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24/09/2020 | FRANCE | N°18/18260

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-6, 24 septembre 2020, 18/18260


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-6



ARRÊT AU FOND

DU 24 SEPTEMBRE 2020 



N° 2020/190













N° RG 18/18260



N° Portalis DBVB-V-B7C-BDLSE







[V] [J]

SA AXA FRANCE IARD





C/



[I] [Y]

Mutualité MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE PROVENCE AZUR















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



-l'ASSOCIATION CABINET CENAC ET ASSOCI

ES



-SELARL MAROCHI-YEPREMIAN ET ASSOCIES



-Me Pascal ALIAS













Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 23 Octobre 2018 enregistrée au répertoire général sous le n° 16/06954.





APPELANTS



Monsieur [V] [J]

né l...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-6

ARRÊT AU FOND

DU 24 SEPTEMBRE 2020 

N° 2020/190

N° RG 18/18260

N° Portalis DBVB-V-B7C-BDLSE

[V] [J]

SA AXA FRANCE IARD

C/

[I] [Y]

Mutualité MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE PROVENCE AZUR

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

-l'ASSOCIATION CABINET CENAC ET ASSOCIES

-SELARL MAROCHI-YEPREMIAN ET ASSOCIES

-Me Pascal ALIAS

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 23 Octobre 2018 enregistrée au répertoire général sous le n° 16/06954.

APPELANTS

Monsieur [V] [J]

né le [Date naissance 1] 1948,

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Nathalie CENAC de l'ASSOCIATION CABINET CENAC ET ASSOCIES, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE.

SA AXA FRANCE IARD,

demeurant [Adresse 6]

représentée par Me Nathalie CENAC de l'ASSOCIATION CABINET CENAC ET ASSOCIES, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

INTIMES

Monsieur [I] [Y]

né le [Date naissance 2] 1961 à [Localité 9],

demeurant [Adresse 5]

représenté par Me Pascal ALIAS, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

Mutualité MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE PROVENCE AZUR

Prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualité audit siège,

demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Carole MAROCHI de la SELARL MAROCHI-YEPREMIAN ET ASSOCIES, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

Les parties ont indiqué expressément qu'elles acceptaient que l'affaire soit jugée selon la procédure sans audience prévue par l'article 8 de l'ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 24 Septembre 2020.

COMPOSITION DE LA COUR

La Cour lors du délibéré était composée de :

Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président

Madame Françoise GILLY-ESCOFFIER, Conseiller

Madame Anne VELLA, Conseiller

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 24 Septembre 2020,

Signé par Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président et Madame Charlotte COMBARET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE

Le 5 août 1979, M. [J] au volant d'une moissoneuse-batteuse assurée auprès de la SA AXA France IARD occasionnait un accident de la voie publique à M. [Y], âgé de 17 ans, qui circulait au guidon de sa motocyclette. M. [Y] était blessé au membre inférieur gauche avec fracure de la rotule.

La responsabilité de M. [J] était établie par jugement du tribunal correctionnel de Bressuire du 18 octobre 1982 et confirmée par arrêt de la cour d'appel de Poitiers du 19 septembre 1984.

Le rapport d'expertise du docteur [W] du 8 mai 1981 retenait un déficit fonctionnel permanent de 18'%. Ce taux était porté à 20'% à la suite d'aggravations successives du préjudice en 1993 et en 2004': des protocoles transactionnels étaient signés les 10 novembre 1995 et 31 janvier 2006.

Par jugement du 4 juillet 2012, le tribunal du contentieux de l'incapacité de Marseille a attribué à M. [Y] une pension d'invalidité de 434,08 € mensuels avec effet rétroactif au 1er juillet 2011, sur la base d'un taux d'incapacité qu'il a fixé aux 2/3.

Par ordonnance du 15 avril 2014, le juge des référés du TGI de Niort saisi par M. [Y] d'une demande en réparation d'une aggravation du préjudice a commis aux fins d'expertise judiciaire le docteur [R] ultérieurement substitué par le docteur [T]. Ce praticien a déposé son rapport le 19 septembre 2014, qui date la nouvelle aggravation'du 29 avril 2007 et la nouvelle consolidation du 1er octobre 2010.

Le 8 juin 2015, la SA AXA France IARD a formulé une offre de règlement, refusée par M. [Y].

Par assignation des 30, 31 août et 1er, 8 septembre 2015, M. [Y] a saisi le TGI de Draguignan d'une demande de condamnation de M. [J], de la SA AXA France IARD, de la caisse primaire d'assurance-maladie du Var et de la MSA Provence Azur à lui payer les sommes de 175751,76 € en réparation de son préjudice d'aggravation et de 8000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance du 21 juin 2017, le juge de la mise en état du TGI de Draguignan a condamné M. [J] et la SA AXA France IARD au paiement d'une indemnisation provisionnelle de 40000 € à valoir sur la réparation future de son préjudice corporel et de 800 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement réputé contradictoire du 23 octobre 2018, le TGI de Draguignan a':

- condamné in solidum M. [J] et la SA AXA France IARD à payer à M. [Y] la somme de 138973,24 € en réparation de son préjudice corporel, provisions de 49500 € non déduites, avec intérêts au taux légal à compter de la date du jugement,

- dit que le poste perte de gains professionnels futurs doit être actuialisé pour tenir compte des rentes invalidité perçues par la victime entre mai 2016 et octobre 2018, dont le montant n'est pas précisé ni les justificatifs produits,

- condamné in solidum M. [J] et la SA AXA France IARD à payer à la MSA Provence Azur la somme de 12277,67 € au titre de son recours tiers payeur, outre une indemnisation forfaitaire de gestion de 910 €,

- condamné in solidum M. [J] et la SA AXA France IARD au paiement des dépens, en ce compris les frais d'expertise, et qui seront distraits au profit de Maître Pascal Alias, et à payer la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, cette somme courant avec intérêts au taux légal à compter de ce jour,

- dit que les avocats en ayant fait la demande pourront, chacun en ce qui le concerne, recouvrer sur la partie condamnée ceux des dépens dont ils auraient fait l'avance sans avoir reçu provision en application de l'article 699 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement à concurrence des deux tiers de l'indemnisation allouée et en totalité en ce qui concerne kes frais irrépétibles et les dépens.

