La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/10/2017 | FRANCE | N°15/07159

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 9e chambre b, 27 octobre 2017, 15/07159


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 27 OCTOBRE 2017



N°2017/





Rôle N° 15/07159







[G] [V]





C/



SA SOCIETE DES TECHNIQUES EN MILIEU IONISANT (S.T.M.I .)







Grosse délivrée le :



à :



Me Silvia SAPPA, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE



Me Eric FORTUNET, avocat au barreau D'AVIGNON







Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :<

br>


Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AIX-EN-PROVENCE - section - en date du 31 Mars 2015, enregistré au répertoire général sous le n° 13/00922.





APPELANT



Monsieur [G] [V], demeurant [Adr...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 27 OCTOBRE 2017

N°2017/

Rôle N° 15/07159

[G] [V]

C/

SA SOCIETE DES TECHNIQUES EN MILIEU IONISANT (S.T.M.I .)

Grosse délivrée le :

à :

Me Silvia SAPPA, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

Me Eric FORTUNET, avocat au barreau D'AVIGNON

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AIX-EN-PROVENCE - section - en date du 31 Mars 2015, enregistré au répertoire général sous le n° 13/00922.

APPELANT

Monsieur [G] [V], demeurant [Adresse 1]

comparant en personne, assisté de Me Silvia SAPPA, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

SA SOCIETE DES TECHNIQUES EN MILIEU IONISANT (S.T.M.I .), demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Eric FORTUNET, avocat au barreau D'AVIGNON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 06 Septembre 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Marie-Agnès MICHEL, Président

Monsieur Jean Yves MARTORANO, Conseiller

Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller

Greffier lors des débats : Monsieur Guy MELLE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 27 Octobre 2017

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 27 Octobre 2017

Signé par Madame Marie-Agnès MICHEL, Président et Monsieur Guy MELLE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [G] [V] a été engagé par la SOCIÉTÉ DES TECHNIQUES EN MILIEU IONISANT (STMI), spécialisée dans l'assainissement nucléaire, depuis le 1er juillet 1985 en qualité de décontamineur suivant contrats à durée déterminée en début de relation contractuelle puis sous contrat de travail à durée indéterminée à compter du 30 novembre 1988.

Au dernier état de la relation contractuelle, le salarié exerçait les fonctions de chef d'équipe et percevait une rémunération mensuelle moyenne de 2 450 € bruts.

Les relations contractuelles des parties sont régies par la convention collective régionale des industries métallurgiques, mécaniques et connexes de la région parisienne du 16 juillet 1954 étendue par arrêté du 11 août 1965.

Le salarié a été convoqué à un entretien préalable le 11 février 2013 puis licencié pour faute grave suivant lettre du 20 février 2013 ainsi rédigée : « Par lettres des 31/1 et 8/2/2013, nous vous avons convoqué à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement, fixé au lundi 18 février 2013, en vous précisant que vous aviez la possibilité de vous faire assister par une personne de votre choix appartenant obligatoirement au personnel de l'entreprise. Au cours de cet entretien, auquel vous vous êtes rendu accompagné de MM [B] [O] et [B] [F] en leur qualité de représentants syndicaux UNSA/SPAEN. MM [D] [N] Directeur de l'Établissement de STMI [Localité 1] et [H] [T], Directeur de l'Établissement de STMI [Localité 1] au moment des faits, vous ont exposé les motifs qui nous amenaient à envisager une mesure de licenciement. Le mercredi 30 janvier 2013 vers 14h00, alors que vous étiez en zone contrôlée sur l'installation Cryotraitement où vous travaillez, vous avez eu un comportement agressif inacceptable envers l'un de vos collaborateurs, M. [M] [L]. En effet, en présence de témoins, présents sur le chantier au moment des faits, vous vous êtes emporté, et avez jeté un rouleau de vinyle de plus de 25 kg dans sa direction, rouleau que M. [M] [L] a esquivé de justesse. C'est alors que vous ruant sur lui, vous l'avez agressé physiquement, avec violence, le blessant au visage. Sortis de Zone, de retour dans les bureaux, vous avez cette fois proféré des menaces de représailles - « je sais où tu habites, on se retrouvera, j'ai vu ton adresse sur le courrier que tu as reçu aujourd'hui » - à l'encontre de M. [M] [L], devant M. [I] [B], votre Chargé d'affaire. Face à cette situation, ni votre attitude, ni les arguments que vous nous avez présentés lors de l'entretien ne nous ont permis de modifier notre appréciation de vos agissements, dès lors que:

- Vous avez reconnu avoir agressé physiquement et proféré des menaces à l'encontre de M. [M] [L] ;

- Un tel comportement violent ne peut être toléré au sein de l'entreprise, qui plus est en zone contrôlée, mais aussi au regard de votre position de Chef d'équipe, et de l'atteinte à l'image de l'entreprise ;

- Des recommandations vous ont déjà été adressées en 2011 et 2012 suite à des écarts constatés (respect des horaires, respect des consignes de sûreté sécurité) et plus particulièrement de maîtriser vos réactions et votre comportement agressif.

