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29/10/2003 | FRANCE | N°02/02153

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Chambre sociale, 29 octobre 2003, 02/02153


ARRET N°637 X... C/ SOCIETE ATAL COUR D'APPEL D'AMIENS 5ème Chambre Sociale cabinet B PRUD'HOMMES ARRET DU 29 OCTOBRE 2003 RG :02/02153 JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE LAON EN DATE DU 07 janvier 2002 PARTIES EN CAUSE : APPELANT Monsieur Didier X... 20 Rue Lehault 02250 MARLE Représenté, concluant et plaidant par Me HAMANN, avocat au barreau de STRASBOURG

ET : INTIMEE SOCIETE ATAL 58 Rue de Manoise 02007 LAON CEDEX Représentée, concluant et plaidant par Me Christine ETIEMBRE, avocat au barreau de LAON, substituée par Me GUERRI, avocat au barreau d'AMIENS. DEBATS :

A

l'audience publique du 02 septembre 2003 ont été entendus les avo...

ARRET N°637 X... C/ SOCIETE ATAL COUR D'APPEL D'AMIENS 5ème Chambre Sociale cabinet B PRUD'HOMMES ARRET DU 29 OCTOBRE 2003 RG :02/02153 JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE LAON EN DATE DU 07 janvier 2002 PARTIES EN CAUSE : APPELANT Monsieur Didier X... 20 Rue Lehault 02250 MARLE Représenté, concluant et plaidant par Me HAMANN, avocat au barreau de STRASBOURG

ET : INTIMEE SOCIETE ATAL 58 Rue de Manoise 02007 LAON CEDEX Représentée, concluant et plaidant par Me Christine ETIEMBRE, avocat au barreau de LAON, substituée par Me GUERRI, avocat au barreau d'AMIENS. DEBATS :

A l'audience publique du 02 septembre 2003 ont été entendus les avocats en leurs conclusions et plaidoiries respectives devant Madame DARCHY, Président de Chambre, siégeant en vertu des articles 786 et 945-1 du nouveau Code de Procédure Civile qui a renvoyé l'affaire à l'audience publique du 29 Octobre 2003 pour prononcer l'arrêt. GREFFIER LORS DES DEBATS: Melle TOUSSAINT COMPOSITION DE LA COUR LORS DU Y...: Madame DARCHY en a rendu compte à la formation de la 5ème chambre Sociale , cabinet B de la Cour composée de: Mme BESSE, Conseiller, Mme SEICHEL, Conseiller, qui en a délibéré conformément à la loi. PRONONCE :

A l'audience publique du 29 Octobre 2003, l'arrêt a été rendu par Madame DARCHY, Président de chambre qui a signé la minute avec Melle TOUSSAINT, greffier. * * * DECISION :

Vu le jugement rendu le 7 janvier 2002 par le Conseil de Prud'hommes de LAON quia débouté Didier X... de ses demandes.

Vu l'appel interjeté le 6 février 2002 par Didier X... de cette décision qui lui a été notifiée le 31 janvier 2002.

Vu les conclusions déposées le 25 août 2003 par Didier X..., régulièrement communiquées et développées à l'audience du 2 septembre 2003 à l'effet de voir la Cour:

- infirmer le jugement qui lui est déféré.

- constater qu'aucune lettre de licenciement ne lui a été notifiée en recommandé avec avis de réception.

En conséquence,

- dire que la transaction du 12 mai 2000 est nulle et non avenue.

- dire que son licenciement intervenu le 28 avril 2000 est dépourvu de toute cause réelle et sérieuse de sorte qu'il s'agit d'un licenciement abusif.

- condamner la société ATAL à lui verser les sommes de:

[*683 370 F, soit 101 180 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif.

*]4 600 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, le tout avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt.

Vu les conclusions déposées le 29 août 2003 par la société ATAL, régulièrement communiquées et soutenues à l'audience du 2 septembre 2003 tendant à voir:

- confirmer le jugement déféré.

