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24/03/2020 | FRANCE | N°18/01369

France | France, Cour d'appel de Besançon, 1ère chambre, 24 mars 2020, 18/01369


ARRÊT N°



BM/DB



COUR D'APPEL DE BESANÇON

- 172 501 116 00013 -



ARRÊT DU 24 MARS 2020



PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE









Contradictoire

Audience publique

du 11 février 2020

N° de rôle : N° RG 18/01369 - N° Portalis DBVG-V-B7C-D7SL



S/appel d'une décision

du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BESANCON

en date du 26 juin 2018 [RG N° 14/00708]

Code affaire : 53A

Prêt - Demande en nullité du contrat ou d'une clause

du contrat





SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE C/ [N] [I], [O] [M] épouse [I], [H] [Z]







PARTIES EN CAUSE :





SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE SA

immatriculée au RCS de PARIS n°542 097 902...

ARRÊT N°

BM/DB

COUR D'APPEL DE BESANÇON

- 172 501 116 00013 -

ARRÊT DU 24 MARS 2020

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

Contradictoire

Audience publique

du 11 février 2020

N° de rôle : N° RG 18/01369 - N° Portalis DBVG-V-B7C-D7SL

S/appel d'une décision

du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BESANCON

en date du 26 juin 2018 [RG N° 14/00708]

Code affaire : 53A

Prêt - Demande en nullité du contrat ou d'une clause du contrat

SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE C/ [N] [I], [O] [M] épouse [I], [H] [Z]

PARTIES EN CAUSE :

SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE SA

immatriculée au RCS de PARIS n°542 097 902

dont le siège est sis [Adresse 2]

APPELANTE

Représentée par Me Philippe METAIS de la SCP WHITE & CASE LLP, avocat au barreau de PARIS et par Me Caroline LEROUX, avocat au barreau de BESANCON

ET :

Monsieur [N] [I]

né le [Date naissance 1] 1959 à [Localité 7]

de nationalité française - Profession : Agent technique,

demeurant [Adresse 3]

Madame [O] [M] épouse [I]

née le [Date naissance 4] 1963 à [Localité 8] - de nationalité française,

demeurant [Adresse 3]

INTIMÉS

Représentés par Me Delphine GROS de la SELARL TERRYN - AITALI -GROS-CARPI-LE DENMAT, avocat au barreau de BESANCON

Monsieur [H] [Z]

né le [Date naissance 5] 1957 à [Localité 8] - de nationalité française,

demeurant [Adresse 6]

INTIMÉ

Représenté par Me Pascale BRETON de la SCP HENNEMANN-BRETON-BEN DAOUD, avocat au barreau de BESANCON et par Me Céline LEMOUX, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats :

PRÉSIDENT : Monsieur Edouard MAZARIN, Président de chambre.

ASSESSEURS : Madame A. CHIARADIA et Madame B. MANTEAUX (magistrat rapporteur), Conseillers.

GREFFIER : Madame D. BOROWSKI, Greffier.

lors du délibéré :

PRÉSIDENT : Monsieur Edouard MAZARIN, Président de chambre

ASSESSEURS : Madame A. CHIARADIA et Madame B. MANTEAUX, Conseillers.

L'affaire, plaidée à l'audience du 11 février 2020 a été mise en délibéré au 24 mars 2020. Les parties ont été avisées qu'à cette date l'arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe.

**************

Faits, procédure et prétentions des parties

Selon acte notarié en date du 28 mai 2009, M. [N] [I] et son épouse, Mme [O] [M], (les époux [I]) sur les conseils de M. [H] [Z] dans le choix de cet investissement de défiscalisation, ont acquis au prix de 99 933,31 euros un appartement situé à Synod (74) en l'état futur d'achèvement.

Pour financer cette acquisition, ils ont souscrit, le 21 avril 2009, auprès de la société BNP Paris Personal Finance (la banque) un prêt immobilier intitulé Helvet Immo d'un montant de 161 890,62 CHF dont le remboursement s'effectue en euros pendant 15 ans et dont le taux d'intérêts est révisable tous les 3 ans.

Par exploits d'huissier délivrés les 12 et 19 mars 2014, les époux [I] ont assigné en justice la banque et M. [Z] aux fins de voir déclarer nul le contrat de prêt en raison de la présence de la clause d'indexation monétaire illicite et obtenir réparation de leurs préjudices.

Par jugement rendu le 26 juin 2018, le tribunal de grande instance de Besançon a :

- déclaré recevable l'action des époux [I] comme non prescrite ;

- rejeté la demande de nullité du prêt Helvet Immo en date du 21 avril 2009 souscrit en francs suisses pour vice de leur consentement ;

- prononcé la déchéance du droit aux intérêts contractuels qui devaient être perçus par la banque et ordonné la substitution du taux contractuel par le taux légal à compter du 21 avril 2009, en raison de l'erreur portant sur le taux effectif global ;

- ordonné à la banque de produire un nouveau tableau d'amortissement prenant en compte les intérêts payés sur le capital emprunteur, soit la somme de 106 506,99 euros, déduction faite de l'intégralité des sommes déjà versées par les époux [I] ;

- condamné la banque à payer aux époux [I] la somme de 30 000 euros pour violation de son devoir de conseil ;

- condamné M. [Z] à payer 10 000 euros aux époux [I] pour violation de son devoir de conseil ;

- condamné in solidum la banque et M. [Z] à payer aux époux [I] la somme de 4 500 euros en réparation de leur préjudice moral ;

- condamné in solidum la banque et M. [Z] à payer aux époux [I] la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens, avec distraction au profit de leur conseil la SELARL Terryn Aitali & associés ;

- débouté les parties de toutes leurs autres prétentions (et notamment des demandes des époux [I] d'annulation de la clause de monnaie de tout compte et de la voir juger abusive).

