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01/07/2014 | FRANCE | N°13/04659

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section a, 01 juillet 2014, 13/04659


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



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ARRÊT DU : 1er JUILLET 2014



(Rédacteur : Madame Marie-Luce Grandemange, Conseiller)

(PH)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 13/04659









Monsieur [L] [T]



c/



SARL K Press

















Nature de la décision : AU FOND















Notifié pa

r LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,





Grosse délivrée le :



à :





Décision déférée à la Cour : jugement rend...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 1er JUILLET 2014

(Rédacteur : Madame Marie-Luce Grandemange, Conseiller)

(PH)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 13/04659

Monsieur [L] [T]

c/

SARL K Press

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 28 juin 2013 (RG n° F 12/01436) par le Conseil de Prud'hommes - formation paritaire - de Bordeaux, section Activités Diverses, suivant déclaration d'appel du 19 juillet 2013,

APPELANT :

Monsieur [L] [T], né le [Date naissance 1] 1979 à [Localité 1] ([Localité 1]), de

nationalité française, employé, demeurant [Adresse 1],

Représenté par Maître Olivier Meyer, avocat au barreau de Bordeaux,

INTIMÉE :

SARL K Press, siret n° 482 886 975 00010, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, [Adresse 2],

Représentée par la SELARL Eric Visseron, avocat au barreau de Bordeaux,

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 juin 2014 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Luce Grandemange, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Maud Vignau, Président,

Madame Marie-Luce Grandemange, Conseiller,

Madame Isabelle Lauqué, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Anne-Marie Lacour-Rivière.

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

M. [L] [T] a été embauché par la SARL K Press, nouvellement créée, en qualité d'employé pré-presse par contrat de travail à durée indéterminée en date du 26 juillet 2005, à effet à compter du 1er août 2005 pour une durée de travail de 18 heures par semaine, soit 78 heures par mois, pour une rémunération de 643,05 € brut mensuel.

À compter du mois de septembre 2007 la durée de travail mensuel était portée à 130 heures (soit 30 heures/semaine).

Le 2 mai 2012 l'employeur notifiait à M. [T] un avertissement suite à des propos tenus le 19 avril 2012.

Lors de deux visites médicales des 15 mai et 4 juin 2012 le médecin du travail déclarait M. [T] apte à temps partiel (30 heures par semaine).

Le 6 juin 2012 M. [T] était placé en arrêt maladie ordinaire jusqu'au 20 juin 2012.

Par lettre datée du 18 juin 2012 M. [T] prenait acte de la rupture de son contrat de travail.

Le 20 juin 2012, M. [T] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Bordeaux pour que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, en requalification de son temps de travail en temps complet et en paiement d'heures supplémentaires, de créances salariales, des indemnités de rupture et de divers dommages intérêts.

Par décision en date du 28 juin 2013, le Conseil de Prud'hommes a dit que la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par M. [T] s'analyse en une démission et a condamné la SARL K Press à lui payer les sommes suivantes :

- 296,95 € à titre de rappel de salaires pour heures complémentaires et

supplémentaires,

- 29,66 € au titre des congés payés afférents,

- 500,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

et a débouté les parties de toutes leurs autres demandes.

Le 19 juillet 2013, M. [T] a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions déposées le 7 mai 2014, développées oralement et aux-quelles il est expressément fait référence, M. [T] conclut à la réformation du jugement entrepris sauf en ce qu'il lui a alloué une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code civil.

Il demande à la Cour de requalifier son contrat de travail en contrat à temps complet à compter du 11 avril 2011 et de dire que sa prise d'acte de la rupture de son contrat de travail doit produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il forme dés lors les demandes en paiement des sommes suivantes à l'encontre de la SARL K Press :

- 4.188,31 € à titre de rappel de salaires depuis le 18 avril 2011,

- 418,83 € au titre des congés payés afférents,

- 335,37 € à titre de rappel de prime de 13ème mois,

- 701,07 € à titre de rappel pour heures supplémentaires en avril/mai 2011 et en mars/avril 2012,

- 70,11 € au titre des congés payés afférents,

- 7.152,93 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 715,29 € à titre d'indemnité de congés payés y afférents,

- 5.374,00 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 35.775,00 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et

sérieuse,

- 1.687,20 € à titre de dommages-intérêts pour perte du droit individuel à la

formation,

- 8.800,00 € à titre de dommages-intérêts pour exécution fautive du contrat de

travail,

- 2.000,00 € à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure

civile.

Il sollicite en outre la remise d'une attestation d'assurance-chômage rectifiée sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt.

