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12/10/2017 | FRANCE | N°16/03706

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 12 octobre 2017, 16/03706


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



--------------------------









ARRÊT DU : 12 OCTOBRE 2017



(Rédacteur : Madame Sophie BRIEU, Vice-Présidente Placée)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 16/03706 - jonction du RG n° 16/03743

















SA THEVENIN

Monsieur [L] [F]



c/



Monsieur [L] [F]

SA THEVENIN

















Natu

re de la décision : AU FOND







Notifié par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,



Grosse délivrée le :


...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU : 12 OCTOBRE 2017

(Rédacteur : Madame Sophie BRIEU, Vice-Présidente Placée)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 16/03706 - jonction du RG n° 16/03743

SA THEVENIN

Monsieur [L] [F]

c/

Monsieur [L] [F]

SA THEVENIN

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 27 mai 2016 (R.G. n° F2015/404) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ANGOULÊME, Section Industrie, suivant déclarations d'appel du 03 et 04 juin 2016,

APPELANTS :

SAS THEVENIN, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 1]

N° SIRET : 788 139 285 00027

représentée par Me Andréanne SACAZE, avocat au barreau d'ORLEANS

Monsieur [L] [F]

demeurant [Adresse 2]

comparant

INTIMÉS :

Monsieur [L] [F]

demeurant [Adresse 2]

comparant

SAS THEVENIN, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 1]

N° SIRET : 788 139 285 00027

représentée par Me Andréanne SACAZE, avocat au barreau d'ORLEANS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 07 juin 2017 en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Eric VEYSSIERE, Président,

Madame Catherine MAILHES, Conseillère,

Madame Sophie BRIEU, Vice-Présidente placée,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Gwenaël TRIDON DE REY,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

FAITS, PROCÉDURE :

Monsieur [L] [F] a été engagé le 15 septembre 2001 par la société Isoa et, dans le dernier état des relations contractuelles, exerçait les fonctions de responsable juridique ressources humaines.

Monsieur [F] a par ailleurs la qualité de conseiller prud'homal depuis le 7 juin 2011.

Par jugement du 16 septembre 2011, le tribunal de commerce de Périgueux, statuant dans le cadre de la procédure collective bénéficiant à la société Isoa, a prononcé la cession partielle d'activité de cette entreprise à la société Thevenin et a autorisé le licenciement des salariés dont le contrat n'était pas repris par la cessionnaire.

Monsieur [F] a été convoqué le 29 septembre 2014 à un entretien préalable fixé au 8 octobre suivant. Il a été licencié par courrier recommandé du 31 octobre 2014.

Celui-ci a, ensuite, été engagé par la société Thevenin en qualité de juriste en exécution d'un contrat à durée déterminée du 3 novembre 2014 au 30 avril 2015 ;

Le 7 décembre 2015, monsieur [F] a demandé au conseil de prud'hommes d'[Localité 1] de :

-requalifier le contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et condamner la société Thevenin avec exécution provisoire, à lui verser une somme de 4000 euros d'indemnité légale de requalification

-fixer son salaire à un montant de 3800 euros bruts par mois

-condamner la société Thevenin à lui régler la somme de 2329 euros bruts, outre 10 % de cette somme au titre des congés payés, à titre de rappel de salaire pour la période du 13 au 31 octobre 2014

-condamner la société Thevenin à lui verser en outre une somme de 22800 euros de dommages-intérêts au titre du travail dissimulé pour non-déclaration sur cette période,

-condamner son employeur à lui verser la somme de 407,14 euros au titre de travail dissimulé accompli par lui au mois de février 2015 pendant ses trois jours d'arrêt maladie outre 10% de cette somme au titre des congés payés afférents et un euro à titre de dommages et intérêts

-condamner la société Thevenin à lui verser en outre une somme de 22800 euros de dommages-intérêts au titre du travail dissimulé pour non-déclaration d'heures sur cette période en application de l'article L8223-1 du code du travail

-prononcer la nullité de la rupture du contrat de travail pour non respect de la consultation obligatoire de l'inspecteur du travail prévue par l'article L2421-8 du code du travail et condamner en conséquence la société Thevenin à lui payer la somme de 126 214,20 euros pour violation du statut protecteur des conseillers prud'hommes

