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12/07/2012 | FRANCE | N°11/21096

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 8e chambre c, 12 juillet 2012, 11/21096


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

8e Chambre C



ARRÊT AU FOND

DU 12 JUILLET 2012



N°2012/324













Rôle N° 11/21096







[Y] [N]

[T] [X] épouse [N]





C/



SA CREDIT FONCIER DE FRANCE





































Grosse délivrée

le :

à : SARAGA

[F]









Déci

sion déférée à la Cour :



Ordonnance du juge de la mise en état du Tribunal de Grande Instance de Toulon en date du 08 Novembre 2011 enregistrée au répertoire général sous le n° 11/2054.





APPELANTS



Monsieur [Y] [N]

né le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 6] (CONGO BELGE), demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Rachel SARAGA-BROSSAT, avocat ...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

8e Chambre C

ARRÊT AU FOND

DU 12 JUILLET 2012

N°2012/324

Rôle N° 11/21096

[Y] [N]

[T] [X] épouse [N]

C/

SA CREDIT FONCIER DE FRANCE

Grosse délivrée

le :

à : SARAGA

[F]

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance du juge de la mise en état du Tribunal de Grande Instance de Toulon en date du 08 Novembre 2011 enregistrée au répertoire général sous le n° 11/2054.

APPELANTS

Monsieur [Y] [N]

né le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 6] (CONGO BELGE), demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Rachel SARAGA-BROSSAT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE constituée aux lieu et place de la SCP PRIMOUT-FAIVRE, avoués et plaidant par Me KIEFFER Alexis substituant Me HOUILLOT de la SCP HOULLIOT ET MATHIAS-MURAOUR, avocats au barreau de TOULON

Madame [T] [X] épouse [N]

née le [Date naissance 4] 1955 à [Localité 5] (93), demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Rachel SARAGA-BROSSAT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE constituée aux lieu et place de la SCP PRIMOUT-FAIVRE, avoués et plaidant par Me KIEFFER substituant Me HOUILLOT de la SCP HOULLIOT ET MATHIAS-MURAOUR, avocats au barreau de TOULON

INTIMEE

SA CREDIT FONCIER DE FRANCE, agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, dont le siège est sis [Adresse 3]

représentée par Me Philippe-Laurent SIDER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et plaidant par Me Henri ELALOUF, avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785, 786 et 910 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 12 Juin 2012 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-Louis BERGEZ, Président, et Monsieur Jean-Noël ACQUAVIVA, Conseiller, chargés du rapport.

Monsieur Jean-Louis BERGEZ, Président, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Jean-Louis BERGEZ, Président

Monsieur Jean-Noël ACQUAVIVA, Conseiller

Monsieur Baudouin FOHLEN, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Juillet 2012.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 Juillet 2012.

Rédigé par Monsieur Jean-Louis BERGEZ, Président,

Signé par Monsieur Jean-Louis BERGEZ, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA COUR

Les époux [Y] et [T] [N] ont acquis des biens immobiliers par l'intermédiaire de la société Apollonia, selon des montages qui ressortissent aux dispositions fiscales avantageuses du statut des loueurs en meublé professionnels.

Ils ont notamment acheté en février 2009 sous le régime de la vente en l'état futur d'achèvement un appartement financé au moyen d'un prêt consenti par le Crédit foncier de France (Crédit foncier).

Les revenus locatifs s'étant révélés insuffisants pour assurer l'équilibre financier de l'opération, les époux ont cessé, comme de nombreux autres investisseurs, de rembourser les emprunts.

Une information judiciaire a été ouverte à l'encontre de la société Apollonia et de son dirigeant des chefs de faux, usage et escroqueries en bande organisée. Elle a été étendue à d'autres personnes dont des notaires.

Les époux [N] ont assigné en responsabilité, devant le tribunal de grande instance de Marseille, le Crédit foncier et les autres établissements de crédit qui leur ont consenti des prêts aux mêmes fins, la société Apollonia et les notaires ayant reçu les actes de prêt.

Après déchéance du terme, le Crédit foncier a fait assigner en paiement, le 21 mars 2011, les époux [N] devant le tribunal de grande instance de Toulon.