Par déclaration parvenue au greffe le 20 juillet 2018, la banque a régulièrement interjeté appel partiel de ce jugement et, au dernier état de ses écrits transmis le 8 janvier 2020, elle conclut à sa confirmation en ce qu'il a débouté les époux [I] de leurs demandes d'annulation de la clause de monnaie de compte stipulée dans le contrat de prêt Helvet Immo ou de la voir déclarer abusive et de nullité du contrat de prêt pour vice du consentement et M. [Z] de sa demande de garantie.

Elle demande son annulation, à titre principal, et son infirmation, à titre subsidiaire, en ce qu'il a déclaré que le taux effectif global comportait une erreur et ordonné la substitution du taux conventionnel par le taux d'intérêts légal.

Elle sollicite son infirmation pour le surplus et, en conséquence, de :

- juger irrecevable la demande de nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels des époux [I] pour défaut d'intérêt à agir, subsidiairement, de juger que le taux effectif global n'est pas erroné et s'il était jugé erroné, que la déchéance du déchéance du droit aux intérêts soit proportionnée ;

- débouter les époux [I] de toutes leurs demandes au titre du caractère prétendument abusif de la clause d'indexation stipulée en devises ;

- juger qu'elle n'était pas tenue à un devoir de conseil envers les époux [I], qu'elle n'a manqué ni à son devoir de conseil ni à son devoir de mise en garde à leur égard, qu'ils ne rapportent pas la preuve de leur préjudice direct, certain et indemnisable qui ne constitue, s'il existe, qu'une simple perte de chance de ne pas contracter un crédit plus favorable, dont le montant doit être mesuré à la chance perdue et ne peut être égal à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle avait été réalisée ;

- débouter les époux [I] de leurs demandes de dommages et intérêts pour préjudice financier et moral ;

- condamner les époux [I] au paiement d'une somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Sur les points objets de son appel, la banque fait notamment valoir que :

- sur la nullité du jugement pour défaut de motif : elle avait présenté au premier juge un moyen d'irrecevabilité de la demande de nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels pour défaut d'intérêt à agir auquel le juge n'a pas répondu alors qu'il était pourtant de nature à exercer une influence sur la solution du litige ;

- sur la demande de nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels : statuant à nouveau la cour devra la juger irrecevable du fait qu'une telle nullité n'est pas prévue pour les crédits immobiliers lorsqu'il s'agit d'une erreur sur le taux effectif global, et du fait que les époux [I] ne démontrent aucun préjudice ;

- sur l'erreur affectant le taux effectif global : ce taux doit uniquement tenir compte des frais effectivement payés par les emprunteurs à l'occasion de l'octroi du prêt, de sorte que l'éventuelle rémunération de l'intermédiation, laquelle n'est au surplus pas prouvée, ne doit pas y être incluse, M. [Z] n'étant pas intervenu auprès des époux [I] pour le compte de la banque ;

- sur les dommages et intérêts : elle n'est tenue qu'à une obligation d'information, laquelle doit être neutre et objective, à défaut de quoi elle devient une obligation de conseil contraire à son obligation de non-immixtion dans les affaires des emprunteurs ; sans preuve d'un risque d'endettement des époux [I] lié au crédit lui-même au jour de sa souscription, elle n'était pas non plus tenue à une obligation de mise en garde, laquelle ne porte d'ailleurs pas sur l'information relative aux effets de la variation du taux de change, d'autant que les époux [I] ne sont pas des emprunteurs profanes ; elle a parfaitement respecté son obligation d'information et le préjudice des époux [I] ne saurait être caractérisé par la perte de chance de ne pas contracter un crédit à un taux plus favorable, faute de justifier de leur renonciation à de tels contrats, et n'est qu'incertain, la variation du taux de change pouvant leur être favorable dans le futur ;

- sur la garantie de la banque à l'égard de M. [Z] : elle n'a pas lieu d'être, la prestation conclue entre ce dernier et les époux [I] est un contrat d'intermédiaire en opérations de banque et en conseil en gestion de patrimoine au titre duquel M. [Z] a conçu et réalisé le montage de l'opération de défiscalisation et a proposé aux époux [I] les solutions de prêt qu'il estimait adaptées à l'opération envisagée ; elle-même n'est jamais intervenue directement auprès des époux [I] ; seul M. [Z] était soumis à une obligation de conseil ; le mandat d'intermédiaire en opération de banque ne crée aucun lien de subordination ni de représentation entre le prêteur et l'intermédiaire, lequel ne saurait solliciter la garantie du prêteur pour des fautes qu'il aurait lui-même commises.