-la condamner en outre à lui régler la somme de 3800 euros au titre de son indemnité de préavis, outre 380 euros au titre des congés payés afférents, celle de 950 euros au titre de son indemnité de licenciement et celle de 3800 euros pour non-respect de la procédure de licenciement à défaut d'organisation d'un entretien préalable

-condamner la société Thevenin à lui payer la somme complémentaire de 40 000 euros de dommages-intérêts en application de l'article L 1235-3 du code du travail

-condamner la société Thevenin à lui payer la somme de 28000 euros de dommages-intérêts pour la précarisation déloyale de son contrat de travail, son recrutement étant intervenu immédiatement après la cession partielle d'activité

-la condamner sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé le délai de 15 jours après la signification du jugement à lui délivrer des bulletins de paie modifiés pour la période d'octobre 2014 à avril 2015 mentionnant sa date d'entrée et son ancienneté au sein de la société ISOA Isolation, un certificat de travail et une attestation Pôle Emploi conformes

-dire que les sommes allouées porteront intérêts au taux légal à compter de la requête pour les sommes dues au titre du contrat

-condamner la société Thevenin aux dépens ainsi qu'à lui payer 2500 euros au titre des frais irrépétibles,

-ordonner l'exécution provisoire sur le tout, au-delà de l'exécution provisoire de droit de l'article R 1484-28 du code du travail.

Par jugement prononcé le 27 mai 2016, le conseil de prud'hommes a :

-condamné la société Thevenin à payer à monsieur [F] les sommes suivantes :

-2 329 euros à titre de rappel de salaire pour la période du 13 octobre au 31 octobre 2014

-230,90 euros au titre des congés payés afférents

-407,14 euros au titre du rappel de salaire pour la période du 9 au 11 février 2015

-40,71 euros au titre de l'indemnité de congé payé afférente

-1 euro à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral lié au travail demandé pendant une période d'arrêt maladie

-22 800 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé

-114 000 euros d'indemnité au titre de la nullité de la rupture du contrat de travail d'un salarié protégé sans consultation de l'inspecteur du travail

-1000 euros à titre de dommages et intérêts pour précarisation déloyale du salarié

-rejeté la demande de requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et la demande d'indemnité afférente

-rejeté les demandes d'indemnité liées à la rupture du contrat formées par monsieur [F]

-dit que les sommes allouées porteraient intérêts au taux légal à compter du 8 décembre 2015 pour les sommes ayant le caractère de salaire ou d'accessoire et à compter du jugement pour les sommes ayant un caractère indemnitaire

-ordonné la délivrance par l'employeur de bulletins de paie conformes à ces rappels pour la période du 13 octobre 2014 au 30 avril 2015, d'un certificat de travail et d'une attestation Pôle emploi mentionnant une date d'entrée au 13 octobre 2014 et ce dans le délai de 15 jours à compter de la notification du jugement sous astreinte provisoire de 5 euros par jour de retard et par document et pour une durée maximale de deux mois

-rejeté les autres demandes des parties

-rappelé en tant que besoin que les sommes allouées à titre de salaires étaient exécutoires de plein droit dans la limite de 9 mois de salaire, la moyenne des trois derniers mois étant de 3800 euros

-rejeté la demande d'exécution provisoire pour le surplus

-condamné la société Thevenin au paiement des dépens, ainsi qu'à payer à monsieur [F] 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Thevenin a régulièrement interjeté appel de cette décision le 3 juin 2016.

***

Par conclusions communiquées le 6 avril 2017 et soutenues oralement à l'audience, l'appelante demande à la Cour de :

-réformer le jugement du conseil de prud'hommes en ce qu'il a condamné la société Thevenin à verser les sommes de :

-2329 euros à titre de rappel de salaire pour la période du 13 au 31 octobre 2014 et 230,90 euros à titre des congés payés y afférents

-407,14 euros à titre de rappel de salaire pour la période du 9 au 11 février 2015 et 40,71 euros a titre de l'indemnité de congés payés y afférent

-01 euro au titre de dommages-intérêts pour la préjudice moral lié au travail demandé pendant une période d'arrêt maladie

-22 800 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé

-114 000 euros d'indemnité au titre de la nullité de la rupture du contrat de travail d'un salarié protégé sans consultation de l'inspecteur du travail

-1000 euros à titre de dommages-intérêts pour précarisation déloyale du salarié

-confirmer le jugement rendu pour le surplus

-débouter monsieur [F] de l'ensemble de ses demandes plus amples et contraires, et notamment celles nouvelles reprises à ses conclusions,

-condamner monsieur [F] à verser à la société Thevenin la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

-le condamner aux dépens de première instance et d'appel.