- vu les articles 2052 et suivants du Code Civil, L122-17 et suivants du Code du Travail, dire irrecevables les demandes de Didier X.... - vu les termes de la transaction, de la lettre de licenciement, dire que la transaction est parfaitement valable.

- en conséquence débouter Didier X... de l'intégralité de ses demandes.

A titre subsidiaire:

- dire que le licenciement de Didier X... repose sur une cause réelle et sérieuse.

- débouter en conséquence Didier X... de ses demandes.

- condamner Didier X... à lui payer la somme de 18 294 euros qu'il a reçue au titre de la transaction et celle de 1 600 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. SUR CE:

Attendu que Didier X... a été embauché le 1 mars 1974 par la société ATAL en qualité d'employé du service technique;

Qu'à compter du 1 juin 1997 il se voyait confier le poste de Responsable Logistique et la Responsabilité du secteur Informatique Centrale; qu'il avait le statut cadre; qu'en 1999 il était désigné Chef de Projet pour la mise en application du Plan Informatique SAP; qu'il a été licencié par une lettre datée du 28 avril 2000 portant la mention manuscrite " Reçu en main propre le 28 avril 2000 " suivie de la signature, pour le motif suivant :

" Non maîtrise de l'outil informatique, une implication insuffisante dans SAP qui a engendré de lourdes conséquences vis à vis de la clientèle notamment du retard, l'impossibilité de gérer les commandes de façon efficace", avec préavis de 3 mois commençant à courir à compter de la présentation de la lettre.

Attendu qu'une transaction était signée entre les parties portant la date du 12 mai 2000 aux termes de laquelle la société ATAL acceptait de verser à Didier X... la somme de 120 000 F à titre d'indemnité forfaitaire transactionnelle en complément d'une indemnité de congés payés et de l'indemnité conventionnelle de licenciement, le salarié renonçant à contester la nature et les conditions de la rupture.

Attendu que sollicitant l'annulation de cette transaction au motif que les pièces de la procédure de licenciement avaient été antidatées et contestant son licenciement, Didier X... a saisi le 28 juin 2001 le Conseil des Prud'hommes de LAON qui l'a débouté de toutes demandes.

Attendu qu'à l'appui de son appel régulièrement interjeté, il fait

essentiellement valoir :

-qu'aucune procédure de licenciement n'a été mise en place, que la lettre de convocation à entretien préalable ainsi que la lettre de licenciement sont antidatées, qu'elles lui ont été remises en même temps et en main propre au mois de mai 2000, que la forme recommandée avec avis de réception de la notification du licenciement est, en cas de transaction, une règle de fond de la validité de la transaction, que l'absence de mise en oeuvre d'une procédure de licenciement et l'absence de notification d'une lettre de licenciement préalablement à la signature de la prétendue transaction rendent nulle et non avenu cette transaction.

- que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse dès lors que son implication dans le projet a té de tous les instants, samedi et dimanche inclus (GSM professionnel ouvert en permanence), que les heures complémentaires apparaissant sur le bulletin de paie de mars 2000 pour le dernier trimestre 1999 en témoignent également, que la gestion du projet était du ressort de l'intégrateur SOLERI, que le projet était organisé en ateliers pilotes avec un responsable fonctionnel client (en général le responsable du service) et un consultant par module SAP, qu'il assurait la coordination des ateliers pilotes et qu'il a tout mis en oeuvre pour mener à bien ce projet, que la société ATAL, qui n'a émis aucun commentaire et pas la moindre observation sur son travail pendant des années , et en particulier pendant la période ayant précédé le licenciement , n'expose pas dans la lettre de licenciement des motifs suffisamment précis pour lui permettre d'y répondre utilement.

- que compte tenu de son âge, de son ancienneté dans l'entreprise, et de ses difficultés à retrouver un emploi, son licenciement lui a causé un important préjudice.