Par conclusions déposées le 26 mai 2014 développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, la société K Press demande la confirmation du jugement entrepris, sauf en ce qu'il a fait droit partiellement à la demande de rappel de salaire de M. [T] au titre des heures supplémentaires et des congés payés afférents, elle demande la condamnation de M. [T] à lui payer la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIVATION

* Sur les demandes en paiement d'heures complémentaires et supplémen-taires et en requalification de la durée du contrat de travail :

Il résulte des dispositions de l'article L.3171-4 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge les éléments de nature à étayer sa demande.

À l'appui de ses prétentions M. [T] produit un décompte informatique sur tableau excell créé en 2012 faisant apparaître des heures complémentaires sur les mois d'avril à mai 2011 et de mars et avril 2012. Cependant l'employeur produit les propres écrits de M. [T], l'attestation de M. [C], ancien gérant salarié à la retraite, présent lors d'une réunion qui s'est tenue le 06 juin 2012 à l'occasion de laquelle le salarié a sollicité le paiement de ses heures complémentaires ou supplémen-taires.

A l'examen de ces éléments il apparaît que M. [T] n'a pas effectué d'heures complémentaires en 2011.

En revanche, au cours des mois de mars et avril 2012 dans le cadre de la préparation du 'Guide Blanc' d'un client M. [T] a incontestablement travaillé au-delà de 30 heures par semaine.

M. [T] prétend avoir effectué 3 heure complémentaires entre les 20, 21 et 28 mars 2012 et avoir travaillé :

- 41 heures entre le lundi 02 et le vendredi 06 avril 2012,

- 36 heures 30 entre le lundi 09 et le vendredi 13 avril 2012

- 40 heures entre le lundi 16 et le vendredi 20 avril 2012.

Soit 30 heures 30 au-delà de la durée contractuellement prévue.

Il prétend avoir également travaillé pendant 12 heures à son domicile.

À la suite des réunions des 4 et 6 juin 2012 l'employeur a accepté de rémunérer le salarié pour 23 heures complémentaires, dont huit travaillées à domicile le week-end, qui lui ont été payées avec son salaire du mois de juin 2012.

Si dans un esprit de conciliation l'employeur a accepté de rémunérer le salarié pour un travail exécuté à son domicile, le salarié ne peut demander le paiement d'heures prétendument exécutées chez lui hors toute possibilité de contrôle et toute demande de l'employeur.

Toutefois, l'employeur n'apportant aucun élément permettant de remettre en cause le décompte de M. [T] pour les jours normalement travaillés, il y a lieu de dire que le salarié est en droit de prétendre au paiement d'un rappel de salaires pour 15 heures 30 (30 heures 30 - 15 heures) avec majoration de 25 % en application des dispositions de l'article L.3123-19 du code du travail, soit la somme de 272,34 € brut outre 27,34 € brut au titre des congés payés afférents avec intérêts courant au taux légal à compter du 20 juin 2012 en application des dispositions de l'article 1153 du code civil. Le jugement déféré sera donc réformé en ce qui concerne le montant de ces sommes.

L'article 5 du contrat de travail de M. [T] spécifie que compte tenu de la technicité requise par son poste d'infographiste, et de l'autonomie applicable à l'organisation de son travail M. [T] 'n'est pas soumis à un horaire précis mais s'engage à effectuer sa mission dans le cadre de la durée mensuelle légale du travail. Tout dépassement exceptionnel de cette durée de travail devra faire l'objet d'une demande d'autorisation préalable écrite auprès du gérant'.

M. [T] n'a jamais sollicité une telle autorisation, et les heures accomplies au-delà de 35 heures hebdomadaires ne l'ont pas été à la demande de l'employeur.

De plus, les pièces versées aux débats démontrent que le jeudi 19 avril 2012, à l'occasion d'un entretien avec le représentant d'un donneur d'ordre de la SARL K Press, M. [T] s'est plaint pour la première fois de sa charge de travail et des heures exécutées, or, il résulte de son propre décompte qu'immédiatement, et jusqu'à sa prise d'acte de la rupture, il a cessé d'effectuer toute heure complémentaire.

Enfin, il apparaît que M. [T], qui avait créé sa propre entreprise de design-infographie en août 2010, ne se tenait pas à la disposition de son employeur

au-delà de la durée de travail prévue.

Le jugement déféré donc sera confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes de M. [T] en requalification de son contrat de travail en contrat à temps complet et en paiement d'un rappel de salaires et de congés payés subséquents.

* Sur la rupture du contrat de travail :

Lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison des faits qu'il reproche à son employeur cette rupture produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiait soit, dans le cas contraire, d'une démission.

