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28/06/2018 | FRANCE | N°17/01895

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 1ère chambre civile, 28 juin 2018, 17/01895


COUR D'APPEL DE BORDEAUX





PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE





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ARRÊT DU : 28 JUIN 2018





(Rédacteur : Catherine BRISSET, conseiller)








N° de rôle : N° RG 17/01895











Yvain X...





c/





SA CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE AQUITAINE POITOU - CHARENTES























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Nature de la décision : AU FOND









































Grosse délivrée le :





aux avocats





Décision déférée à la cour : jugement rendu le 21 mars 2017 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX (chambre : 5°, RG : 14/06772) suivant déclaration d'appel du 24 mars 2017





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COUR D'APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 28 JUIN 2018

(Rédacteur : Catherine BRISSET, conseiller)

N° de rôle : N° RG 17/01895

Yvain X...

c/

SA CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE AQUITAINE POITOU - CHARENTES

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 21 mars 2017 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX (chambre : 5°, RG : 14/06772) suivant déclaration d'appel du 24 mars 2017

APPELANT :

Yvain X...

né le [...] à LA REOLE (33)

de nationalité française

demeurant [...]

représenté par Maître Benjamin Y..., avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

SA CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE AQUITAINE POITOU- CHARENTES, prise en la personne de son représentant légal domicilié [...]

représentée par Maître Benjamin Z... de la SCP AHBL AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 912 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 mai 2018 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Catherine BRISSET, conseiller, chargée du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de:

Michèle ESARTE, président,

Catherine COUDY, conseiller,

Catherine BRISSET, conseiller,

Greffier lors des débats : Véronique SAIGE

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

* * *

Selon offre du 6 juillet 2010, la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Aquitaine Poitou Charente (la Caisse d'Epargne ou la banque) a consenti à M. X... un prêt immobilier d'un montant de 159 700 euros au TEG de 4,48 % destiné à l'acquisition d'un terrain situé à [...]. Ce prêt était garanti par un cautionnement auquel a été substitué par avenant en la forme authentique du 26 avril 2012 une hypothèque conventionnelle.

Selon offre du 4 février 2012, ayant donné lieu à un acte authentique du 26 avril 2012, la même banque a consenti à M. X... un prêt immobilier d'un montant de 202000 euros au TEG de 5,04% destiné à la construction de la résidence principale de M. X... sur le terrain acquis à [...]. Il était stipulé une hypothèque conventionnelle.

Par acte d'huissier du 24 juin 2014, M. X... a fait assigner la banque en nullité du taux conventionnel pour chacun des deux prêts.

Par jugement du 21 mars 2017, le tribunal de grande instance de Bordeaux a débouté M. X... de ses demandes et l'a condamné au paiement de la somme de 1 500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le tribunal a considéré que le demandeur n'établissait pas que le TEG était affecté d'une erreur.

M. X... a relevé appel de la décision le 24 mars 2017.

Dans ses dernières écritures en date du 9 mai 2011, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens et prétentions, M. X... formule les demandes suivantes :

Déclarer M. Yvain X... recevable et bien fondé en son appel,

Y faisant droit,

Infirmer la décision déférée,

En conséquence,

Constater l'irrégularité du taux d'intérêts conventionnels des prêts du 6 juillet 2010 et du prêt du 4 février 2012 en ce que la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Aquitaine Poitou Charente a appliqué le diviseur 360,

Ce faisant, prononcer la nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels pour chacun des prêts,

Ordonner la restitution de la différence perçue entre les intérêts conventionnels et les

intérêts légaux à compter du jour de leur signature,

Condamner la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Aquitaine Poitou Charente à communiquer à M. Yvain X... un nouveau tableau d'amortissement pour chacun des prêts intégrant les intérêts légaux au jour de la souscription des contrats, sous astreinte de 50 euros par jour de retard deux semaines après la signification de la décision,

Condamner Caisse d'Epargne et de Prévoyance Aquitaine Poitou Charente, outre aux entiers dépens, à la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il fait valoir que le tribunal n'a pas tiré les conséquences de ses constatations alors qu'il résulte des stipulations du prêt que la banque a bien appliqué un diviseur 360 prohibé par les dispositions de l'article R 313-1 du code de la consommation et son annexe. Il ajoute que la pratique de l'année dite lombarde contrevient aux objectifs de transparence et de cohérence fixés par le législateur. Il invoque non pas une erreur de calcul mais une pratique opaque ne permettant pas aux consommateurs de connaître avec précision le coût du crédit et de comparer les offres en connaissance de cause. Il demande la substitution du taux légal.

