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10/11/2020 | FRANCE | N°19/03161

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-1, 10 novembre 2020, 19/03161


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-1



ARRÊT SUR COMPETENCE

DU 10 NOVEMBRE 2020

D.D.

N° 2020/ 252













Rôle N° RG 19/03161 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BD22O







[W] [Y] épouse [M]

[F]-[C] [Y]





C/



[E] [R]

L'ETAT FRANCAIS





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Henri-Charles LAMBERT

Me Joseph MAG

NAN













Décision déférée à la Cour :



Ordonnance du Juge de la mise en état de NICE en date du 14 Février 2019 enregistrée au répertoire général sous le n° 17/03807.





APPELANTS



Madame [W] [Y] épouse [M]

née le [Date naissance 3] 1948 à [Localité 8] de nationalité Française,

d...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-1

ARRÊT SUR COMPETENCE

DU 10 NOVEMBRE 2020

D.D.

N° 2020/ 252

Rôle N° RG 19/03161 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BD22O

[W] [Y] épouse [M]

[F]-[C] [Y]

C/

[E] [R]

L'ETAT FRANCAIS

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Henri-Charles LAMBERT

Me Joseph MAGNAN

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance du Juge de la mise en état de NICE en date du 14 Février 2019 enregistrée au répertoire général sous le n° 17/03807.

APPELANTS

Madame [W] [Y] épouse [M]

née le [Date naissance 3] 1948 à [Localité 8] de nationalité Française,

demeurant [Adresse 7]

Monsieur [F]-[C] [Y]

né le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 8] de nationalité Française,

demeurant [Adresse 5]

ensemble représentés par Me Henri-Charles LAMBERT, avocat au barreau de NICE

INTIMES

Monsieur [E] [R]

se déclarant agent assermenté attaché à la direction départementale des territoires et de la mer et domicilié en cette qualité au CADAM [Adresse 4]

né le [Date naissance 6] 1960 à [Localité 8],

demeurant CADAM [Adresse 4]

L'ETAT FRANCAIS

représenté par Monsieur le Préfet des Alpes Maritimes demeurant en cette qualité à l'Hôtel de la Préfecture agissant par la Direction Départementale des Territoires et de la Mer des Alpes Maritimes, Centre Administratif Départementale sis BP 3003. [Localité 2],

demeurant [Adresse 4]

ensemble assistés de Me David JACQUEMIN de l'ASSOCIATION DEPLANO-SALOMON-JACQUEMIN-MIGNONE, avocat au barreau de NICE,

et représentés par Me Joseph MAGNAN de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 05 Octobre 2020 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Danielle DEMONT, Conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Olivier BRUE, Président

Madame Anne DAMPFHOFFER, Conseiller

Mme Danielle DEMONT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. Rudy LESSI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 10 Novembre 2020.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Novembre 2020,

Signé par Monsieur Olivier BRUE, Président et M. Rudy LESSI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Exposé du litige

Par exploit en date du 21 août 2017 Mme [W] [M] épouse [Y] et M. [F] [C] [Y] (les époux [Y]) ont fait assigner l'État français et M. [E] [R], agent assermenté, devant le tribunal de grande instance de Nice aux fins de voir juger que les mentions du procès-verbal de contravention de grande voirie dressé contre eux le 11 octobre 2016 et selon lequel « des ouvrages et parties d'ouvrages construits sur le domaine public maritime occupent sans droit ni titre une dépendance du domaine public maritime » sont fausses.

Par ordonnance en date du 14 février 2019, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Nice a rejeté l'exception de nullité de l'assignation, s'est déclaré incompétent pour connaître du litige, renvoyé les parties à mieux se pourvoir, dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile, et condamné in solidum Mme [W] [M]-[Y] et M. [F] [C] [Y] aux dépens.

Le 22 février 2019 les époux [Y] ont relevé appel de cette décision.

