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05/05/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006951271

France | France, Cour d'appel de bourges, Chambre sociale, 05 mai 2006, JURITEXT000006951271


Vu l'arrêt du 17 JUIN 2005,

Les parties ont développé oralement à l'audience leurs conclusions écrites au détail desquelles il est renvoyé et dont il résulte en substance ce qui suit :

Monsieur X... fait valoir que son licenciement est l'aboutissement du harcèlement moral dont il est l'objet depuis plusieurs années, né d'un contentieux avec Monsieur Y... qui désirait le pousser à la démission pour supprimer un poste à doublon, ce qu'il n'avait pas pu obtenir par voie transactionnelle. Il ressort notamment de l'envoi de sept lettres recommandées depuis 1998, dont

cinq en 2002.

Il sollicite au titre de l'exécution du contrat de travail...

Vu l'arrêt du 17 JUIN 2005,

Les parties ont développé oralement à l'audience leurs conclusions écrites au détail desquelles il est renvoyé et dont il résulte en substance ce qui suit :

Monsieur X... fait valoir que son licenciement est l'aboutissement du harcèlement moral dont il est l'objet depuis plusieurs années, né d'un contentieux avec Monsieur Y... qui désirait le pousser à la démission pour supprimer un poste à doublon, ce qu'il n'avait pas pu obtenir par voie transactionnelle. Il ressort notamment de l'envoi de sept lettres recommandées depuis 1998, dont cinq en 2002.

Il sollicite au titre de l'exécution du contrat de travail :

- 239 ç au titre de deux jours de congés pris les 6 et 7 MAI 2002,

- 717 ç au titre d'un reliquat de six jours de congés RTT sur l'année 200-2001,

- 1 529 ç au titre de l'intéressement 2002,

- 243 ç au titre de la participation 2002, avec intérêts au taux légal à compter du dépôt de la demande.

Il demande que son licenciement soit déclaré dépourvu de cause réelle et sérieuse et que la SA INDRAERO SIREN soit condamnée à lui verser :

- 21 499, 98 ç à titre d'indemnité de préavis et 2 149, 99 ç au titre des congés payés,

- 2 389 ç en remboursement des salaires des 18 jours de mise à pied, avec intérêts au taux légal à compter de la demande,

- 39 560 ç à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 130 000 ç à titre de dommages-intérêts,

- 2 000 ç sur le fondement de l'article 700 du NCPC.

La SA INDRAERO SIREN réplique, d'abord, que les créances de participation ne ressortent pas de la compétence des conseils de

prud'hommes mais de celle des tribunaux judiciaires, conformément aux dispositions de l'article L 442-13 du Code du travail. Elle soutient, ensuite, que Monsieur X... n'a pas été autorisé à s'absenter les 6 et 7 MAI 2002 et que ces journées ne lui sont dues ni au titre des congés payés, ni au titre de l'ARTT.

Sur le licenciement, elle objecte que les faits qualifiés de fautifs sont matériellement constitués et qu'ils ont été justement qualifiés de faute grave;

Le harcèlement invoqué par le salarié n'est pas caractérisé et sa plainte a du reste été classée sans suite.

L'intimée conclut en conséquence à la confirmation du jugement et sollicite l'allocation de 3 000 ç sur le fondement de l'article 700 du NCPC.

SUR CE

1. Sur les demandes liées à l'exécution du contrat de travail

- Sur la participation et l'intéressement au titre de l'année 2002-2003

Attendu qu'à juste titre, par application des articles L 511-1 et L 442-13 du Code du travail, le premier juge s'est déclaré incompétent pour juger la demande portant sur la créance de participation ;

Attendu qu'il est cependant compétent pour statuer sur le litige portant sur l'intéressement ;

que la société relève exactement que le calcul de Monsieur X... pour obtenir un rappel de prime 2002 se fonde sur l'intéressement de 2003 au regard de l'évolution en pourcentage évoquée lors de la réunion du comité d'entreprise du 14 AVRIL 2004 ;

que ce mode de calcul ne saurait prospérer ;

