annulation de l'autorisation administrative de licenciement, le salarié non réintégré peut prétendre à la réparation du préjudice né de la rupture du contrat de travail s'il établit que son licenciement, était, au moment où il a été prononcé, nul ou encore dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Madame X...soutient d'abord que le licenciement serait dépourvu de cause réelle et sérieuse au motif de l'annulation de l'autorisation de licenciement ;
Si l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement ne résulte pas, en soi, de l'annulation de l'autorisation, la décision du juge administratif s'impose au juge judiciaire si le premier se livrant à un contrôle de légalité interne, s'est prononcé sur le caractère réel et sérieux du motif du licenciement de sorte qu'il convient d'examiner les motifs ayant amené le juge administratif à annuler la décision d'autorisation ;
Le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'autorisation de licenciement de madame X...accordée par l'inspecteur du travail, en retenant que la consultation du comité d'entreprise ne répondait pas aux exigences de l'article L2323-4 du code du travail dans la mesure où rien ne permettait de retenir que le comité avait été destinataire de pièces lui permettant d'émettre son avis en toute connaissance de cause ; le tribunal administratif retenait en outre que la circonstance qu'une réunion ait été organisée le 2 juillet 2012 dans le cadre de la première procédure de licenciement était inopérante et ce d'autant que rien n'établissait que le comité avait alors été destinataire de toutes les informations nécessaires ;
L'article L2421-3 du code du travail impose la consultation du comité d'entreprise sur le licenciement envisagé d'un délégué du personnel ou d'un membre du comité d'entreprise et le tribunal administratif annule l'autorisation de licenciement au motif que le comité d'entreprise n'a pas été mis à même de donner un avis éclairé ;
Cet article se situe dans le titre deuxième du livre IV de la deuxième partie du code du travail, ayant trait aux " procédures d'autorisation applicables à la rupture ou au transfert du contrat " des salariés protégés et ainsi les dispositions ayant fondé l'annulation concernent la procédure de licenciement du salarié protégé et non pas les motifs du licenciement ni sa validité au fond, le tribunal administratif ne s'étant à cet égard pas penché sur les avis du médecin du travail, sur la consultation des délégués du personnel ou sur le reclassement et s'étant limité à un contrôle de légalité externe suffisant à annuler la décision qui lui était déférée ;
Il ne peut donc être déduit de la seule annulation de l'autorisation de licencier donnée par l'inspecteur du travail, le défaut de cause réelle et sérieuse du licenciement au moment de sa notification ;
L'article L1226-10 du code du travail prévoit que " lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. Dans les entreprises d'au moins 50 salariés, le médecin du travail formule également des indications sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation destinée à lui proposer un poste adapté. L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de poste ou aménagement du temps de travail. " ;
L'article L1226-12 précise que " lorsque l'employeur est dans l'impossibilité de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement. L'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L1226-10, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions. " ;
La consultation des délégués du personnel doit porter sur la recherche de reclassement, permettre l'expression d'un avis éclairé et être antérieure à l'engagement de la procédure de licenciement ;
En l'espèce, l'association ODELIA soutient que les délégués du personnel ont bien été consultés avant l'engagement de la procédure dès lors qu'ils l'ont été le 11 juin 2012, le procès-verbal du 13 septembre 2012 ne venant " qu'acter par écrit l'avis des délégués du personnel recueilli le 11 juin 2012 " ;
Le procès-verbal du 11 juin 2012 n'a pas trait spécialement à la consultation des délégués du personnel mais correspond à la " rencontre mensuelle direction-délégués du personnel " ; la situation de madame X...est évoquée en rubrique " divers ", témoignant de ce qu'elle n'avait pas été portée à l'ordre du jour préalablement et que les délégués du personnel n'ont donc pas été informés avant cette réunion, de l'ensemble des éléments de situation de leur collègue ; le procès-verbal de borne par ailleurs à indiquer que " l'employeur a soumis aux délégués du personnel son impossibilité de reclasser Mme X...Fatima suite à la notification d'inaptitude définitive pour maladie professionnelle à tout poste dans l'entreprise, prononcée par le médecin du travail " ; il ne fait état d'aucun avis des délégués du personnel ni même d'une quelconque consultation mais évoque une simple information non pas sur le reclassement, les préconisations et avis du médecin du travail mais sur une impossibilité déjà constatée par l'employeur avant toute consultation ; il ne répond dès lors aucunement aux exigences légales ;
L'inspecteur du travail motive à cet égard son refus d'autorisation de licenciement daté du 3 août 2012 notamment par l'absence d'avis émis par les délégués du personnel ;
Dès lors cet avis ne saurait être considéré comme valant consultation des délégués du personnel au sens de l'article L1226-10 du code du travail et partant, le seul fait de " l'acter par écrit " ne remplit pas davantage les conditions de ce texte ;
Le procès-verbal de la rencontre entre la direction et les délégués du personnel en date du 13 septembre 2012 ne comporte aucun horaire ; il apparaît cependant que le même jour, le comité d'entreprise était convoqué et s'est réuni à partir de 9 heures selon le procès-verbal versé aux débats, comité auquel participait monsieur Y..., représentant l'employeur, mesdames Z...et A..., représentant les salariés ; ce comité a procédé à l'audition de madame X...au cours d'une " deuxième phase " étant observé que la salariée était conviée pour 10 heures à la dite réunion ; mesdames Z...et A... et sont les délégués du personnel dont le procès-verbal du 13 septembre indique qu'elles ont été consultées par monsieur Y..., représentant la direction ; compte tenu de la réunion du comité d'entreprise entre 9 heures et au moins 10h15, la consultation des délégués du personnel, distincte de celle du comité, n'a pu intervenir que postérieurement ; or le même jour, madame X...faisait l'objet d'un entretien préalable au licenciement pour lequel elle était convoquée à 9 heures 30 ; cet entretien s'est donc nécessairement tenu avant la consultation des délégués du personnel en violation des dispositions précitées ;
Dès lors et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres motifs invoqués par madame X..., il y a lieu de retenir que le licenciement au moment de son prononcé, était dépourvu de cause réelle et sérieuse et que la salariée est fondée à obtenir une indemnité qui ne peut être inférieure à 12 mois de salaire par application de l'article L1226-15 du code du travail, le salaire mensuel brut à retenir s'élevant à 1772, 75 euros ;
Compte tenu de son ancienneté, de son âge au moment du licenciement, du fait qu'elle a retrouvé un emploi mieux rémunéré à compter d'août 2014, il lui sera alloué la somme de 22000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Madame X...peut également prétendre à l'application des dispositions de l'article L5213-9 du code du travail dès lors qu'il est retenu que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et qu'il ne peut dès lors plus être tiré argument de ce qu'il aurait eu pour origine l'inaptitude de la salariée ; il lui sera alloué la somme de 1772, 75 euros bruts outre 177, 27 euros bruts au titre des congés payés afférents ;