Par ordonnance du 8 novembre 2011, le juge de la mise en état de ce tribunal, saisi par les époux [N], à titre principal, d'une demande de sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure pénale, subsidiairement, d'une demande de renvoi de l'affaire devant le tribunal de grande instance de Marseille à raison de la connexité entre les deux instances civiles, a rejeté les demandes.

Les époux [N] sont appelants de cette ordonnance.

****

Vu les conclusions déposées le 9 mai 2012 par le Crédit foncier ;

Vu les conclusions déposées le 13 mars 2012 par les époux [N] ;

Vu l'ordonnance de clôture du 29 mai 2012 ;

Vu les conclusions déposées le 7 juin 2012 par les époux [N], assorties d'une demande en révocation de l'ordonnance de clôture ;

MOTIFS DE LA DÉCISION

Les époux [N], qui ont disposé d'un délai largement suffisant pour répliquer avant le 29 mai 2012, date de prononcé de l'ordonnance de clôture, aux conclusions déposées le 9 mai 2012 par le Crédit foncier de France, ne peuvent qu'être déboutés de leur demande en révocation de la clôture, la violation du principe de la contradiction qu'ils allèguent n'étant nullement constituée.

Les conclusions déposées le 7 juin 2012 sont irrecevables par application de l'article 783 du code de procédure civile.

****

Les époux [N], âgés de 58 et 57 ans, font valoir qu'ils ont été victimes d'agissements frauduleux qui les ont placés en situation de surendettement, à la suite de la souscription d'un 'package' immobilier présenté comme un 'produit de retraite' par la société Apollonia qui le commercialisait.

Ils ont acquis entre le 25 juin 2002 et le 10 février 2009, huit appartements (2 en 2002, 1 en 2005, 4 en 2006, 1 en 2007 et 1 en 2009), pour un montant total de 1 305 560 €. Ces investissements ont été financés intégralement par des crédits consentis, sur une longue durée, par six banques, les intérêts étant supportés par le promoteur pendant le temps de chaque construction.

Le prêt litigieux a été octroyé par le Crédit foncier en 2009. A cette époque, les emprunteurs, dont les investissements se sont échelonnés sur les 6 années précédentes, étaient nécessairement conscients, de la nature, de la rentabilité et des risques attachés aux 'produits de retraite' commercialisés par la société Apollonia. Ils ne prétendent d'ailleurs pas avoir été trompés sur la nature ou sur les modalités des obligations souscrites.

Les emprunteurs se sont placés sous le régime fiscal des loueurs en meublé professionnels, ce qui a nécessité une immatriculation au registre du commerce et des sociétés. Ils ont ainsi pu bénéficier des avantages fiscaux attachés à cette activité : remboursement de la TVA sur le prix d'achat, déductibilité d'un amortissement annuel, imputation de la totalité du déficit foncier sur le revenu global, exonération de l'impôt de solidarité sur la fortune, allégement des droits de succession.

Mais les revenus escomptés ont été loin de couvrir les charges d'emprunt et les frais, en sorte que leur revenu disponible ne serait plus que de 9 016 € par an. Le décompte produit ne prend toutefois pas en compte les avantages fiscaux dont ils ont bénéficié, notamment au titre du remboursement de la TVA qui représente, à lui seul, une somme de l'ordre de 200 000€. En outre, ils ne justifient pas de leur situation financière puisqu'ils n'ont produit ni déclarations de revenus, ni avis d'imposition.

Au soutien de leurs demandes tendant, à titre principal, au sursis à statuer, subsidiairement au renvoi pour connexité, les époux [N] font valoir que les crédits litigieux s'inscrivent dans une opération globale, initiée dans des conditions frauduleuses, en sorte que l'action en paiement introduite par la banque ne peut être jugée distinctement de l'action en responsabilité exercée à son encontre et sans que soient déterminées les responsabilités pénales et civiles à l'origine des engagements souscrits.

