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09/06/2008 | FRANCE | N°07/01146

France | France, Cour d'appel d'Orléans, Chambre civile 1, 09 juin 2008, 07/01146


COUR D'APPEL D'ORLÉANS
CHAMBRE CIVILE
GROSSES + EXPÉDITIONS
la SCP DESPLANQUES-DEVAUCHELLE la SCP LAVAL-LUEGER

TGI TOURS
09 / 06 / 2008 ARRÊT du : 09 JUIN 2008

N° RG : 07 / 01146
DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOURS en date du 27 Mars 2007
PARTIES EN CAUSE
APPELANTE
Madame Yvette X... épouse Y...... 37000 TOURS

représentée par la SCP DESPLANQUES-DEVAUCHELLE, avoués à la Cour
ayant pour avocat la SCP SAINT CRICQ-NEGRE, du barreau de TOURS
D'UNE PART INTIMÉS :

Madame Odette Z... v

euve X...... 36000 CHATEAUROUX

représentée par la SCP LAVAL-LUEGER, avoués à la Cour
ayant pour avocat la SCP...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS
CHAMBRE CIVILE
GROSSES + EXPÉDITIONS
la SCP DESPLANQUES-DEVAUCHELLE la SCP LAVAL-LUEGER

TGI TOURS
09 / 06 / 2008 ARRÊT du : 09 JUIN 2008

N° RG : 07 / 01146
DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOURS en date du 27 Mars 2007
PARTIES EN CAUSE
APPELANTE
Madame Yvette X... épouse Y...... 37000 TOURS

représentée par la SCP DESPLANQUES-DEVAUCHELLE, avoués à la Cour
ayant pour avocat la SCP SAINT CRICQ-NEGRE, du barreau de TOURS
D'UNE PART INTIMÉS :

Madame Odette Z... veuve X...... 36000 CHATEAUROUX

représentée par la SCP LAVAL-LUEGER, avoués à la Cour
ayant pour avocat la SCP VILLATTE-LIERE-JUNJAUD, du barreau de CHATEAUROUX
Monsieur Eliséo Y...... 37000 TOURS

représenté par la SCP DESPLANQUES-DEVAUCHELLE, avoués à la Cour
ayant pour avocat la SCP SAINT CRICQ-NEGRE, du barreau de TOURS
D'AUTRE PART
DÉCLARATION D'APPEL EN DATE DU 09 Mai 2007
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 31 mars 2008
COMPOSITION DE LA COUR
Lors des débats, du délibéré :
Monsieur Bernard BUREAU, Président de Chambre,
Madame Marie-Brigitte NOLLET, Conseiller,
Madame Elisabeth HOURS, Conseiller.
Greffier :
Madame Fatima HAJBI, Greffier lors des débats, Madame Anne-Chantal PELLÉ, Greffier lors du prononcé.

DÉBATS :
A l'audience publique du 21 AVRIL 2008, à laquelle ont été entendus Madame Elisabeth HOURS, Conseiller, en son rapport, et les avocats des parties en leurs plaidoiries.
ARRÊT :
Prononcé publiquement le 09 JUIN 2008 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
Exposé du litige :
Madame Clotilde B... était propriétaire d'un ensemble immobilier comprenant une grange et un terrain et sis ... à LARCAY. Ces immeubles avaient été pour partie acquis par elle en communauté avec son époux, Monsieur Emile C..., et pour partie recueillis par elle seule dans les successions de ses parents et de sa grand-mère maternelle. Emile C... est décédé le 19 juillet 1928, après avoir fait donation de l'ensemble de ses biens à son épouse.

Madame B... a convolé en secondes noces, le 24 février 1930, avec Monsieur Albert-Louis X... sous le régime de la communauté de biens réduite aux acquêts. Après décès de son second mari, Madame B... a, selon acte reçu le 15 septembre 1966 par Maître Gaston D..., notaire à Châteauroux, vendu à Madame Odette Z... les biens immobiliers sis à LARCAY.

