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16/11/2017 | FRANCE | N°16/01885

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 16 novembre 2017, 16/01885


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



--------------------------









ARRÊT DU : 16 NOVEMBRE 2017



(Rédacteur : Madame Catherine MAILHES, Conseillère)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 16/01885

















Monsieur [S] [G]



c/



SAS COMPASS GROUP

SA API RESTAURATION

















Nature de la décision : AU FOND



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Notifié par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,



Grosse délivrée le :



à :

Décision déférée à la Cour : jug...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU : 16 NOVEMBRE 2017

(Rédacteur : Madame Catherine MAILHES, Conseillère)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 16/01885

Monsieur [S] [G]

c/

SAS COMPASS GROUP

SA API RESTAURATION

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 14 mars 2016 (R.G. n°F14/01209) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, Section Commerce, suivant déclaration d'appel du 22 mars 2016,

APPELANT :

Monsieur [S] [G]

né le [Date naissance 1] 1977 au CAMEROUN

de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Magali BISIAU, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉES :

SAS COMPASS GROUP, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 2]

représentée par Me THIEFFRY looo Me William MAXWELL de la SCP MAXWELL BERTIN BARTHELEMY-MAXWELL, avocat au barreau de BORDEAUX

SA API RESTAURATION, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 3]

représentée par Me de RYCKE loco Me Jean-François CORMONT, avocat au barreau de LILLE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 20 septembre 2017 en audience publique, devant Madame Catherine MAILHES, Conseillère et Madame Sophie BRIEU, Vice-Présidente placée, chargées d'instruire l'affaire, qui ont entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés,

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Eric VEYSSIERE, Président,

Madame Catherine MAILHES, Conseillère,

Madame Sophie BRIEU, Vice Présidente Placée,

Greffier lors des débats : Gwenaël TRIDON DE REY,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

EXPOSE DU LITIGE et PRETENTIONS DES PARTIES :

M. [G] a été engagé à compter du 29 mars 2010 en qualité d'employé polyvalent de restauration par la société Api restauration à temps partiel dans le cadre d'un contrat à durée déterminée.

La convention collective applicable est celle du personnel des entreprises de restauration de collectivités. Le salarié était affecté sur le site de la CRAM [Localité 1] et devait percevoir une rémunération mensuelle brute de 767,80 euros pour une durée mensuelle de travail de 86, 66 heures en moyenne.

Un contrat de travail à durée indéterminée a été régularisé entre les parties le 17 décembre 2010. A compter du 1er septembre 2011, la durée du travail du salarié a été porté à temps complet, étant précisé que du 1er avril 2011 au 2 novembre 2011, le salarié a été incarcéré.

La société Api restauration a perdu le chantier qui a été repris par la société Compass Group à compter du 1er janvier 2012.

Se plaignant de ce que la société Compass Group ne lui avait jamais permis d'occuper son poste de travail, M. [G] a saisi le conseil de prud'hommes de Bordeaux le 30 avril 2014, et a formé les demandes suivantes à l'encontre de la société Compass Group :

résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur

paiement du salaire à compter de juillet 2013 : 37 633,95 euros

congés payés au prorata : 3 763,40 euros

dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 20 000 euros

indemnité de préavis : 2 787, 77 euros

indemnité de congés payés sur préavis : 278,77 euros

indemnité de licenciement : 1 393,85 euros

remise des documents de rupture sous astreinte de 100 euros par jour de retard

article 700 du code de procédure civile : 1500 euros

dépens

exécution provisoire

La société Api restauration a été mise en cause par la société Compass Group, les sociétés sollicitant chacune une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le 14 mars 2016, le conseil de prud'hommes a :

mis hors de cause la société Compass Group et l'a déboutée de sa demande reconventionnelle,

condamné la société Api restauration à verser à M. [G] les sommes suivantes:

1393,85 euros à titre d'indemnité forfaitaire,

1393,85 au titre du préavis,

100 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

débouté M. [G] du surplus de ses demandes,

débouté la société Api restauration de sa demande reconventionnelle et l'a condamnée aux dépens,

dit n'y avoir lieu à exécution provisoire autre que celle prévue pour les sommes visées à l'article R1454-28 du code du travail.

Le conseil de prud'hommes a considéré que M. [G] s'était fait embauché sous une fausse identité par la société Api restauration et qu'il n'était pas en possession d'un titre de séjour en cours de validité ni d'autorisation de travail en France à la date de transfert en violation des règles de l'article L.8251-1 du code du travail en sorte que le contrat était nul de nullité absolue et que cette nullité justifiait le refus de transfert opposé par la société Compass Group.