***

Par écritures communiquées le 15 mai 2017 et développées oralement à l'audience, l'intimé demande à la cour de :

-fixer le salaire moyen mensuel brut à la somme de 3800 euros

-juger que la société Thevenin a commis une fraude aux dispositions d'ordre public de l'article L 1224-1 du code du travail

-juger en conséquence de la poursuite du contrat de travail du cédant avec le cessionnaire aux mêmes conditions contractuelles

-requalifier le CDD en CDI :

-à titre principal, en application de l'article L1224-1 du code du travail

-à titre subsidiaire, en jugeant qu'un CDI a été conclu avec Thevenin dès le 13 octobre 2014

-à titre très subsidiaire, en jugeant qu'un CDI a été conclu avec Thevenin dès le 3 novembre 2014

-condamner en conséquence la société Thévenin à verser à M. [F] la somme de 4000 euros au titre de l'indemnité légale de requalification

-juger que la société Thévenin a eu recours au travail dissimulé en octobre 2014

-condamner en conséquence la société Thévenin à verser à M. [F] la somme de 22800 au titre de l'indemnité forfaitaire légale

-Condamner la société Thévenin à verser à M. [F] un salaire au titre du mois d'octobre 2014:

-à titre principal, du fait de poursuite du contrat de travail avec le cessionnaire (Thévenin): le salaire complet du mois d'octobre 2014, sur la base d'un temps plein, soit 3800 euros bruts, outre congés payés à hauteur de 10% de cette somme, soit 380 euros

-à titre subsidiaire, s'il est jugé qu'un CDI a été conclu avec Thévenin dès le 13 octobre 2014 : un salaire couru entre le 13 et 31 octobre 2014 (19/31ème d'un mois complet), sur la base d'un temps plein, soit 2329 euros bruts, outre congés payés à hauteur de 10% de cette sommes, soit 232,90 euros bruts

-condamner la société Thévenin à verser à M. [F] la somme de 500 euros nets en compensation des sujétions liées au télétravail

-juger que la société Thévenin a eu recours au travail dissimulé en février 2015

-condamner en conséquence la société Thévenin à verser à M. [F] la somme de 22800 euros au titre de l'indemnité forfaitaire légale pour cette seconde situation illicite

-condamner la société Thévenin à verser à M. [F] un salaire au titre du mois de février 2015, soit la somme de 407,14 euros bruts (3/28 ème de mois)

Outre congés payés à hauteur de 10% de cette somme, soit 40,71 euros bruts

-juger que la société Thévenin a méconnu son obligation de préserver la santé de M. [F] et de son droit au repos ;

Condamner en conséquence la société Thévenin à verser à M. [F] la somme de 1 euro net.

-juger que la rupture du contrat de travail du 30 avril 2015 est entachée de nullité et que la société Thévenin a violé le statut protecteur de conseiller prud'homal de M. [F]

-condamner en conséquence la société Thévenin à verser à M. [F] la somme de 126.214,20 euros nets forfaitaires au titre de l'indemnité pour violation du statut protecteur

-juger que la rupture du contrat de travail est entachée de nullité et qu'elle est sans cause réelle et sérieuse

-condamner en conséquence la société Thévenin à verser à M. [F] les sommes suivantes:

-dommages-intérêts pour rupture illicite et/ou sans cause réelle ni sérieuse : 50 000 euros nets

-indemnité de licenciement :

-à titre principal si la Cour fait droit à la demande de M. [F] quant à la poursuite du contrat de travail ISAO/ Thévenin (ancienneté 13 ans, 7 mois, 15 jours) : 19 760 euros

