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21/05/2013 | FRANCE | N°11/06153

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section a, 21 mai 2013, 11/06153


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



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ARRÊT DU : 21 MAI 2013



(Rédacteur : Madame Maud Vignau, Président)

(PH)



PRUD'[Localité 1]



N° de rôle : 11/06153











Monsieur [N] [H]



c/



SA Hérakles venant aux droits de la SA Nationale des Poudres et Explosifs Matériaux Energétiques















Nature de la décision : AU F

OND













Notifié par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,





Gros...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 21 MAI 2013

(Rédacteur : Madame Maud Vignau, Président)

(PH)

PRUD'[Localité 1]

N° de rôle : 11/06153

Monsieur [N] [H]

c/

SA Hérakles venant aux droits de la SA Nationale des Poudres et Explosifs Matériaux Energétiques

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 16 août 2011 (RG n° F 11/02297) par le Conseil de Prud'hommes - formation de départage - de Bordeaux, section Industrie, suivant déclaration d'appel du 04 octobre 2011,

APPELANT & INTIMÉ :

Monsieur [N] [H], né le [Date naissance 1] 1949 à [Localité 3], de

nationalité Française, retraité, demeurant [Adresse 1],

Représenté par Maître Labrunie de la SCP Jean-Paul Teissonnière & associés, avocats au barreau de Paris,

INTIMÉE & APPELANTE : suivant déclaration d'appel du 11 octobre 2011,

SA Hérakles venant aux droits de la SA Nationale des Poudres et Explosifs Matériaux Energétiques, siret n° 440 513 059 00046, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, [Adresse 3],

Représentée par Maître Perlaud de la SCP Dominique de la Garanderie & associés, avocats au barreau de Paris,

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 18 mars 2013 en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Maud Vignau, Président,

Madame Raphaëlle Duval-Arnould, Conseiller,

Madame Marie-Luce Grandemange, Conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Anne-Marie Lacour-Rivière.

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

Monsieur [N] [H] a été employé par la Société Nationale des Poudres et Explosifs Matériaux Energétiques, aux droits de laquelle vient désormais la société Hérakles, sur le site de [Localité 2] qui par arrêté du 30 juin 2003 a été inscrit sur la liste des établissements ouvrant droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (ACAATA). Il a été admis le 1er août 2004 au régime de l'Allocation de Cessation Anticipée d'Activité des Travailleurs de l'Amiante (ACAATA).

Il a saisi le Conseil de Prud'hommes de Bordeaux le 9 mars 2010 pour obtenir réparation des préjudices subis pour avoir été durant sa vie professionnelle, exposé à l'inhalation de fibres d'amiante. Par jugement de départage du 16 août 2011, le juge départiteur a débouté le salarié de ses demandes de dommages et intérêts au titre d'un préjudice économique et d'un préjudice résultant d'un bouleversement dans ses conditions d'existence mais a condamné l'employeur, la Société Nationale des Poudres et Explosifs Matériaux Energétiques, aux droits de laquelle vient désormais la société Hérakles, à payer à Monsieur [N] [H] la somme de 8.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation d'un préjudice d'anxiété et la somme de 300 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Monsieur [N] [H] a régulièrement interjeté appel de cette décision.

La Société Nationale des Poudres et Explosifs Matériaux Energétiques a interjeté appel incident.

Dans ses conclusions déposées le 18 février 2013, développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, Monsieur [N] [H] demande à la Cour de confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a dit qu'il avait été exposé à l'inhalation de fibres d'amiante au sein de la Société Nationale des Poudres et Explosifs Matériaux Energétiques dans des conditions constitutives d'un manquement à l'obligation de sécurité de résultat de son employeur et qu'il a subi des préjudices qu'il convient de réparer, a condamné l'employeur à payer la somme de 300 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et ordonné l'exécution provisoire.

Il demande à la Cour d'infirmer le jugement entrepris pour le surplus, de statuer à nouveau et de condamner la société Hérakles venant aux droits de la Société Nationale des Poudres et Explosifs Matériaux Energétiques à verser au salarié 15.000 € au titre du bouleversement dans les conditions d'existence, 15.000 € en réparation du préjudice d'anxiété et 1.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Hérakles venant aux droits de la Société Nationale des Poudres et Explosifs Matériaux Energétiques demande à la Cour de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande formée au titre du bouleversement dans les conditions d'existence, et de fixer l'indemnisation du préjudice d'anxiété en fonction de son risque d'exposition et des pièces justifiant son préjudice moral personnel. Elle demande de ramener à de plus justes proportions la somme sollicitée par l'appelant au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur ce, la Cour :

Vu l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 qui a institué une allocation de cessation anticipée d'activité au bénéfice des salariés et anciens salariés qui ont travaillé dans des établissements figurant sur une liste fixée par arrêté ministériel (établissements de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, établissements de flocage et de calorifugeage à l'amiante, établissements de construction et de réparation navales). L'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, ACAATA).