***

Par déclaration de son avocat au greffe de la Cour du 22 mars 2016, M. [G] a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Par conclusions déposées le 5 septembre 2016 au greffe de la Cour et développées oralement, et amodiées en ce qui concerne le montant des salaires, congés payés afférents et indemnité de licenciement réclamés, M. [G] demande à la Cour de :

le recevoir en son appel

le déclarer bien fondé en toutes ses demandes, fins et conclusions

en conséquence

réformer le jugement contradictoirement rendu le 14/03/2016 par l'un des bureaux de jugement de la section commerce du conseil de prud'hommes de Bordeaux , en conséquence,

àtitre principal

1°) sur le transfert du contrat de travail :

dire et juger que le contrat de travail de M. [G], conclu initialement la société Api restauration a été transféré à la société Compass Group,

2°) sur la rupture du contrat de travail :

prononcer la résiliation du contrat de travail de M. [G] à la date du prononcé de l'arrêt, en conséquence,

condamner la société Compass Group à payer à M. [G] :

2 787,70 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis

278,77 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de congés payés afférente à l'indemnité compensatrice de préavis

74.337,99 euros bruts au titre des salaires à courir depuis juillet 2013, montant à parfaire jusqu'à la date de résiliation du contrat de travail

7.433,79 euros bruts au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés sur les salaires ayant courus depuis juillet 2013,

2.072,38 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement

20 000 euros au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, sur le fondement de l'article L.1235-3 du code du travail

3°) sur les autres demandes :

condamner la société Compass Group à remettre à M. [G], sous astreinte de 100,00 € par jour de retard, à compter du prononcé de la décision à intervenir :

un certificat de travail

une attestation destinée à l'assedic

des bulletins de paie à compter de juillet 2013

un bulletin de paie afférent aux indemnités de rupture

tenant compte des condamnations prononcées

dire que les condamnations porteront intérêts à compter de la saisine du Conseil de prud'hommes de bordeaux,

débouter la société Compass Group de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

à titre subsidiaire

sur le relevé indemne par la société Api restauration, donner acte à M. [G] de ce qu'il s'associe à la demande de la société Compass Group

débouter la société Api restauration de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions

En tout état de cause,

allouer à M. [G] 2 500,00 € supplémentaires à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens et frais éventuels d'exécution

et pour le surplus, confirmer le jugement dont appel.

***

Par conclusions déposées le 17 juillet 2017 au greffe de la Cour et développées oralement, la société Api restauration demande à la Cour de :

réformer le jugement en ce qu'il a condamné la société Api restauration à régler à M. [G] la somme de 1393,85 euros à titre d'indemnité forfaitaire, 1393,85 euros au titre du préavis et 100 euros au titre de l'article 700

constater que M. [G] ne formule aucune demande au principal à l'encontre de la société Api restauration,

en conséquence :

mettre hors de cause la société Api restauration,

débouter M. [G] de ses demandes subsidiaire tendant à la garantie de la société Api restauration,

dire irrecevable et en tout cas mal fondée la société Compass Group en sa demande de condamnation de la société Api restauration à la relever indemne des condamnations mises à sa charge au bénéfice de M. [G],

condamner la société Api restauration au paiement d'une somme de 2500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

***

Par conclusions déposées le 1er septembre 2017 au greffe de la Cour et développées oralement auxquelles la Cour se réfère expressément, la société Compass Group demande à la Cour de :

confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes du 14 mars 2016 en toutes ses dispositions,

débouter M. [G] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

condamner M. [G] et à défaut la société Api restauration à payer à la société Compass Group la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner M. [G], et à défaut la société Api restauration aux entiers dépens,

rejeter l'exception d'incompétence soulevée par la société Api restauration,

débouter la société Api restauration de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions dirigées par la société Compass Group

Les parties ont été autorisées à produire chacune une note en délibéré sur le montant du rappel de salaire sollicité tel que réactualisé et sur le montant de l'indemnité de licenciement.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées, oralement reprises.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le transfert du contrat de travail

Au soutien de son appel, M. [G] fait valoir qu'il y a eu transfert de son contrat au profit de la société Compass Group car il avait été régulièrement embauché et que par application des dispositions de l'article L.8252-2 du code du travail, il bénéficie de la même protection que les autres salariés, peu important le fait que son contrat ait été suspendu à raison d'une incarcération au moment du transfert.

Selon les dispositions de l'article L.8251-1 du code du travail, nul ne peut directement ou indirectement, embaucher, conserver à son service ou employeur pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France.

