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10/11/2005 | FRANCE | N°04/04780

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Ct0041, 10 novembre 2005, 04/04780


ARRET No

DU
10 Novembre 2005
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04 / 04780

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L'EARL DE CRAVANCON, représentée par Mme X... Marie-Claude, gérante,
C /
COMMUNAUTE D'AGGLOMERATION DU SOISSONNAIS
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COUR D'APPEL D'AMIENS

CHAMBRE DES EXPROPRIATIONS

JUGEMENT DU JUGE DES EXPROPRIATIONS DU DEPARTEMENT DE l'AISNE EN DATE DU 10 novembre 2004

APPELANTE :

L'EARL DE CRAVANCON, représentée par Mme X... Marie-Claude, gérante,
Ferme de Cravançon
02200 CHAUDUN

Représentée par Madame X..., gérante

et plaidant par Me Claudine SCOTTO D'APOLLONIA, avocat au barreau de PARIS.

INTIMEE :

COMMUNAUTE D'AGGLOMERATION DU SOISSONNAIS
11, a...

ARRET No

DU
10 Novembre 2005
------------

04 / 04780

------------

L'EARL DE CRAVANCON, représentée par Mme X... Marie-Claude, gérante,
C /
COMMUNAUTE D'AGGLOMERATION DU SOISSONNAIS
--------------

COUR D'APPEL D'AMIENS

CHAMBRE DES EXPROPRIATIONS

JUGEMENT DU JUGE DES EXPROPRIATIONS DU DEPARTEMENT DE l'AISNE EN DATE DU 10 novembre 2004

APPELANTE :

L'EARL DE CRAVANCON, représentée par Mme X... Marie-Claude, gérante,
Ferme de Cravançon
02200 CHAUDUN

Représentée par Madame X..., gérante et plaidant par Me Claudine SCOTTO D'APOLLONIA, avocat au barreau de PARIS.

INTIMEE :

COMMUNAUTE D'AGGLOMERATION DU SOISSONNAIS
11, avenue François Mitterand
Les Terrasses du Mail
02880 CUFFIES

Représentée et plaidant par la SCP SIRAT GILLI ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS.

DEBATS : A l'audience publique de la Chambre des Expropriations tenue à la Cour d'Appel d'AMIENS le 14 Septembre 2005, ont été entendus :

Maître SCOTTO D'APOLLONIA et Maître SIRAT, représentant les parties en leurs explications à l'appui de leurs mémoires respectifs régulièrement notifiés,

Monsieur le Commissaire du Gouvernement en ses conclusions et observations.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Madame DELON, Présidente de la Chambre des Expropriations,

Madame MALANDAIN, Conseiller à la Cour, désignée par ordonnance de Monsieur le Premier Président en date du 21 juin 2005, pour composer la Chambre des Expropriations siégeant en l'absence des Juges de l'Expropriations de la SOMME, et de leur suppléant, empêchés.

Madame MACE, Juge de l'Expropriation de l'OISE.

Qui en a délibéré conformément à la loi et renvoyé l'affaire à l'audience du 10 Novembre 2005 pour prononcer arrêt.

Madame PILVOIX, Greffier.

Monsieur WARGNIER, Commissaire du Gouvernement de l'AISNE.

ARRET

Par ordonnance d'expropriation en date du 10 avril 2003, ont été déclarés expropriés 12. 380m ² pris sur la parcelle cadastrée ZB no25, 6. 870m ² pris sur la parcelle ZC no9 et 5. 190m ² pris sur la parcelle ZC no7, toutes ces parcelles se trouvant au lieu dit " Cravançon " sur la commune de Chaudun pour la première et de Ploisy pour les deux autres.

Le juge de l'expropriation, saisi par la Communauté d'Agglomération du Soissonnais en vue de la fixation de l'indemnité d'éviction devant revenir à la société " Exploitation Agricole à Responsabilité limitée de Cravancon " qui occupe ces terres suivant un bail rural, par jugement en date du 10 novembre 2004, a pris acte de l'engagement de la Communauté d'Agglomération du Soissonnais de tuber le chemin en plusieurs endroits au choix de l'exploitant de façon à lui permettre de pénétrer sur les terres de cultures, a fixé à 16. 065, 48 € l'indemnité d'éviction agricole que la Communauté d'Agglomération du Soissonnais devra verser à l'EARL de Cravançon, a débouté cette dernière du surplus de ses demandes et a condamné la Communauté d'Agglomération du Soissonnais à payer à l'EARL de Cravançon la somme de 500 € par application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, les dépens étant mis à la charge de l'autorité expropriante.