-à titre subsidiaire (ancienneté 6 mois 18 jours) : 417,48 euros

-à titre très subsidiaire (ancienneté de 5 mois et 27 jours) : 372,89 euros

-indemnité de préavis :

-à titre principal si la Cour fait droit à la demande de M. [F] quant à la poursuite du contrat de travail ISOA/Thévenin (ancienneté de 13 ans, 7 mois, 15 jours) : 11400 euros outre 1140 euros à titre de congés payés

-à titre subsidiaire la somme de 3800 euros à titre d'indemnité de préavis, outre 380 euros à titre de congés payés ;

-juger que la rupture illicite du contrat de travail a été effectuée sans respect des droits procéduraux de M. [F] (entretien préalable)

-condamner en conséquence la société Thévenin à verser à M. [F] la somme de 3800 euros nets

-condamner la société Thévenin à verser à M. [F] la somme de 380 euros bruts à titre de congés payés d'ancienneté conventionnels

-juger que la société Thévenin a précarisé la situation salariale de M. [F] et ce dans le cadre d'une exécution déloyale du contrat de travail

-condamner en conséquence la société Thévenin à verser à M. [F] la somme de 28 000 euros nets à titre de dommages-intérêts

-condamner la société Thévenin à adresser à M. [F] sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé un délai de 15 jours suivant la signification de l'arrêt d'appel, les documents rectificatifs suivants : attestation Pôle Emploi, bulletins de salaires d'octobre 2014 à avril 2015 (date d'entrée, et ancienneté), certificat de travail

-assortir les demandes de nature salariales de l'intérêt au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes (art 1153 du code civil) et les demandes indemnitaires à compter du prononcé de l'arrêt à venir

-condamner la société Thévenin aux entiers dépens, dont ceux relatifs à l'exécution forcée par huissier si nécessaire

-condamner la société Thévenin à verser à M. [F] la somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

***

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux conclusions déposées, oralement reprises à l'audience, ce par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

- I -. Sur la qualification du contrat de travail

A.]Attendu que, au soutien de sa demande en qualification de son contrat de travail en contrat à durée indéterminée, monsieur [F] développe le moyen principal tiré du transfert de son contrat à durée indéterminée initial entre la société Isao, son précédent employeur, et la société Thevenin, ce au résultat d'une fraude aux dispositions de l'article L.1224-1 du code du travail en vertu desquelles :

'Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise' ;

Que, ainsi, la cession de l'entreprise dans le cadre d'une procédure collective, même partielle, arrêtée par le juge, entraîne de plein droit le transfert d'une entité économique autonome conservant son identité et donc la poursuite des contrats de travail des salariés de l'entité cédée; que le principe vaut notamment pour la cession totale ou partielle de l'entreprise dans le cadre du redressement judiciaire (article L.642-1 du code de commerce), dès lors que, conformément aux dispositions de l'article L.642-1 du code de commerce, la cession a pour but d'assurer le maintien d'activités susceptibles d'exploitation autonome et de tout ou partie des emplois qui y sont attachés, et que lorsque celle-ci est partielle, elle porte sur un ensemble d'éléments d'exploitation formant une ou plusieurs branches complètes et autonomes d'activité ;

Que, cependant, le transfert légal des contrats de travail au repreneur ne s'applique

pas aux salariés licenciés dont le licenciement pour motif économique a été prononcé

en application du plan de cession arrêté par le juge, sauf pour le salarié à établir la fraude aux exigences de l'article L.1224-1 du code du travail ;

Qu'il est constant que le contrat de travail de monsieur [F] n'entrait pas dans le périmètre de la cession partielle d'activité de la société Isoa à la société Thevenin ; que le jugement de cession du 16 septembre 2011 autorise d'ailleurs le licenciement de l'intimé ;

Que le mandataire judiciaire a donc, faute d'acceptation par le salarié d'adhérer au contrat de sécurisation professionnelle, notifié à monsieur [F] son licenciement pour motif économique, ce par courrier du 30 octobre 2014 ;