M. [Z] a formé appel incident du jugement en ce qu'il a retenu sa responsabilité et par dernières conclusions transmises le 5 avril 2019, il demande à la cour de débouter les époux [I] de toutes leurs demandes, à titre subsidiaire, de condamner la banque à le garantir de toute condamnation mise à sa charge au titre de la souscription du prêt Helvet Immo, et de condamner les époux [I] à lui verser 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP Hennemann-Breton-Ben Daoud.

Il prétend qu'il n'est pas intervenu auprès des époux [I] en qualité de prestataire de services d'investissement mais comme intermédiaire en opérations de banque en exécution d'une convention de mandat en date du 5 avril 2006 le liant à la banque. Or, ce simple rôle d'intermédiaire n'impliquait, à la date des faits, aucune obligation d'information et de conseil à sa charge s'agissant des caractéristiques et de l'opportunité de l'offre de prêt formulée directement par la banque, qu'il n'a pas même eue entre les mains. Il ne saurait donc être tenu pour responsable des prétendus manquements de la banque au titre de son obligation d'information et de conseil dans l'octroi du prêt litigieux.

En tout état de cause, il indique que les époux [I] étaient bien informés des caractéristiques du crédit notamment des risques liés au taux de change de sorte qu'aucune faute ne peut être retenue à son encontre quant à la souscription du crédit.

La seule demande de dommages et intérêts formulée par les époux [I] contre lui pour perte de change était lié au crédit Helvet Immo ; le tribunal ne pouvait donc pas le condamner solidairement avec la banque pour une perte de chance liée à son intervention sur la conception du projet immobilier.

Il n'avait d'obligation de moyen de conseil et d'information qu'en sa qualité de conseil en gestion de patrimoine, à laquelle s'appliquent les règles en matière d'intermédiation en transactions immobilières, pour l'investissement locatif sis à Synod qui devait être en adéquation avec leur objectif de défiscalisation et susceptible de leur procurer l'avantage fiscal poursuivi. Aucun des documents qu'il leur a remis n'évoque de garantie de loyers. L'objectif de défiscalisation a été atteint ; la seule plainte des intimés réside dans l'effort de remboursement du crédit, en raison de la variation du taux de change d'une part, dont il n'est pas responsable, et de la diminution de la rentabilité du bien immobilier du fait de la baisse des loyers en 2015 qui a été acceptée par les époux [I] en 2015. Ils ont bien perçu les loyers escomptés pendant plus de 5 ans après son intervention. Ils échouent donc à établir une faute s'agissant de l'information et du conseil qui leur ont été prodigués quant à leur investissement immobilier locatif.

Il relève enfin la contradiction dans la décision querellée qui à la fois prononce la déchéance du droit aux intérêts conventionnels et sa substitution par le taux légal et accorde aux époux [I] l'indemnisation de leur préjudice pour perte de chance de ne pas avoir pu souscrire un crédit à un taux plus avantageux.

Par ailleurs, la perte de chance, si elle était retenue, devrait être évaluée en fonction des propositions faites par la banque de remplacer l'emprunt litigieux par un nouveau, au taux fixe de 4,50 %, proposition rejetée par les époux [I].

Il conclut à l'absence de preuve d'un préjudice financier lié au crédit, la proposition de remplacement du crédit litigieux par un nouveau crédit étant faite sur la base d'un taux de change arrêté au jour de la souscription du crédit initial.

Les époux [I] ont répliqué en dernier lieu le 19 janvier 2020 pour demander à la cour, à titre principal, de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, de débouter la banque et M. [Z] de toutes leurs demandes et, y ajoutant, de les condamner in solidum à leur verser 5 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens à hauteur d'appel ainsi qu'aux entiers dépens.

A titre subsidiaire, ils demandent à la cour de :

' Sur les clauses abusives du contrat de prêt :

- infirmer le jugement sur ce point et déclarer abusives et non écrites la clause de monnaie de compte, la clause qui stipule de faire supporter exclusivement aux emprunteurs les conséquences de la variation du taux de change, et la clause de fixation des intérêts contractuels variables en ce qu'elle ne permet pas de déterminer à l'avance le taux qui sera appliqué aux sommes prêtées, et en ce que ces clauses ont pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, au détriment des consommateurs, et en ce qu'elles ont pour objet et pour effet de stipuler une date indicative d'exécution du contrat en dehors des cas prévus par la loi ;

- en conséquence, les déclarer non écrites, en écarter l'application et, en tant que de besoin, déclarer nul le contrat de prêt avec restitution des sommes dues éventuellement, calculées sur le capital emprunté en euros ;

- en conséquence, juger que les fonds débloqués en euros devront être remboursés par eux dans cette même monnaie, sans intérêt ;

- ordonner à la banque d'établir un nouveau tableau d'amortissement tenant compte des paiements effectués entièrement imputés sur le capital prêté ;

'sur la nullité du prêt :

- infirmer le jugement entrepris ;

- prononcer la nullité du contrat de prêt et remettre les parties en l'état avant la conclusion du dit acte en disant que les fonds ont été débloqués en euros pour la somme de 106 506,99 euros et non 161 890,62 CHF, et dire que les parties devront, le cas échéant, restituer les fonds en euros ;

