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29/09/2016 | FRANCE | N°15/04907

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 29 septembre 2016, 15/04907


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



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ARRÊT DU : 29 SEPTEMBRE 2016



(Rédacteur : Monsieur Marc SAUVAGE, Président)



SÉCURITÉ SOCIALE



N° de rôle : 15/04907





















CARSAT AQUITAINE



c/



Monsieur [K] [V]











Nature de la décision : AU FOND







Notifié pa

r LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,



Grosse délivrée le :



à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 03 jui...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU : 29 SEPTEMBRE 2016

(Rédacteur : Monsieur Marc SAUVAGE, Président)

SÉCURITÉ SOCIALE

N° de rôle : 15/04907

CARSAT AQUITAINE

c/

Monsieur [K] [V]

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 03 juillet 2015 (R.G. n°20141435) par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de GIRONDE, suivant déclaration d'appel du 30 juillet 2015,

APPELANTE :

CARSAT AQUITAINE

agissant poursuites et diligences de son Directeur, domicilié en cette qualité au dit siège

[Adresse 2]

représentée par Me Sophie PARRENO, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉ :

Monsieur [K] [V]

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me FRALEUX loco Me Nadia BOUCHAMA, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 02 juin 2016, en audience publique, devant Monsieur Marc SAUVAGE, Président chargé d'instruire l'affaire, qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Président : Marc SAUVAGE

Conseiller : Catherine MAILHES

Conseiller : Véronique LEBRETON

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Florence Chanvrit Adjoint Administrative faisant fonction de Greffière

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Faits :

M. [K] [V] est employé en qualité de cuisinier au sein de la Société COMPASS GROUP France.

Il est affecté depuis son embauche, soit le 4 Mai 1987, sur l'établissement SNECMA.

Le 3 Novembre 2009, M. [V] a déposé une demande d'allocation de travailleur de l'amiante (ATA).

Le 17 Novembre 2009, cette première demande a été rejetée au motif que M. [V] n'avait pas atteint l'âge requis pour prétendre à cette allocation.

Le 13 Septembre 2013, il a donc déposé une autre demande d'ATA.

Par notification en date du 3 Octobre 2013, la CARSAT Aquitaine informait M. [V] du rejet de sa demande au motif que la société EUREST, son employeur depuis le 4 Mai 1987 ne figure pas sur la liste des établissements susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation.

Le 16 Octobre 2013, M. [V] a saisi la Commission de Recours Amiable afin de voir réformer cette décision de rejet.

Par décision du 3 Juin 2014, la Commission de Recours Amiable a de nouveau rejeté sa demande expliquant que pour bénéficier de l'allocation, l'Article 41 de la loi du 23 Décembre 1998 impose que soit listé par arrêté ministériel l'employeur auprès duquel un salarié exerce ou a exercé son activité, condition non remplie ici.

Par courrier recommandé du 28 Juillet 2014, Me [V] a saisi le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale aux fins de contester la décision de la Commission de Recours Amiable de la Caisse d'Assurance Retraite Santé Au Travail (CARSAT) du 3 Juin 2014 rejetant sa demande d'allocations de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (ACAATA).

À défaut de conciliation possible, l'affaire a été plaidée à l'audience du 29 Mai 2015.

Par des écritures reprises oralement, M. [V] a demandé au Tribunal de :

annuler la décision de rejet de la Commission de Recours Amiable en date du 3 Juin 2014

valider la période comprise entre son embauche le 4 Mai 1987 et 1992, durant laquelle il a travaillé pour la Société COMPASS GROUP France sur le site de la SNECMA au Haillan dans le calcul de ses droits au bénéfice de l'ACAATA.

En défense, la CARSAT Aquitaine demande, au visa de l'Article 41 de la loi du 23 Décembre 1998, de :

constater que M. [V] est salarié de la Société EUREST depuis le 4 Mai 1987

constate que la Société SEP ne figure pas sur la liste visée à l'Article 41 de cette loi

en conséquence, juger que c'est à bon droit que la CARSAT Aquitaine a estimé que les conditions d'octroi de l'allocation des travailleurs de l'amiante n'étaient pas réunies au bénéfice de M. [V]

juger que la situation de M. [V] ne constitue pas une discrimination

débouter M. [V] de l'ensemble de ses demandes

Par jugement en date du 3 Juillet 2015, le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale [Localité 1] a infirmé la décision de rejet de la Commission de Recours Amiable en date du 3 Juin 2014 en exposant que la période du 4 Mai 1987 au 31 Décembre 1992 devait être retenue par la CARSAT dans le cadre de la détermination des droits de M. [V] à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante.

Par acte en date du 30 Juillet 2015, la CARSAT Aquitaine a relevé appel de cette décision.