Par déclaration du 22 novembre 2018, M. [J] la SA AXA France IARD ont interjeté appel du jugement du TGI de Draguignan du 23 octobre 2018, appel limité aux postes suivants': perte de gains professionnels futurs, incidence professionnelle et frais de véhicule adapté.

M. [Y] a relevé appel incident sur les postes suivants': dépenses de santé actuelles, frais divers, perte de gains professionnels futurs, incidence professionnelle et préjudice moral.

La MSA Provence Azur a relevé appel incident aux fins de condamnation de solidaire de M. [J] et de la SA AXA France IARD au paiement des sommes de 12277,67 € au titre des frais d'hospitalisation et de 72638,29 € au titre de la pension d'invalidité.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions récapitulatives notifiées par RPVA le 21 mai 2019, M. [J] et la SA AXA France IARD demandent à la cour de statuer comme suit :

1/ Sur le préjudice corporel en aggravation de M. [Y]':

' préjudices patrimoniaux avant consolidation':

- dépenses de santé actuelles':

* déclarer irrecevable comme nouvelle en cause d'appel, au visa de l'article 564 du code de procédure civile, la demande de Monsieur [Y] tendant au paiement d'une somme de 8352,95 €,

* subsidiairement, l'en débouter en présence de dépenses dont le lien de causalité avec l'aggravation n'est pas établi pour avoir été exposées avant le point de départ de l'aggravation et postérieurement à sa consolidation,

* juger que les dépenses de cures thermales ne sont pas rattachables aux séquelles de l'accident,

* plus subsidiairement, limiter la condamnation à intervenir au titre des frais médicaux restés à charge à la somme de 487,56 €,

- frais divers':

* confirmer le jugement entrepris quant au débouté des demandes formulées, en l'absence de justificatifs des honoraires d'assistance à expertise et des frais de déplacement,

' préjudices patrimoniaux après consolidation':

- perte de gains professionnels futurs':

* fixer l'indemnisation des pertes de gains futurs à la somme de 51430,40 €, soit 32960 € pour la période échue au 1er mai 2019 et 18470,40 € pour la période à échoir,

* juger qu'aucune indemnité ne peut revenir à la victime après imputation de la créance de la MSA Provence Azur au titre de la pension d'invalidité,

* infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné les concluants au paiement de la somme de 90800,48 € à parfaire au titre des pertes de gains professionnels futurs et débouter M. [Y] de sa demande à ce titre,

- incidence professionnelle':

* fixer l'indemnisation de l'incidence professionnelle à la somme de 24480 €,

* juger que la somme à revenir à la victime après imputation du solde de la créance de la MSA Provence Azur au titre de la pension d'invalidité est limitée à 3272,12 €,

* débouter M. [Y] du surplus de sa demande,

- frais de véhicule adapté':

* infirmer le jugement entrepris quant à la réparation de frais de véhicule adapté,

* juger que la nécessité médicale de l'usage d'un véhicule à boîte automatique n'est pas établie,

* débouter M. [Y] de sa demande à ce titre,

* subsidiairement, limiter l'indemnisation à la somme de 1500 € correspondant au surcoût moyen résultant de la présence d'une boîte automatique,

' préjudices extra-patrimoniaux avant consolidation':

- souffrances endurées':

* confirmer le jugement entrepris quant au débouté de la demande formulée au titre de la réparation de son préjudice moral,

2/ Sur le recours subrogatoire de la MSA Provence Azur':

- statuer ce que de droit sur la demande de la MSA au titre de son action subrogatoire,

3/ Sur les demandes annexes':

- débouter les intimées de leurs demandes d'application de l'article 700 du code de procédure civile.

- condamner M. [Y] aux dépens d'appel dont distraction au profit de Maître Nathalie Cenac, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Au soutien de leurs demandes, M. [J] et la SA AXA France IARD font valoir les arguments suivants':

Les demandes de M. [Y] au titre des dépenses de santé actuelles sont nouvelles et donc irrecevables sur le fondement de l'article 564 du code de procédure civile. En tout état de cause, les dépenses alléguées sont sans rapport avec l'aggravation du préjudice et avec le genou de M. [Y].

Les frais divers invoqués sont sans rapport avec le préjudice d'aggravation et le premier juge ne les a d'ailleurs pas pris en compte.

La perte de gains professionnels futurs doit être déterminée comme suit':

- M. [Y] était agent d'entretien dans une école à temps plein. Il convient de ne tenir compte que de la réduction de son taux d'activité professionnelle imputable à l'accident, soit de 100'% à 80'%, et non les réductions ultérieures à 50'% puis à 40'% ;

- il conviendrait d'imputer sur ces pertes de gains le montant de la pension d'invalidité de 434,08 € allouée à compter du 1er juillet 2011 par jugement du TCI de Marseille du 4 juillet 2012, étant précisé que le premier juge a omis de prendre en compte la période de perception de la pension d'invalidité non seulement de courant de juillet 2011 à juillet 2012 (arrérages échus) mais aussi à partir de 2016 (arrérages à échoir) du capital constitutif de la pension d'invalidité. Précisément, la MSA Provence Azur a produit le 2 mai un relevé de créance complémentaire de ce chef de 72638,29 € (42257,92 € d'arrérages échus + 30380,77 € d'arrérages à échoir). Et de souligner que M. [Y] ne tient compte que partiellement de la créance de la MSA Provence Azur, et qu'il chiffre sa créance de façon inadaptée';

- toutefois, M. [Y] est fondé à intégrer dans son calcul une évolution salariale entre 2010 et 2018, et à substituer à un salaire de référence de 1504 € en 2010 un salaire médian de 1600 €';

- s'agissant du chiffrage de la perte de gains au-delà de la date de liquidation, le tribunal a retenu à tort une 1600 € x capitalisation sur la base d'un euro de rente viagère alors qu'il aurait dû retenir le prix d'un euro de rente temporaire (le différentiel étant beaucoup plus important que le montant de la perte alléguée des droits à retraite du fait d'un passage à temps partiel, lequel ne peut au surplus être pris en compte que dans la limite de 80'%)';

- la perte théorique de gains de M. [Y] est de (1600 € x 20'% = 320 €) x 12 mois x 4,81 (prix de l'euro de rente temporaire pour un homme de 57 ans jusqu'à l'âge de 62 ans, selon barème BCRIV 2018)'= 51430,40 € ;

- la créance de 72638,29 € de la MSA doit s'imputer sur le montant de la perte théorique de gains de 51430,41 € de M. [Y]': aucune somme ne revient par conséquent à M. [Y].