- juger que des sommes empruntées en euros devront être déduites les sommes versées mensuellement au titre des échéances de remboursement du prêt depuis mars 2010, les frais de commission, les frais de change, les frais de tenue de compte de 40 euros par an, les primes d'assurance mensuelles de 21,30 euros, et tous autres frais liés au prêt ;

- donner injonction à la banque de produire un décompte des sommes perçues de toutes natures depuis le déblocage des fonds, et d'établir en conséquence un décompte des sommes dues par les époux [I], voire par elle-même aux époux [I], sous astreinte de 100 euros par jour de retard, passé un mois après la signification de l'arrêt à intervenir ;

- ordonner la compensation des créances respectives ;

'Concernant la demande de déchéance des intérêts du prêteur :

- ordonner la déchéance des intérêts en application des articles L.312-8, 2° ter et L.312-33 (anciens) du code de la consommation pour défaut de notice d'information valable et de réception du tableau d'amortissement à chaque variation du taux ;

'Concernant la nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel au titre du TEG erroné et subsidiairement la déchéance intégrale du droit aux intérêts :

- débouter la banque de sa demande d'annulation du jugement et confirmer le jugement entrepris, subsidiairement, si la cour annulait ou infirmait le jugement sur ce point :

- dire recevable leur demande après avoir constaté leur intérêt à agir ;

- prononcer la nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel ou subsidiairement la déchéance intégrale des intérêts, après avoir constaté que l'acte de prêt ne respecte pas les mentions légales et d'ordre public, relatives au taux effectif global et au taux de période, que le taux effectif global annoncé dans l'acte de prêt est erroné et que la banque n'a pas informé les emprunteurs du taux effectif global nouveau à chaque variation du taux d'intérêts ;

- ordonner à la banque de produire un décompte des sommes dues en conséquence, selon un nouveau tableau d'amortissement, après imputation des sommes versées au titre des intérêts sur le capital emprunté ;

'Sur le manquement aux obligations d'information, de mise en garde et de conseil :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a retenu la responsabilité et les manquements de la banque et de M. [Z], sauf dans le quantum des condamnations ;

- condamner in solidum la banque et M. [Z] à leur payer la somme de 80 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice financier et au titre de la perte de chance occasionnée par la signature du contrat de prêt litigieux ;

- condamner M. [Z] à leur payer la somme de 10 000 euros au titre des préjudices financiers, de leur perte de chance de ne pas contracter l'investissement réalisé et préjudices moraux consécutifs à l'investissement immobilier réalisé, non fiable, et sans garantie de loyer ;

- condamner in solidum la banque et M. [Z] à leur payer la somme de 10 000 euros au titre de leur préjudice moral ;

'sur les frais et dépens :

- de condamner in solidum la banque et M. [Z] à leur verser 5 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens à hauteur d'appel ainsi qu'aux entiers dépens.

Ils font valoir que :

- sur la nullité de la convention d'intérêts ou la déchéance du droit aux intérêts : la notice d'information et la simulation sur la variation du taux d'intérêts sont tout aussi incompréhensibles que le corps entier de l'offre du prêt, dont elles ne sont d'ailleurs qu'une simple copie ; aucun nouveau tableau d'amortissement ne leur a été envoyé lors de la variation du taux d'intérêts.

La nullité, et subsidiairement la déchéance du droit aux intérêts totale, de la convention d'intérêts s'impose également du fait que le taux effectif global n'inclut pas les frais d'acte, les frais liés à l'intervention de M. [Z] et ceux liés à l'intervention du notaire, que des exemples significatifs de calcul du taux effectif global du fait de la variation du taux d'intérêts remplaçant l'obligation de justifier du taux effectif global appliqué n'ont pas été versés aux emprunteurs, du fait que le nouveau taux effectif global, après variation, n'a pas davantage été porté à leur connaissance par mention sur les relevés qu'ils ont reçus et du fait enfin que l'égalité des flux entre sommes prêtées et versements dus n'était pas assurée.

La différence, largement plus importante qu'une décimale, entre le taux effectif global annoncé (4,88 %) et le taux réel (5,10 %) permet de les dire recevables, comme ayant un intérêt à agir, d'écarter la demande de nullité du jugement et de prononcer la nullité de la convention d'intérêts et sa substitution par le taux légal ;

- sur la responsabilité de M. [Z] : ils prétendent qu'il n'a jamais fait état de sa qualité d'intermédiaire en opérations de banque, mais, quelle que soit la qualité avec laquelle il est intervenu auprès d'eux pour leur conseiller un projet de défiscalisation et un financement, il était tenu d'une obligation de conseil, d'information, de mise en garde et de loyauté. Il avait le devoir de s'enquérir de leur capacité financière, de leur expérience en matière d'investissement, et de leurs objectifs afin de leur proposer un projet adapté ; il devait les alerter et les mettre en garde sur les risques de l'opération envisagée et les éclairer afin qu'ils s'engagent en toute connaissance de cause. Ses obligations ne découlent pas de la qualification du rapport contractuel qu'il a avec la banque mais des rapports contractuels qu'il a avec eux.

