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18/09/2012 | FRANCE | N°11/07336

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section a, 18 septembre 2012, 11/07336


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



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ARRÊT DU : 18 SEPTEMBRE 2012



(Rédacteur : Madame Monique Castagnède, Président)

(PH)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 11/07336











Société Olivier Bertrand Distribution Sud-Ouest venant aux droits de la SAS Cafein Sud-Ouest



c/



Monsieur [P] [B]















Nature de la décision : AU

FOND













Notifié par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,





G...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 18 SEPTEMBRE 2012

(Rédacteur : Madame Monique Castagnède, Président)

(PH)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 11/07336

Société Olivier Bertrand Distribution Sud-Ouest venant aux droits de la SAS Cafein Sud-Ouest

c/

Monsieur [P] [B]

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 21 novembre 2011 (RG n° F 11/00038) par le Conseil de Prud'hommes - formation paritaire - de Bergerac, section Commerce, suivant déclaration d'appel du 05 décembre 2011,

APPELANTE :

Société Olivier Bertrand Distribution Sud-Ouest venant aux droits de

la SAS Cafein Sud-Ouest, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, [Adresse 2],

Représentée par Maître Stéphanie Ogez, avocat au barreau de Bordeaux,

INTIMÉ :

Monsieur [P] [B], demeurant [Adresse 1],

Représenté par Maître Caroline Dupuy, avocat au barreau de Bordeaux,

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 mai 2012 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Monique Castagnède, Président chargé d'instruire l'affaire,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Monique Castagnède, Président,

Madame Raphaëlle Duval-Arnould, Conseiller, faisant fonction de Président,

Madame Myriam Laloubère, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Anne-Marie Lacour-Rivière.

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

Exposé du litige

Monsieur [B] engagé par la société Cafein Sud-Ouest le 8 décembre 2004 a présenté sa démission le 6 mai 2008. Réembauché le 6 avril 2009, il a été déclaré inapte définitif à tout poste dans l'entreprise en une seule visite le 23 septembre 2010 et licencié pour inaptitude physique le 20 décembre 2010.

Par jugement du 21 novembre 2011, le Conseil de Prud'hommes de Bergerac a jugé le licenciement nul et dépourvu de cause réelle et sérieuse et a condamné la société Olivier Bertrand Distribution Sud-Ouest qui vient aux droits de la société Cafein Sud-Ouest à payer à Monsieur [B] la somme de 25.225,50 € à titre de dommages-intérêts réparant le préjudice occasionné par le licenciement, celle de 4.000 € de dommages-intérêts pour une perte de rémunération, 346,07 € d'indemnité de congés payés et 2.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par lettre recommandée adressée par son conseil le 5 décembre 2011 au greffe de la Cour, la société Olivier Bertrand Distribution Sud-Ouest a interjeté appel de cette décision.

Dans ses conclusions déposées le 28 mars 2012 et développées à l'audience, l'appelante demande à la cour de réformer le jugement, de juger le licen-ciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, de débouter le salarié de toutes ses demandes , d'ordonner la restitution des sommes versées en exécution du jugement et de condamner Monsieur [B] à contribuer par le versement d'une somme de 3.000 € aux frais non taxables par elle exposés.

Monsieur [B] a déposé le 14 mai 2012 des conclusions soutenues à la barre tendant, par confirmation du jugement à voir reconnaître la nullité du licenciement et, subsidiairement, son absence de cause réelle et sérieuse avec les conséquences attachées par la décision. Il sollicite en outre la condamnation de la société appelante à lui verser une indemnité complémentaire de 2.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Motifs

L'appel est recevable comme régulier en la forme.

Sur la demande de nullité

Selon l'article R.4624-31 du code du travail, sauf dans le cas où le maintien du salarié à son poste de travail entraîne un danger immédiat pour la santé ou la sécurité de l'intéressé ou celle des tiers, le médecin du travail ne peut constater d'inaptitude d'un salarié à son poste de travail qu'après deux examens médicaux espacés de deux semaines. Il s'ensuit que cette inaptitude ne peut être déclarée après un seul examen médical que si la situation de danger résulte de l'avis du médecin du travail ou si cet avis indique, outre la référence à l'article R.4624-31 du code du travail, qu'une seule visite est effectuée.