L'EARL de Cravançon a interjeté appel de ce jugement le 1er décembre 2004.

Par mémoire déposé au greffe de la chambre des expropriations de la cour d'appel d'Amiens moins de deux mois à partir de l'appel et régulièrement communiqué à l'autorité expropriante et au commissaire du gouvernement, l'EARL du Cravançon demande à la cour de :

- réformer le jugement à l'exception de l'indemnité pour fumures et arrière fumures,

- fixer l'indemnité totale d'éviction à la somme de 312. 303, 79 € correspondant à concurrence de :

* 13. 649, 62 € à l'indemnité principale d'éviction (2, 4440ha x 5. 584, 95 € € / ha),
* 2. 153, 64 € à l'indemnité pour fumures et arrière fumures (2, 4440ha x 881 € / ha),
* 4. 094, 89 € à l'indemnité pour perte de bail à long terme (13. 649, 62 € x 30 %),
* 292. 405, 64 € à l'indemnité pour perte de l'activité culturale du surplus de l'îlot cultural (52, 356 ha x 5. 584, 95 € / ha),

- condamner l'expropriant à lui verser une indemnité de 5. 000 € par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Par mémoire régulièrement communiqué à l'EARL de Cravançon et au commissaire du gouvernement, la Communauté d'Agglomération du Soissonnais demande à la cour de :

- confirmer le jugement, au besoin, par substitution de motifs,

- dire qu'à défaut de production d'éléments probants justifiant de l'importance du préjudice de l'EARL de Cravançon, celui-ci sera apprécié sur la base du Protocole Départemental pour l'indemnisation des exploitants agricoles,

- dire que le préjudice consécutif à la création d'une voie nouvelle pour la desserte de la ZAC du Plateau ressortit à la compétence du tribunal administratif d'Amiens,

- débouter, en conséquence, l'EARL de Cravançon de toutes ses prétentions,

- dire que cette dernière lui devra sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile la somme de 5. 000 €,

- dire que les dépens seront à la charge de l'EARL de Cravançon.

Par conclusions déposées le 26 août 2005 régulièrement communiquées à l'appelante et à la Communauté d'Agglomération du Soissonnais, le commissaire du gouvernement conclut à la confirmation du jugement et donc à la fixation d'une indemnité d'un montant de 16. 065, 48 € ainsi qu'à celle de la Communauté d'Agglomération du Soissonnais au paiement de la somme de 500 € en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

CECI EXPOSE, LA COUR,

Attendu que l'article L. 13-13 du Code de l'expropriation dispose que le indemnités allouées doivent couvrir l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation ;

Que les indemnités doivent être évaluées au jour du jugement en fonction de l'usage effectif du bien à la date de référence ;

Attendu qu'il est constant que l'EARL de Cravançon exploite les parcelles cadastrées ZB no 25, ZC no 9 et ZC no 7 représentant un surface cultivable de 81, 73ha formant l'îlot cultural no 6 d'un seul tenant et qu'elle dispose d'un bail rural portant sur ces parcelles ;

Attendu qu'il résulte des documents produits que cet îlot cultural dispose d'une façade sur la nationale 2 sur laquelle il n'a pas d'accès, d'une autre façade sur la route départementale 172, d'une troisième façade sur la route départementale no 1420 et sur le chemin rural des Vertes Feuilles sur toute la longueur de ces trois parcelles ;

Que cet îlot cultural a une contenance de 834. 770m ² ;

Attendu que l'emprise est partielle et porte sur 24. 440m ² sous la forme d'une bande de terrain allant de la route départementale no 1420 jusqu'à la route départementale no 172 d'une largeur d'environ 19 m de large partant du chemin des Vertes Feuilles ;