Il lui appartient de prouver qu'il les informés de ce que le prêt Helvet Immo, qu'il a lui-même proposé, était souscrit en monnaie étrangère, que le risque de variation du taux de change n'était supporté que par eux et que le taux était variable.

Il a également failli en ses obligations de conseil en leur proposant d'investir dans le projet immobilier arrêté en présentant ce projet comme incluant un bail commercial de 9 ans avec une garantie de loyers, en leur faisant signer un contrat de réservation le jour même de la présentation du projet, sans délai de réflexion, et en leur faisant finaliser l'acte authentique dans un délai extrêmement rapide, après une présentation trompeuse.

Ils lui reprochent également de ne pas s'être enquis de la capacité de la société d'exploitation de l'immeuble acheté à remplir ses obligations contractuelles ;

- sur la responsabilité de la banque : ils estiment qu'elle ne peut se contenter de satisfaire ses devoirs d'information et de mise en garde par la seule édition de l'offre de prêt, dont les termes sont par ailleurs d'une complexité particulière, y compris pour un emprunteur averti, ce qu'ils ne sont pas. Le risque d'endettement excessif existait dans la structure même du contrat et n'a pas manqué de se réaliser lors de la chute de l'euro, monnaie dans laquelle ils ont toujours perçu leurs salaires. Compte tenu de leur profil, la banque devait s'abstenir de leur proposer un prêt en devises étrangères et, a minima, les mettre en garde sur les risques d'un tel prêt ;

- sur leur préjudice, ils indiquent qu'ils avaient souscrit en 2009 un prêt pour un montant initial de 161 890 CHF (soit 104 933 euros) et que le capital restant à rembourser en décembre 2018 étaient encore de 79 832,64 euros après 10 ans de remboursements réguliers pour un montant total de 107 040 euros.

Ils demandent à la cour de cumuler la nullité du contrat de prêt et celle de la clause d'indexation sur le franc suisse afin que le capital à rembourser le soit en euros et non en francs suisses avec le taux de change actuel, étant rappelé qu'ils n'ont jamais perçu la somme de 161 890,62 CHF mais celle de 104 933 euros.

Pour l'exposé complet des moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 21 janvier 2020 et l'affaire, appelée à l'audience du 11 février 2020, a été mise en délibéré au 24 mars 2020.

Motifs de la décision

Aucune des parties n'a relevé appel du jugement en ce qu'il a débouté les époux [I] de leur demande d'annulation de la clause de monnaie de compte stipulée dans le contrat de prêt Helvet Immo ou de la voir déclarée abusive et de leur demande de nullité du contrat de prêt pour vice du consentement.

La cour n'est donc pas saisie de la validité de cette clause, ni de celle du contrat de prêt au regard du vice du consentement.

- Sur la demande d'annulation du jugement pour défaut de motif en ce qu'il n'a pas répondu au moyen tiré de l'irrecevabilité de la demande de nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels pour défaut d'intérêt à agir :

Si le défaut de motifs est une cause d'annulation du jugement par application de l'article 455 code de procédure civile, encore faut-il que le juge ait statué sur cette demande.

En première instance, la banque demandait au tribunal de juger irrecevable la demande de nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels, les époux [I] ne justifiant pas d'un intérêt à agir.

Or, le premier juge, que ce soit dans son exposé des motifs ou dans le dispositif de son jugement, n'a pas répondu à cette demande ; après motivation sur ce point, il a déclaré les époux [I] recevables, leur demande n'étant pas prescrite, étant d'ailleurs constaté que ce moyen n'était pas formulé.

Il en résulte qu'il s'agissait non pas d'un défaut de motifs mais d'une omission de statuer qui, pouvant être réparée par la procédure prévue à l'article 463 du code de procédure civile et qui le sera par la cour par la dévolution même de l'affaire, conduit la cour à rejeter la demande d'annulation du jugement.

- Sur la fin de non recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir :

La banque soutient que la demande des époux [I] en nullité de la stipulation d'intérêts pour erreur sur le taux effectif global est irrecevable du fait qu'une telle nullité n'est pas prévue pour les crédits immobiliers et que, dès lors, faute de voir leur demande susceptible d'être accueillie, ils n'ont pas d'intérêt à agir.

Mais il ne s'agit pas pour les époux [I] de demander l'annulation de la convention d'intérêts pour une erreur portant sur le taux effectif global qui leur serait favorable, auquel cas effectivement ils seraient dépourvus d'intérêt à agir, mais de soutenir que l'erreur leur est préjudiciable. Dès lors, l'intérêt à agir existe, quand bien même la sanction de l'erreur ne serait pas celle qu'ils invoquent.

Par conséquent, la cour rejette cette fin de non recevoir.

- Sur les irrégularités relatives au taux effectif global et ses conséquences,

Le tribunal a retenu que le taux effectif global était erroné faute d'avoir intégré la rémunération de M. [Z], et en a déduit la substitution du taux d'intérêts conventionnel par le taux légal.

Les époux [I] demandent la confirmation du jugement relatif à la déchéance du droit aux intérêts. Subsidiairement, ils sollicitent la nullité de la convention d'intérêts, et plus subsidiairement, la déchéance totale du droit aux intérêts.