- que ses demandes sont donc justifiées;

Attendu que la société ATAL fait valoir :

- que le reçu pour solde de tout compte emporte forclusion dès lors qu'il n'est pas dénoncé dans un délai de deux mois à compter de sa signature.

- que la transaction a autorité de la chose jugée.

- que l'accusé de réception est un moyen simple de preuve et la transaction remplit ses effets dès lors que le salarié a eu notification de la lettre de licenciement.

- qu'en l'espèce les pièces de la procédure de licenciement n'ont pas été antidatées, Didier X... y ayant lui-même mentionné la date de notification.

- que le 5 mai 2000 il a lui-même écrit pour contester son licenciement.

- que la transaction, intervenue après le licenciement est donc régulière et Didier X... est irrecevable en ses demandes conformément aux dispositions de l'article 2052 du Code Civil.

- à titre subsidiaire, que ses demandes ne sont pas fondées dès lors que la transaction est régulière et répond aux conditions légales.

- que les carences professionnelles reprochées à Didier X... sont établies par de nombreux dysfonctionnements constatés dans la mise en oeuvre du projet SAP dont il était chargé, dysfonctionnements ayant entraînés d'importants retards de production, le mécontentement de la clientèle et l'inquiétude des représentants du personnel.

-que Didier X... doit être débouté de toutes ses demandes.

Attendu que le reçu pour solde de tout compte signé à la suite d'une transaction n'est valable que dans la mesure où la transaction l'est également.

Attendu en l'espèce que Didier X... conteste la validité de la transaction;

Attendu que la transaction qui a pour objet de mettre un terme au litige résultant d'un licenciement, ne peut être valablement conclue qu'une fois la rupture devenue définitive par la réception par le salarié de la lettre de licenciement dans les conditions requises par l'article L122-14-1 du Code du Travail, lequel dispose que l'employeur qui décide de licencier un salarié doit notifier le licenciement par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ;

Attendu que si l'avis de réception est un moyen de preuve de la notification du licenciement en sorte que le licenciement verbal ou par lettre simple produit néanmoins ses effets dès lors que son prononcé n'est pas contesté, la notification par lettre recommandée avec avis de réception est une condition de fond, en matière de transaction, pour établir le caractère définitif de la rupture lors de la transaction;

Attendu en effet que la remise en main propre à Didier X... de la lettre de licenciement datée par lui du 28 avril 2000, la transaction étant datée du 12 mai 2000, ne permet pas d'établir qu'au moment de la transaction la rupture était consommée, le salarié soutenant que toutes les pièces de la procédure de licenciement ainsi que la lettre du 5 mai 2000 dans laquelle il contestait son licenciement ont été antidatées et soumises à sa signature au cours du même entretien;

Attendu que la transaction ne peut intervenir que lorsque le salarié n'est plus sous la subordination juridique de son employeur;

Attendu en conséquence que la transaction conclue entre la société ATAL et Didier X... en l'absence de notification préalable de licenciement par lettre recommandée avec demande d'avis de réception est donc nulle et non avenue;

Attendu en conséquence que Didier X... est recevable à contester son licenciement;

Attendu que les motifs énoncés dans la lettre de licenciement déterminent les limites du litige;

Attendu que Didier X... qui avait une longue expérience dans la société, a été désigné Chef Projet Interne SAP ; que s'il ressort des pièces produites, notes, courriers, comptes-rendus du comité de direction de la société ATAL et du comité d'entreprise, qu'il y a eu retards dans le planning et des dysfonctionnements, ce qui a perturbé la production et la livraison, et entraîné le mécontentement des clients, aucune des pièces produites ne permet d'imputer à Didier X..., personnellement, les difficultés rencontrées qui proviennent selon lui, notamment, d'analyses mal faites et d'insuffisance d'informations.