M. [T] invoque trois griefs à l'encontre de son employeur.

Le premier, qui a directement provoqué sa décision de prendre acte de la rupture, consisterait en des violences physiques exercées par M. [H], directeur général, le 04 juin 2012 alors qu'il lui réclamait le paiement des heures complémentaires de mars et avril 2012. Il indique que l'employeur l'a poussé ce qui a provoqué sa chute et occasionné une tuméfaction constatée médicalement.

M. [H] ne nie pas la réalité de la chute de M. [T] mais conteste tout contact physique entre eux, il soutient que M. [T], très énervé, a trébuché seul en reculant et qu'il est tombé. En l'absence d'éléments quant à l'origine de cette chute, la preuve de violences physiques exercées sur la personne de M. [T] n'est pas rapportée et aucun manquement de l'employeur à cet égard n'est établi.

M. [T] invoque également un manquement de l'employeur à ses obligations en matière de suivi médical notamment une absence de visite de reprise après un arrêt maladie ordinaire du 06 juin au 21 juillet 2011.

Il est justifié que M. [T] a eu sa visite médicale d'embauche le 06 mars 2006, sans que l'on sache à qui ce retard, sans conséquence, est imputable, il a eu des visites médicales périodiques les 28 mars 2007, 06 avril 2009 et 15 mai 2012 le médecin du travail a alors souhaité le revoir le 04 juin 2012.

Si l'employeur a, effectivement, manqué à ses obligations en n'organisant pas la visite médicale de reprise au retour de M. [T] en août 2011, après son arrêt maladie suivi de trois semaines de congés payés, sa faute est à relativiser, le salarié ayant lui-même la possibilité de solliciter cette visite, la SARL K Press étant adhérente et s'étant acquittée de ses cotisations auprès d'un service de santé au travail.

Enfin, M. [T] invoque un manquement de l'employeur au paiement de l'intégralité des heures effectuées et du complément de salaire pendant son arrêt maladie de 2011. Ce reproche est pour partie fondé, la Cour ayant reconnu que M. [T] était créancier à ce titre d'une somme de 272 € brut. Cependant, les éléments du dossier démontrent qu'au moment de la prise d'acte de la rupture l'employeur venait de faire partiellement droit à la réclamation de M. [T], réclamation qui ne concernait que les mois de mars et avril 2012, en ce compris pour des heures prétendument travaillées chez lui les fins de semaine.

Par ailleurs, il apparaît que ce n'est que dans sa lettre de prise d'acte de la rupture du contrat de travail du 18 juin 2012 que M. [T] a demandé le paiement de son complément de salaire pour les mois de juin/juillet 2011, ce dernier lui a été payé immédiatement avec son salaire du mois de juin 2012 pour un montant de 368,67 € bruts, il n'y a donc pas eu une résistance délibérée et manifeste de l'employeur à verser au salarié les sommes qui lui étaient dues.

C'est donc par une juste appréciation des éléments de fait de ce dossier que le premier juge a considéré que les seuls manquements de l'employeur établis n'avaient pas un degré de gravité suffisant pour justifier que M. [T] prenne acte de la rupture du contrat de travail.

En conséquence, il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail devait produire les effets d'une démission et a débouté M. [T] de ses demandes en paiement d'indemnités de rupture, de dommages intérêts pour licenciement abusif, pour perte du droit individuel de formation.

Par ailleurs, le salarié ne justifie pas d'un manquement de la SARL K Press à son obligation d'exécuter loyalement le contrat de travail et d'un préjudice distinct de celui résultant du retard apporté dans le paiement du rappel de salaires dû au titre des heures complémentaires, lequel sera réparé par le cours des intérêts moratoires.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté la demande de M. [T] en paiement de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat.

* Sur les autres demandes :

M. [T] qui succombe en son appel sera condamné aux dépens de la procédure d'appel et supportera ses frais irrépétibles, toutefois l'indemnité qui lui a été allouée en première instance lui restera acquise.

L'équité et les circonstances de la cause ne commandent pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de la SARL K Press.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

' Confirme le jugement déféré sauf en ce qui concerne les montants du rappel de salaires pour heures complémentaires et congés payés afférents alloués à M. [T].

Et, statuant de nouveau :

' Condamne la SARL K Press à verser à M. [T] les sommes de 272,34 € (deux cent soixante douze euros et trente quatre centimes) bruts et de 27,23 € (vingt sept euros et vingt trois centimes) bruts avec intérêts courant au taux légal à compter du 20 juin 2012.

Y ajoutant :

' Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

' Condamne M. [T] aux dépens de la procédure d'appel.

Signé par Madame Maud Vignau, Président, et par Madame Anne-Marie Lacour-Rivière, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A-M Lacour-Rivière M. Vignau


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section a
Numéro d'arrêt : 13/04659
Date de la décision : 01/07/2014

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4A, arrêt n°13/04659 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-07-01;13.04659 ?
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