La banque soutient que le taux effectif global est conforme aux prescriptions du code de la consommation, que le jugement doit être infirmé sur ce point ; subsidiairement, elle demande que la cour prononcé une déchéance proportionnée du droit aux intérêts.

Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de ses prétentions et donc aux époux [I] d'établir les erreurs qu'ils allèguent.

En vertu de l'article L. 312-8, 3° du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi du 17 mars 2014, l'offre de crédit concernant un prêt immobilier doit indiquer, outre le montant du crédit susceptible d'être consenti et, le cas échéant, celui de ses fractions périodiquement disponibles, son coût total, son taux défini conformément à l'article L.313-1 ainsi que, s'il y a lieu, les modalités de l'indexation.

Le dernier alinéa de l'article L.312-33 ancien du code de la consommation précise que le prêteur qui ne respecte pas l'une des obligations prévues notamment par ce texte pourra être déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.

Il résulte des dispositions de l'article L.313-1 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable au contrat de l'espèce, que le taux effectif global doit inclure les frais, commissions ou rémunérations de toute nature, directs ou indirects, y compris ceux qui sont payés ou dus à des intermédiaires intervenus de quelque manière que ce soit dans l'octroi du prêt. Les charges liées aux garanties ainsi que les honoraires des officiers ministériels ne sont pas compris dans le taux effectif global lorsque leur montant ne peut être indiqué avec précision antérieurement à la conclusion définitive du contrat.

En l'espèce, l'offre de prêt indique un taux conventionnel nominal annuel de 4,05 % et un taux effectif global de 4,88 % représentant le taux initial augmenté de 0,83 % de charges annexes composées des primes d'assurances, des frais de change et des frais de tenue de compte. Elle précise que les frais d'acte (honoraires du notaire, frais liés à la prise de garantie, taxes diverses) sont évalués entre 1,5 et 2 % du montant du crédit et que l'incidence des frais d'acte sur ce taux est d'environ 0,21 % par an.

Il était donc aisé pour les époux [I] de pouvoir faire l'addition des deux sommes pour obtenir un taux effectif global déterminable au moment où l'offre de crédit a été émise de 5,09 % et disposer ainsi des éléments suffisants pour pouvoir comparer ce taux à celui d'autres crédits, puisque tel est l'objectif d'un taux effectif global.

Concernant les frais d'intermédiaire, si les époux [I] soutiennent à juste titre que les sommes qu'ils auraient payées à M. [Z], en qualité d'intermédiaire intervenu lors de la souscription du crédit, doivent être intégrés au taux effectif global, la cour constate qu'à aucun moment ils n'indiquent avoir versé, à ce titre, une somme à ce dernier. Dès lors, ils échouent à prouver une erreur sur ce point et le jugement qui s'est seulement basé sur des vraisemblances doit être réformé.

Concernant les irrégularités invoquées relative au taux variable, si l'article L.313-2 du code de la consommation, dans sa version applicable en 2009, impose la mention du taux effectif global dans tout écrit constatant un contrat de prêt, il ne fait pas obligation au prêteur, en cas de stipulation de révision du taux d'intérêt originel selon l'évolution d'un indice objectif, d'informer l'emprunteur de la modification du taux effectif global résultant d'une telle révision. L'établissement de crédit est donc dispensé d'une mention nouvelle en présence d'un indice objectif, ce qu'est le taux SWAP CHF puisque ne dépendant pas de la seule volonté du prêteur.

Enfin, en quelques lignes finales de ce chapitre, les époux [I] invoque que « l'égalité des flux n'est pas respectée, le taux de période est erroné et par conséquence le taux effectif global indiqué à l'acte est nécessairement inexact ».

S'appuyant sur un document établi à leur demande, ils affirment que le taux de période est de 0,42511 % et non pas de 0,40626 comme calculé selon les éléments communiqués sur l'offre.

Il y a lieu de rappeler à cette partie qu'elle a la charge de prouver les éléments qu'elle invoque, et qu'une simple et absconse affirmation reposant sur un vague document établi unilatéralement à sa demande ne saurait valoir preuve.

Les époux [I] échouant à prouver une erreur portant sur le taux effectif global, ils seront déboutés de leur demande de déchéance du droit aux intérêts après réformation du jugement.

- Sur les irrégularités relatives à la variation du taux d'intérêt :

Par application des dispositions des articles L.312-8, 2° ter et L.312-33 du code de la consommation dans leur version applicable en 2009, le prêteur qui propose une offre de crédit avec un taux variable a l'obligation, sous peine de déchéance du droit aux intérêts, de joindre à l'offre une notice présentant les conditions et modalités de variation du taux d'intérêts et d'un document d'information contenant une simulation de l'impact d'une variation de ce taux sur les mensualités, la durée du prêt et le coût total du crédit.

La notice a bien été jointe à l'offre et contient les informations requises.

Par ailleurs, les textes applicables en 2009 depuis la loi n° 96-314 du 12 avril 1996 ne font plus obligation à la banque d'envoyer aux emprunteurs un échéancier des amortissements nouveaux lors de la variation du taux. La déchéance du droit aux intérêts n'est pas prévue en cas de défaut de mention du taux effectif global sur les relevés de banque reçus par l'emprunteur.

