La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/03/2012 | FRANCE | N°10/03047

France | France, Cour d'appel de Besançon, Chambre sociale, 16 mars 2012, 10/03047


ARRET N°

LM/CM



COUR D'APPEL DE BESANCON

- 172 501 116 00013 -

ARRET DU 16 MARS 2012



CHAMBRE SOCIALE





Contradictoire

Audience publique

du 20 Janvier 2012

N° de rôle : 10/03047



S/appel d'une décision

du CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE BELFORT

en date du 19 novembre 2010

Code affaire : 80C

Demande d'indemnités ou de salaires





[P] [Z]

C/

SA TRANSPORTS ALAIN BUFFA & CIE, Me [O] [F], pris en sa qualité de

mandataire judiciaire de la SA TRANSPORTS BUFFA, Me [M] [E], pris en sa qualité d'administrateur judiciaire de la SA TRANSPORTS BUFFA

CGEA DE NANCY









PARTIES EN CAUSE :





Monsieur [P] ...

ARRET N°

LM/CM

COUR D'APPEL DE BESANCON

- 172 501 116 00013 -

ARRET DU 16 MARS 2012

CHAMBRE SOCIALE

Contradictoire

Audience publique

du 20 Janvier 2012

N° de rôle : 10/03047

S/appel d'une décision

du CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE BELFORT

en date du 19 novembre 2010

Code affaire : 80C

Demande d'indemnités ou de salaires

[P] [Z]

C/

SA TRANSPORTS ALAIN BUFFA & CIE, Me [O] [F], pris en sa qualité de mandataire judiciaire de la SA TRANSPORTS BUFFA, Me [M] [E], pris en sa qualité d'administrateur judiciaire de la SA TRANSPORTS BUFFA

CGEA DE NANCY

PARTIES EN CAUSE :

Monsieur [P] [Z], demeurant [Adresse 1]

APPELANT

COMPARANT EN PERSONNE, assisté par Me Pierre-Etienne MAILLARD, avocat au barreau de BELFORT

ET :

SA TRANSPORTS ALAIN BUFFA & CIE, ayant son siège social, [Adresse 6]

Maître [M] [E], pris en sa qualité d'administrateur judiciaire de la SA TRANSPORTS BUFFA, demeurant [Adresse 3]

REPRESENTES par Me Thierry CHARDONNENS, avocat au barreau de BESANCON

Maître [O] [F], pris en sa qualité de mandataire judiciaire de la SA TRANSPORTS BUFFA, demeurant [Adresse 4]

NON COMPARANT, NON REPRESENTE

INTIMES

Le CENTRE de GESTION et D'ETUDES de l'A.G.S. -' C.G.E.A.' -dont le siège est situé [Adresse 2], Délégation Régionale A.G.S. du NORD-EST, Unité déconcentrée de l'U.N.E.D.I.C., agissant en qualité de gestionnaire de l'A.G.S., en application de l'article L. 143-11-4 du Code du Travail, représentée par son Président actuellement en exercice, demeurant en cette qualité audit siège

PARTIE INTERVENANTE

REPRESENTE par Me Brigitte TOURNIER, avocat au barreau de BESANCON

COMPOSITION DE LA COUR :

lors des débats du 20 janvier 2012:

CONSEILLERS RAPPORTEURS : Monsieur Jean DEGLISE, Président de chambre, en présence de Monsieur Laurent MARCEL, Vice-président placé, délégué dans les fonctions de Conseiller par ordonnance de Monsieur le Premier Président, conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, en l'absence d'opposition des parties

GREFFIER : Mademoiselle Ghyslaine MAROLLES

lors du délibéré :

Monsieur Jean DEGLISE, Président de chambre, et Monsieur Laurent MARCEL, Vice-président placé, délégué dans les fonctions de Conseiller par ordonnance de Monsieur le Premier Président, ont rendu compte conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile à Madame Hélène BOUCON, Conseiller

Les parties ont été avisées de ce que l'arrêt sera rendu le 16 Mars 2012 par mise à disposition au greffe.

**************

M. [P] [Z] a été embauché par la s.a. Transports [N] en qualité de cadre commercial suivant contrat à durée indéterminée en date du 2 mai 2000. Le 30 octobre 2009 il a fait valoir ses droits à la retraite.