Dans ses dernières écritures en date du 27 juillet 2017, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens et prétentions, la Caisse d'Epargne formule les demandes suivantes :

À titre principal

Confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 21 mars 2017 par le tribunal de grande instance de Bordeaux

Constater que la Caisse d'Epargne Aquitaine Poitou Charentes a parfaitement rempli ses obligations s'agissant de la détermination du TEG appliqué aux prêts immobiliers souscrits par M. X...,

Constater que la Caisse d'Epargne Aquitaine Poitou Charentes a parfaitement rempli ses obligations s'agissant de la détermination des intérêts conventionnels appliqués aux prêts immobiliers souscrits par M. X...,

En conséquence,

Débouter M. X... de l'intégralité de ses demandes,

À titre subsidiaire :

Dire et juger que seule la sanction de la déchéance des intérêts dans une proportion fixée par le juge est applicable en cas de TEG erroné,

Dire et juger que dans l'hypothèse où un manquement serait relevé dans le cadre du calcul des intérêts conventionnels des prêt souscrits par M. X..., le caractère non significatif de l'irrégularité supposée implique que soit maintenu le droit de la Caisse d'Epargne aux intérêts conventionnels.

En conséquence débouter M. X... de l'intégralité de ses demandes,

À titre infiniment subsidiaire,

Dire et juger que dans l'hypothèse où la cour estimerait que la présence de la clause 30/360 affecte la régularité de l'offre de prêt, prononcer la déchéance partielle du droit aux intérêts à hauteur du préjudice allégué, soit 0 (zéro) euros,

En toutes hypothèses :

Condamner M. X... au paiement d'une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 ainsi qu'aux entiers dépens.

Elle fait valoir que l'appelant ne produit aucune démonstration attestant de la surfacturation d'intérêts liés à un calcul sur la base de 360 jours. Elle estime qu'il n'est pas rapporté la preuve d'une erreur de calcul et que l'emprunteur ne démontre pas une telle erreur affectant le taux au delà d'une décimale. Elle ajoute que la clause critiquée est une clause de rapport 30jours/360 jours équivalente au mois normalisé. Subsidiairement, elle considère que la demande en nullité de la stipulation d'intérêt est irrecevable et que seule pourrait être envisagée une déchéance du droit aux intérêts dans une proportion fixée par le juge et se prévaut à ce titre du principe de proportionnalité.

La clôture de la procédure a été prononcée selon ordonnance du 11 mai 2018.

Le 14 mai 2018, la Caisse d'Epargne a déposé de nouvelles écritures comprenant un bordereau de communication de pièces comprenant 3 nouvelles pièces. Ces conclusions comprennent une demande de révocation de l'ordonnance de clôture et pour le surplus un dispositif identique aux précédentes.

Compte tenu de l'accord exprès des parties et des intérêts en cause, il a été procédé à la révocation de l'ordonnance de clôture, à l'admission de ces écritures tardives et, avant les débats, à la clôture de la procédure.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Pour conclure à la réformation du jugement, M. X... fait valoir que le tribunal n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations. Il indique ainsi que les contrats de prêts comprennent la clause suivante : le taux conventionnel est en effet calculé sur la base d'une année bancaire de 360 jours, d'un semestre de 180 jours, d'un trimestre de 90 jours et d'un mois de 30 jours. Il en déduit que la banque a appliqué un diviseur 360 et donc l'année dite à la lombarde ce qui emporte le caractère erroné du taux et la nullité du taux conventionnel.

Il est exact que le taux de l'intérêt conventionnel mentionné par écrit dans l'acte de prêt consenti à un consommateur ou à un non-professionnel doit, comme le taux effectif global, sous peine de se voir substituer l'intérêt légal, être calculé sur la base de l'année civile.

