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25/01/2005 | FRANCE | N°95

France | France, Cour d'appel d'aix-en-provence, Ct0007, 25 janvier 2005, 95


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE 1 Chambre A ARRÊT AU FOND DU 25 janvier 2005 AD/JNG No 2005/ Rôle No 04/13980 SYNDICAT NATIONAL DES TRANSPORTS URBAINS CFDT (SNTU-CFDT) C/ SOCIETE REGIE DES TRANSPORTS DE MARSEILLE (RTM) Grosse délivrée le : à : réf Décision déférée à la Cour : Ordonnance de référé rendue par Monsieur le Président du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 07 Mai 2004 enregistré au répertoire général sous le no 04/688. APPELANTE SYNDICAT NATIONAL DES TRANSPORTS URBAINS CFDT (SNTU-CFDT), agissant poursuites et diligences de son représentant légal e

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COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE 1 Chambre A ARRÊT AU FOND DU 25 janvier 2005 AD/JNG No 2005/ Rôle No 04/13980 SYNDICAT NATIONAL DES TRANSPORTS URBAINS CFDT (SNTU-CFDT) C/ SOCIETE REGIE DES TRANSPORTS DE MARSEILLE (RTM) Grosse délivrée le : à : réf Décision déférée à la Cour : Ordonnance de référé rendue par Monsieur le Président du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 07 Mai 2004 enregistré au répertoire général sous le no 04/688. APPELANTE SYNDICAT NATIONAL DES TRANSPORTS URBAINS CFDT (SNTU-CFDT), agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié ..., domicilié ... représenté par la SCP DE SAINT FERREOL-TOUBOUL, avoués à la Cour, plaidant par Me Jean-Paul Y..., avocat au barreau de MARSEILLE INTIME SOCIETE REGIE DES TRANSPORTS DE MARSEILLE (RTM), prise en la personne de son représentant légal en exercice, domiciliée ... représentée par la SCP BOTTAI-GEREUX-BOULAN, avoués à la Cour, plaidant par la SELARL BAFFERT - FRUCTUS ET ASSOCIES, substituée par Me Stéphanie X..., avocats au barreau de MARSEILLE *-* - *-* - * COMPOSITION DE LA COUR L'affaire a été débattue le 14 Décembre 2004 en audience publique devant la Cour composée de :

Monsieur Gérard LAMBREY, Président Monsieur Jean VEYRE, Conseiller Monsieur Jean Noùl GAGNAUX, Conseiller qui en ont délibéré. Greffier lors des débats : Madame Radegonde DAMOUR. Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 25 janvier 2005 ARRÊT Contradictoire, Prononcé par mise à disposition au greffe le 25 janvier 2005 Signé par Monsieur Gérard LAMBREY, Président et Madame Radegonde DAMOUR, greffier présent lors de la mise à disposition au greffe de la décision. * **

Vu l'ordonnance rendue le 7 mai 2004 par le Président du Tribunal de

Grande Instance de Marseille condamnant le syndicat SNTU CFDT à cesser sous astreinte la diffusion de tracts syndicaux aux salariés de la REGIE DES TRANSPORTS DE MARSEILLE par la messagerie électronique professionnelle de celle-ci déboutée par ailleurs de ses autres prétentions (indemnité provisionnelle, dommages intérêts pour résistance abusive) sauf à lui allouer 750 ç au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Vu les conclusions en date du 26 octobre 2004 du SYNDICAT NATIONAL DES TRANSPORTS URBAINS CFDT appelant selon déclaration d'appel du 2 juillet 2004 ses conclusions du 8 décembre 2004,

Vu les conclusions en date du 16 novembre 2004 de la société REGIE DES TRANSPORTS DE MARSEILLE, ses conclusions récapitulatives du 23 novembre 2004,

Vu l'ordonnance de clôture du 10 décembre 2004. SUR CE,

Attendu qu'au soutien de son appel principal le SYNDICAT NATIONAL DES TRANSPORTS URBAINS CFDT- le syndicat- rappelle longuement l'historique de l'implantation en 1999 des messageries dans l'entreprise et les diverses procédures qui l'ont opposé à ce propos à la société REGIE DES TRANSPORTS DE MARSEILLE -l'employeur -;

Attendu qu'il convient de souligner que les erreurs ou fautes de l'employeur au regard de la loi "Informatique et libertés" ne sauraient exonérer le syndicat de ses propres fautes ; qu'à ce jour en tout état de cause celui-là peut se prévaloir d'un avis favorable de la CNIL du 29 décembre 2001 pour son "acte réglementaire" du 21 janvier 2002- publié- relative à la mise en place en son sein d'une messagerie ; Qu'il justifie pareillement d'une déclaration d'un traitement automatisé d'informations nominatives du 26 mars 2001 pour son fichier nominatif de messagerie, dont la légalité n'est pas sérieusement contestée à ce jour, si tant est que cela puisse avoir une incidence a fortiori sur l'utilisation de cette messagerie et de

cette même liste par le syndicat ; que ce dernier serait d'autant plus malvenu de s'en servir qu'il estimerait illégale et l'une et l'autre ;