L'incidence professionnelle ne prend en compte que la pénibilité accrue de l'activité professionnelle et l'incidence au demeurant limitée sur l'acquisition des points de retraite de la réduction du temps de travail de 20'% à compter d'octobre 2010 (en effet, les articles L.351-3 et R.351-12 du code de la sécurité sociale posent un principe de validation gratuite des trimestres pendant lesquels l'assuré social a perçu des indemnités journalières, une pension d'invalidité ou une rente accident de travail). En revanche, l'incidence professionnelle ne saurait correspondre à une perte de chance professionnelle ou une dévalorisation sur le marché du travail, M. [Y] ayant conservé le même emploi depuis 1999. Enfin, le reliquat de créance de la MSA Provence Azur de 21207,88 € vient s'imputer sur l'indemnisation réparant l'incidence professionnelle. Celle-ci a été chiffrée par le premier juge à 24480 € (montant offert par la SA AXA France IARD), le solde revenant à M. [Y] est donc de 3272,12 €.

Les frais de véhicule adapté ne sauraient être acceptés faute d'avoir été dûment admis par l'expert judiciaire. À titre subsidiaire, le montant de 18692,76 € alloué par le premier juge devrait être réduit dans de larges proportions.

Les souffrances endurées incluent les souffrances psychiques qui se confondent avec le préjudice moral. M. [Y] ayant acquiescé au jugement de première instance au titre des souffrances endurées, il n'y a pas lieu de majorer la somme totale de 5000 € que le premier juge a accordée ' ce d'autant moins que les souffrances à prendre en considération sont uniquement celles apparues depuis le 29 avril 2007.

* * *

Aux termes de ses dernières conclusions d'intimé n°2 notifiées par RPVA le 9 janvier 2020, M. [Y] demande à la cour de :

- révoquer l'ordonnance de clôture prononcée le 31 décembre 2019 ;

- juger que M. [Y] justifie des frais de déplacements effectués ;

- juger que M. [Y] justifie de frais médicaux restés à charge ;

- juger que M. [Y] justifie des frais d'assistance exposés ;

- juger que M. [Y] justifie des frais de véhicule adapté notamment au moyen de certificats médicaux ;

- réformer la décision dont appel en ce qu'elle a considéré que M. [Y] ne justifiait pas des frais de déplacements et des frais d'assistance à expertise exposés ;

- confirmer la décision dont appel en ce qu'elle a fait droit à la demande de M. [Y] concernant les frais de véhicule adapté ;

- condamner solidairement M. [J] et la SA AXA France IARD au paiement de la somme de 34331,63 € au titre des frais divers avec intérêts de droit ;

- juger que M. [Y] justifie de la perte de gains professionnels futurs et des indemnités perçues de la MSA ;

- condamner M. [J] et la SA AXA France IARD au paiement de la somme de 97430,63 € au titre de la perte de gains professionnels futurs avec intérêts de droit (à parfaire) ;

- réformer la décision dont appel en ce qu'elle a considéré l'offre des appelants satisfactoire quant à l'incidence professionnelle ;

- condamner solidairement M. [J] et la SA AXA France IARD au paiement de la somme de 50000 € au titre de l'incidence professionnelle avec intérêts de droit ;

- juger que M. [Y] justifie d'un préjudice moral distinct du préjudice apprécié au titre des souffrances endurées ;

- réformer la décision dont appel en ce qu'elle a considéré que M. [Y] ne justifiait pas d'un préjudice moral distinct des souffrances endurées évaluées par l'expert ;

- condamner solidairement M. [J] et la SA AXA France IARD au paiement de la somme de 3000 € au titre du préjudice moral subi par M. [Y] ;

- confirmer la décision dont appel pour le surplus ;

- condamner solidairement M. [J] et la SA AXA France IARD au paiement de la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner solidairement M. [J] et la SA AXA France IARD aux entiers dépens.

Au soutien de ses demandes, M. [Y] fait valoir en particulier les éléments suivants :

Frais divers': M. [Y] indique rapporter la preuve de la réalité des déplacements effectués, et indique que sous cette réserve, il est constant que les frais de tranasport peuvent être indemnisés sans justificatif des dépenses.

Frais de médecin-conseil': le rapport d'expertise atteste de ce que M. [Y] s'est fait assister par le docteur [N], médecin-conseil, pendant les opérations d'expertise.

Frais de véhicule adapté': M. [Y] fait valoir que les lésions de son genou gauche rendent indispensable l'usage d'un véhicule à boîte de vitesses automatique (il produit une attestation du docteur [P] en ce sens), et que le devis établi par Toyota pour l'achat d'une Toyota Yaris comporte précisément la reprise de son ancien véhicule à boîte mécanique.

Perte de gains professionnels futurs': M. [Y] a baissé son taux d'activité de 80'% à 50'% en 2014 pui à 40'% en 2017. Il applique aux salaires qu'il a perçus un coefficient de 2,00 puis de 2,50 pour aboutir à un salaire de référence de 1741 € (base 100'% en 2018), notablement supérieur aux 1600 € de salaire médian proposés par la SA AXA France IARD. Il fait état de ce que son arrêt de travail ne lui a permis de bénéficier que de 1516 points de retraite et non de 2029 dans le cas contraire ' ce dont il est résulté une perte de 300 € par mois pendant 20 ans, soit 72000 €.

Incidence professionnelle': la pénibilité accrue n'est pas contestée par la SA AXA France IARD mais il convient de tenir compte aussi d'une perte de chance d'évolution professionnelle et de substituer une somme de 50000 € aux 24480 € proposés par la SA AXA France IARD et alloués par le premier juge.

Préjudice moral': s'il est admis que les souffrances morales sont intégrées dans les souffrances endurées (avant consolidation) et dans le déficit fonctionnel permanent (après consolidation), pour autant l'expert judiciaire n'a manifestement tenu aucun compte de celles que M. [Y] a exprimées aux termes d'un dire, de sorte que le chiffrage des souffrances endurées à 3/7 est insuffisant.

* * *

Par conclusions de procédure du 10 janvier 2020, M. [J] et la SA AXA France IARD s'opposent, au visa de l'article 784 du code de procédure civile, à la révocation de l'ordonnance de clôture du 31 décembre 2019, et concluent à l'irrecevabilité des conclusions et pièces notifiées le 9 janvier 2020.