A) Sur l'indemnité principale d'éviction

Attendu que l'EARL de Cravançon demande que l'indemnité principale d'éviction soit :
" calculée sur la base de la marge brute du protocole départemental soit 4. 137 € / ha majorée de 15 % pour pression foncière et de 20 % pour opération particulière, la majoration de 15 % pour pression foncière devant être appliquée à l'ensemble de la superficie expropriée " ;

Attendu que l'EARL de Cravançon critique, ainsi, le jugement, seulement, en ce qu'il n'a pas retenu la majoration de 15 % pour pression foncière pour l'éviction des parcelles sises sur la commune de Chaudun et qu'il a limité à 10 % de l'indemnité d'éviction la réparation pour perte de bail rural à long terme ;

Attendu qu'en l'absence de tout élément comptable fournis par la société exploitante et à défaut de communication du bail ou des baux, l'indemnité d'éviction sera déterminée en considération du protocole départemental pour l'indemnisation des exploitants agricoles évincés lors d'acquisitions réalisées par les collectivités et organismes tenus de consulter le domaine passé entre les représentants des agriculteurs du département de l'Aisne et la Direction des services fiscaux de l'Aisne ;

Attendu qu'il est prévu à l'article 14 de ce protocole que l'exploitant-fermier exproprié pour une superficie au moins égale à deux hectares de tout ou partie d'une exploitation ayant fait l'objet d'un bail de 18 ans ou plus dont la durée restant à courir sera au moins de 9 ans, pourra obtenir une majoration de 10 % du préjudice d'exploitation pour une durée de bail de 9 à 12 ans, le correctif de 30 % étant applicable au cas où la durée du bail restant à courir est de 15 à 18 ans ;

Qu'en l'espèce, l'EARL de Cravançon qui fait état dans son mémoire d'un bail à long terme de 18 ans ayant pris effet le 1er avril 2004 sans le produire alors que l'expropriant et le commissaire du gouvernement font état d'une durée de 9 à 12 ans restant à courir et que le juge de l'expropriation a retenu cette durée pour limiter à 10 % la majoration pour perte de bail à long terme, ne rapporte pas la preuve qu'elle peut prétendre à l'application d'un correctif de 30 % ;

Que le correctif de 10 % retenu par le juge de l'expropriation sera donc confirmé dès lors qu'il n'est critiqué ni par l'expropriant ni par le commissaire du gouvernement ;

Attendu que l'article 17 de ce protocole prévoit une majoration du préjudice d'exploitation notamment de 15 % lorsque l'exploitation est située sur le territoire de la commune de Soissons et de communes limitrophes ou comprises dans le SDAU de l'agglomération soissonnaise ;

Attendu que si effectivement, le canton de Chaudun sur le territoire duquel est la parcelle ZB 25, se trouve sur le canton de Oulchy-le-Chateau et non dans le canton de Soissons et que Chaudun n'est pas inclus dans le SDAU de l'agglomération soissonnaise, cependant, l'article 17 de ce protocole faisant référence à l'exploitation, il convient d'appliquer le coefficient de majoration de 15 % pour pression foncière s'agissant de la partie de l'exploitation située sur la parcelle ZB 25 dès lors que l'îlot 6 est composé de trois parcelles contiguës dont deux cadastrées ZC7 et ZC9 appartiennent au même propriétaire ainsi que cela résulte du mémoire d'appel de l'exploitante et que cette dernière parcelle est située sur la commune de Ploisy ;

Qu'ainsi le jugement en ce qu'il n'a pas appliqué le coefficient de majoration relativement à la parcelle ZB 25 sera infirmé ;

Attendu que les parties s'accordent pour estimer à la somme de 881 € / ha l'indemnité pour fumures et arrière fumures ;

Attendu qu'en conséquence, à la date du jugement, compte tenu de l'usage effectif terres à la date de référence située au 4 septembre 2001 soit un an avant l'ouverture de l'enquête publique laquelle n'est critiquée ni par les parties ni par le commissaire du gouvernement, le préjudice à l'hectare sera intégralement réparé par l'allocation d'une indemnité de 6. 879, 65 € (4. 137 € / ha + majoration de 10 % pour bail à long terme ; 413, 70 € + majoration de 20 % pour opération particulière : 827, 40 € + majoration de 15 % pour pression foncière pour l'ensemble de l'îlot 6 : 620, 55 € + 881 € / ha pour les fumures et arrière fumures) soit pour l'ensemble de l'emprise la somme de 16. 813, 86 € ;