Cette vente a été consentie, et acceptée, moyennant l'entretien, le blanchiment et les soins que devait apporter Madame Z... à Madame B... jusqu'au décès de cette dernière qui est survenu le 19 septembre 2003.
Entre-temps, le 19 février 1986, Madame Z... avait contracté mariage, sous le régime de la séparation des biens, avec Monsieur Albert-Charles X... (fils d'Albert-Louis et beau-fils de la venderesse), lequel était devenu veuf après avoir eu de son premier mariage une fille, Yvette, épouse de Monsieur Eliséo Y...- A....
Exposant que sa propriété sise à LARCAY était désormais occupée sans droit ni titre par Monsieur et Madame Eliséo Y..., Madame Z..., veuve X..., les a assignés le 23 décembre 2004 devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Tours afin de voir ordonner leur expulsion et obtenir paiement d'une indemnité d'occupation.
Par ordonnance en date du 15 mars 2005, ce magistrat a dit n'y avoir lieu à référé en raison de l'existence d'une contestation sérieuse.
Le 13 janvier 2006, Madame Z... a saisi des mêmes demandes le tribunal de grande instance de Tours, lequel, par jugement en date du 27 mars 2007, a jugé que Monsieur et Madame Y... sont entrés dans les lieux en vertu d'un prêt à usage, a prononcé la résiliation de ce contrat, a condamné sous astreinte les époux Y... à quitter l'immeuble et a débouté Madame Z... de sa demande tendant au paiement d'une indemnité d'occupation.
Madame Y... a interjeté appel de cette décision par déclaration en date du 9 mai 2007. Les dernières écritures des parties, prises en compte par la cour au titre de l'article 954 du Code de procédure civile, ont été déposées :- le 31 mars 2008 pour Madame Y..., appelante, et Monsieur Y..., intimé,- le 25 mars 2008 pour Madame Z... .

Madame Y..., qui poursuit l'infirmation du jugement déféré, soutient que le titre de propriété versé aux débats par Madame Z... lui est inopposable comme étant entaché d'irrégularités, puisqu'il est raturé, surligné, et comporte des ajouts manuscrits. Elle fait valoir que la copie de cet acte à la conservation des hypothèques porte le tampon " Acte illisible " et, en marge de la désignation de l'immeuble, la mention manuscrite " annulée le 22 juin 1996 " suivie de la signature de Monsieur Albert-Charles X... .
A titre subsidiaire, elle soutient que la vente était dépourvue de prix sérieux puisque son grand-père, Albert-Louis X..., avait, par acte notarié du 29 décembre 1949, fait donation de ses biens à son fils avec obligation de recevoir Madame B... chez lui, de la nourrir à table, la chauffer, l'éclairer, vêtir et soigner et que la charge de la venderesse incombait donc à son père qui s'en est seul acquitté.
A titre encore plus subsidiaire, elle soutient que Madame Z... ne démontre pas avoir rempli son obligation de soins envers Madame B... et sollicite la résolution de la vente pour inexécution de ses obligations par l'acquéreur.
A titre encore plus subsidiaire, elle demande à la cour de requalifier en donation le contrat intervenu entre Madame B... et Madame Z... et d'en prononcer la nullité par application de l'article 1133 du Code civil.
Monsieur et Madame Y... concluent par ailleurs ensemble au rejet de l'appel incident formé par Madame Z... et à sa condamnation à leur verser 3. 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Madame Z... souligne que l'appelante présente la même argumentation que devant les premiers juges qui y ont très complètement répondu. Elle sollicite la confirmation de la décision entreprise hormis en ce qu'elle l'a déboutée de sa demande tendant au versement d'une indemnité d'occupation. Faisant valoir que les époux Y... ont été mis en demeure de quitter les lieux par exploit d'huissier de justice en date du 23 décembre 2003, elle demande à cette cour de constater qu'ils ont donc bénéficié d'un délai suffisant pour restituer les immeubles lui appartenant, de fixer au 13 janvier 2006 la date de la résiliation du prêt à usage qui leur avait été consenti, et de les condamner, à compter de cette même date et jusqu'à leur départ définitif, à lui verser une indemnité d'occupation mensuelle de 150 euros. Elle sollicite enfin versement de 3. 000 euros au titre des frais irrépétibles.
Bien que ne modifiant pas sa demande tendant à la confirmation du jugement déféré, Madame Z... excipe désormais de l'irrecevabilité de l'ensemble des demandes formées à son encontre en soutenant que le bien occupé par les époux Y... a le caractère de propre, tant de Madame B... que d'elle-même, et que l'appelante n'a donc aucune qualité ni aucun intérêt à agir pour solliciter la nullité de la vente qui lui a été consentie.
Monsieur et Madame Y... n'ont formulé aucune observation sur cette irrecevabilité.
CELA ETANT EXPOSE, LA COUR :
Attendu que la décision entreprise est entachée d'une erreur matérielle en ce qu'elle a dénommé l'époux de Madame Odette X... sous le nom de " Elie Y... " alors que les pièces d'état civil versées aux débats le désignent comme étant Monsieur Eliséo Y...- A... ; qu'il convient donc de rectifier sur ce point le jugement déféré ;