En l'espèce, la fiche de visite du 23 septembre 2010 qui indique expressément une seule visite et se réfère à l'article R.4624-31 susvisé, justifie parfaitement de l'inaptitude physique du salarié.

Pour tenter d'obtenir l'annulation de son licenciement, le salarié fait encore valoir :

- que son employeur aurait fait pression sur lui en vue de la pratique de ventes occultes,

- qu'il lui adressait de nombreux mails virulents,

- qu'il n'hésitait pas à le faire travailler pendant ses congés payés ou même les samedis sans paiement d'heures supplémentaires ni jour de récupération,

- qu'il a modifié unilatéralement le mode de calcul des primes variables ainsi que les objectifs pour 2010,

- que ces agissements qui présentent les caractères d'un harcèlement moral auraient provoqué la dégradation de son état de santé.

Outre le fait que le salarié ne justifie pas avoir montré une quelconque opposition à la pratique des ventes occultes, l'employeur fait valoir à bon droit que si le salarié était réellement opposé à cette pratique, il n'aurait pas postulé pour un nouvel emploi après avoir travaillé dans l'entreprise au cours des années 2005 à 2008, alors que la réalité de l'allégation selon laquelle ces pratiques seraient limitées au Bergeracois ne s'appuie sur aucun justificatif et que le fait que l'entreprise ait changé de direction demeure également inopérant puisque les ventes occultes ont commencé dès l'année 2001.

Les courriels versés aux débats par le salarié ne démontrent pas autre chose que des échanges professionnels sans caractère particulièrement virulent.

Si le salarié justifie avoir travaillé pendant une semaine de congés payés au mois de mai 2010 et si l'employeur lui a refusé une semaine de congé entre le 21 et 24 juin 2010, cela ne suffit pas à démontrer l'impossibilité de récupérer des jours de congés travaillés, alors que l'employeur a proposé au mois de juillet une semaine de congé au mois d'août ainsi que trois jours de récupération les mercredis du mois de juillet, bien que la région de [Localité 3] étant touristique il existe une pratique de prendre les congés annuels en dehors de la période d'été. En effet, l'état annuel des congés payés pour l'année 2010 versé aux débats par l'employeur, montre qu'au cours des mois de juin, juillet et août 2010, aucun des salariés ne bénéficie de plus d'une semaine de congés.

Le contrat de travail de Monsieur [B] stipule une rémunération mensuelle brute de 1.650 € et l'intéressement mensuel variable lié aux résultats commerciaux du secteur dont le mécanisme d'attribution pourra être modifié à chaque début d'exercice. Le salarié ne peut donc valablement faire grief à l'employeur d'avoir modifié unilatéralement le mode de calcul des primes variables et les objectifs pour 2010. Il ne peut davantage prétendre que les objectifs fixés auraient présenté un caractère déraisonnable alors que l'augmentation des résultats de l'autre commercial du dépôt de [Localité 3] lui a permis de les remplir.

Si le médecin traitant indique le 27 février 2010 que l'état anxio dépressif de Monsieur [B] serait secondaire à un problème relationnel avec un de ses collègues, le 16 juillet 2010, il note seulement : 'il se dit victime d'un harcèlement au travail et je le crois' et le psychiatre écrit pour sa part : 'le patient rapporte l'origine de sa dépression à des faits de harcèlement dont il aurait été victime au travail'. Les deux médecins ne font donc que rapporter les dires du salarié, ce qui ne peut constituer une présomption quant à l'existence de ce harcèlement moral.

Dans le dossier remis à la Cour, il n'existe aucun élément relatif aux brimades, dénigrements, insultes et menaces de la part de la hiérarchie évoqués par le Conseil.

Outre le fait que l'intimé n'établit donc pas des faits permettant de présumer l'existence d'un harcèlement moral, les éléments médicaux versés aux débats ne permettent pas d'attribuer la dégradation non contestée de l'état de santé du salarié à une situation de harcèlement moral, de simples difficultés professionnelles pouvant avoir le même effet. À cet égard, il y a lieu de relever que le médecin du travail, consulté par la société Olivier Bertrand Distribution Sud-Ouest sur le point de savoir si sa proposition de reclassement sur un poste équivalent en Aveyron et en Lozère était compatible avec l'état de santé du salarié, a répondu que son état de santé ne permettait pas à Monsieur [B] de reprendre 'ce type d'activité', ce qui tend à établir que la cause du syndrome dépressif résidait davantage dans le type d'activité exercée que dans les relations entretenues avec l'employeur.