Attendu que les réponses apportées aux questions posées lors des réunions du Comité d'entreprise des 12 janvier, 11 avril et 17 mai 2000 concernant le projet SAP ne font pas apparaître de problèmes autres que ceux inhérents à la mise en oeuvre d'un projet de cette importance, qui soient imputables à Didier X... personnellement.

Attendu en conséquence que le licenciement critiqué est dépourvu de cause réelle et sérieuse;

Attendu que Didier X... ne verse aucune pièce justifiant de sa situation depuis son licenciement ; que la perte justifiée de son emploi après 26 ans d'ancienneté, lui a causé un incontestable préjudice; que compte tenu de ce préjudice, de son ancienneté, du montant de sa rémunération, des dispositions de l'article L 122-14-4 du Code du Travail, il ya lieu de lui allouer la somme de 27 500 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse dont il conviendra de déduire la somme de 120 000 F versée au titre de la transaction.

Attendu qu'en application des dispositions de l'alinéa 2 de l'article L 122-14-4 du Code du Travail, la société ATAL remboursera aux

organismes concernés les indemnités de chômage éventuellement versées à Didier X... du jour de son licenciement au jour du jugement dans la limite de 6 mois d'indemnités.

Attendu que succombant en ses prétentions la société ATAL réglera à Didier X... la somme de 760 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement,

Reçoit l'appel régulier en la forme,

Au fond,

Infirme le jugement,

Statuant à nouveau,

Dit que la transaction du 12 mai 2000 est nulle et non avenue,

Dit que le licenciement de Didier X... est sans cause réelle et sérieuse.

Condamne en conséquence la société ATAL à payer à Didier X... les sommes de:

- 27 500 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse dont à déduire la somme de 18 293, 88 euros versée au titre de la transaction, soit un solde de 9 206,12 euros.

- 760 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Ordonne le remboursement par la société ATAL aux organismes concernés des indemnités de chômage versées à Didier X... du jour de son licenciement au jour du jugement dans la limite de 6 mois d'indemnités.

Déboute la société ATAL de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du Nouveau code de Procédure Civile.

La condamne aux dépens de 1ère instance et d'appel. Le Greffier,

Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 02/02153
Date de la décision : 29/10/2003
Type d'affaire : Sociale

Analyses

TRANSACTION - Objet

La transaction qui a pour objet de mettre un terme au litige résultant d'un licenciement, ne peut être valablement conclue qu'une fois la rupture devenue définitive par la réception par le salarié de la lettre de licenciement dans les conditions requises par l'article L122-14-1 du Code du Travail, lequel dispose que l'employeur qui décide de licencier un salarié doit notifier le licenciement par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.Si l'avis de réception constitue un moyen de preuve de la notification du licenciement, de sorte que le licenciement verbal ou par lettre simple produit néanmoins ses effets en l'absence de contestations, la notification par lettre recommandée avec avis de réception est une condition de fond, en matière de transaction, pour établir le caractère définitif de la rupture lors de la transaction.En effet, la transaction ne peut intervenir que lorsque le salarié n'est plus sous la subordination juridique de son employeur.En l'espèce, la remise en main propre de la lettre de licenciement au salarié, dont la date apposée par ce dernier est antérieure à celle de la transaction, ne permet pas d'établir, qu'au moment de la transaction, la rupture était consommée, le salarié soutenant que l'ensemble des pièces de la procédure de licenciement ont été antidatées et soumises à sa signature au cours du même entretien.Par conséquent, en l'absence de notification préalable du licenciement par lettre recommandée avec avis de réception, la transaction intervenue entre l'employeur et le salarié licencié est nulle et non avenue. Le salarié est dès lors recevable à contester son licenciement, ainsi que le reçu pour solde de tout compte signé suite à la transaction et dont la validité dépend de celle de la transaction.


Références :

Code civil 2052
Code du travail L122-14-1, L122-14-4
Nouveau code de procédure civile 786, 945-1, 700

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.amiens;arret;2003-10-29;02.02153 ?
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