- Sur les autres demandes

L'association ODELIA supportera la charge des dépens ; elle versera en outre à madame X...la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Confirme le jugement déféré en ce qu'il a :- dit qu'il était compétent pour apprécier la cause réelle et sérieuse du licenciement,- dit que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse,- fixé la rémunération brute mensuelle de madame X...à 1772, 76 euros,- débouté ODELIA de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,- condamné ODELIA aux dépens,- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire autre que de droit,- fait courir les intérêts au taux légal sur les créances ayant un caractère de salaire, à compter du 3 octobre 2013 ;

L'infirme pour le surplus ;
Statuant à nouveau sur les dispositions infirmées et y ajoutant :
Condamne l'association ODELIA à payer à Fatima X...:-10453, 34 euros nets au titre du préjudice matériel résultant de l'annulation du licenciement,-1772, 75 euros bruts au titre du complément de l'indemnité de préavis,-177, 27 euros bruts au titre des congés payés afférents à ce complément,-22. 000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Déboute Fatima X...de sa demande au titre du préjudice moral ;
Condamne l'association ODELIA à payer à Fatima X...la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne l'association ODELIA aux entiers dépens.
Ainsi prononcé le 16 Février 2017 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Claudine FOURCADE, Présidente, et Madame Nelly CHAILLEY, Greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de chambéry
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16/00947
Date de la décision : 16/02/2017
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.chambery;arret;2017-02-16;16.00947 ?
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