Encore convient-il toutefois que l'emprunteur qui supporte la charge de la preuve du caractère erroné du taux démontre que les modalités de calcul qu'il conteste, en l'espèce le diviseur 360, ont bien affecté le taux annoncé d'une erreur et que cette erreur excède une décimale en application des dispositions de l'article R 313-1 du code de la consommation dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce.

Or, M. X... ne s'explique guère sur le moyen soulevé par la banque selon lequel la clause litigieuse n'aboutirait pas in concreto à un calcul erroné mais à un simple rapport d'équivalence entre un diviseur 30/360 ou un diviseur mois normalisé/365. Dans ses dernières écritures, il admet même expressément qu'il a été fait application du mois normalisé (p.9) en omettant toutefois de prendre en considération les dispositions de l'annexe à l'ancien article R 313-1 du code de la consommation lequel fait expressément référence au mois normalisé, étant encore observé que les dates d'échéances étaient fixées chaque mois au même jour. Il estime ainsi que le mois normalisé ne pourrait s'appliquer qu'au TEG et non au taux conventionnel en particulier des prêts immobiliers.

En l'espèce, ainsi que l'a retenu le premier, juge M. X... ne rapporte pas la preuve qui lui incombe. Il se contente de procéder par affirmation et soutient que l'application du diviseur 360, sans tenir compte du rapport d'équivalence dans le cadre d'un prêt remboursable par échéances mensuelles identiques prélevées le même jour, contrevient à l'objectif de transparence et de cohérence en ne permettant pas au consommateur de comparer utilement les offres. Il ne propose aucun calcul mathématique qui permettrait de constater que le taux conventionnel ou le TEG qui lui ont été communiqués pour chacun des prêt était affecté d'une erreur et que cette erreur excédait la décimale. Il ne discute pas les calculs présentés par l'intimée et qui font apparaître que le TEG, dans chacun des prêts, correspondait bien au TEG tel que stipulé au contrat, étant observé qu'il n'est pas davantage établi d'erreur du taux conventionnel, alors qu'il n'est pas soutenu que des coûts n'auraient pas été pris en compte.

Il veut faire de la clause telle que rappelée ci-dessus une cause de nullité formelle de la stipulation d'intérêts. Or, s'il est certain que le taux d'intérêt doit être calculé sur l'année civile, il n'en demeure pas moins que la référence au mois normalisé prévue par l'annexe à l'article R313-1 du code de la consommation permet un calcul équivalent à l'année civile dans le cas des prêts objet du litige. La méthode d'équivalence fixée par cette annexe l'est certes pour les crédits à la consommation et le TEG mais il n'en demeure pas moins que compte tenu des modalités de remboursement appliquées, le calcul est en l'espèce strictement identique. En outre, en ne proposant aucun autre calcul qui aurait pu être débattu contradictoirement, M. X... ne met pas la cour en mesure de caractériser une erreur affectant le taux d'intérêt, tel que convenu entre les parties, à son détriment.

Ainsi que le rappelle M. X..., l'objectif du TEG est de permettre au consommateur une comparaison avisée et pertinente des différentes offres sans que ces coût cachés ne fausse cette comparaison. Or, dès lors qu'il n'est justifié d'aucune erreur quant au montant du TEG qui lui a été annoncé, à savoir respectivement 4,48% et 5,04% pas plus qu'au titre du taux conventionnel de 3,95% et 4,45%, et auquel il a consenti, il ne saurait prétendre à la nullité de la stipulation d'intérêt. Il a en effet pu procéder normalement à toute comparaison qu'il souhaitait sans que celle-ci soit faussée par taux inexactement précisé ou en tout cas il ne le démontre pas à la cour par la seule référence à la clause rappelée ci-dessus.

Le jugement sera en conséquence confirmé en toutes ses dispositions.

L'appel étant mal fondé, M. X... sera condamné au paiement de la somme de 1 500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne M. X... à payer à Caisse d'Epargne et de Prévoyance Aquitaine Poitou Charente la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. X... aux dépens.

Le présent arrêt a été signé par Madame Michèle ESARTE, président, et par Madame Véronique SAIGE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre civile
Numéro d'arrêt : 17/01895
Date de la décision : 28/06/2018

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 1A, arrêt n°17/01895 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-06-28;17.01895 ?
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