Vu l'arrêté ministériel du 30 juin 2003 modifiant la liste des établissements susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante qui a ajouté l'établissement SNPE [Adresse 2] pour la période de 1972 à 1992 et la SNPE (société Celerg) [Localité 2] pour la période de 1993 à 1997. (soit de 1972 à 1997).

Vu le rapport établi le 25 novembre 2002 par l'inspecteur du travail dont il ressort que l'établissement SNPE sis à [Localité 2] a utilisé de l'amiante entre 1972 et 1997 dans les différents processus de production sous les formes les plus diverses : de l'amiante libre en poudre, du Durestos (composite comprenant de l'amiante), des matériaux d'isolation de calorifugeage contenant de l'amiante, sans que les salariés qui intervenaient dans ces processus de fabrication aient bénéficié de protection individuelle ou collective. L'inspecteur soulignait que l'air extrait de certains ateliers pollués par l'amiante était expulsé par les extracteurs dans l'air que respirait toute personne présente dans l'environnement immédiat de l'entreprise et que l'ensemble des salariés et des sous-traitants pouvaient être exposés au risque lié à l'inhalation de la fibre d'amiante. Il ajoutait encore que la grande polyvalence des salariés qui pouvaient être exposés, ajoutait au risque d'inhalation massive des fibres d'amiante au gré de leurs changements de postes. L'inspecteur du travail concluait, enfin, que l'activité de l'entreprise entre 1972 et 1997 exposait sévèrement les salariés aux risques liés à l'inhalation de fibres d'amiante.

Il résulte de ces éléments que tous les salariés de l'établissement ayant travaillé entre 1972 et 1997 dans l'établissement SNPE de St Médard en Jalles ont tous été exposés aux poussières d'amiante, sans que l'entreprise prenne les mesures nécessaires pour protéger leur santé physique et mentale, en ne mettant pas à leur disposition les protections collectives et individuelles adéquates, et ce, en infraction à son obligation de sécurité de résultat visée à l'article L 4121-1 du code du travail.

Il s'ensuit que tous les salariés de l'entreprise SNPE matériaux énergétiques de St Médard, établissement mentionné à l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 et figurant sur une liste établie par arrêté ministériel ouvrant droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, exposés à l'amiante pendant une période de 1972 à 1997 où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante, ont droit de réclamer réparation des préjudices occasionnés par ce manquement.

En l'espèce, Monsieur [N] [H] a travaillé du premier octobre 1973 au 31 juillet 2004, en qualité d'employé puis d'agent de maitrise à différents postes sur le site de la SNPE matériaux énergétiques de St Médard, établissement inscrit sur la liste des établissements ouvrant droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante pour la période de 1972 à 1997. Il produit une attestation de laquelle il résulte qu'il a durant les périodes de 1978 à 1988 été directement et régulièrement en contact avec des fibres et poussières d'amiante. Sur le plan personnel son épouse témoigne de son angoisse et de ses anxiétés y compris nocturnes face aux risques de maladie liés à l'amiante. Il bénéficie d'ailleurs d'un suivi médical poste professionnel suite à cette exposition cancérogène. (pièces PSV 1 à 11 de l'appelant).

Il ne peut donc être sérieusement contesté que Monsieur [N] [H] se trouve

depuis, de par le fait de son employeur, dans une situation d'inquiétude permanente face au risque de déclaration à tout moment d'une maladie liée à l'amiante ce qui caractérise l'existence d'un préjudice spécifique d'anxiété qu'il convient, en conséquence de réparer par l'allocation d'une somme de 10.000 €.

En revanche, Monsieur [N] [H] ne produit aucun élément permettant d'établir qu'il a subi un préjudice distinct, autrement caractérisé, au titre du boulever-sement de ses conditions d'existence et dès lors, le déboute de cette demande.

L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en faveur du salarié et de lui allouer une indemnité de 300 €, à la charge de l'employeur.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

' Confirme partiellement la décision attaquée en ce qu'elle a :

- débouté le salarié de sa demande de dommages et intérêts fondée sur un préjudice au titre du bouleversement de ses conditions d'existence,

et :

- condamné la SA SNPE à payer à Monsieur [N] [H] 300 € (trois cents euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

' Réforme pour le surplus.

Et, statuant à nouveau :

' Condamne la société Hérakles venant aux droits de la Société Nationale des Poudres et Explosifs Matériaux Energétiques à payer à Monsieur [N] [H] 10.000 € (dix mille euros) à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice d'anxiété.

' Condamne la société Hérakles venant aux droits de la Société Nationale des Poudres et Explosifs Matériaux Energétiques à payer à Monsieur [N] [H] 300 € (trois cents euros) en application de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens .

Signé par Madame Maud Vignau, Président, et par Madame Anne-Marie Lacour-Rivière, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A-M Lacour-Rivière M. Vignau


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section a
Numéro d'arrêt : 11/06153
Date de la décision : 21/05/2013

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-05-21;11.06153 ?
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