* * *

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 2 mai 2019, la MSA Provence Azur demande à la cour de :

- réformer le jugement rendu par le TGI de Draguignan le 23 octobre 2018, en ce qu'il a rejeté la demande formée par la MSA Provence Azur tendant à voir condamner conjointement et solidairement M. [J] et M. [Y] à la MSA Provence Azur la somme de 1500 € au titre de I'articIe 700 du code de procédure civile,

- confirmer le jugement du TGI de Draguignan du 23 octobre 2018 en ce qu'il a condamné conjointement et solidairement M. [J] et la SA AXA France IARD à régler à la MSA Provence Azur la somme de 910 € au titre de I'indemnité forfaitaire de gestion,

- confirmer le jugement du TGI de Draguignan du 23 octobre 2018 en ce qu'il a condamné conjointement et solidairement M. [J] et la SA AXA France IARD aux entiers dépens,

Statuant à nouveau,

- juger que la créance de la MSA Provence Azur au titre du recours contre tiers s'élève à 12277,67 € au titre des frais d'hospitalisation et des indemnités journalières, outre la somme de 72638,29 € au titre de la pension d'invalidité et des arrérages,

- condamner conjointement et solidairement M. [J] et la SA AXA France IARD à régler à la MSA Provence Azur la somme de 12277,67 € au titre des frais d'hospitaIisation et des indemnités joumalières, outre la somme de 72638,29 € au titre du capital constitutif de la pension d'invalidité et de ses arrérages,

- condamner conjointement et solidairement M. [J] et la SA AXA France IARD à régler à la MSA Provence Azur la somme de 1500 € au titre de I'article 700 du code de procédure civile pour la procédure devant le TGI de Draguignan,

- condamner conjointement et solidairement M. [J] et la SA AXA France IARD à régler à la MSA Provence Azur la somme de 1500 € au titre de I'article 700 du code de procédure civile pour la procédure en cause d'appel,

- condamner conjointement et solidairement M. [J] et la SA AXA France IARD aux entiers dépens de l'instance au pro't de Maître Carole Marochi, qui pourra faire application des dispositions de I'articIe 699 du code de procédure civile.

Au soutien de ses demandes, la MSA Provence Azur rappelle que le premier juge avait réservé le chiffrage de la perte de gains professionnels futurs dans l'attente du montant des rentes invalidité perçues par M. [Y] de mai 2016 à octobre 2018. Elle produit précisément un relevé actualisé de sa créance, compte arrêté au 2 mai 2019, et elle entend exercer le recours qu'elle tient de l'article L.376-1 du code de la sécurité sociale. En sus de la somme de 12277,67 € accordée par le premier juge au titre des frais d'hospitalisation (2678,37 €) et des indemnités journalières (9599,30 €), elle entend obtenir paiement':

1/ de la somme de 72638,29 € au titre du capital constitutif de la pension d'invalidité, se décomposant ainsi':

- 30380,77 €, soit 5475 € (= montant annuel de la pension au 1er janvier 2019) x 5,549 (prix de l'euro de rente à selon barème officiel du 2 décembre 2016, pour une victime de 57 ans), et

- 42257,52 € au titre des arrérages échus de la pension d'invalidité.

2/ des sommes de 910 € (indemnité forfaitaire de gestion prévue par les articles L.376-1 précité et 9 de l'ord 96-51 du 24 janvier 1996) et de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la nature de la décision rendue':

L'arrêt rendu sera contradictoire, conformément à l'article 467 du code de procédure civile.

Sur la demande de révocation de l'ordonnance de clôture':

La clôture a été prononcée le 31 décembre 1999. L'affaire a été fixée au 15 janvier 2020, date à laquelle l'affaire a été renvoyée par suite d'un mouvement national de grève des avocats. L'ordonnance de clôture du 31 décembre 2019 a été révoquée afin de permettre la production de certaines pièces par M. [Y]. Le 20 mai 2020, un avis de mise en oeuvre de l'article 8 de l'ordonnance 2020-304 du 25 mars 2020 valant expressément ordonnance de clôture a été notifié aux parties.

Sur le droit à indemnisation'de M. [Y] :

Le droit à indemnisation intégrale du préjudice corporel en aggravation subi par M. [Y] n'a jamais été contesté. Seule est discutée en cause d'appel l'évaluation de ce préjudice.

Sur l'indemnisation du préjudice corporel'en aggravation de M. [Y] :

Le rapport d'expertise médicale du docteur [T] du 19 septembre 2014, contre lequel aucune critique médicalement fondée n'est formulée, constitue une base valable d'évaluation du préjudice corporel subi.

Données médico-légales':

L'expert judiciaire indique expressément que l'aggravation des séquelles concernant le genou gauche de M. [Y]

qui a été constatée depuis le 29 avril 2007 est en relation directe et certaine avec l'accident du 5 août 1979.

Date de consolidation : 1er octobre 2010

Arrêt temporaire total des activités professionnelles':

Souffrances endurées : 3/7

Préjudice esthétique permanent : 0/7

Assistance par tierce personne': néant

AIPP : 20'% (inchangé)

Préjudice sexuel': non

Préjudice d'établissement': non

Frais de véhicule adapté': non

Frais de logement adapté': non

Préjudice d'agrément': non

Préjudice professionnel

Incidence professionnelle': nécessité d'un temps partiel à 80'%

L'expert note qu'une aggravation sera à prévoir avec mis en place d'une prothèse totale du genou dans un délai qui ne peut être précisé.

L'évaluation doit intervenir au vu des diverses pièces justificatives produites, de l'âge de la victime au moment de l'accident, de son activité (agent d'entretien dans une école), de la date de consolidation, afin d'assurer sa réparation intégrale et en tenant compte, conformément aux articles 29 et 31 de la loi du 5 juillet 1985, de ce que le recours subrogatoire des tiers payeurs s'exerce poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'ils ont pris en charge, à l'exclusion de ceux à caractère personnel sauf s'ils ont effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un tel chef de dommage.

La victime a subi un dommage corporel : elle doit être replacée dans la situation où elle se serait trouvée si l'acte dommageable ne s'était pas produit, sans qu'il en résulte pour elle ni perte ni profit.