Sur l'application des dispositions prévues en matière de sursis à statuer par les articles 312 du code de procédure civile et 4 du code de procédure pénale

Il résulte du premier de ces textes que si des poursuites pénales sont engagées contre les auteurs ou complices d'un faux commis dans un acte authentique, il est sursis à statuer au jugement civil jusqu'à ce qu'il ait été statué au pénal, à moins que le principal puisse être jugé sans tenir compte de la pièce arguée de faux ou qu'il y ait eu, sur le faux, renonciation ou transaction.

En vertu du second texte, la mise en mouvement de l'action publique n'impose le sursis que sur le seul jugement de l'action civile exercée devant la juridiction civile en réparation du dommage causé par l'infraction. Les autres actions exercées devant la juridiction civile, de quelque nature qu'elles soient, ne sont pas soumises à l'obligation de suspendre l'instance, même si la décision à intervenir au pénal est susceptible d'exercer, directement ou indirectement, une influence sur la solution du procès civil.

Les époux [N] sont infondés à se prévaloir de ces dispositions pour soutenir que le sursis s'impose dès lors, d'un côté, qu'ils n'ont pas introduit dans l'instance en paiement une procédure en inscription de faux incidente, d'un autre côté, que la demande formée par la banque ne tend pas à la réparation du dommage causé par les infractions.

Il s'ensuit qu'en l'espèce, le prononcé du sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure pénale, présente un caractère facultatif.

Sur les demandes tendant au renvoi pour connexité et au prononcé d'un sursis à statuer

En vertu de l'article 101 du code de procédure civile, la connexité résulte de l'existence, entre des affaires portées devant deux juridictions distinctes, d'un lien tel qu'il est de l'intérêt d'une bonne administration de la justice de les faire instruire et juger ensemble.

Lorsqu'il présente un caractère facultatif, le prononcé du sursis à statuer dans l'attente de l'issue d'une instance pénale, relève du pouvoir conféré au juge en vue d'une bonne administration de la justice.

Les demandes de renvoi pour connexité et de prononcé d'un sursis à statuer, sont étroitement liées puisqu'un renvoi pour connexité aurait pour effet de faire obstacle au jugement de l'action en paiement pendant le temps du sursis prononcé dans l'action en responsabilité et que l'existence d'une connexité comme l'opportunité d'ordonner le sursis à statuer sont fonction d'une appréciation concrète de l'intérêt d'une bonne administration de la justice.

En l'espèce, la complexité de la procédure pénale, induite par la multiplicité des infractions poursuivies, des personnes mises en cause et des parties civiles, a nécessairement pour effet d'en retarder l'issue pendant de nombreuses années.

Il s'ensuit que la durée de la suspension qui résulterait d'un sursis à statuer ou d'un renvoi pour connexité serait incompatible avec l'obligation de statuer dans un délai raisonnable sur la demande en paiement, laquelle ne présente, en l'état des moyens invoqués, aucune difficulté sérieuse, alors que les créances indemnitaires alléguées par les époux [N] restent incertaines.

Il convient, dès lors, de confirmer l'ordonnance attaquée en ce qu'elle a rejeté les demandes de renvoi pour connexité et de sursis à statuer, le lien entre les deux instances civiles n'étant pas tel qu'il soit d'une bonne administration de la justice de les faire instruire et juger ensemble et le sursis à statuer n'étant pas justifié au regard d'une bonne administration de la justice.

****

Les époux [N], qui succombent, sont condamnés aux dépens.

L'équité ne commande pas l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Rejette la demande en révocation de l'ordonnance de clôture,

Déclare irrecevables les conclusions déposées le 7 juin 2012 par les époux [Y] et [T] [N],

Confirme l'ordonnance attaquée,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [Y] [N] et Mme [T] [N] aux dépens,

Vu l'article 699 du code de procédure civile,

Autorise, s'il en a fait l'avance sans avoir reçu provision, M. [J] - [C] [F] à recouvrer les dépens d'appel directement contre M. [Y] [N] et Mme [T] [N].

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 8e chambre c
Numéro d'arrêt : 11/21096
Date de la décision : 12/07/2012

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 8C, arrêt n°11/21096 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-07-12;11.21096 ?
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