Attendu que Madame Z... verse aux débats un acte notarié reçu le 15 septembre 1966 par Maître Gaston D..., notaire à Châteauroux, aux termes duquel Madame Clotilde B... lui a vendu l'immeuble sis... à LARCAY ; que cette pièce, parfaitement lisible, ne comporte pas de ratures ou de surcharges permettant de jeter un doute sur sa validité ; que cet acte a été régulièrement publié au bureau de la conservation des hypothèques et que le fait que la copie produite par la conservation des hypothèque soit illisible et porte des mentions manuscrites de Monsieur Albert-Charles X..., qui n'y était pas partie, ne peuvent en entacher la régularité ;

Attendu que, comme devant les premiers juges, Madame Y... soutient que la vente consentie à Madame Z... par Madame B... serait nulle pour défaut de prix ; que ce dernier consistait, en effet, dans la charge pour l'acquéreur d'entretenir, blanchir et soigner la venderesse à son domicile ; que l'appelante soutient que cette charge aurait été supportée par son père, Monsieur Albert-Charles X..., auquel son propre père, Albert-Louis X... avait, par acte du 29 décembre 1949, fait donation à son fils sous condition pour son fils, si Madame Clotilde B... lui survivait, de recevoir cette dernière chez lui, la nourrir à table, la chauffer, éclairer, vêtir et soigner ; que l'appelante indique que l'action engagée par Madame Z... à son encontre est sans objet puisqu'elle n'est pas propriétaire de l'ensemble immobilier occupé par les époux Y..., qui en ont toujours été considérés comme propriétaires tant par la mairie de LARCAY que par leurs relations, et dont Monsieur Albert-Louis X... a toujours assuré les dépenses ;

Attendu qu'aux termes de l'article 31 du Code de procédure civile, l'action est ouverte à ceux qui ont un intérêt légitime au succès d'une prétention ; que cette exigence impose que Madame Y... ait qualité et intérêt à engager une action en nullité fondée sur l'existence d'une donation déguisée entre Madame B... et Madame Z... ;

Attendu que Madame B..., veuve en secondes noces de Monsieur Albert-Louis X..., était seule propriétaire en propre de cet immeuble depuis le 19 juillet 1928, date du décès de son premier mari, Monsieur Emile C... ; que le mariage entre Madame B... et Monsieur Albert-Louis X... ayant été contracté sous le régime de la communauté des biens réduite aux acquêts, le bien n'est pas entré dans la communauté B...- X... ; que Madame B... était donc entièrement libre d'en faire l'usage qui lui en semblait bon et a pu, en toute légalité, le vendre ou le donner à Madame Z... ; que cette dernière en était seule propriétaire depuis vingt ans lorsqu'elle s'est mariée en 1986 sous le régime de la séparation des biens avec Monsieur Albert-Charles X..., père d'Yvette Y..., ;

Attendu que contrairement à ce que semble soutenir l'appelante, si l'article 911 du Code civil prévoit la nullité d'une donation déguisée faite entre deux personnes dont l'une n'a pas la capacité de donner ou de recevoir, aucune disposition légale ne prévoit une telle nullité lorsqu'une telle donation est intervenue entre personnes capables ; qu'il n'est pas allégué que Madame B... ou Madame Z... aient été incapables au moment de la vente ; que si cette dernière devait être requalifiée en donation, une telle donation resterait valable jusqu'à concurrence de la quotité disponible de la succession de Madame B... en application de l'article 931 du Code civil ; que seuls les héritiers de la donatrice auraient qualité et intérêt à agir en re-qualification de la vente en donation en bornant leur demande à la réduction de cette dernière à la quotité disponible sans pouvoir solliciter l'annulation de l'acte litigieux ; que les héritiers de Madame B..., dont Madame Y... ne fait pas partie, ne s'étant jamais manifestés pour attaquer la vente consentie à Madame Z..., cette vente, même si le tribunal ou cette cour devaient la qualifier " donation ", resterait valable ; que l'appelante n'a donc ni qualité ni intérêt à agir en nullité de l'acte de vente au motif de l'existence d'une donation déguisée ; qu'il n'y a en conséquence pas lieu d'examiner les écritures des parties quant à la qualification de l'acte passé entre Madame B... et Madame Z... ; qu'il convient d'infirmer partiellement la décision entreprise et de déclarer irrecevable la demande en nullité formée par les époux Y... ;