L'évaluation du dommage doit être faite au moment où la cour statue.

Le barème de capitalisation employé sera celui publié par la Gazette du Palais le 26 avril 2016 dont il a été fait application par le premier juge.

Données chronologiques :

Date de naissance':08/10/1961

Date du fait générateur :05/08/1979

Date de la consolidation':25/08/1980

Aggravation'en 1993 :02/11/1993

Consolidation':01/01/1995

Aggravation'en 2004 :07/06/2004

Consolidation :04/02/2005

Aggravation'en 2007 :29/04/2007

Consolidation':01/10/2010

Date de la liquidation':25/06/2020

Date du départ en retraite':08/10/2023

Durée en années de la période avant nouvelle consolidation :3,425

Durée en années de la période nouvelle consolidation / liquidation':9,733

Age'lors de la nouvelle aggravation en 2007 :45

Age'lors de la nouvelle consolidation :48

Age'lors de la liquidation :58

Age'lors du départ en retraite :62

Sous le bénéfice de ces observations, le préjudice corporel en aggravation de M. [Y] doit être évalué comme suit.

I. PRÉJUDICES PATRIMONIAUX

a) préjudices patrimoniaux temporaires (avant consolidation)

Dépenses de santé actuelles (DSA)': 487,56 €

Par ce poste il s'agit d'indemniser l'ensemble des frais médicaux, hospitaliers, pharmaceutiques et paramédicaux exposés par l'organisme de sécurité et sociale et ceux éventuellement restés à la charge de la victime durant la phase temporaire d'évolution de la pathologie traumatique, jusqu'à la date de consolidation.

Aucune fin de non-recevoir ne saurait être opposée à M. [Y] au motif qu'il se serait abstenu en première instance de solliciter le remboursement des dépenses de santé actuelles restées à sa charge. En effet, la demande indemnitaire qu'il formule en cause d'appel tend aux mêmes fins que celle soumises au premier juge: obtenir l'indemnisation intégrale de l'ensemble des postes du dommage corporel effectivement subi à la suite de l'accident, et apparaît étayée par les nouvelles pièces produites. Elle ne constitue pas une prétention nouvelle au sens de l'article 564 du code de procédure civile, prohibée en tant que telle devant la cour.

La période au titre de laquelle M. [Y] sollicite le remboursement de dépassements d'honoraires va du 22 septembre 2004 au 12 février 2019, soit en deçà de la date de la nouvelle aggravation (29 avril 2007) et au delà de la date de la nouvelle consolidation (1er octobre 2010). Entre ces deux dates, cependant, la SA AXA France IARD ne conteste pas l'existence d'un reste à charge de 28 € pour chacune des neuf consultations médicales ou chirurgicales intervenues, soit une somme de 252 € qui sera allouée à M. [Y].

De même, M. [Y] sollicite une somme de 481,35 € au titre de frais médicaux divers engagés avant le 29 avril 2007 et après le 1er octobre 2010. Seront alloués à M. [Y] les montants des dépenses restées à sa charge entre ces deux dates, soit une somme ' admise par la SA AXA France IARD ' de 235,56 € (frais pharmaceutiques, frais de chambre particulière à la clinique de Manosque).

Enfin, M. [Y] entend obtenir paiement d'une somme de 7171 € au titre de cures thermales destinées à soulager les douleurs de son genou. Le rapport d'expertise judiciaire ne conclut pas à la nécessité de cures thermales. Aucune somme ne sera allouée à M. [Y] de ce chef.

Le montant des dépenses de santé actuelles restées à la charge de M. [Y] est donc de 487,56 €. Le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.

La MSA Provence Azur justifie avoir engagé une somme de 2678,37 €.

Frais divers (FD) : 1766,72 €

* Frais de médecin conseil': 1044 €

La réparation du préjudice doit être intégrale et cette dépense, non prise en charge par les organismes sociaux, est née directement et exclusivement de l'accident': elle est par là-même indemnisable par l'assureur du conducteur du véhicule impliqué.

Le rapport d'expertise judiciaire atteste bien de ce que M. [Y] s'est fait assister devant l'expert par un médecin-conseil, en l'espèce le docteur [N], afin que la discussion s'engage sur un terrain médico-légal pour lequel M. [Y] ne disposait d'aucune compétence technique ' et ce d'autant plus que la SA AXA France IARD était elle-même représentée par le docteur [C]. La présence du docteur [N] a garanti l'instauration d'un débat réellement contradictoire.

La SA AXA France IARD fait valoir que M. [Y] ne produit pas le moindre justificatif de règlement d'honoraires au docteur [N], et que les 3600 € demandés sont d'autant plus contestables que le docteur [T], expert judiciaire désigné, n'a tenu qu'une seule réunion.

M. [Y] produit une facture du 10 juin 2014 du docteur [N]. Il lui sera alloué la somme de 1044 €. Le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.

* Frais de déplacement': 766,72 €

Les frais de déplacement pour se rendre aux divers examens et consultations médicales sont nés directement et exclusivement de l'accident. Supportés par la victime, ils sont par la même indemnisables par le conducteur du véhicule impliqué ou son assureur.

Dans le cas présent, M. [Y] sollicite de ce chef la somme de 3685,92 € correspondant à une distance parcourue de 6582 kilomètres de 2004 à 2019, pour se rendre notamment chez le radiologue, le kinésithérapeute, l'hôpital de [Localité 7], mais aussi dans des juridictions autres que Draguignan, en particulier Toulon et Marseille. Ces frais ne sont là encore indemnisables que pour la période courant du 29 avril 2007 au 1er octobre 2010 ' alors que M. [Y] produit un décompte de créance courant du 4 janvier 2004 au 21 février 2019. Par ailleurs, M. [Y] ne justifie pas du lien entre l'accident et la nécessité de se rendre dans des juridictions autres que Draguignan, ainsi qu'à une expertise à [Localité 8] qui n'est pas celle qui a été confiée au docteur [T]. Compte tenu de ces restrictions, le kilométrage parcouru entre avril 2007 et octobre 2010 en lien avec les soins consécutifs à l'accident du 5 août 1979 n'est que de 1466 kilomètres, auxquels sera appliquée ' en l'absence d'indication et de justification de la puissance fiscale du véhicule utilisé ' le tarif kilométrique 2020 de 0,523 € appliqué par l'administration fiscale aux véhicules de 4 cv fiscaux. Soit une somme de 766,72 €.