Que le contexte judiciaire du licenciement de l'intimé caractérise une présomption de régularité de la procédure et le seul constat de l'embauche ultérieure de celui-ci par la société Thevenin, cessionnaire, n'est pas de nature à établir une fraude aux dispositions de l'article L.1224-1 du code du travail, en l'absence d'autres éléments apportés par le salarié ;

Que ce premier moyen sera écarté ;

B]Attendu que monsieur [F] soutient subsidiairement le moyen tiré de ce que, en dépit du fait qu'il a été engagé par la société Thevenin par contrat à durée déterminée le 3 novembre 2014, il a en réalité exécuté une prestation de travail dès le 13 octobre précédent au bénéfice de l'appelante ;

Que celle-ci fait valoir d'une part que le contrat de travail de monsieur [F] avec la société Isoa n'a pris fin que le 30 octobre 2014, de sorte que le salarié ne pouvait occuper deux emplois, d'autre part que les quelques échanges entretenus avec monsieur [F] au cours du mois d'octobre 2014 ont été réalisés avec celui-ci en sa qualité de juriste de la société Isoa puisqu'il était dûment informé de la situation juridique des différents personnels, repris ou non, et était donc en mesure de travailler au transfert des contrats entrant dans le périmètre de la cession ;

Que, toutefois, l'intimé établit que, le 29 septembre 2014, l'administrateur judiciaire de la société Isoa l'a dispensé d'activité à compter du 30 septembre au soir ;

Que, de surcroît, la nature des courriels échangés dès le 13 octobre 2014 entre l'employeur et monsieur [F] met en évidence d'une part le fait que ce dernier réalisait des prestations très expressément au bénéfice de la société Thévenin, d'autre part le lien de subordination entre les parties ; que, à cet égard, le lundi 13 octobre à 9 h 31, la directrice des ressources humaines adresse à monsieur [F], sur la boîte courriel personnel de celui-ci, un message électronique par lequel elle lui demande d'analyser un courrier adressé par un salarié et de préparer une réponse ; que, de même, à la suite de plusieurs messages pour transmission de courriers de salariés (refus d'avenant au contrat de travail), la même directrice des ressources humaines convoque monsieur [F] à une conférence téléphonique le 20 octobre 2014 ; que, également, il est donné instruction à l'intimé par message du 21 octobre 2014 d'analyser une situation particulière et d'y apporter une réponse ; que les messages suivants, jusqu'à la fin du mois d'octobre 2014, comportent également des instructions, présentées courtoisement ('merci de...') portant sur l'analyse de situations juridiques et sociales;

Que l'intimé a donc, dès alors, exécuté la mission de juriste qui sera ensuite définie par le contrat à durée déterminée du 3 novembre suivant ;

Qu'il est constant que, en vertu des dispositions de l'article L.1242-12 alinéa 1 et L.1245-1 du code du travail, toute relation de travail sans contrat écrit est nécessairement conclue pour une durée indéterminée ; que la relation salariale de la société Thevenin et monsieur [F] a donc commencé le 13 octobre 2014 pour une durée indéterminée, en ce compris la relation de travail concrétisée par le contrat du 3 novembre 2014 ;

C]Attendu que les dispositions de l'article L.1245-2 du code du travail sont dès lors applicables; qu'il est constant que l'indemnité de requalification d'un contrat de travail à durée déterminée naît dès la conclusion de ce contrat en méconnaissance des exigences légales et pèse ainsi sur l'employeur l'ayant conclu ; qu'il sera donc alloué à monsieur [F] la somme de 3.800 euros de ce chef ;

D]Attendu que le défaut de réponse de l'employeur aux courriels qui lui ont été adressés les 17 octobre et 2 novembre 2014 par l'intimé établit que la société Thevenin n'a pas rémunéré son salarié au titre des heures de travail accomplies à son bénéfice au cours du mois d'octobre, à compter du 13 ; que le premier juge sera en conséquence confirmé en ce qu'il a condamné la société Thevenin à payer de ce chef à monsieur [F] la somme de 2.329 euros à titre de rappel de salaire et celle de 232,90 euros à titre de rappel de congés payés ;

E]Attendu qu'il est constant que l'intimé a, au cours de ce mois d'octobre 2014, réalisé une prestation de travail au bénéfice de l'appelante au sein de son domicile personnel ;