Par conclusions du 7 septembre 2019 ils demandent à la cour de déclarer irrecevables les conclusions de M. [E] [R], d'infirmer l'ordonnance du juge de la mise en état du 14 février 2019 en toutes ses dispositions, de renvoyer la cause devant le tribunal de grande instance de Nice, et de condamner in solidum l'État français et M. [R] aux dépens et à leur payer la somme de 6000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Les époux [Y] soutiennent que la procédure d'inscription de faux peut être engagée contre des actes ou des écrits qui ne présentent pas la qualification d'actes authentiques, puisque l'article 286 du code de procédure civile dispose que : « l'inscription de faux contre un acte authentique relève de la compétence du juge saisi du principal lorsqu'elle est formée incidemment devant un tribunal de grande instance ou devant une cour d'appel. Dans les autres cas, l'inscription de faux relève de la compétence du tribunal de grande instance. » ; qu'il y a donc bien 'd'autres cas', comme par exemple une inscription de faux contre un acte sous-seing privé, comme une cession de parts sociales, un bail etc. ; que l'article L633-1 al. 2 du code de la justice administrative prévoit expressément que le juge administratif ne soit pas le juge de l'inscription de faux lorsqu'il énonce que « Si la partie déclare qu'elle entend se servir de la pièce, la juridiction peut, soit surseoir à statuer sur l'instance principale jusqu'après le jugement de faux rendu par le tribunal compétent, soit statuer au fond si elle reconnaît que la décision ne dépend pas de la pièce arguée de faux » ; qu'il n'appartient pas au juge administratif de se prononcer sur les demandes d'inscription de faux, sauf lorsque la pièce incriminée est un acte administratif; et qu'un procès-verbal de contravention de grande voirie n'est pas un acte authentique mais qu'il n'est pas davantage un acte administratif, même s'il est établi en la forme administrative.

Par conclusions du 5 septembre 2019 M. [E] [R] et l'État français demandent à la cour :

à titre principal

' de confirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

à titre subsidiaire, en cas de réformation,

' de recevoir l'État français et M. [R] en leur appel incident,

' de constater que l'assignation est dépourvue de toute motivation en droit et en fait et que les époux [Y] ne justifient pas avoir dénoncé la procédure au ministère public ;

' de prononcer en conséquence la nullité de l'assignation du 21 août 2017 à l'encontre de l'État et de M. [E] [R], et de déclarer irrecevables les demandes exposées au sein de l'assignation susvisée ;

' de débouter les époux [Y] de toutes leurs demandes ;

et en tout état de cause,

' de condamner les consorts [Y] à leur payer la somme de 3000 € chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens avec distraction. RG 19/3161

Les intimés font valoir que le tribunal administratif de Nice a été saisi, sur la base d'un procès-verbal, pour voir condamner les époux [Y] comme prévenus d'une infraction de grande voirie; que ceux-ci ont fait valoir par leur mémoire en défense du 28 juin 2017 que le procès-verbal ne leur avait pas été notifié et qu'il n'était pas signé, sans l'arguer de faux ; que la préfecture des Alpes-Maritimes s'est désistée purement et simplement de l'instance en cours le 25 septembre 2017 ; que l'inscription de faux devant les instances judiciaires ne s'applique qu'aux actes authentiques, actes notariés, actes d'huissiers de justice, actes officiels d'état civil ainsi que les arrêts ou jugements, et qu'elle ne peut pas être étendue aux actes sous-seing privés ; et que l'exactitude des mentions contenues dans les actes administratifs dont les juridictions administratives sont saisies n'est pas appréciée par les tribunaux de l'ordre judiciaire.

Motifs

Attendu que l'action engagée par les époux [Y] tend à soumettre au juge judiciaire civil une procédure principale d'inscription de faux contre un procès verbal de contravention de grande voirie dressé à leur encontre ;

Attendu qu'ils se prévalent des dispositions de l'article R633-1 du code de la justice administrative, figurant au chapitre III relatif à ' L'inscription de faux', aux termes duquel :

« Dans le cas d'une demande en inscription de faux contre une pièce produite, la juridiction fixe le délai dans lequel la partie qui l'a produite sera tenue de déclarer si elle entend s'en servir.