Perte de gains professionnels actuels (PGPA) : aucune

Ce poste vise à compenser les répercussions du dommage sur la sphère professionnelle de la victime et doit être évalué au regard de la preuve d'une perte effective de revenus. La durée et l'importance, généralement décroissante, de l'indisponibilité temporaire professionnelle sont à apprécier depuis la date du dommage jusqu'à la date de la consolidation. Il convient de déduire des revenus dont la victime a été privée pendant cette indisponibilité professionnelle temporaire, le montant des indemnités journalières versées par son organisme de sécurité sociale comme celui du salaire maintenu par son employeur.

En l'occurrence, la MSA Provence Azur a versé des indemnités journalières d'un montant de 9599,30 € du 15 octobre 2009 au 9 août 2010. Aucune perte supplémentaire et personnelle de revenus n'est invoquée par la victime. L'indemnité revient donc intégralement au tiers payeur.

b) préjudices patrimoniaux permanents après consolidation

Perte de gains professionnels futurs (PGPF) : 0 €

Ce poste est destiné à indemniser la victime de la perte ou de la diminution directe de ses revenus à compter de la date de consolidation, consécutive à l'invalidité permanente à laquelle elle est désormais confrontée dans la sphère professionnelle à la suite du fait dommageable. Cette perte ou diminution des gains professionnels peut provenir soit de la perte de son emploi par la victime, soit de l'obligation pour elle d'exercer un emploi à temps partiel à la suite du dommage consolidé. Ce poste n'englobe pas les frais de reclassement professionnel, de formation ou de changement de poste qui ne sont que des conséquences indirectes du dommage.

Adossé au montant du revenu antérieur à l'accident, le chiffrage de la perte de revenus annuels doit permettre':

- le calcul des arrérages échus payables sous forme de capital jusqu'à la décision fixant l'indemnisation du préjudice, et

- le calcul des arrérages à échoir à compter de cette date, capitalisés selon un euro de rente variant selon l'âge de la victime.

De ce poste de préjudice devront être déduites les prestations servies à la victime par les organismes de sécurité sociale (pensions d'invalidité et rentes accidents du travail), les mutuelles, les institutions de prévoyance et les assureurs (prestations longue durée d'invalidité et accidents du travail), de même que par les employeurs publics (allocations temporaires d'invalidité, pensions et rentes viagères d'invalidité) qui tendent à indemniser, le plus souvent de manière forfaitaire, partant de manière partielle l'incapacité invalidante permanente subie par la victime afin d'éviter soit que celle-ci ne bénéficie d'une double indemnisation de son préjudice sur ce point, soit que le recours exercé par l'organisme tiers payeur ne réduise les sommes dues à la victime.

En l'occurrence, le chiffrage de la perte de gains professionnels futurs de M. [Y] doit prendre en compte les paramètres suivants':

' La réduction du taux d'activité professionnelle ne doit entrer en ligne de compte que dans la mesure où elle résulte de l'accident et le cas échéant d'une nouvelle aggravation du préjudice, mais non de convenances personnelles. Or, en l'espèce, l'expert judiciaire n'admet la nécessité d'un passage à temps partiel qu'à hauteur de 80'%. D'autre part, l'employeur de M. [Y] a accusé réception par courriers successifs des 18 février 2013 et 16 janvier 2017 du souhait de l'intéressé de réduire encore son taux d'activité, et lui a notifié un passage à 50'% avec effet rétroactif au 1er avril 2013, puis à 40'% avec effet rétroactif au 1er janvier 2017. Ne doit donc être retenue comme perte de gains professionnels qu'un différentiel de 20'%.

' La SA AXA France IARD ne conteste pas dans son principe la position de M. [Y] consistant à répercuter dans l'assiette de calcul de la perte de gains professionnels la réévaluation, généralement annuelle, intervenue entre la consolidation et la liquidation. La SA AXA France IARD propose la référence à un salaire médian de 1600 €, là où M. [Y] se fonde sur l'évolution du salaire de référence (calculé par rapport à l'évolution du salaire perçu). Cette dernière méthode est plus précise et sera retenue, étant précisé toutefois que les bulletins de paie ne sont produits que pour la période 2010 à 2015. Le nouveau salaire de 920,65 € que l'employeur de M. [Y] mentionne son courrier du 16 janvier 2017 correspond à un montant brut et non pas net. Pour la période 2015 à 2020, la cour appliquera au salaire net une progression salariale annuelle de +0,43'%, conforme à celle observée au mois de janvier 2015 par rapport à janvier 2014.

' S'agissant des arrérages échus, il en résulte une perte de gains professionnels futurs de 36480,79 € sur 117 mois entre la date de consolidation (1er octobre 2010) et celle de la liquidation (25 juin 2020), ventilée comme suit':