- Sur les congés payés pour la période 2000-2001

Attendu que le salarié expose que, sur instructions de son supérieur,

il a bénéficié de 6 jours de RTT qui ont été en réalité transformés en jours de congés payés par le service du personnel et qu'il reste donc créditeur de ces congés payés non pris ;

qu'il produit une autorisation d'absence pour prendre 6 jours de RTT 2000 signée le 15 NOVEMBRE 2000 par Monsieur Y..., avec la mention OK ;

Attendu que l'employeur objecte que l'intéressé expose lui-même dans ses conclusions avoir été rempli de ses droits, ce qui ressort de ses bulletins de salaire, et qu'en tout état de cause il ne saurait cumuler salaire et indemnité compensatrice de congés payés non pris ; Attendu que l'autorisation de prendre 6 jours de RTT produite par Monsieur X... porte sur la période du 4 au 11 DECEMBRE 2000 et que le bulletin de paie de ce mois comporte la mention : "indemnité 48 heures de récupération" pour un montant de 5 258, 40 F ;

que ce même document pris en sa 2ème page mentionne "congés pris le 1/12 et du 26 au 30/12", que figure en 1ère page une "indemnité de congés payés antérieurs" d'une durée de 6 jours pour un montant de 4 682, 44 F ;

Attendu dans ces conditions que Monsieur X... a été rempli de ses droits ;

- Sur le rappel de rémunération au titre de deux jours d'absence les 6 et 7 MAI 2002

Attendu que Monsieur X... considère avoir suivi la procédure de demande d'autorisation d'absence pour ces deux jours et que, faute de réponse, il a estimé avoir obtenu l'autorisation sollicitée ;

que la société réplique qu'il a en réalité décidé de passer outre l'absence d'autorisation, et produit lui-même le bon retourné non signé, ce qui a justifié la retenue critiquée ;

Attendu que la note de service no 1274 prévoit que toute demande

d'autorisation d'absence est soumise à l'accord préalable de la hiérarchie et doit faire l'objet d'un écrit, que tout bon refusé par la hiérarchie doit porter en clair le motif du refus ;

que dans ces conditions, peu important qu'il s'agisse de jours de RTT ou de congés payés, l'absence de réponse n'autorisait pas Monsieur X... à prendre ses congés de sa propre initiative, d'autant qu'il savait pour l'avoir mentionné dans son courrier de contestation du 31 MAI 2002, que son supérieur avait émis des réserves ;

2. Sur le licenciement

Attendu que la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, retient pour griefs le refus de participer à l'entretien annuel et celui d'exécuter les instructions écrites du supérieur hiérarchique, qualifiés d'actes d'insubordination répétés nuisant à la bonne marche du service et rendant impossible le maintien dans la société, caractérisant la faute grave ;

- Sur le refus de participer à l'entretien annuel

Attendu qu'il est constant que Monsieur X... a refusé de participer à cet entretien ;

Attendu que le salarié expose qu'il avait déjà refusé auparavant de se rendre à cet entretien sans être sanctionné, qu'il faisait en réalité l'objet de pressions, ainsi que son épouse, pour quitter la société contre indemnités, qu'il ignorait le caractère obligatoire de cet entretien, le seul document en faisant état étant le compte rendu du CE diffusé le 9 AVRIL 2003, postérieur à sa mise à pied ; qu'il a finalement accepté le 24 MARS 2003 l'entretien si le harcèlement de Monsieur Y... cessait mais qu'il a été convoqué précipitamment le 27 MARS à l'entretien préalable avec mise à pied conservatoire ;

que l'employeur réplique que ces entretiens s'inscrivaient dans le cadre de la certification ISO 9001 version 2000 et se trouvaient par ailleurs prévus par l'article 6 de la convention collective

applicable ;