La gravité des faits qui vous sont reprochés, nous conduisent à vous notifier votre licenciement pour faute, dont la première présentation marquera le point de départ de votre préavis de 2 mois que nous vous dispensons d'effectuer, mais qui vous sera normalement rémunéré aux échéances habituelles. C'est à l'expiration de ce préavis que vous cesserez définitivement de faire partie de nos effectifs et que nous vous délivrerons l'ensemble des documents afférents à la rupture de votre contrat ainsi que votre solde de tout compte. Nous vous informons à toutes fins que vous avez acquis 120 heures au titre du droit individuel à la formation. Vous pouvez demander, pendant votre préavis, à utiliser ces heures pour bénéficier notamment d'une action de formation, de bilan de compétences ou de validation des acquis de l'expérience. A défaut, ces droits pourront faire l'objet d'une portabilité dans le cadre de la prise en charge par Pôle Emploi ou d'un nouvel emploi. Nous vous indiquons aussi, qu'en application de l'article 14 de l'ANI du 11 janvier 2008, vous pourrez demander à conserver pendant 9 mois à compter de l'expiration de votre contrat de travail, le bénéfice du régime de protection sociale santé et prévoyance en vigueur dans l'entreprise sous réserve de votre prise en charge au titre de l'assurance chômage. Cette couverture sera financée conjointement par vous et par la Société dans les mêmes conditions que durant notre collaboration. L'intégralité des cotisations afférentes au maintien des garanties sera prélevée sur votre solde de tout compte. Vous avez cependant la possibilité de renoncer au maintien de ces garanties dans le délai de dix jours à compter de l'expiration du préavis. Dans ce cas, les cotisations prélevées vous seront remboursées. Nous vous précisons par ailleurs, que le maintien cofinancé des couvertures complémentaires santé et prévoyance n'est possible que pour autant que vous bénéficiez d'une prise en charge par le Pôle emploi. Aussi, vous devrez communiquer à la Société la justification de cette prise en charge et/ou nous informer aussi de toute interruption dans cette prise en charge comme de la reprise d'un nouvel emploi, auquel cas, le trop-versé de cotisations sera remboursé. »

Contestant son licenciement, M. [G] [V] a saisi le 5 juillet 2013 le conseil de prud'hommes d'Aix-en-Provence, section industrie, lequel, par jugement rendu le 31 mars 2015, a :

dit que l'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile ;

dit que le licenciement notifié le 20 février 2013 pour faute est parfaitement fondé et légitime ;

débouté le salarié de l'intégralité de ses demandes ;

débouté l'employeur de sa demande reconventionnelle ;

condamné le salarié aux dépens.

M. [G] [V] a interjeté appel de cette décision suivant déclaration du 23 avril 2015.

Vu les écritures déposées à l'audience et soutenues par son conseil aux termes desquelles M. [G] [V] demande à la cour de :

infirmer le jugement entrepris ;

à titre principal,

dire que le licenciement est illicite et nul d'effet ;

condamner l'employeur à lui payer les sommes suivantes :

'117 600 € à titre d'indemnité pour licenciement abusif ;

'  15 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral ;

subsidiairement,

dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

condamner l'employeur à lui payer les sommes suivantes :

'117,600 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (4 ans de salaire) ;

'  15 000 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail ;

en toute hypothèse,

dire qu'à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées l'exécution forcée devra être réalisée par l'intermédiaire d'un huissier et le montant des sommes de l'article 10 du décret du 8 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996 n° 96/1080 (tarif des huissiers) devra être supporté par le débiteur en sus de l'application de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner l'employeur au paiement de la somme de 2 500 € au titre des frais irrépétibles.

Vu les écritures déposées à l'audience et reprises par son conseil selon lesquelles la SOCIÉTÉ DES TECHNIQUES EN MILIEU IONISANT (STMI) demande à la cour de :

confirmer le jugement entrepris notamment en ses dispositions rejetant la demande de nullité du licenciement que ce soit pour violation du statut protecteur ou pour prétendue discrimination syndicale, ou que ce soit celle tendant à faire juger le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse ;

débouter en conséquence le salarié de toutes demandes de dommages et intérêts quel que soit son fondement et de toutes autres demandes, y compris en matière de frais irrépétibles ;

condamner le salarié au paiement de la somme de 5 000 € au titre des frais irrépétibles ainsi qu'aux dépens.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1/ Sur la nullité du licenciement

Le salarié fait valoir qu'il a déclaré sa candidature le 4 septembre 2012 aux élections des représentants du personnel au conseil d'administration sur la liste UNSA-SPAEN qui devaient se tenir le 12 octobre 2012 et qu'il n'a pas été élu et qu'ainsi son licenciement est discriminatoire.

Il sera tout d'abord relevé que le salarié ne bénéficiait plus de la protection légale des candidats au temps de la procédure de licenciement. Par contre, l'employeur ne pouvait ignorer son engagement syndical dont témoigne sa candidature. En conséquence, et par dérogation au droit commun, il appartient à l'employeur de prouver la réalité et le sérieux de la cause du licenciement pour s'exonérer de grief de discrimination.