Attendu que- contrairement à ce que soutient encore l'appelant - l'absence de négociation sur l'usage syndical de la messagerie électronique ne permet pas en soi - de passer outre l'accord inexistant ou a fortiori une mise en garde (lettre de l'employeur à la CFDT le 10 octobre 2003) ; qu'il importe peu que cette négociation demeure souhaitable, voire qu'elle ait été promise ;

Attendu encore qu'il importe peu au regard de la question de fond de savoir si la diffusion de tracts syndicaux sur la messagerie électronique constitue ou non une diffusion susceptible d'être qualifiée de spamming ; qu'en effet la réception ponctuelle par un salarié d'information ou de tract syndical à propos de son entreprise ne constitue pas un abus d'envoi et ne lui cause a priori aucun trouble particulier ; qu'il est de la nature et de la fonction syndicale de s'adresser à tous les salariés ses messages, dès lors qu'elle a légalement vocation à représenter les intérêts professionnels de tous ;

Attendu qu'il est vrai encore que dans le Code du Travail, en son chapitre "Exercice du droit syndical dans les entreprises", l'article 412-8 énonçait en son alinéa 4 : "Les publications et tracts de nature syndicale peuvent être librement diffusés aux travailleurs dans l'enceinte de celle-ci aux heures d'entrée et de sortie du travail" ; que cette diffusion "papier" n'était pas d'actualité en l'état de l'apparition de nouveaux moyens de communication ; Que le syndicat fait de plus remarquer l'amplitude très importante des horaires des salariés de la RTM, ce qui permettait difficilement un exercice normal de diffusion à défaut d'horaire fixe commun, des entrées et sorties du personnel assurant les transports urbains ;

Attendu qu'il convient encore de noter que le texte parlait déjà de diffusion dans l'enceinte de l'entreprise en ce limitant la période de seule distribution ; qu'au moins en cas de réception d'un tract lors de l'entrée de l'entreprise il n'était pas besoin d'être grand clerc pour penser que le salarié était assez naturellement tenté d'en prendre connaissance au moins sommairement au commencement de son travail ; qu'à cet égard la version papier et la version électronique n'ont pas de différences très sensibles ;

Attendu qu'il peut être aussi observé que le législateur avait manifesté dès 1982 la volonté de rendre effective ce droit à diffusion ; qu'ainsi l'alinéa 6 du même article, se préoccupant d'un cas particulier il énonçait déjà : "Dans les entreprises de travail temporaire, les communications syndicales portées sur le panneau d'affichage doivent être remises aux salariés temporaires en mission ou adressées par voie postale, aux frais de l'entrepreneur de travail temporaire, au moins une fois par mois" ;

Attendu sur les faits litigieux, sans qu'il soit besoin d'un constat d'huissier ou a fortiori de "saisie-contrefaçon" ä, il est constant que le syndicat a diffusé des tracts de nature syndicale (produits aux débats) à l'ensemble des salariés en se servant du listing informatique des salariés de l'entreprise ; qu'il importe peu sur la légalité du procédé ou la certitude de cet usage que ce listing soit entièrement reconstituable pour des centaines de salariés par une technique de codage simple ; que cette allégation du syndicat de l'avoir reconstitué n'est en définitive pas sérieuse ;

Attendu enfin que contrairement à ce que soutient la CFDT le coût des communications n'est pas supporté par l'émetteur syndical mais par l'émetteur opérationnel, c'est à dire l'entreprise si le message est diffusé depuis son réseau;

Attendu que c'est donc à bon droit que le juge de référé en sa

décision du 7 mai 2004, au visa des articles 808 et 809 du Nouveau Code de Procédure Civile a ordonné alors la cessation par le syndicat - sous astreinte- de toute nouvelle diffusion syndicale non autorisée sur la messagerie de l'entreprise ;

Attendu que pendant le délibéré du premier juge l'article L 412-8 du Code du Travail a été modifié avec un alinéa 6 : "(Alinéa créé, L 2004-391, 4 mai 2004, art. 52) Un accord d'entreprise peut autoriser la mise à disposition des publications et tracts de nature syndicale, soit sur un site syndical mis en place sur l'intranet de l'entreprise, soit par diffusion sur la messagerie électronique de l'entreprise. Dans ce dernier cas, cette diffusion doit être compatible avec les exigences du bon fonctionnement du réseau informatique de l'entreprise et ne pas entraver l'accomplissement du travail. L'accord d'entreprise définit les modalités de cette mise à disposition ou de ce mode de diffusion, en précisant notamment les conditions d'accès des organisations syndicales et les règles techniques visant à préserver la liberté de choix des salariés d'accepter ou de refuser un message".