Attendu que Monsieur X... a d'abord été convoqué le 4 FEVRIER 2003 mais a refusé de se rendre à l'entretien ;

que Monsieur Z... a noté sur le compte rendu "Monsieur X... refuse l'entretien, en 2003 comme pour 2001 et 2002, malgré plusieurs relances" ;

qu'il a fait part de son désaccord par lettre recommandée avec accusé de réception reçue par le salarié le 19 FEVRIER 2003 ;

que ce courrier a été suivi, dans les mêmes formes, d'une mise en demeure de Monsieur Y... à se rendre à un nouveau rendez-vous le 24 MARS suivant à 15 heures, reçue le 21 MARS 2003, et signalant que son supérieur a "rendu l'entretien annuel obligatoire pour tous les cadres depuis cette année étant donné, notamment, des nouvelles normes ISO 9001 version 2000" ;

que le CE avait été régulièrement informé le 18 MARS 2003 ;

que dans ces conditions Monsieur X..., qui ne justifie aucunement avoir ensuite obtempéré, et qui d'ailleurs maintient que son refus était légitime, a bien commis un acte d'insubordination caractérisé; qu'aucun élément ne permet de mettre en doute la nécessité de cet entretien relevant du pouvoir de direction de l'entreprise et envisagé par la convention collective ;

que ce refus ne se trouve pas justifié par l'absence de sanction les années précédentes, Monsieur Y... ayant bien précisé que cet entretien présentait un caractère obligatoire pour les cadres "depuis cette année" ;

que le salarié estime être en réalité victime d'un harcèlement moral mais ne produit que ses propres courriers, un compte rendu de réunion du CE faisant état de pressions sur "un cadre" sans autre précision et une attestation d'un autre salarié l'assistant pour rappeler qu'il

lui avait offert un départ négocié resté sans suite en raison des sommes en jeu ;

que Monsieur X... fait notamment état d'une proposition de mutation sur un autre poste qu'il a refusée, refus dont sa direction a pris acte dans son courrier en réponse, ce qui ne peut constituer un acte de harcèlement ;

- Sur le refus d'exécuter les instructions écrites

Attendu que l'employeur précise à ce titre que l'intéressé, à qui avaient été confiés par Monsieur A... (responsable du département sous traitance, sous les ordres de Monsieur Z... responsable de l'unité achats sous traitance), le 28 JANVIER 2003 quatre dossiers, dont trois devaient être traités dans un délai précis, n'a pas respecté les consignes et a obligé Monsieur A... à le signaler à la direction le 10 MARS 2003 et à pallier ses défaillances, ce qui a suscité des retards dans le traitement de certains ordres de fabrication ou dans le règlement de dossiers majeurs définis en terme d'objectifs annuels ;

que Monsieur X... objecte avoir découvert ce grief le jour de l'entretien préalable alors que Monsieur A... a adressé des lettres l'accusant datées du 5 FEVRIER et du 10 MARS 2003 à Monsieur Z..., son propre supérieur hiérarchique ; qu'il considère que Monsieur A..., en difficultés, a en réalité voulu transférer sur lui une partie de son travail ; qu'à compter du 29 JANVIER 2003, son collègue ne lui a plus adressé la parole ; que Monsieur Y... a voulu vider son poste de son intérêt en donnant à Monsieur A... une partie importante de son travail puis qu'il a ensuite été accusé de ne pas exécuter ses instructions écrites ; qu'il conteste ce dernier point ; que Monsieur A... ne peut affirmer qu'il a dû rattraper son travail dans la mesure où il a bénéficié d'un congé de

paternité de quinze jours en même temps ; que par ailleurs les délais impartis pour exécuter le travail confié n'étaient pas réalistes ;

Attendu que l'employeur produit la demande de traitement des quatre dossiers concernés en date du 28 JANVIER ;

que le dossier 223, à traiter la semaine 5 portant sur la création de contrats et de fichiers pour le lancement d'une commande, soit avec un délai d'une semaine, a été en réalité traité par Monsieur A... le 10 JANVIER 2003, avant son départ en congé de paternité débutant le 18 FEVRIER ;

qu'il en est de même pour le dossier 232 ;

que Monsieur A... a écrit le 5 FEVRIER 2003 à ses supérieurs pour signaler le refus de Monsieur X... de faire le travail demandé, signalement réitéré le 10 MARS suivant ;

que les pièces produites par Monsieur X... et ses explications contradictoires ne sont pas de nature à contredire les affirmations de l'employeur étayées ainsi qu'il a été rappelé ;

que l'insubordination, alors que Monsieur A... figure comme "responsable sous-traitance" sur ses fiches de paie, étant rappelé que Monsieur X... était en dernier lieu cadre du service achats-sous traitance, le chef de service étant Monsieur Z..., est caractérisée;