Demandes des parties

Par conclusions déposées au greffe le 12 Janvier 2016, et développées oralement à l'audience, la CARSAT Aquitaine sollicite de la Cour qu'elle :

la déclare recevable en son appel

la déclare bien fondée en son appel

réforme le jugement entrepris

constate que M. [V] est salarié de la Société EUREST depuis le 4 Mai 1987

constate que cette société ne figure pas sur la liste visée à l'Article 41 de la loi du 23 Décembre 1998

constate que la Société SEP ne figure pas sur la liste visée à l'Article 41 de la loi du 23 Décembre 1998 que pour la période de 1964 à 1992

en conséquence, dise et juge que c'est à bon droit qu'elle a estimé que les conditions d'octroi de l'allocation des travailleurs de l'amiante n'étaient pas réunies au bénéfice de M. [V]

dise et juge que la situation de M. [V] ne constitue pas une discrimination

déboute M. [V] de l'ensemble de ses demandes

Par conclusions déposées au greffe le 02 Mai 2016, et développées oralement à l'audience, M. [V] sollicite de la Cour qu'elle :

confirme la décision dont appel et en conséquence,

infirme la décision de rejet de la Commission de Recours Amiable en date du 3 Juin 2014

dise que la période du 4 Mai 1987 et le 31 Décembre 1992 devra être retenue par la CARSAT dans le cadre de la détermination de ses droits à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante

Moyens des parties :

* Sur le bénéfice de l'allocation des travailleurs de l'amiante :

La CARSAT Aquitaine soutient que selon l'Article 41 de la loi du 23 Décembre 1998 et l'arrêté du 3 Juillet 2000, pour bénéficier de l'allocation des travailleurs de l'amiante, le demandeur doit démontrer qu'il a travaillé dans un établissement figurant sur une liste établie par arrêté des ministres chargés du travail, de la sécurité sociale et du budget, d'autant que la date de départ en cessation d'activité est fonction de la durée du travail effectué dans ces établissements.

En outre, la circulaire de Septembre 2006 est sans équivoque dans la mesure où les salariés d'un établissement de sous-traitance non répertoriés dans les arrêtés ne peuvent prétendre au bénéfice de l'allocation des travailleurs de l'amiante.

En effet, M. [V] étant salarié de la Société EUREST depuis le 4 Mai 1987, société ne figurant pas sur la liste déterminée par l'arrêté, il ne correspond pas aux prescriptions de la loi du 23 Décembre 1998 et le fait qu'il ait été détaché sur le site de la Société SNECMA, entreprise ouvrant droit à l'ATA, n'a aucun incidence sur ses droits puisqu'aucune rupture d'égalité à l'origine d'une prétendue discrimination n'est constituée en l'espèce. D'autant plus que les juges du fond ont assimilé M. [V] a un salarié intérimaire visé dans la circulaire du 14 Décembre 2000, circulaire qui n'a pas de valeur normative.

De ce fait, cette période ne peut donc permettre à M. [V] de solliciter le bénéfice de l'allocation des travailleurs de l'amiante.

M. [V] soutient que l'entreprise dans laquelle il travaillait à savoir la Société EUREST ne figure pas dans la liste des établissements fixés par arrêté ministériel, activité au sein de ces établissements permettant d'ouvrir le bénéfice de cette allocation mais il n'en demeure pas moins qu'il a exercé depuis le 4 Mai 1987 ses fonctions au sein de l'établissement SNECMA, entreprise ouvrant droit à cette allocation donc il a bien exercé ses fonctions au même titre que les salariés de SNECMA durant une certaine période, sans pour autant bénéficier des mêmes droits puisque ses collègues ont pu voir leurs demandes prospérer (sachant que ces collègues ont exercé leurs fonctions dans le Comité d'Entreprise de la société SNECMA). Ainsi, leurs conditions de travail étaient identiques de sorte que Me [V] ne doit subir aucune discrimination dans l'attribution de cette allocation.

D'autant plus, que les juges du fond ont souvent été favorables à l'attribution de cette allocation et ce, au regard de l'activité réelle du salarié au sein de l'un des établissements listés dans la mesure où ils considéraient que le bénéfice de l'allocation litigieuse devait être lié à l'activité réelle du salarié et non au rattachement juridique du salarié à une autre société.

De ce fait, il y a discrimination ici, dans la mesure où des salariés d'une telle entreprise figurant sur la liste, même non exposés en pratique aux risques liés à l'amiante pourraient bénéficier de cette allocation, alors que ceux effectivement exposés à ces risques ne le pourraient pas à l'unique motif qu'ils sont salariés d'une entreprise sous-traitante ne figurant pas sur cette même liste. Ainsi, c'est dans ces conditions que le TASS [Localité 1] a fait droit à la demande de M. [V], notamment au regard de la circulaire du 14 Décembre 2000 et a retenu que la CARSAT ne justifiait d'aucun motif objectif et raisonnable pour expliquer la différence de traitement entre salariés intérimaires et sous-traitants qui n'étaient pas employés par des établissements figurant sur la liste, tout en étant exposé au danger de l'amiante dans les mêmes conditions.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées, oralement reprises.