La demande de déchéance du droit aux intérêts des époux [I] doit être rejetée derechef.

- Sur la responsabilité de la banque :

Le premier juge a considéré que la banque opérait par l'intermédiaire de M. [Z], comme apporteur d'affaires, et qu'elle était donc tenue, comme ce dernier, d'un véritable devoir de conseil au titre duquel elle devait vérifier que le projet qui lui était apporté par M. [Z] ne faisait pas courir un risque financier trop important aux époux [I], emprunteurs non avertis.

Or, tenu par un devoir de non-immixtion dans les affaires des emprunteurs qui lui interdit de donner son avis sur l'opportunité de contracter ou non un crédit, et n'ayant pas souscrit un engagement particulier de conseil avec les époux [I] dans le cadre du contrat litigieux, la banque ne saurait être tenue d'un devoir de conseil.

En revanche, elle est tenue d'un devoir d'information et éventuellement d'un devoir de mise en garde.

Sur le devoir d'information, la cour relève, que les stipulations du contrat de crédit (paragraphe en gras du courrier d'accompagnement, pages 1, 2, 3, 4, etc. de l'offre ) font clairement apparaître que le prêt est en francs suisses alors que les paiements sont en euros, ce qui induit nécessairement des opérations de conversion avec un risque de change supporté par l'une ou l'autre des parties selon les modalités de la variation du taux de conversion (paragraphe « opérations de change » page 3, paragraphe « amortissement du capital » page 5, annexe « informations relatives aux opérations de change », qui traitent tous du risque de change).

L'offre précise que l'emprunteur accepte les opérations de change nécessaires au fonctionnement au remboursement du crédit, fait référence à plusieurs reprises à la possible variation du taux de change appliqué aux règlement mensuels et est assortie d'une notice présentant les conditions et modalités de variation du taux d'intérêts du crédit ainsi que d'une information sur les opérations de change et notamment les variation éventuelles du taux de change qui pourraient avoir un impact sur le plan de remboursement.

L'information est tout aussi précise sur le taux d'intérêt.

Au vu de ces éléments, la cour considère que la banque a rempli son devoir d'information à l'égard des emprunteurs.

Sur l'obligation de mise en garde en considération des capacités financières des emprunteurs et du risque de l'endettement né de l'octroi du prêt de ces investisseurs non avertis, M. [I] étant agent technique municipal et Mme [I] secrétaire administrative, la banque ne saurait avoir engagé sa responsabilité du seul fait qu'elle a proposé à des emprunteurs profanes, demeurant et travaillant en France et voulant financer une acquisition immobilière en France, un prêt en francs suisses. Les époux [I] ont souscrit le prêt litigieux dans le cadre d'une opération de défiscalisation immobilière qui impliquait l'acquisition d'un bien immobilier qui devait être financé dans sa totalité par un crédit, dans la perspective de le louer et de bénéficier d'avantages fiscaux. Le prêt Helvet Immo leur a été présenté par M. [Z] ; la banque, qui n'a pas été en relation directe avec les emprunteurs, leur a simplement adressé une offre qu'ils ont acceptée.

Il appartient à celui qui se prévaut d'une faute de la banque d'en apporter la preuve de cette faute, de leur préjudice et du lien de causalité entre les deux.

Les époux [I] ne contestent pas le fait que la banque a rempli son obligation de se renseigner sur leurs capacités financières, que le prêt n'a entraîné, lors de sa souscription, aucun endettement excessif et qu'il était, alors, ajusté à leurs capacités financières.

Ils reprochent à la banque de ne pas les avoir mis en garde contre le risque de change, par le biais d'un avertissement extérieur à l'offre de crédit ; or, l'information leur a été fournie de façon satisfaisante comme il a été vu au paragraphe précédent.

La banque n'a pas dissimulé le risque qui existait pour les emprunteurs de voir les sommes à payer en euros augmenter par l'effet de l'allongement de la période de remboursement du crédit lié à une dépréciation de l'euro ; il ne saurait être exigé de l'établissement de crédit prêteur qu'il évalue très précisément et de manière chiffrée, un risque d'endettement sur la base d'un cours dont il ne contrôle pas les fluctuations.

Le taux de change est, par essence, susceptible d'évoluer, et a nécessairement des effets sur l'amortissement du prêt. La banque n'était pas en mesure d'anticiper le décrochage de l'euro par rapport au franc suisse qui participe d'une modification fondamentale de la conjoncture économique et est la conséquence de la crise de la dette souveraine de certains pays de la zone euro. La hausse constatée à compter de l'année 2010 constitue un événement imprévisible dont les époux [I] ne peuvent faire grief à la banque de s'être abstenue de les prévenir.

Ainsi, aucune faute imputable à la banque n'étant caractérisée, les époux [I] seront déboutés de leurs demandes indemnitaires avec infirmation du jugement.

- Sur la responsabilité de M. [Z],

Les époux [I] ont la charge d'administrer la preuve de l'obligation contractuelle pesant, selon eux, sur M. [Z] et du lien de causalité entre la faute qu'ils lui reprochent et leur préjudice.