PÉRIODEANNÉEARRÉRAGES ÉCHUS DE LA PERTE DE SALAIRE SUBIE

T42010Salaire net de référence 100'%1'504,25 €

Salaire net perçu 80'%1'203,40 €

Perte nette mensuelle300,85 €

Perte nette sur la période (3 mois)902,55 €

T1 - T42011Salaire net perçu 80'% 1'229,97 €

Salaire net reconstitué 100'% 1'537,46 €

Perte nette mensuelle307,49 €

Perte nette sur la période (x 12)3'689,91 €

T1 - T4 2012Salaire net perçu 80'% 1'250,02 €

Salaire net reconstitué 100'% 1'562,53 €

Perte nette mensuelle312,51 €

Perte nette sur la période (12 mois)3'750,06 €

T1 2013Salaire net perçu 80'% 1'361,32 €

Salaire net reconstitué 100'% 1'701,65 €

Perte nette mensuelle340,33 €

Perte nette annuelle (x 3) 1'020,99 €

T2 - T42013Salaire net 50'% 780,91 €

Salaire net reconstitué 100'% 1'561,82 €

Salaire net reconstitué 80'% 1'249,46 €

Perte nette mensuelle312,36 €

Perte nette sur la période (9 mois)2'811,28 €

T1 - T4 2014Salaire net perçu 50'% 834,94 €

Salaire net reconstitué 100'% 1'669,88 €

Salaire net reconstitué 80'% 1'335,90 €

Perte nette mensuelle333,98 €

Perte nette annuelle (12 mois)4'007,71 €

T1 à T42015Salaire net perçu 50'% 838,52 €

Salaire net reconstitué 100'% 1'677,04 €

Salaire net reconstitué 80'% 1'341,63 €

Perte nette mensuelle335,41 €

Perte nette annuelle (12 mois)4'024,90 €

T1 - T4 2016Salaire net perçu 50'% (N-1 + 0,43%) 842,13 €

Salaire net reconstitué 100'% 1'684,25 €

Salaire net reconstitué 80'% 1'347,40 €

Perte nette mensuelle336,85 €

Perte nette annuelle (x 12)4'042,20 €

T1 - T4 2017Salaire net perçu 40'% (N-1 - 20'% + 0,43%)676,60 €

Salaire net reconstitué 100'% 691,49 €

Salaire net reconstitué 80'% 1'353,19 €

Perte nette mensuelle338,30 €

Perte nette annuelle (12 mois)4'059,58 €

T1 à T4 2018Salaire net perçu 40'% (N-1 + 0,43%)679,51 €

Salaire net reconstitué 100'% 698,77 €

Salaire net reconstitué 80'% 1 359,01 €

Perte nette mensuelle339,75 €

Perte nette annuelle (12 mois)4 077,04 €

T1 à T4 2019Salaire net 40'% (N-1 + 0,43%)682,43 €

Salaire net reconstitué 100'% 1'706,07

Salaire net reconstitué 80'% 1'364,86 €

Perte nette mensuelle341,21 €

Perte nette annuelle (12 mois)4'094,57 €

T1 - T2 2020Salaire net perçu 40'% (N-1 + 0,43%)685,36 €

Salaire net reconstitué 100'% 1'713,41 €

Salaire net reconstitué 80'% 1'370,73 €

Perte nette mensuelle342,68 €

Perte nette sur la période (6 mois)2'056,09 €

T 4 2010 ' T2 2020Perte nette sur la période (117 mois)36 480,79  €

' S'agissant des arrérages à échoir, la perte mensuelle de 342,68 € à la date de la liquidation doit être annualisée et multipliée par le prix de l'euro de rente temporaire de 3,804 pour un homme âgé de 58 ans à la liquidation (selon barème Gazette du Palais mis en oeuvre par le premier juge), jusqu'à l'âge de 62 ans auquel il sera admis à faire valoir ses droits à la retraite ' étant précisé que la question distincte de la perte éventuelle des droits à retraite sera appréciée dans le poste distinct de l'incidence professionnelle. Soit un montant de 342,68 € x 12 x 3,804 = 16053,87 €.

' Soit une perte de gains professionnels futurs totale de 36480,79 € + 16053,87 € = 52534,66 €.

' Conformément à l'article L.376-1 du code de la sécurité sociale, doit être imputée sur ce montant'la somme de 72638,29 €, montant de la pension d'invalidité servie par la MSA Provence Azur à M. [Y], soit 42257,92 € d'arrérages échus et 30380,77 € d'arrérages à échoir.

Au vu de l'ensemble de ces données, l'indemnité due pour ce poste de dommage doit être chiffrée à 52534,66 €. Sur cette indemnité s'impute la pension d'invalidité réglée par la MSA Provence Azur, qu'elle a vocation à réparer, soit 72638,29 €. Ce tiers payeur sera partiellement désintéressé à hauteur de 52534,66 €. Aucune indemnité ne revient à ce titre à M. [Y]. Le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.

Incidence professionnelle (IP)': 4896,37 €

Ce chef de dommage a pour objet d'indemniser non la perte de revenus liée à l'invalidité permanente de la victime mais les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle en raison, notamment,

- de sa dévalorisation sur le marché du travail,

- de sa perte d'une chance professionnelle,

- de l'augmentation de la pénibilité de l'emploi qu'elle occupe imputable au dommage, ou

- de l'obligation de devoir abandonner la profession exercée au profit d'une autre en raison de la survenance de son handicap, ou enfin

- de la perte des droits à retraite que la victime va devoir supporter en raison de son handicap.

L'incidence professionnelle est indemnisée selon une somme fixée globalement même si différents éléments sont pris en considération, et non à partir d'une perte annuelle de gains professionnels déterminée puis capitalisée selon un barème choisi.

En l'occurrence, l'expert judiciaire relève que M. [Y] présente une atteinte cartilagineuse du genou gauche qui, même sans instabilité, entraîne des répercussions sur son activité professionnelle. M. [Y] est agent d'entretien dans une école': la pénibilité accrue des conditions d'exercice de ladite activité n'est pas contestable.

L'incidence sur l'étendue des droits à la retraite résulte de ce que l'assiette des cotisations retraite de M. [Y] aura été réduite pendant douze ans, soit près du quart de sa vie active, dans une proportion imputable à la nouvelle aggravation de 20'% de son salaire.

Plus discutable est l'argument selon lequel M. [Y] a subi une perte de chance d'évolution professionnelle n'emporte pas la conviction. Ses bulletins de paie attestent de sa grande sédentarité professionnelle au sein de l'entreprise MFR Puyloubier depuis 1999, et il résulte de l'expertise judiciaire que d'autres pathologies sans rapport avec l'accident du 5 août 1979 contribuent à freiner l'évolution professionnelle de M. [J], appelé à faire valoir ses droits à la retraite le 8 octobre 2023.

Au vu de l'ensemble de ces données, l'indemnité due pour ce poste de dommage doit être chiffrée à 25000 €. Sur cette indemnité s'impute le reliquat de créance de la MSA Provence Azur au titre de la pension d'invalidité, soit 72638,29 € - 52534,66 € = 20103,63 €, qu'elle a vocation à réparer. La somme revenant à M. [Y] est de 4896,37 €. Le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.

Frais de véhicule adapté (FVA) : 18692,76 €

L'expert judiciaire écarte toute nécessité pour M. [Y] de bénéficier d'un véhicule aménagé en fonction de son handicap ' en l'occurrence, l'accès à une boîte automatique. La cour, qui n'est pas liée par l'avis de l'expert, considère que la nature des lésions ' atteinte sévère du genou gauche ' contre-indique l'usage du pied gauche qu'implique le passage des vitesses avec un boîte manuelle. Cette analyse est d'ailleurs partagée par le docteur [P], son médecin traitant qui le suit depuis 2002 et qui, par certificat médical du 7 février 2019, atteste que l'état de santé de M. [Y] et la pathologie de son genou justifient l'accès à un véhicule à boîte automatique.