Le 1er mars 2010, M. [P] [Z] a saisi le conseil de prud'hommes de Belfort aux fins d'obtenir la condamnation de son ancien employeur à lui verser les sommes de :

-24.221,00 € brut à titre de rappel de salaire, ainsi que les congés payés y afférents, soit la somme de 2422,10 €,

-30.662,68 € brut au titre des heures supplémentaires impayées, ainsi que les congés payés y afférents, soit la somme de 3066,27 € .

Par jugement du 19 novembre 2010, la juridiction prud'homale saisie a débouté M. [P] [Z] de ses prétentions et l'a condamné à payer à la société défenderesse la somme de 100,00 € en application de l'article 700 du code de procédure civile. Le 6 décembre 2010, M. [P] [Z] a régulièrement interjeté appel de la décision.

Le 25 octobre 2011, le tribunal de commerce de Belfort a placé la s.a. Transport [H] [N] en redressement judiciaire et a désigné Maître [M] [E] en qualité d'administrateur judiciaire de ladite société.

Dans ces dernières écritures, auxquelles il s'est expressément référé lors de l'audience des débats, M. [P] [Z] demande à la cour de céans d'infirmer le jugement déféré et de faire droit aux prétentions qu'il avait formulées devant les premiers juges. Il réclame également la somme de 2000,00 € au titre des frais irrépétibles.

Au soutien de ses prétentions l'appelant fait valoir :

- qu'il a signé avec son employeur le 12 janvier 2005 un avenant à son contrat de travail portant son salaire mensuel brut à la somme de 4250 €'; que ce montant n'intégrait pas la partie variable constituée par la prime de résultat'; que l'examen de ses bulletins de paye démontre que cet avenant n'a jamais été respecté par la société intimée ; qu'il est donc bien fondé à réclamer un rappel de salaire ainsi que les congés payés y afférents ;

- que son contrat de travail ne prévoyait pas qu'il était tenu d'accomplir une durée du travail supérieure à la durée légale ; qu'il s'ensuit que la rémunération convenue était calculée sur la base de 35 heures par semaine ; que durant 9 années il a constamment accompli pour la société [N] des heures supplémentaires ; que ces heures supplémentaires étaient au minimum de 4h00 par semaine ainsi que cela résulte de la mention «'169 heures'» sur ses fiches de paie;

- que l'employeur ne saurait opposer à sa demande en paiement d'heures supplémentaires l'existence d'une convention de forfait dès lors que la clause de rémunération insérée dans le contrat travail ne prévoyait ni le nombre d'heures, ni celui de jounées à effectuer par le salarié, et qu'elle ne faisait pas davantage référence à un horaire précis.'

En réponse la s.a. Transport, M. [H] [N] et son administrateur judiciaire sollicitent de la présente juridiction à titre principal la confirmation du jugement entrepris. À titre subsidiaire ils demandent que la condamnation éventuelle de la société intimée au titre des heures supplémentaires soit limitée à la somme de 4921,82 € avec les congés payés y afférents. En tout état de cause, ils réclament la condamnation de l'appelant à leur payer la somme de 3000,00 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

À l'appui de leurs demandes la société intimée et son administrateur judiciaire exposent':

- que l'avenant dont fait état M. [P] [Z] a fait passer le salaire mensuel brut de ce dernier, prime de résultat comprise, de la somme de 3811,25 € à celle de 4250,35 €'; que cet avenant a été scrupuleusement respecté'; que pour s'en convaincre il suffit de se reporter aux bulletins de salaire des mois de décembre 2004 et janvier 2005 ; que durant l'exécution du contrat travail le salarié n'a jamais contesté la méthodologie employée par l'employeur pour calculer son salaire'; que cette rémunération était notoirement avantageuse puisque bien supérieure aux minima conventionels';