Attendu que cette nouvelle disposition législative oblige à terme une négociation des partenaires sociaux mais ne modifie pas le principe d'un nécessaire accord préalable pour sa mise en oeuvre;

Attendu qu'il y a lieu en conséquence de confirmer l'ordonnance entreprise sur ce premier point ;

Attendu qu'au soutien de son appel incident aux fins d'obtenir une indemnité provisionnelle de 1.500 ç à titre de dommages intérêts, la société RTM ne justifie d'aucun préjudice matériel ou moral ; qu'elle sera donc déboutée de cette prétention ; qu'elle ne justifie pas plus d'une résistance abusive du syndicat de soutenir sa revendication sur un usage à venir de la messagerie électronique interne mais à

négocier ;

Attendu que pour la première fois en cause d'appel, le syndicat invoque être victime d'une discrimination syndicale, d'autres syndicats ne s'étant pas heurtés à la même opposition de l'employeur ou du moins à une action judiciaire ;

Attendu qu'à tout le moins curieusement il explique non sans se contredire que d'autres organisations de façon "masquée" avaient fait de même selon une ruse informatique qu'il explique ; que ce masquage impliquerait l'ignorance de l'employeur et serait plutôt pourtant à y mieux réfléchir un argument contre la discrimination alléguée ;

Attendu que si ce n'est une pétition de principe, il n'est allégué qu'un seul et unique fait aux contours mal précisés (deux documents électroniques non commentés et deux attestations sommaires de salariés) ; qu'il n'est pas justifié que cette diffusion ait été tolérée, étant encore remarqué que l'employeur avant même d'attraire la CFDT en justice a toléré de celle-ci des diffusions et a adressé une mise en demeure ;

Attendu qu'aucune discrimination n'est avérée au point que l'on puisse a fortiori en référé allouer en l'état des seuls éléments produits une indemnisation à titre provisionnelle ; que cette question relèverait en tout état de cause d'un véritable débat au fond ; que le syndicat sera débouté en conséquence de cette prétention ;

Attendu que la situation respective des parties et la nature même du conflit qui les oppose ne justifient pas leurs demandes réciproques au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile tant en première instance qu'en appel ; PAR CES MOTIFS La Cour, Statuant publiquement, en la forme des référés, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,

-En la forme, dit l'appel recevable,

-Au fond,

-Confirme l'ordonnance entreprise sauf sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

-Déboute la société RTM de ses demandes de dommages intérêts à titre provisionnel et pour résistance abusive,

-Déboute le syndicat SNTU - CFDT de sa demande de dommages intérêts pour discrimination syndicale,

-Déboute les parties de leurs demandes en première instance et appel au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

-Condamne le Syndicat SNTU - CFDT aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés à son encontre par la SCP BOTTAI - GEREUX - BOULAN, avoués à la Cour, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. LE GREFFIER

LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'aix-en-provence
Formation : Ct0007
Numéro d'arrêt : 95
Date de la décision : 25/01/2005

Analyses

SYNDICAT PROFESSIONNEL - Droits syndicaux - Exercice

Saisie d'un appel d'une ordonnance de référé, La Cour a dû statuer sur la licéité de la diffusion de tracts syndicaux par la messagerie électronique professionnelle d'une régie de transports. La Cour a jugé que la diffusion de tracts syndicaux sur la messagerie électronique de l'entreprise rentrait dans le cadre de l'exercice du droit syndical dans les entreprises prévu par l'article L 412-8 alinéa 4 du Code du travail. En effet, l'apparition de nouveaux moyens de communication ne permettant plus de se limiter à une diffusion papier , l'amplitude très importante des horaires des salariés d'une régie de transports, l'absence de différences très sensibles entre un tract version papier et version électronique, et la volonté du législateur envisageant dès 1982 une adaptation aux cas particuliers, confortent cette interprétation du texte de l'article. La Cour a également jugé que cette diffusion de tracts par la messagerie électronique de l'employeur nécessitait l'accord préalable de ce dernier, et ce tant parce que le coût des communications est supporté non par l'émetteur syndical mais par l'émetteur opérationnel, c'est-à-dire l'entreprise, que suite à la récente modification du 4 mai 2004 de l'alinéa 6 de l'article L 412-8 du Code du travail qui subordonne ce type de diffusion syndicale à la négociation préalable des partenaires sociaux.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.aix-en-provence;arret;2005-01-25;95 ?
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