Si la partie déclare qu'elle n'entend pas se servir de la pièce, ou ne fait pas de déclaration, la pièce est rejetée. Si la partie déclare qu'elle entend se servir de la pièce, la juridiction peut soit surseoir à statuer sur l'instance principale jusqu'après le jugement du faux rendu par le tribunal compétent, soit statuer au fond, si elle reconnaît que la décision ne dépend pas de la pièce arguée de faux. » ;

Attendu que la compétence du juge judiciaire civil pour une procédure d'inscription de faux à titre principal ou à titre incident est prévue aux articles 299 et suivants du code de procédure civile ; qu'ils décrivent la procédure à suivre pour des faux qui ne sont relatifs qu' à un écrit sous seing privé ou à un acte authentique ;

Attendu que le juge de la mise en état relève exactement en son ordonnance déférée qu'un procès-verbal contravention de grande voirie est établi par des agents ou officiers de police judiciaire ou par des agents habilités à cet effet ; que ses énonciations font foi jusqu'à preuve contraire ; que le Conseil constitutionnel a retenu dans une décision n° 87-151 du 23 septembre 1987 que « les contraventions de grande voirie qui tendent à réprimer tout fait matériel pouvant compromettre la conservation d'une dépendance du domaine public ou nuire à l'usage auquel cette dépendance est destinée, ne sont pas, compte tenu de leur objet et des règles de compétences qui leur sont applicables, des contraventions de police » ;

Attendu que l'article L 2132-2 du code général de la propriété des personnes publiques dispose que :

« Les contraventions de grande voirie sont instituées par la loi ou par décret selon le montant de l'amende encourue, en vue de la répression des manquements aux textes qui ont pour objet, pour les dépendances du domaine public n'appartenant pas à la voirie routière, la protection soit de l'intégrité ou de l'utilisation de ce domaine public, soit d'une servitude administrative mentionnée à l'article L 2131-1.

Elles sont constatées, poursuivies et réprimées par voie administrative.» [Nous soulignons];

Que l'article L 2331-1 du code général de la propriété des personnes publiques précise expressément que :

« Sont portés devant la juridiction administrative les litiges relatifs : (')

3° Aux contraventions de grande voirie conformément à l'article L774-1 du code de justice administrative ; »

Que les articles L774-1 et suivants du code de justice administrative figurant au chapitre IV Les contraventions de grande voirie ajoutent que :

« Le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne à cette fin ayant atteint au moins le grade de premier conseiller statue sur les difficultés qui s'élèvent en matière de contravention de grande voirie à défaut de règles établies par des dispositions spéciales. » ;

Que dans l'article 286 du code de procédure civile qui ne concerne que les actes authentiques, la mention « dans les autres cas » vise, ceux pour lesquels l'inscription n'est pas invoquée à titre incident et non les autres types d'actes ;

Attendu que le procès verbal de contravention de grande voirie visant les époux [Y] a été produite dans le cadre d'une procédure engagée devant la juridiction administrative ; qu'elle est, par nature, administrative et que l'inscription de faux relève de la compétence de cette même juridiction ;

Attendu que le juge judiciaire n'est pas compétent pour statuer sur l'inscription de faux engagée contre le procès-verbal dressé par M. [E] [R] ; et qu'en application de l'article 81 al.1er du code de procédure civile, et les époux [Y] ont été à bon droit renvoyés à mieux se pourvoir ;

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions,

Y ajoutant

Condamne in solidum Mme [W] [M] épouse [Y] et M. [F] [C] [Y] à payer à M. [E] [R] et à l'Etat français, ensemble, la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum Mme [W] [M] épouse [Y] et M. [F] [C] [Y] aux dépens, et dit que ceux-ci pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-1
Numéro d'arrêt : 19/03161
Date de la décision : 10/11/2020

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 1A, arrêt n°19/03161 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-11-10;19.03161 ?
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