- qu'en sa qualité de cadre, M. [P] [Z] disposait d'une très large autonomie dans l'exécution de ses tâches ainsi que le démontre l'article 5 de son contrat de travail'; qu'il se trouvait placé directement sous l'autorité du président du conseil d'administration et du directeur d'exploitation'; qu'en contrepartie de ses responsabilités, il bénéficiait d'une rémunération fixe conséquente à laquelle s'ajoutait un intéressement ; que M. [P] [Z] bénéficiait donc d'un forfait mensuel horaire ainsi qu'en atteste la mention «'169 h'»sur tous ses bulletins de salaire';

- que si le raisonnement du salarié devait être suivi par la cour, il appartiendrait à ce dernier d'apporter tous les éléments permettant de conclure à l'accomplissement d'heures supplémentaires'; qu'il ne saurait en effet se contenter d'exciper ses fiches de paye pour en justifier ; que pour sa part la société est dans l'impossibilité de produire des éléments sur les heures effectivement travaillées de l'appelant puisque celui-ci était appelé à se déplacer de manière habituelle hors de l'entreprise et qu'il avait toute latitude pour fixer ses horaires.'

Pour sa part, le C.g.e.a. de [Localité 5] indique dans ses conclusions faire sienne l'argumentation développée par la société Transport [H] [N] et demande à titre principal la confirmation du jugement critiqué. Subsidiairement il rappelle qu'il ne procédera à l'avance des créances que dans les conditions et les limites posées par les dispositions du code du travail.

SUR CE, LA COUR

Sur la demande de rappel de salaire

Attendu qu'aux termes de l'article 1134 du code civil les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites';

Attendu qu'il est constant que M. [P] [Z] a été embauché par la société transports [N] en qualité de cadre commercial suivant contrat de travail à durée indéterminée en date du 2 mai 2000 ; qu'un avenant du même jour arrêtait les éléments de sa rémunération': une partie fixe (19'500,00 francs brut mensuel x 12 ) et un intéressement'; que le 13 janvier 2005 les parties ont conclu un nouvel avenant aux termes duquel la rémunération du salarié était portée à la somme de 4250,00 € brut mensuel, l'ancienneté ainsi que l'ensemble des avantages étant intégralement maintenus'; que les parties s'opposent dans la présente instance sur l'interprétation dudit avenant';

Qu'il convient de constater dans un premier temps que l'avenant litigieux ne comporte aucune modification du mode de calcul de la rémunération de M. [P] [Z] ; qu'il y a lieu d'en conclure que celui-ci restait soumis aux règles fixées dans le contrat du 2 mai 2000, le salarié continuant de bénéficier d'un fixe et d'un intéressement ; que cette constatation se trouve confortée par la lecture des fiches de paie postérieures à l'avenant de janvier 2005 qui mentionnent expressément un salaire et une prime de résultat';

Que par ailleurs la prime d' intéressement étant déterminée en fonction de la réalisation par le salarié de ses objectifs, elle ne pouvait dès lors faire l'objet d'une fixation forfaitaire par anticipation'; qu'il faut donc considérer, en toute logique, que le montant retenu par les parties dans l'avenant du 13 janvier 2005 au titre de la rémunération n'incluait pas la prime de résultat';

Qu'enfin l'examen de l'ensemble des bulletins de paie montre que de mars 2005 jusqu'à son départ à la retraite, le salarié a perçu la plupart du temps une rémunération - salaire et prime de résultat ' inférieure à la somme de 4250,00 € brut'; qu'il s'ensuit que l'argument avancé par la société intimée, selon lequel le montant retenu dans l'avenant serait l'addition du salaire et de la prime de résultat, manque de pertinence'; qu'il échet d'ajouter que l'absence de contestation ou de protestation durant la relation contractuelle ne saurait s'analyser en un acquiescement du salarié aux pratiques de l'employeur ;

Attendu qu'il convient de juger, en conclusion de ce qui précède, que l'intention des parties, dans l'avenant du 13 janvier 2005 , était d'arrêter la partie fixe du salaire de M. [P] [Z] à la somme de 4250,00 €'brut ; qu'en conséquence la demande de rappel de salaire formée par celui-ci doit être déclarée bien-fondée dans son principe et dans son montant'; qu'il y a lieu dès lors d'infirmer le jugement déféré sur ce point ;