Attendu que pour débouter Madame Z... de sa demande tendant au paiement d'une indemnité d'occupation, le tribunal a retenu que l'occupation de l'immeuble n'était devenue fautive que passé le jour auquel il a lui-même ordonné la restitution du bien ; Mais attendu que Madame Z... avait fait délivrer aux époux Y..., le 12 août 2004, sommation d'avoir à lui restituer son immeuble ; que l'assignation en justice tendant à voir prononcer la résiliation du prêt à usage et ordonner cette restitution a été délivrée le 13 janvier 2006 ; que le tribunal n'a pas précisé la date à laquelle la résiliation du prêt consenti aux époux Y... devait être fixée ; que, cependant, le délai de dix-huit mois qui s'est écoulé entre la sommation délivrée à ces derniers et leur assignation devant le tribunal constitue bien le délai raisonnable exigé par la jurisprudence pour mettre fin à un prêt à usage ; que la date de fin d'effet de ce prêt doit en conséquence être fixée au 13 janvier 2006 ; qu'en se refusant à toute restitution, les époux Y..., qui n'occupent pas les lieux au titre de leur logement principal, ont bien commis une faute causant à Madame Z... un préjudice résultant de l'impossibilité de reprendre normalement possession de son bien ; qu'il convient en conséquence d'infirmer le jugement entrepris et de condamner solidairement Monsieur et Madame Y... à verser à l'intimée une indemnité d'occupation mensuelle qui sera fixée, compte tenu du caractère de grange aménagée de l'immeuble et de sa situation, à 80 euros ;

Attendu qu'il convient en outre de préciser que l'astreinte fixée par le premier juge commencera à courir à compter du trente et unième jour suivant la date de signification du présent arrêt ; qu'il y a lieu de faire application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
RECTIFIANT l'erreur matérielle affectant le jugement déféré,
DIT que l'état civil de la partie au litige dénommée, dans cette décision, " Elie Y... " est en réalité " Eliséo Y...- A...,
INFIRME la décision entreprise, mais seulement en ce qu'elle a débouté Monsieur Eliséo Y... et son épouse, Madame Yvette X..., de leur demande tendant à voir prononcer la nullité de la vente consentie à Madame Odette Z..., veuve X..., et a débouté cette dernière de sa demande d'indemnité d'occupation,
STATUANT À NOUVEAU sur ces seuls chefs,
DÉCLARE irrecevable, faute de qualité et d'intérêt à agir, la demande formée par Monsieur Eliséo Y... et son épouse tendant à voir prononcer la nullité de la vente conclue le 15 septembre 1966 entre Mesdames Clotilde B... et Odette Z..., veuve X...,
CONDAMNE solidairement Monsieur Eliséo Y... et son épouse, Madame Yvette X..., à payer à Madame Odette Z..., veuve X..., à compter du 13 janvier 2006 et jusqu'à complète libération des lieux, une indemnité d'occupation mensuelle de quatre-vingt (80) euros,
CONFIRME la décision entreprise dans ses autres chefs de dispositions,
Y AJOUTANT,
DIT que l'astreinte fixée par le tribunal commencera à courir à compter du trente et unième jour suivant la date de signification du présent arrêt ;
CONDAMNE Madame Yvette X..., épouse Y..., à payer à la somme de 1. 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
CONDAMNE Madame Yvette X..., épouse Y..., aux dépens d'appel,
ACCORDE à la SCP LAVAL-LUEGER, avoué, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Arrêt signé par Monsieur Bernard BUREAU, président, et Madame Anne-Chantal PELLÉ, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 07/01146
Date de la décision : 09/06/2008
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Tours, 27 mars 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.orleans;arret;2008-06-09;07.01146 ?
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