Les parties sont en désaccord sur le rôle de M. [Z] et, par voie de conséquence, sur le type de contrat qui les lie, les époux [I] soutenant qu'il est intervenu, à leur domicile, en qualité de prestataire de service en investissement financiers et M. [Z] prétendant qu'il est intermédiaire en opérations de banque, son rôle n'ayant consisté qu'à mettre en relation les époux [I] et la banque, étant resté extérieur à la signature du contrat de crédit.

Les époux [I] n'apportent aucun élément pour permettre à la cour de caractériser le cadre contractuel de l'intervention de M. [Z] tant au niveau du contexte de leur rencontre que de la souscription des contrats de crédit et d'acquisition immobilière : aucun contrat, aucun document écrit, aucune attestation.

Ce qui est seulement établi c'est que M. [Z] est intervenu auprès des époux [I] pour leur proposer un projet de défiscalisation par le biais d'un investissement immobilier financé par un prêt bancaire, qu'il a proposé deux solutions de financement dont l'une est le prêt Helvet Immo et qu'il a mis en relation les époux [I] avec la banque avec laquelle il était lié par un contrat de mandat d'intermédiaire en opérations de banque prévoyant une rémunération en sa qualité d'apporteur d'affaires.

L'offre de crédit leur a été envoyée directement par la banque et c'est à elle qu'ils l'ont remise. L'acte d'achat du bien immobilier a été signé, hors la présence de M. [Z], devant notaire.

La preuve n'est donc pas rapportée que M. [Z] avait mission de les assister dans la signature des deux contrats litigieux (crédit et achat immobilier) et de les conseiller sur l'opportunité d'accepter ces contrats aux conditions précises faites par les tiers (banque et vendeur).

L'étude qu'il a remise aux époux [I] présente à la fois la situation avec un crédit classique et avec le crédit Helvet. Les éléments communiqués ne permettent pas de savoir quelle a été son implication dans le choix des époux [I] de retenir la proposition avec le crédit Helvet.

Ainsi, il n'est établi, en l'état des pièces versées par les parties, ni que M. [Z] était lié avec les époux [I] par un contrat l'impliquant en sa qualité d'intermédiaire en opérations de banque, ni qu'il était redevable à leur égard, au vu de la réglementation alors en vigueur, d'un devoir de conseil ou de mise en garde dans les risques particuliers liés aux variations du taux de change, ou dans ceux liés aux risques locatifs habituels, étant précisé concernant l'investissement locatif, qu'aucun document remis par M. [Z] ne mentionne de garantie de loyer (aucun élément ne permet de retenir que la pièce 4bis émane de M. [Z]) et qu'il n'a aucune responsabilité dans la baisse de loyer intervenue plusieurs années après l'acquisition du bien.

Dès lors, infirmant le jugement, la cour considère que la preuve d'une faute imputable à M. [Z] n'est pas établie et déboute les époux [I] de l'ensemble de leurs demandes dirigées contre lui.

- Sur les demandes accessoires :

Les époux [I], qui succombent, seront condamnés aux dépens de première instance et d'appel.

Pour des raisons d'équité tenant à la situation économique des parties, toutes les demandes au titre des frais exposés et non compris dans les dépens seront rejetées.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement, après débats en audience publique et en avoir délibéré conformément à la loi :

Rejette la demande d'annulation du jugement formulée par la société BNP Paribas Personal Finance.

Déboute la banque de sa demande d'irrecevabilité de M. [N] [I] et de Mme [O] [M] en leur demande principale d'annulation de la convention d'intérêts pour défaut d'intérêt à agir.

Infirme, dans les limites de l'appel, le jugement rendu entre les parties le 26 juin 2018 par le tribunal de grande instance de Besançon sauf en qu'il a rejeté la demande de nullité du prêt Helvet Immo en date du 21 avril 2009 souscrit en francs suisses pour vice de leur consentement et débouté M. [N] [I] et Mme [O] [M] de leur demande d'annulation de la clause de monnaie de tout compte et de la voir juger abusive.

Statuant sur les chefs infirmés et y ajoutant :

Déboute M. [N] [I] et Mme [O] [M] de leurs demandes de nullité de la convention d'intérêts et de déchéance du droit aux intérêts du prêt Helvet Immo souscrit le 21 avril 2009 auprès de la société BNP Paribas Personal Finance.

Les déboute de leurs demandes de dommages et intérêts formées à l'encontre de la société BNP Paribas Personal Finance et de M. [H] [Z].

Déboute la société BNP Paribas Personal Finance, M. [H] [Z] et M. [N] [I] et Mme [O] [M] de leur demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens tant en première instance qu'en appel.

Condamne M. [N] [I] et Mme [O] [M] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Accorde aux avocats de la cause qui l'ont sollicité, le droit de se prévaloir des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Ledit arrêt a été signé par M. Edouard Mazarin, président de chambre, magistrat ayant participé au délibéré, et par Mme Dominique Borowski, greffier.

Le greffier,le président de chambre


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Besançon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18/01369
Date de la décision : 24/03/2020

Références :

Cour d'appel de Besançon 01, arrêt n°18/01369 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-03-24;18.01369 ?
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