Que cette situation est ainsi définie par l'article L.1229-9 du code du travail -dans sa rédaction applicable au litige- : 'le télétravail désigne toute forme d'organisation du travail dans laquelle un travail qui aurait également pu être exécuté dans les locaux de l'employeur est effectué par un salarié hors de ces locaux de façon régulière et volontaire en utilisant les technologies de l'information et de la communication dans le cadre d'un contrat de travail ou d'un avenant à celui-ci' ;

Que l'article L.1229-10 1° du même code, dans sa rédaction applicable au litige, précise que l'employeur est tenu de prendre en charge tous les coûts découlant directement de l'exercice du télétravail, notamment le coût des matériels, logiciels, abonnements, communications et outils ainsi que de la maintenance de ceux-ci ;

Que monsieur [F] tend à l'indemnisation des coûts découlant de l'exercice du télétravail à hauteur de 500 euros ; que la cour accueillera cette demande, qui est suffisamment détaillée dans sa relation directe avec la situation de télétravail ;

- II -. Sur le mois de février 2015

Attendu que monsieur [F] a subi un arrêt de travail du 9 au 13 février 2015 ;

Qu'il produit aux débats une série de courriels dont les termes établissent que, alors que son employeur était par ailleurs dûment informé de la suspension du contrat de travail, il a pourtant demandé à son salarié des prestations de travail ;

Que l'intimé demande donc le paiement de son salaire pour cette période travaillée, dont il est constant, à l'examen des mentions du bulletin de salaire du mois de février 2015, qu'elle a fait l'objet d'une déduction de rémunération à hauteur de 950 euros ;

Que, toutefois, la société Thevenin oppose à monsieur [F], sans être contredite, qu'il a été versé à celui-ci un revenu de remplacement ;

Que, cependant, les articles L.323-1 et R.323-1 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction applicable au litige, prévoient que le point de départ de l'indemnité journalière servie au salarié en arrêt de travail est le quatrième jour de l'incapacité de travail ;

Que le premier juge sera dès lors confirmé en ce qu'il a condamné la société Thevenin à payer de ce chef à monsieur [F] la somme de 407,14 euros à titre de rappel de salaire, outre 40,71 euros à titre de rappel de congés payés ;

Que, enfin, l'employeur, expressément avisé de la situation de santé de monsieur [F] -par l'envoi de l'avis médical de l'arrêt de travail et l'annonce de cet envoi par courriel du même jour- n'a cependant pas hésité à solliciter des travaux en urgence à son salarié tout en lui recommandant de se reposer et en plaisantant sur la nécessité d'éviter les exercices physiques ; que la cour confirmera le conseil de prud'hommes en ce qu'il a condamné la société Thevenin à indemniser le préjudice résultant de la violation de l'obligation d'assurer la santé et la sécurité de son salarié, ce à concurrence de 1 euro ;

- III -. Sur la rupture du contrat de travail

A]Attendu que la requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, au résultat de la constatation de la poursuite en novembre 2014 de la relation de travail initiée sans contrat écrit dès le 13 octobre 2014, conduit à appliquer à la rupture du contrat les règles régissant le licenciement ;

B]Attendu que monsieur [F] établit qu'il a prêté serment le 7 juin 2011 en qualité de conseiller prud'homme pour une durée de cinq années ; que l'article 2 de la loi du 18 décembre 2014 a prorogé le mandat des conseillers prud'hommes au 31 décembre 2017 ;

Que plusieurs messages électroniques produits aux débats par l'employeur lui-même, dont le premier en date du 17 octobre 2014, ainsi que les copies, versées par le salarié, de demandes d'autorisation d'absence expressément formalisées pour 'délibéré prud'homal' ou 'audience prud'homale', la première le 7 novembre 2014 et la dernière le 21 avril 2015, établissent que la société Thevenin avait une parfaite connaissance du mandat de son salarié, lequel avait au surplus pris en considération le fait que les audiences du conseil de prud'hommes au sein duquel il siège se déroulent le lundi matin pour modifier son temps de travail 'sans perturbations pour l'entreprise', ainsi qu'il le mentionne dans un courriel du 2 novembre 2014 ;