Sur la cause du licenciement

Dans ces conditions, il ne peut davantage être retenu qu'une exécution déloyale du contrat de travail qui n'est pas démontrée, serait à l'origine de l'inaptitude médicale.

S'agissant de l'obligation de rechercher un reclassement, l'employeur justifie avoir procédé à des recherches détaillées et personnalisées à l'intérieur du groupe qui se sont révélées improductives. Il a proposé un reclassement dans un poste équivalent de responsable de clientèle sur l'Aveyron et la Lozère qui a été refusé par le salarié. Au demeurant, le médecin du travail a estimé que l'intéressé ne pouvait pas reprendre ce type d'activité. Il importe peu en conséquence que l'employeur ait procédé à l'embauche d'un commercial à [Localité 4], ce qui n'est au demeurant pas démontré.

L'employeur ayant respecté son obligation de rechercher un reclassement, le licenciement doit être jugé fondé sur une cause réelle et sérieuse.

Sur la régularité de la procédure

Monsieur [B] a été convoqué à un entretien préalable au licen-ciement fixé au 15 décembre par lettre postée le 9 décembre 2010 et présentée le 10 décembre. Il fait valoir que le délai de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre prévu par l'article L.1232-2 du code du travail n'a pas été respecté et sollicite l'indemnisation du préjudice occasionné.

Le Conseil a exactement relevé que le 12 décembre étant un dimanche, le délai expirait le 16 décembre et qu'en conséquence la procédure n'a pas été respectée.

Cette irrégularité de procédure justifie une indemnité de 1.000 €.

Sur les congés payés

Le salarié qui avait obtenu des congés payés du 17 au 28 mai justifie avoir travaillé les 25, 26, 27 et 28 mai sans que l'employeur soit en mesure de justifier que ces journées de repos ont été remplacées. Le Conseil de Prud'hommes a donc exactement accordé au salarié à ce titre la somme de 346,07 €. L'employeur n'est pas crédible lorsqu'il prétend que c'est de sa propre initiative que le salarié aurait amputé ses congés de quatre jours.

Sur les dommages-intérêts pour perte de rémunération

Monsieur [B] qui fait grief à l'employeur d'avoir modifié unilatéralement au mois de mars 2010, à la fois les modalités de calcul des primes de résultat mais aussi les objectifs, sollicite la réparation de la perte de rémunération subie par la condamnation de l'employeur lui verser la somme de 4.000 € de dommages-intérêts.

Il a déjà été vu que ce faisant, l'employeur n'a fait qu'appliquer les stipulations du contrat de travail. À défaut de faute, il ne saurait y avoir lieu à dommages intérêts.

L'appelante demande que soit ordonnée la restitution des sommes qu'elle a versées en vertu du jugement assorti de l'exécution provisoire. Le présent arrêt infirmatif constituant le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution du jugement, il n'y a pas lieu de statuer sur cette demande.

L'intimé qui succombe en majeure partie dans ses prétentions devra supporter les dépens d'appel mais, eu égard à la disparité des situations des parties, il ne sera pas fait application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

' réformant le jugement déféré, déclare le licenciement de Monsieur [B] fondé sur une cause réelle et sérieuse et déboute le salarié de ses demandes de dommages-intérêts consécutifs au licenciement et à la perte de rémunération ;

' confirme pour le surplus jugement déféré ;

y ajoutant :

' condamne la société Olivier Bertrand Distribution Sud-Ouest à payer à Monsieur [B] la somme de 1.000 € (mille euros) à titre de dommages-intérêts pour le non-respect de la procédure ;

' dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

' dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande de restitution des sommes versées en vertu de l'exécution provisoire attachée au jugement déféré à la Cour ;

' condamne Monsieur [B] aux dépens d'appel.

Signé par Madame Raphaëlle Duval-Arnould, Conseiller, faisant fonction de Président, et par Madame Anne-Marie Lacour-Rivière, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A-M Lacour-Rivière R. Duval-Arnould


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section a
Numéro d'arrêt : 11/07336
Date de la décision : 18/09/2012

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4A, arrêt n°11/07336 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-09-18;11.07336 ?
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