Sur la demande faite au titre des heures supplémentaires

Attendu qu'aux termes de l'article L.212-15-3 du code du travail, pris dans sa version applicable au jour de la conclusion du contrat de travail, les salariés ayant la qualité de cadre au sens des conventions collectives de branche ou du premier alinéa de l'article 4 de la convention nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947 et qui ne relèvent pas des dispositions des articles L. 212-15-1 et L. 212-15-2 pouvaient voir fixer leur durée du travail par des conventions individuelles de forfait, établies sur une base hebdomadaire, mensuelle ou annuelle'; qu'à défaut de convention ou d'accord collectif étendu ou de convention ou d'accord d'entreprise ou d'établissement, les conventions de forfait en heures ne pouvaient être établies que sur une base hebdomadaire ou mensuelle';

Attendu qu'il est établi dans la présente affaire que M. [P] [Z] n'avait pas au sein de l'entreprise la qualité de cadre dirigeant ; qu'il est avéré en effet qu'il était soumis dans l'exercice de ses fonctions à la tutelle du président du conseil d'administration'; qu'il résulte par ailleurs du contrat de travail qu'il jouissait pour organiser son activité d'une réelle autonomie, qu'il était libre de se déplacer pour les besoins de sa mission'et qu'en conséquence ses horaires étaient difficilement contrôlables; qu'il convient de déduire des éléments qui précèdent que M. [P] [Z] appartenait à la catégorie de cadres qui pouvaient librement conclure avec leur employeur une convention de forfait';

Attendu ensuite que l'existence d'une convention de forfait ne se présume pas ; qu'il appartient à celui qui l'invoque de rapporter la preuve que les parties au contrat de travail ont convenu d'une rémunération forfaitaire des heures supplémentaires'effectuées par le salarié'; qu'il convient de constater en l'espèce qu'il était clairement stipulé à l'article 5 du contrat de travail que '«la rémunération du salarié constituait une convention de forfait destinée à couvrir l'intégralité de la mission qui lui était confiée, et ce, quelle que soit la durée du travail effectivement consacrée par lui à l'accomplissement de celle-ci'»; qu'il en résulte qu'en signant le contrat de travail M.[P] [Z] a consenti au principe d'une convention de forfait';

Attendu enfin que l'ensemble des bulletins de paie versés au dossier porte la mention «'horaires': 169 heures'» ; qu'en l'absence de contestations et de réclamations du salarié durant la relation contractuelle sur le nombre d'heures rémunérées, il convient de considérer que les parties étaient également convenues d'une convention de forfait de 169 heures par mois'; qu'il s'ensuit que la demande faite par M. [P] [Z] au titre des heures supplémentaires doit être rejetée.

PAR CES MOTIFS

La Cour, chambre sociale, statuant en audience publique, par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement rendu entre les parties le 19 novembre 2010 par le conseil de prud'hommes de Belfort mais seulement en sa disposition relative au rappel de salaire';

Statuant à nouveau sur ce point ,

Fixe les créances de M. [P] [Z] au passif du redressement judiciaire de la s.a. Transport [H] [N] aux sommes de':

- vingt quatre mille deux cent vingt et un euros (24 221,00 €) brut à titre de rappel de salaire pour la période du 01 juin 2005 au 31 octobre 2009,

- deux mille quatre cent vingt deux euros et dix centimes (2 422,10 €) brut au titre des congés payés afférents au rappel de salaire,

Confirme le jugement pour le surplus';

Y ajoutant,

Dit que le C.G.E.A. de Nancy, es-qualités de gestionnaire de l'A.G.S., procédera à l'avance desdites créances dans les limites et conditions posées par les dispositions du code du travail';

Dit que la s.a. Transport [H] [N] devra payer à M. [P] [Z]'la somme de mille cinq cents euros( 1500,00 €) en application de l'article 700 du code de procédure civile';

Laisse les dépens à la charge de la s.a. Transport [H] [N] .

Ledit arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le seize mars deux mille douze et signé par Monsieur Jean DEGLISE, président de chambre, et Mademoiselle Ghyslaine MAROLLES, greffier.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT DE CHAMBRE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Besançon
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10/03047
Date de la décision : 16/03/2012

Références :

Cour d'appel de Besançon 03, arrêt n°10/03047 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-03-16;10.03047 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award