Que le terme du contrat de travail à durée déterminée et la rupture du contrat de travail, qu'il ait été conclu à durée déterminée ou indéterminée, d'un conseiller prud'homme bénéficient d'une procédure particulière détaillée au Livre quatrième du code du travail, aux articles L.2411-1 et suivants d'une part et L.2412-1 et suivants d'autre part ;

Que, en particulier, le licenciement d'un conseiller prud'homme, la rupture de son contrat à durée déterminée ou l'arrivée du terme de ce contrat doivent impérativement être autorisés par l'inspecteur du travail ;

Que, à défaut d'une telle autorisation, le licenciement du salarié protégé est nul ; que l'intéressé peut, en conséquence, demander sa réintégration au sein de l'entreprise ;

Que l'appelante ne peut sérieusement soutenir que son salarié a manqué à son obligation de loyauté en ne la prévenant pas, alors qu'il était juriste, de l'obligation de saisir la Direccte d'une demande d'autorisation de licenciement de ce salarié protégé sous contrat à durée déterminée ; que, en effet, cette procédure spéciale est d'ordre public absolu de sorte qu'aucune exception ne peut justifier qu'elle ne soit pas respectée, étant observé que la société Thevenin, dont l'intimé indique sans être démenti qu'elle emploie plus de 500 salariés, dispose d'un service des ressources humaines nécessairement informé des impératifs de la gestion des différentes situations de relation salariale ;

C]Attendu que monsieur [F] ne présente pas de demande de réintégration ; qu'il est donc fondé à réclamer l'indemnisation de la violation de son statut protecteur, soit une indemnité forfaitaire égale à la rémunération de 3.800 euros bruts qu'il aurait perçue depuis la date de son éviction, soit le 30 avril 2015, jusqu'à l'expiration de la période de protection en cours, dans la limite de deux ans, durée minimale légale du mandat des représentants du personnel, augmentée de six mois ;

Que le premier juge sera donc confirmé en ce qu'il a condamné la société Thevenin à payer de ce chef à monsieur [F] une somme de 114.000 euros ;

D]Attendu qu'il est constant en droit que le salarié protégé qui ne demande pas la poursuite de son contrat de travail illégalement rompu a le droit d'obtenir, non seulement les indemnités de rupture, mais également une indemnité réparant l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement et au moins égale à celle qui est prévue par l'article L.1235-3 du code du travail ;

Que l'intimé justifie à cet égard avec précision des conditions difficiles dans lesquelles, alors qu'il espérait la poursuite de la relation de travail avec la société Thevenin, il a été contraint de s'engager auprès d'une autre société et d'organiser, après plusieurs mois de résidence célibataire à distance de sa famille restée en [Localité 2], la vente de la maison familiale et un déménagement en [Localité 3] ;

Qu'il lui sera alloué une somme de 22.800 euros à ce titre ;

E]Attendu que, en considération de l'ancienneté de l'intimé dans l'entreprise, soit 6 mois et 18 jours, celui-ci peut prétendre à une indemnité de licenciement de 417,48 euros, ainsi qu'à une indemnité de préavis de 3.800 euros, outre 380 euros à titre de congés payés sur préavis, sommes au paiement desquelles sera condamnée l'appelante ;

F]Attendu que le licenciement litigieux a été effectué sans que la procédure soit respectée ; qu'il sera alloué au salarié, en exécution des dispositions de l'article L.1235-2 du code du travail et en considération du contexte de la rupture du contrat de travail, la somme de 300 euros;

- IV -. Sur le travail dissimulé

Attendu qu'en vertu de l'article L8221-5 du Code du Travail : "Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales."