2/ Sur la cause du licenciement

Il convient tout d'abord d'écarter l'avertissement du 10 septembre 2008 dont l'employeur se prévaut dès lors qu'il ne produit pas la preuve de son expédition ou de sa remise et que le salarié conteste en avoir eu connaissance. Il en va de même des recommandations qui lui auraient été remises en main propre par un chargé d'affaires exploitation le 8 juin 2011.

L'employeur, à l'appui des griefs de violences et de menaces figurant à la lettre de licenciement, produit l'attestation de M. [I] [B] rédigée dans les termes suivants : « Les faits décrits ci-dessous ont eu lieu le 30 janvier 2013 au bâtiment n° 272 du CEA à [Localité 1], dans le bureau du chef de chantier du cryotraitement au 1er étage.

1er épisode : je suis dans le bureau, en compagnie de M. [K], M. [V] arrive et nous explique que « les jeunes », « les merdeux » ne le respectent pas et que dans ces conditions il ne veut plus être chef d'équipe. Je lui demande de m'expliquer ce qui se passe calmement mais il sort en disant qu'il va se calmer en fumant une cigarette. (faits ayant lieu vers 13h50).

2e épisode (10 mm plus tard) : je reviens dans le bureau, il y a alors M. [M], M. [K], M. [L], le Dr. [S], Mme [H] qui est infirmière). L'infirmière est en train d'examiner M. [L] et lui explique qu'il faut qu'il aille au médical pour se faire examiner. Mme [U] arrive, c'est l'ingénieur sécurité opérationnel du bâtiment, elle a prévenu la FLS et ils arrivent. Je demande au personnel non STMI de sortir pour l'on explique ce que se passe. M. [V] arrive et une discussion animée commence où M. [L] explique que M. [V] lui a jeté un rouleau de vinyle au visage, puis lui a mis la main au visage ce qui explique son égratignure. M. [V] conteste le jet du rouleau en lui disant qu'il ne l'a pas touché, ce à quoi M. [L] répond qu'il l'a évité. M. [V] sort, je demande à M. [L] de rester dans le bureau et je sors à mon tour. M. [V] revient et lance à l'attention de M. [L] : « de toutes façons je sais où tu habites, on se retrouvera, j'ai vu ton adresse sur le courrier que tu as reçu aujourd'hui » et il s'en va. Je demande alors à la FLS d'amener les deux protagonistes au médical et je rends compte de la situation à M. [T] (directeur STM [Localité 1]). »

Ce récit est en parfaite concordance avec les courriels adressés par le témoin à son encadrement dès le 18 février 2013, avec celui de M. [H] [T] du lendemain faisant la synthèse de l'enquête interne, ainsi qu'avec les attestations de MM [D] [N], [K] [Z] et [W] [M].

Certes, l'employeur ne produit aucun témoin direct de l'altercation initiale qui s'est déroulée en zone contrôlée, mais le salarié n'en produit pas plus. La cour retient que les suites immédiates de cette altercation sont, elles, parfaitement établies par les témoignages qui viennent d'être cités desquels il se déduit que le salarié a bien perdu son calme alors même qu'il se trouvait en zone contrôlée et qu'il était à ce point hors de lui qu'il n'a pu se calmer comme sa hiérarchie le lui demandait et encore qu'il a menacé son antagoniste devant des témoins.

Le salarié ne produit aucun élément permettant de douter des témoignages précités et uniquement des attestations de moralité prouvant certes sa valeur humaine et professionnelle mais qui ne le disculpent pas des faits précis et limités dans le temps qui lui sont reprochés.

En perdant ainsi, même durant une courte durée, le contrôle de lui-même alors qu'il exerçait des fonctions de chef d'équipe, et qu'il se trouvait avec ses collaborateurs dans un milieu dangereux, et encore en menaçant un de ses derniers, le salarié a gravement manqué à ses obligations de sécurité, ne permettant plus à son équipe d''uvrer en toute sérénité sous sa direction. Cette faute constitue, compte tenu de l'environnement de travail particulier et des fonctions du salarié, une cause réelle et sérieuse de licenciement, même au regard de sa grande ancienneté. Ainsi, le licenciement n'est pas discriminatoire mais au contraire bien fondé et le salarié sera débouté de l'ensemble de ses demandes.

3/ Sur les autres demandes

L'équité commande d'allouer à l'employeur, au titre de ses frais irrépétibles d'appel la somme de 1 500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le salarié supportera les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Déboute M. [G] [V] de ses demandes.

Y ajoutant,

Condamne M. [G] [V] à payer à la SA SOCIÉTÉ DES TECHNIQUES EN MILIEU IONISANT (STMI) la somme de 1 500 € au titre des frais irrépétibles d'appel.

Condamne M. [G] [V] aux dépens d'appel.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 9e chambre b
Numéro d'arrêt : 15/07159
Date de la décision : 27/10/2017

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 9B, arrêt n°15/07159 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-10-27;15.07159 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award