Il ressort des pièces versées au dossier que :

- la demande d'autorisation de travail formulée par la société Api restauration auprès de la Directe d'Aquitaine avait été rejetée par décision du 13 décembre 2010,

- le recours gracieux de la société Api restauration auprès du préfet de la Gironde avait été rejeté le 14 avril 2011,

- le 3 février 2011, le préfet de la Gironde avait rejeté la demande de délivrance de titre de séjour effectuée par M. [G] et lui avait notifié son obligation de quitter le territoire français,

- ce n'est que le 25 juillet 2013 que M. [G] a été régularisé, qu'il a bénéficié d'un titre de séjour en France lui permettant de travailler.

M. [G] n'était pas muni d'autorisation de travailler et malgré la connaissance qu'elle en avait la société Api restauration l'a conservé à son service, en violation des dispositions d'ordre publique de l'article précité.

Ainsi la société Api restauration savait que M. [G] ne bénéficiait pas d'une autorisation de travail en France et qu'il était alors en séjour irrégulier.

Le contrat de travail a ainsi été poursuivi en violation des règles d'ordre public de l'article 8251-1 du code du travail par la société sortante.

Selon les dispositions de l'article L.8252-1 du code du travail, le salarié étranger employé en méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 est assimilé, à compter de la date de son embauche, à un salarié régulièrement engagé au regard des obligations de l'employeur définies par le présent code :

1° Pour l'application des dispositions relatives aux périodes d'interdiction d'emploi prénatal et postnatal et à l'allaitement, prévues aux articles L.1225-29 à L.1225-33 ;

2° Pour l'application des dispositions relatives à la durée du travail, au repos et aux congés prévus au livre 1er de la troisième partie ;

3° Pour l'application des dispositions relatives à la santé et la sécurité au travail prévue à la quatrième partie ;

4° Pour la prise en compte de l'ancienneté dans l'entreprise.

Il en va de même pour les articles L.713-1 et suivants du Code rural et de la pêche maritime pour les professions agricoles.

Ce texte limitatif, ne prévoit pas que le salarié étranger employé en méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 est assimilé à un salarié régulièrement embauché au regard des obligations de l'employeur définies en matière de transfert de contrat de travail.

Il s'ensuit que nonobstant l'absence de disposition conventionnelle particulière excluant le transfert de contrat de travail à durée indéterminée, le salarié étranger employé en méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 se trouve en dehors du champ d'application du transfert de contrat de travail de la convention collective nationale du personnel des entreprises de restauration de collectivités.

Ainsi le contrat de travail de M. [G] n'a pas été transféré auprès de la société Compass Group et ce dernier sera débouté de ses demandes en ce qu'elles sont dirigées à l'encontre de la société Compass Group, sans qu'il y ait lieu à mise hors de cause.

Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M. [G] de ses demandes dirigées à l'encontre de la société Compass Group mais infirmé en ce qu'il a mis hors de cause la société Compass Group.

Sur les condamnations de la société Api restauration

Le conseil de prud'hommes a condamné la société Api restauration à verser à M. [G] une indemnité forfaitaire, une indemnité de préavis outre une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Or M. [G] n'a pas dirigé ses demandes contre la société Api restauration, et n'a fait aucune demande d'indemnité forfaitaire, en sorte que le conseil de prud'hommes a statué ultra petita.

En cause d'appel, M. [G] n'a pas formulé de demande nouvelle à l'encontre de la société Api restauration.

Ainsi en l'absence de condamnation de la société Compass Group, la demande de relevé indemne qu'elle a dirigée contre la société Api restauration est devenue sans objet. La société Api restauration sera ainsi mise hors de cause et le jugement infirmé en ces dispositions.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

M. [G] succombant sera condamné aux entiers dépens de première instance et d'appel. Il sera en conséquence débouté de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a condamné la société Api restauration à lui verser une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande néanmoins de laisser à la charge de chacune de la société Api restauration et la société Compass Group les frais qu'elles ont exposés pour la défense de leurs intérêts et de les débouter de leurs demandes respectives sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [G] de ses demandes dirigées contre la société Compass Group ;

Infirme le jugement entrepris sur le surplus,

Statuant a nouveau dans cette limite,

Constate que M. [G] n'a pas formulé de demandes à l'encontre de la société Api restauration au titre d'une indemnité de préavis et d'une indemnité forfaitaire en première instance et en appel ;

Dit qu'en l'absence de condamnation de la société Compass Group, la demande de relevé indemne qu'elle a dirigée contre la société Api restauration est devenue sans objet ;

Dit que la société Api restauration sera ainsi mise hors de cause ;

Déboute les parties de toutes autres demandes ;

Condamne M. [G] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Eric VEYSSIERE, Président et par Gwenaël TRIDON DE REY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 16/01885
Date de la décision : 16/11/2017

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4B, arrêt n°16/01885 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-11-16;16.01885 ?
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