B) Sur l'indemnité pour perte totale de l'activité culturale sur le reliquat de l'îlot no 6

Attendu que l'EARL Cravançon fait valoir que les parcelles de l'îlot no 6 perdent entièrement leur façade sur le chemins des Vertes Feuilles, l'expropriant ne s'engageant nullement à restituer leur façade aux parcelles expropriées sur ce chemin ce qui entraînera une perte totale de son activité culturale sur cet îlot qui se trouvera sans façade dépourvu d'accès et totalement enclavé ainsi que, par voie de conséquence, la perte de l'assolement ;

Attendu que la Communauté d'agglomérations du Soissonnais réplique que le préjudice allégué trouvant sa cause non point dans l'opération de dépossession mais exclusivement dans une décision administrative prohibant l'accès des riverains sur la nouvelle voie de desserte de la ZAC et dans l'opération de création de la voie nouvelle, la juridiction de l'expropriation est incompétente pour en connaître ;

Attendu que dès lors que l'emprise porte sur une bande de terrain d'environ 19m de largeur à partir du chemin des Vertes Feuilles et se prolonge sur la longueur des trois parcelles, la partie hors emprise se trouvant de ce fait séparée de ce chemin par une bande de terrain n'appartenant plus aux propriétaires des terrains est privée, dès l'ordonnance d'expropriation emportant transfert de propriété, de sa façade sur ce chemin, l'autorité expropriante ne pouvant, donc, soutenir utilement que le préjudice pouvant en résulter pour le preneur à bail aurait pour cause non pas la dépossession mais la décision administrative prohibant l'accès des riverains sur la nouvelle voie de desserte de la ZAC et dans l'opération de création de la voie nouvelle ;

Attendu que cependant, l'EARL de Cravançon qui doit rapporter la preuve de l'existence du préjudice qu'elle allègue, n'établit pas que cette emprise de 24. 440m ² entraînera la perte totale de l'activité culturale du reliquat de l'îlot 6 d'une contenance de 810. 330m ², seul préjudice allégué, dès lors qu'il résulte des plans produits que cette surface de culture dispose de deux autres façades, l'une sur le chemin départementale 172 et l'autre sur le chemin départemental no 1420 et qu'aucune des pièces produites ne permet de constater que tout accès est impossible ce qui ne saurait résulter de la seule présence de talus ;

Qu'il convient donc de débouter l'EARL de Cravançon de sa demande de sa demande d'indemnité à ce titre ;

Attendu que l'indemnité due à l'EARL de Cravançon au titre des frais exposés et non compris dans les dépens sera fixée à la somme de 1. 000 €.

Par ces motifs,

La cour statuant contradictoirement,

Rejette le moyen tiré de l'incompétence du juge de l'expropriation pour statuer sur la demande d'indemnité en réparation de la perte de l'activité culturale du surplus de l'îlot 6,

Infirme le jugement sauf en ses dispositions condamnant la Communauté d'Agglomération du Soissonnais au paiement d'une indemnité de 500 € au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Statuant à nouveau,

Fixe à la somme de 16. 813, 86 € l'indemnité d'éviction agricole que la Communauté d'Agglomération du Soissonnais devra verser à l'EARL de Cravançon en réparation des emprises effectuées sur les parcelles ZB 25 lieudit de Cravançon sur la commune de Chaudun et ZC 7 et ZC 9 au même lieudit sur la commune de Ploisy,

Déboute l'EARL de Cravançon du surplus de ses demandes,

Fixe l'indemnité due par la Communauté d'Agglomération du Soissonnais à l'EARL du Soissonnais au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile à la somme de 1. 000 €,

Met les dépens d'appel à la charge de la Communauté d'Agglomération du Soissonnais.

Fait et prononcé à l'audience publique du 10 Novembre 2005, où siégeaient :

Madame DELON, Président,

Assistée de Madame PILVOIX, Greffier.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Ct0041
Numéro d'arrêt : 04/04780
Date de la décision : 10/11/2005

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Laon, 10 novembre 2004


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.amiens;arret;2005-11-10;04.04780 ?
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