L'argument de la SA AXA France IARD selon lequel le chiffrage du poste frais de véhicule adapté devrait être circonscrit au différentiel de coût moyen entre un véhicule à boîte automatique et un véhicule à boîte mécanique, soit entre 1000 € et 2000 €, sera écarté': le principe de réparation intégrale du préjudice justifie en effet de replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l'acte dommageable n'avait pas eu lieu, et à subsituer à son ancien véhicule dorénavant inutilisable beaucoup plus difficilement utilisable, un véhicule spécialement dédié à son handicap ' étant précisé que la reprise de l'ancien véhicule a réduit de 2500 € le coût de son remplacement.

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a accordé à M. [Y] la somme de 18692,76 € au titre des frais de véhicule adapté pour l'achat d'un véhicule Toyota Yaris.

II. PRÉJUDICES EXTRA-PATRIMONIAUX

a) préjudices extra-patrimoniaux temporaires (avant consolidation)

Souffrances endurées (SE)': 5000 €

Ce poste prend en considération les souffrances physiques et psychiques et les troubles associés supportés par la victime. Les souffrances endurées ont été qualifiées de modérées par l'expert judiciaire et évaluées à 3/7.

M. [Y] ne conteste pas que le préjudice moral entre dans le périmètre des souffrances endurées. Il soutient néanmoins que l'évaluation à 3/7 n'a pas tenu compte de la douleur morale qu'il a évoquée dans un dire transmis à l'expert. L'argument n'emporte pas la conviction, le premier juge ayant nécessairement pris connaissance du dire avant de procéder au chiffrage de ce poste de préjudice. Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a fixé à 5000 € le montant du poste souffrances endurées, en ce compris la dimension morale et psychiques de celles-ci.

b) préjudices extra-patrimoniaux permanents (après consolidation)

[...]

* * *

Le préjudice corporel en aggravation subi par M. [Y] s'établit ainsi à la somme de 115803,37 €. Soit, après imputation de la créance de 84915,96 € de la MSA Provence, une somme de 30887,41 € lui revenant, provisions non déduites, qui, en application de l'article 1231-7 du code civil, portera intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement du 23 octobre 2018.

Sur le recours subrogatoire de la MSA Provence Azur :

Conformément à l'article L.376-1 du code de la sécurité sociale, les tiers payeurs peuvent exercer leur recours sur tout poste de préjudice qu'ils ont indemnisé. La pension d'invalidité versée à la victime indemnise, d'une part les pertes de gains professionnels et l'incidence professionnelle de l'incapacité et d'autre part le déficit fonctionnel permanent.

En l'occurrence, la MSA Provence Azur justifie avoir versé à M. [Y] les sommes suivantes':

1/ frais d'hospitalisation (avant consolidation)': 2678,37 €

2/ indemnités journalières (avant consolidation)': 9599,30 €

3/ pension d'invalidité (après consolidation)': 72638,29 €

- arrérages échus': 42257,52 €

- arrérages à échoir': 30380,77 € au titre du capital constitutif de la pension d'invalidité (montant annuel 5475 € x 5,549 prix de l'euro de rente pour un homme de 57 ans selon barème issu de l'arrêté du 27 décembre 2011 relatif à l'application des articles R. 376-1 et R. 454-1 du code de la sécurité sociale).

M. [J] et la SA AXA France IARD seront condamnés in solidum à payer à la MSA Provence Azur la somme de 84915,96 €.

Sur la demande de la MSA Provence Azur au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion':

L'article L.376-1 du code de la sécurité sociale prévoit la possibilité pour l'organisme payeur auquel est affilié l'assuré social victime de l'accident de recouvrer contre le tiers responsable une indemnité forfaitaire de gestion dont le montant est égal au tiers des sommes dont le remboursement a été obtenu, sans pouvoir excéder un montant fixé par arrêté pris conjointement par les ministres des affaires sociales et du budget.

En l'occurrence, l'arrêté du 27 décembre 2018 fixe ce montant maximum à la somme de 1080 €, soit un montant supérieur à celui dont la MSA Provence Azur demande la confirmation. Il est constant que cette indemnité se distingue de l'article 700 du code de procédure civile, tant par sa finalité que par ses modalités d'application.

Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.

Sur les demandes annexes':

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles alloués à la victime doivent être confirmées.

M. [J] et M. [Y] qui succombent partiellement dans leurs prétentions et sont tenus à indemnisation supporteront la charge des entiers dépens d'appel et ne peuvent, de ce fait, bénéficier des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité ne justifie pas particulièrement de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice des autres parties en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Rappelle que la clôture prononcée le 31 décembre 1999 a été révoquée le 15 janvier 2020 et prononcée derechef le 20 mai 2020.

Infirme le jugement du TGI de Draguignan du 23 octobre 2018, hormis':

- sur les postes frais de véhicule adapté et souffrances endurées, ,nnjfs

- sur le principe et le montant de l'indemnité forfaitaire de gestion instituée par l'article L.376-1 du code de la sécurité sociale et allouée à la MSA Provence Azur,

- sur les dépens et les sommes allouées au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,

Fixe le préjudice corporel en aggravation de M. [Y] à la somme de 115803,37 € (cent quinze mille huit cent trois euros et trente sept cents).

Dit que l'indemnité revenant à cette victime s'établit à la somme de 30887,41 € (trente mille huit cent quatre vingt sept euros et quarante et un cents) lui revenant, provisions non déduites.

Condamne in solidum M. [J] et la SA AXA France IARD à payer à M. [Y] la somme de 30887,41 € (trente mille huit cent quatre vingt sept euros et quarante et un cents).

Condamne in solidum M. [J] et la SA AXA France IARD à payer à la MSA Provence Azur la somme de 84915,96 € (quatre vingt quatre mille neuf cent quinze euros et quatre vingt seize cents).

Dit que les sommes allouées porteront intérêts au taux légal à compter du 23 octobre 2018.

Dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles que les parties ont engagés en cause d'appel.

Condamne in solidum M. [J] et la SA AXA France IARD aux entiers dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffier,Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-6
Numéro d'arrêt : 18/18260
Date de la décision : 24/09/2020

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 10, arrêt n°18/18260 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-09-24;18.18260 ?
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