Attendu qu'en définitive Monsieur X... s'est bien rendu coupable d'actes réitérés d'insubordination, caractérisant une faute grave;

3. Sur le harcèlement moral

Attendu qu'il résulte des articles L 122-49 et suivants du Code du travail qu'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de

compromettre son avenir professionnel ;

qu'il appartient au chef d'entreprise de prendre toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir ces agissements ;

qu'en cas de litige relatif à ceux-ci, dès lors que le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement, il incombe à la partie défenderesse, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;

que le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ;

Attendu en l'espèce que Monsieur X... dresse la liste des comportements de l'employeur de nature à caractériser un harcèlement, tant à l'égard de sa personne que de celle de son épouse, depuis JUIN 1998 ;

qu'il expose ainsi que son supérieur Monsieur Y... l'a évité en ne lui a adressant plus la parole, a fait la sourde oreille et a repoussé ses demandes d'entretien ;

qu'il l'a isolé et ne l'a plus convoqué aux réunions, tutoyant tous les cadres sauf lui, l'évinçant du parking cadres, recrutant un cadre pour le remplacer, lui interdisant de lire "les échos", omettant son nom d'un certain nombre de documents et réunions ;

qu'il a dégradé ses conditions de travail en refusant des congés sous de mauvais prétextes et en imposant des horaires injustifiés ;

qu'il a vidé son poste de son intérêt en supprimant des responsabilités sans raisons objectives ;

qu'il l'a poussé à la faute en organisant une surcharge de travail, en fixant des objectifs intenables et en donnant des instructions floues ;

Attendu qu'il produit au soutien de ses affirmations trois

attestations et des documents médicaux ;

Attendu que l'employeur oppose des avertissements et remontrances non contestables, une offre de promotion du 1er FEVRIER 2002 refusée, et conteste avoir commis des actes de harcèlement ;

Attendu que le salarié n'établit pas qu'il a été privé de sa place de stationnement "cadre", ni que son supérieur le mettait ostensiblement à l'écart notamment en le vouvoyant et en ne répondant pas à ses demandes d'entretien ;

qu'il n'établit pas davantage le refus de prise de congés sous de mauvais prétextes, ni les horaires injustifiés, ni la suppression de responsabilité sans raison non plus que la surcharge de travail pour le pousser à la faute ;

qu'à ce dernier égard, il convient de rappeler l'avenant à son contrat de travail 3 JANVIER 2001 auquel il a donné son accord ;

que l'employeur produit la liste de ses cadres dont le nombre conforte ses affirmations sur le fait que tous n'étaient pas convoqués en même temps à un séminaire ;

que les attestations produites par Monsieur X... rapportent qu'une partie du travail a été transférée et qu'il a été mis à l'écart mais ne citent aucun fait précis, daté et matériellement vérifiable;

que les documents médicaux reprennent les propos du salarié ou de son épouse ;

Attendu en définitive que les allégations de Monsieur X... ne sont pas justifiées ;

Attendu que le jugement sera donc intégralement confirmé ;

Attendu que Monsieur X..., qui succombe, supportera les dépens ;

que les demandes sur le fondement de l'article 700 du NCPC seront rejetées ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR

STATUANT publiquement et contradictoirement,

CONFIRME le jugement,

REJETTE les demandes plus amples ou contraires,

CONDAMNE Monsieur X... aux entiers dépens.

Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus,

En foi de quoi, la minute du présent arrêt a été signée par Madame VALLEE, Président, et Madame B..., Greffier. LE GREFFIER,

LE PRESIDENT, A. B... N. VALLEE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de bourges
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006951271
Date de la décision : 05/05/2006
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bourges;arret;2006-05-05;juritext000006951271 ?
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