Que l'article L.8223-1 du même code prévoit que, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a recouru dans les conditions de l'article L.8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L.8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire;

Qu'il est constant en droit que, au regard de la nature de sanction civile de cette indemnité, ces dispositions ne font pas obstacle au cumul de l'indemnité forfaitaire qu'elles prévoient avec les indemnités de toute nature auxquelles le salarié a droit en cas de rupture de la relation de travail;

Attendu qu'il a été jugé plus haut que la société Thevenin a, à deux reprises en octobre 2014 puis en février 2015, sollicité et obtenu des prestations de travail de monsieur [F] sans les rémunérer et s'est ainsi soustraite intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes habilités ;

Que le conseil de prud'hommes d'[Localité 1] sera donc confirmé en ce qu'il a condamné la société appelante à payer au salarié une somme de 22.800 euros de ce chef ; qu'il sera également confirmé en ce qu'il a rejeté la deuxième demande de monsieur [F] au titre du travail dissimulé, soutenue par le motif tiré de ce que, les faits de travail dissimulé en octobre 2014 et ceux qui ont été commis en février 2015 reposent sur deux alinéas différents de l'article L.8221-5 du code du travail, de sorte que les indemnités se cumulent ; que la cour observe cependant que la loi vise une commission alternative des faits pour accorder une seul indemnité au salarié ;

- V -. Sur l'exécution déloyale du contrat de travail

Attendu que, en vertu de l'article L 1222-1 du code du travail, l'employeur est tenu d'une obligation de loyauté dans l'exécution du contrat de travail dont le non respect est de nature à générer un préjudice pour le salarié qui peut prétendre à des dommages-intérêts en réparation de celui-ci ;

Attendu que le premier juge a souligné avec pertinence que la société Thevenin a engagé monsieur [F] sur un poste d'agent de maîtrise alors que celui-ci avait bénéficié du statut cadre au sein de la société Isoa et que les missions qui lui étaient dévolues dans l'une et l'autre société étaient les mêmes ;

Que la cour confirmera donc le conseil de prud'homme de ce chef ;

- VI -. Sur les autres demandes

Attendu que la demande formée au titre des congés payés conventionnels, accessoire de la demande formée au titre du transfert du contrat de travail entre les sociétés Isoa et Thevenin, est sans objet ;

Attendu que l'employeur sera condamné à délivrer au salarié un bulletin de salaire pour le mois d'octobre 2014, des bulletins de salaires rectifiés de novembre 2014 à avril 2015 en ce qui concerne la date d'entrée, ainsi que des documents de fin de contrat rectifiés en exécution du présent arrêt ;

Attendu qu'il est conforme à l'équité d'allouer à l'intimé une somme de 1.500 euros en indemnisation de ses frais irrépétibles ;

Que la société Thevenin, partie succombante, sera condamnée au paiement des dépens ;

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe,

INFIRME le jugement déféré en ce qu'il a :

- débouté monsieur [L] [F] de sa demande en requalification du contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée,

- débouté monsieur [L] [F] de sa demande en paiement de l'indemnité de requalification, de l'indemnité légale de licenciement, de l'indemnité de préavis et congés payés afférents, de dommages et intérêts au titre de la rupture

Statuant de nouveau de ces chefs,

REQUALIFIE le contrat à durée déterminée en date du 3 novembre 2014 en contrat à durée indéterminée à compter du 13 octobre 2014.

DIT que la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement nul.

CONDAMNE la société Thevenin à payer à monsieur [L] [F] les sommes suivantes :

- 3.800 euros au titre de l'indemnité de requalification,

- 22.800 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

- 417,48 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

- 3.800 euros à titre d'indemnité de préavis,

- 380 euros à titre de congés payés sur préavis,

- 300 euros à titre de dommages et intérêts pour le non respect de la procédure de licenciement.

CONFIRME le jugement pour le surplus.

Y ajoutant,

CONDAMNE la société Thevenin à payer à monsieur [L] [F] la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts en exécution de l'article L.1229-10 1° du code du travail.

CONDAMNE la société Thevenin à délivrer à monsieur [L] [F] un bulletin de salaire pour le mois d'octobre 2014, des bulletins de salaires rectifiés de novembre 2014 à avril 2015 en ce qui concerne la date d'entrée, ainsi que des documents de fin de contrat rectifiés en exécution du présent arrêt.

CONDAMNE la société Thevenin à payer à monsieur [L] [F] la somme de 1.500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNE la société Thevenin à payer les dépens.

Signé par Eric VEYSSIERE, Président et par Gwenaël TRIDON DE REY Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 16/03706
Date de la décision : 12/10/2017

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4B, arrêt n°16/03706 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-10-12;16.03706 ?
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