MOTIFS DE LA DECISION.

Aux termes de l'article 41 de la loi n°98-1194 du 23 décembre 1998 :

« Une allocation de cessation anticipée d'activité est versée aux salariés et anciens salariés des établissements de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, des établissements de flocage et de calorifugeage à l'amiante ou de construction et de réparation navales, sous réserve qu'ils cessent toute activité professionnelle, lorsqu'ils remplissent les conditions suivantes :

1° Travailler ou avoir travaillé dans un des établissements mentionnés ci-dessus et figurant sur une liste établie par arrêté des ministres chargés du travail, de la sécurité sociale et du budget, pendant la période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante. L'exercice des activités de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, de flocage et de calorifugeage à l'amiante de l'établissement doit présenter un caractère significatif ;

2° Avoir atteint l'âge de soixante ans diminué du tiers de la durée du travail effectué dans les établissements visés au 1°, sans que cet âge puisse être inférieur à cinquante ans ;

3° S'agissant des salariés de la construction et de la réparation navales, avoir exercé un métier figurant sur une liste fixée par arrêté conjoint des ministres chargés du travail, de la sécurité sociale et du budget.

Le bénéfice de l'allocation de cessation anticipée d'activité est ouvert aux ouvriers dockers professionnels et personnels portuaires assurant la manutention sous réserve qu'ils cessent toute activité professionnelle, lorsqu'ils remplissent les conditions suivantes :

1° Travailler ou avoir travaillé, au cours d'une période déterminée, dans un port au cours d'une période pendant laquelle était manipulé de l'amiante ; la liste de ces ports et, pour chaque port, de la période considérée est fixée par arrêté conjoint des ministres chargés du travail, de la sécurité sociale, des transports et du budget ;

2° Avoir atteint l'âge de soixante ans diminué du tiers de la durée du travail effectué dans les ports visés au 1°, sans que cet âge puisse être inférieur à cinquante ans »

Pour bénéficier de cette disposition, il faut, d'une part, avoir été salarié d'un établissement ayant mis en oeuvre l'amiante dans les conditions définies par la loi et, d'autre part, avoir travaillé dans un établissement figurant sur une liste arrêtée conjointement par les ministres du travail, de la sécurité sociale et du budget. Salarié de la société Eurest : Monsieur [V] n'a jamais été salarié d'un tel établissement.

En ce qui concerne la rupture du principe d'égalité, et de la discrimination qui en résulterait, au regard des dispositions de la convention européenne des droits de l'homme, aucune disposition de ce texte n'est précisément visée par le requérant.

Pour ce qui est du respect du principe constitutionnel d'égalité, il appartenait au demandeur de poser , le cas échéant, une question prioritaire de constitutionnalité.

Il sera relevé que, moins encore que le juge constitutionnel, le juge judiciaire n'a un pouvoir général d'appréciation analogue à celui du législateur et il faut rappeler que le mécanisme de l'allocation de cessation anticipée des salariés au profit des salariés victimes de l'amiante, d'une part, ne bénéficie pas à des salariés, y compris malades suite à une contamination professionnelle par l'amiante, qui n'ont jamais travaillé pour un des établissements concernés par ce mécanisme et, d'autre part, bénéficie à des salariés qui ont travaillé dans de tels établissements mais sans jamais avoir été en contact avec l'amiante. A cet égard, Monsieur [V] évoque le cas des salariés du comité d'entreprise de la SNECMA qui travaillaient dans les mêmes locaux que lui et dont certains ont bénéficié de cette allocation. Dans ces conditions, la mise en oeuvre du principe d'égalité en ce domaine relève du seul législateur.

Le jugement doit donc être infirmé et la décision de la CARSAT confirmée.

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau du chef infirmé,

Confirme la décision de la CARSAT d'Aquitaine du 03 juin 2014 qui a rejeté sa contestation de rejet par l'Assurance Aquitaine Retraite de la demande soumise par Monsieur [K] [V] de reconnaissance du bénéfice de l'allocation de cessation anticipée des salariés au profit des salariés victimes de l'amiante,

Rappelle que la présente procédure est gratuite et sans frais.

Signé par Monsieur Marc SAUVAGE, Président, et par Florence

CHANVRIT Adjointe Administrative Principale faisant fonction de greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Florence CHANVRIT Marc SAUVAGE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 15/04907
Date de la décision : 29/09/2016

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4B, arrêt n°15/04907 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-09-29;15.04907 ?
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